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Christoblog

Articles avec #j'aime

House of Gucci

Assez mal accueilli à sa sortie, House of Gucci est très intéressant pour qui ne connait pas l'histoire de Maurizio Gucci, ce qui était mon cas.

Ridley Scott nous conte d'une façon très professionnelle ces mésaventures familiales, qui n'ont rien à envier en férocité à celles de la famille Roy dans Succession.

La première partie du film est véritablement captivante. Lady Gaga révèle un potentiel d'actrice insoupçonné, Adam Driver est incroyablement juste et séduisant, Jared Leto compose un personnage unique avec classe, Al Pacino n'en fait pas trop et Jeremy Irons est glaçant. La qualité du casting est d'un niveau rarement atteint.

La direction artistique est parfaite et la mise en scène redoutablement efficace. A noter que le sujet du film n'est pas du tout la mode, ce qui a été pour moi une vraie surprise. C'est à peine si on voit dans le dernier tiers du film quelques images d'un défilé de Tom Ford.

Le film s'assombrit doucement alors que les années passent, et le récit se délite un petit peu dans la deuxième partie. Le rythme semble s'amollir et notre intérêt s'émousse, peut-être parce que le personnage joué par Lady Gaga devient secondaire. Les tensions dramatiques paroxystiques qui se développent alors manquent d'incarnation, et les 2h37 du film se font par moment lourdement sentir.

L'ensemble constitue toutefois un morceau de choix, qu'on pourra apprécier de différentes façons, suivant qu'on soit plutôt sensible à la munificence des décors, ou à la maestria des acteurs et actrices.

 

2e

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L'ombre d'un mensonge

Le nouveau film de Bouli Lanners, tourné en anglais, présente une première qualité essentielle : nous montrer des paysages écossais (les îles Hébrides) d'une beauté irréelle.

Autre point fort de L'ombre d'un mensonge : le jeu des deux personnages principaux. Bouli Lanners est très convaincant et Michelle Fairley (la Catelyn Stark de Games of Thrones) fait preuve d'une élégance rare.

Pour le reste, le film est modeste. Il vaut pour sa grande justesse dans les choix de mise en scène et ses intentions simples mais efficaces. Clovis Cornillac, par exemple, fait une apparition très touchante.

J'ai été finalement touché par cette histoire d'amour simple mais belle, filmée avec tact et distance, comme une sorte d'understatement émotionnel.

A voir, éventuellement.

Bouli Lanners sur Christoblog : Les géants - 2011 (*) / Les premiers, les derniers - 2016 (**)

 

2e

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Petite nature

Quel sujet casse-gueule !  Un garçon de 10 ans issu d'une famille défavorisée tombe amoureux de son professeur et le drague, à Forbach.

Exprimé comme cela, on peut craindre le pire, du réalisme social glauque à la romance malaisante, en passant par le chantage au suspense psychologique. 

Mais Samuel Theis évite tous les écueils, grâce à une mise en scène élégante et surtout grâce à la prestation exceptionnelle du jeune Aliocha Reinert, qui fait preuve d'une sensibilité formidable. Petite nature avance donc dans son histoire avec beaucoup de tact, à coup de vigoureuses ellipses et sur la base de ce qu'on pourrait appeler un naturalisme poétique.

On est charmé par le rythme faussement indolent du film, sa faculté à capter des fragments de réalité brute et à dérouler une narration qui au final s'avère millimétrique.

C'est très beau.

Samuel Theis sur Christoblog : Party Girl - 2013 (***)

 

4e

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La Mif

La Mif est un film qui peut rappeler dans l'esprit et par la méthode Entre les murs de Laurent Cantet : un mélange subtil de fiction et de documentaire, des personnages qui jouent un rôle basé sur leur propre personnalité, dans un milieu qui leur est naturel.

Au lieu de la salle de classe on est ici dans un foyer d'accueil pour adolescent. Le réalisateur, Frédéric Baillif, choisit un montage original qui fait mouche : chaque séance est centré sur un personnage, et on revoit certaines scènes dans plusieurs séquences, qui revêtent alors une signification différente (un effet Rashomon à répétition).

Au delà des intrigues parfois un peu tarabiscotées, c'est l'énergie vitale des actrices qui porte ce film attachant et efficace. Malgré toutes les horreurs vécues (que pour certaines, on ne fait qu'imaginer) les émotions, l'espoir et l'amitié peuvent continuer à briller. 

 

3e

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Rien à foutre

Ce premier film présenté à la Semaine de la Critique 2021 commence comme du Stéphane Brizé. On se dit qu'il s'agit de nous montrer les conditions de travail difficiles des hôtesses de l'air de compagnie low cost : management à la fois mielleux et impitoyable, objectifs individuels de vente, absence de perspectives, planning démentiel.

Mais on se rend vite compte que la sécheresse didactique de Brizé ne conduira pas le film. Il s'agit plus ici de partager le vague à l'âme étrangement détaché de Cassandre, magnifiquement interprété par Adèle Exarchopoulos, qui tient ici son meilleur rôle depuis La vie d'Adèle.

Plutôt que d'explorer les arcanes sociologique de ce milieu professionnel peu montré au cinéma, on voit donc notre hôtesse de l'air se promener désoeuvrée dans des villes indéterminée, coucher avec des hommes au gré des rencontres d'une nuit, se griser de musique dans des clubs en s'alcoolisant, ou discuter avec ses collègues. Ces déambulations se teintent rapidement d'une connotation plus grave : on comprend que sa mère est décédée récemment dans un accident de voiture.

Rien à foutre change alors de tonalité et devient progressivement un film sur le deuil. C'est lors d'une séquence magnifique (un coup de fil d'Orange), dans laquelle Adèle Exarchopoulos est bouleversante, que l'on perçoit pleinement quel est véritablement le coeur du film.

La dernière partie de Rien à foutre se concentre sur ce sujet et le métier de Cassandre disparait alors au second plan. Elle est un peu plus convenue que la première, mais est très efficace et se conclut sur un dernier plan de toute beauté.

Un première oeuvre d'une grande sensibilité, qui capte parfaitement l'air du temps, à découvrir.

 

3e

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Ali & Ava

Pas si courant de voir un tableau des classes défavorisées anglaises sous forme de feel-good movie ! On est ici bien loin des films de Ken Loach. 

Porté par deux interprètes formidables, Ali & Ava confirme le talent incroyable de Clio Barnard, qui parvient à faire émerger d'intenses émotions d'un background terriblement réaliste.

Le film évite tous les clichés misérabilistes pour tisser une fine trame narrative dans laquelle peut éclore la bulle de sensibilité qui entoure les deux personnages principaux. La réalisatrice réussit formidablement à dessiner une ambiance en quelques plans : feux d'artifice, plan sur la ville, pluie sur un vélum, intérieur confiné. Les larmes viennent souvent aux yeux, sans qu'à aucun moment la sensiblerie ne pointe le bout de son nez.

J'ai beaucoup apprécié la façon dont le personnage d'Ali évolue au fil du film : d'abord très drôle, voire burlesque, puis de plus en plus intérieur au fur et à mesure que ses sentiments évoluent, comme la musique qu'il écoute passe progressivement du rap au folk.

L'amour épaissit et assombrit ces deux-là, en même temps qu'il les remplit. C'est très beau.

Clio Barnard sur Christoblog : Le géant égoïste - 2013 (****)

 

4e

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Robuste

Robuste est un film fragile.

Son scénario n'est pas le point fort du film : il est éthéré et finalement peu stimulant.

Tout l'intérêt du film réside dans la confrontation rêveuse de deux immenses présences : la densité de Gérard Depardieu dans un rôle de vieil acteur mal léché face à la robustesse de lutteuse de Déborah Lukumuena, révélée dans l'excellent Divines.

C'est à la fois peu et beaucoup. Il faut un réglage millimétrique dans chaque scène pour que la rouerie de Georges (qui parfois frôle le génie) ne "mange" pas la placidité inquiète et juvénile d'Aïssa. Mais cela fonctionne globalement, même si certains passages sont un tout petit peu faibles, surtout dans la deuxième partie du film.

L'impression générale est émouvante et intrigante. Il n'est pas si courant d'assister à une rencontre profonde qui n'est pas amoureuse.

A découvrir.  

 

2e

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Médecin de nuit

Quelle excellente surprise que ce thriller tendu et nocturne d'Elie Wajeman qui s'était un peu égaré dans son film précédent, Les anarchistes.

Dans cette histoire qui se déroule au cours d'une seule nuit, on passe par toutes les émotions que procurent les grands films d'errance nocturne : sentiment d'ivresse et de perdition, peur, fascination, tension sexuelle, désinhibition, impression de prendre des décisions qui changent la vie, etc.

La mise en scène est parfaite, nerveuse, tendue comme un arc, proche des visages. Elle est servie par une photographie admirable et une brochette d'acteurs au top de leur talent. Vincent Macaigne trouve ici probablement son meilleur rôle, alors que Pio Marmai est parfait dans un rôle ambigu et Sara Giraudeau plus magnétique que jamais.

Le scénario de ce film ramassé (1h22 seulement) nous tient en haleine jusqu'au dernier plan renversant. Une pépite noire.

Elie Wajeman sur Christoblog : Les anarchistes - 2014 (*)

 

3e

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Mon année à New-York

Le covid a brutalement interrompu la carrière de ce joli film présenté en ouverture du Festival de Berlin, en février 2020, et qui n'a jamais trouvé le chemin des salles françaises, englué dans l'embouteillage post confinement.

Mon année à New-York doit beaucoup à ses deux interprètes principales : Sigourney Weaver impériale en agent littéraire de JD Salinger et Margaret Qualley, irrésistible en jeune employée ingénue de la maison d'édition du prestigieux et mystérieux écrivain. Cette dernière, découverte dans la série Leftovers, et qui explose depuis (on l'a vu par exemple dans Once upon a time ... in Hollywood de Tarantino, et dans la série Maid), est rayonnante. Sa prestation enjouée entraîne le film dans un tourbillon frais et vintage.

Les années 90 sont délicieusement reconstituées, et forment un cadre parfait à ce récit d'apprentissage charmant et instructif, dans lequel l'informatique est encore balbutiante.

Une oeuvre sans chichi du québécois Philippe Fallardeau, à déguster en DVD ou sur Canal+. 

 

2e

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Piccolo corpo

Le sujet du premier film Laura Samani n'est a priori pas très avenant : en 1900, une jeune femme dont le bébé est mort-né entame un voyage vers une église dans les montagnes, où son bébé pourrait être ressuscité le temps d'un souffle, pour pouvoir être baptisé.

Pourtant loin d'être glauque et triste, Piccolo corps est au contraire splendide, solaire et rayonnant.

Plastiquement tout d'abord, le film est une merveille. Agata traverse des paysages très différents (des  îles lacustres, des forêts, une mine, un lac, des montagnes) qui se révèlent être de magnifiques univers très différents, superbement filmés.

Le récit réserve ensuite de belles rencontres, tour à tour inquiétantes et émouvantes, qui ravivent sans cesse notre curiosité. 

L'actrice Celeste Cescutti, enfin, est très convaincante, à la fois terrienne et d'une certaine façon ... céleste. Elle irradie l'écran.

Un très beau film, véritable voyage sensoriel, et une jeune cinéaste à suivre.

 

3e

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Yi Yi

Disons-le simplement : Yi Yi, d'Edward Yang, est probablement l'un des meilleurs films jamais réalisé.

L'histoire qu'il conte est celle de la vie ordinaire : on suit les membres d'une famille dans un quotidien marqué par les évènements et les sensations que chacun de nous a éprouvé ou éprouvera. Rien de spectaculaire, donc.

Le génie du film tient dans la façon dont ces évènements sont racontés. La mise en scène ample et élégante, principalement constituée de plans larges et distanciés, donne au film une tonalité à la fois intime et sacrée. C'est comme si Edward Yang nous donnait à voir l'envers mystique d'une réalité triviale, exactement comme le petit garçon renfermé prend en photo la nuque des gens pour leur montrer ensuite (car personne ne voit jamais sa nuque, au final).

L'écoulement majestueux du film, qui dure 2h53 mais ne semble jamais long, est servi par un montage d'une intelligence rare. Les scènes se répondent, s'interpellent d'une partie à l'autre du film, et parfois nous laissent suspendus dans une expectative rêveuse et chargée d'émotion (je pense par exemple à celle du petit garçon dans la piscine, ou celle de la jeune fille avec la grand-mère).

Le jeu de la caméra avec les reflets et les transparences, l'utilisation poétique et parfois éclatante des couleurs (le rouge et le rose de mariage), le jeu au cordeau des acteurs et actrices : il ne manque rien à ce chef-d'oeuvre intemporel, dont on mesure mieux aujourd'hui à quel point il fut la matrice féconde de tout un courant du cinéma asiatique, consacré à la famille et au temps qui passe.

A voir absolument.

 

4e

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Great freedom

Franz Rogowski, acteur fétiche de Christian Petzold, qu'on a également vu chez Malick comme chez Haneke, est sûrement un des meilleurs acteurs actuel en Europe.

Dans cette histoire bouleversante, qui raconte la vie d'un homosexuel allemand de l'après-guerre jusqu'en 1970, Rogowski est absolument formidable. Il parvient à donner une profondeur étonnante à son personnage, jamais vraiment abattu, toujours luttant et aimant.

Si la mise en scène de Sebastian Meise est très sage, sa façon de conduire un récit au long cours est remarquable. La construction du film (une première partie sous forme d'un long flash-back, et une seconde partie qui du coup semble aspirer l'avenir) est extrêmement prenante. L'utilisation du milieu carcéral à rebours des habitudes (ici, les prisonniers sont loin d'essayer de s'évader) est aussi brillante : la prison apparaît comme une métaphore de la vie à l'extérieur.

Great freedom est un film captivant, qui nous prend la main et nous émeut progressivement. La belle histoire d'amour qu'il raconte nourrit progressivement l'ampleur mélodramatique du film comme le vent gonfle une voile : on est emporté par cette série de huis clos parfaitement reconstitués.

Le meilleur d'un cinéma classique, apaisé et sensible, sonnant comme un Douglas Sirk germanique.

 

4e

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Red rocket

C'est un raccourci un peu commode de qualifier Sean Baker (Tangerine, The Florida project) de cinéaste des marges du rêve US.

Il est bien plus que ça : c'est aussi un formidable directeur d'acteurs qui sait donner à sentir l'énergie brute qui peut se dégager d'une situation, d'un caractère ou d'une confrontation.

Le héros de Red rocket est une ex-star du porno (ce qu'est aussi par ailleurs le formidable Simon Rex, qui joue ce personnage) qui essaye de refaire sa vie dans un bled paumé du Texas, à l'ombre d'une gigantesque usine. Il n'est pas vraiment le bienvenu auprès de son ex femme, mais son énergie débordante et sa gouaille semble l'entraîner irrésistiblement vers une rédemption inespérée.

Le film est à la fois sombre et acidulé, drôle et touchant, sensuel et déprimant. Il est merveilleusement mis en scène et on ne s'ennuie pas une seconde. L'utilisation des décors naturels est formidable, et mérite à elle seule qu'on se déplace pour ce film.

Du beau, du grand Sean Baker.  

Sean Baker sur Christoblog : The Florida project - 2017 (***)

 

3e

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Les promesses

Je n'ai pas grand-chose à reprocher au film de Thomas Kruithof, si ce n'est peut-être un petit manque de crédibilité dans le jeu d'Isabelle Huppert (elle est très mauvaise dans l'exercice du discours) et une facilité dans l'écriture de certains passage (par exemple le dénouement).

Pourtant je n'ai pas été complètement enthousiasmé par Les promesses. J'ai très souvent eu l'impression d'être devant un épisode de Baron noir, en moins cynique et sans beaucoup plus de moyens. 

J'ai suivi, c'est vrai, avec un certain plaisir les vicissitudes de cette maire de banlieue (c'est d'ailleurs un des intérêts du film de donner à voir la vie des quartiers sans drogue et sans violence), et peut-être encore plus les états d'âme de Reda Kateb, parfait comme d'habitude.

Un bon film sur l'exercice de la politique, auquel je préfère toutefois l'indépassable L'exercice de l'Etat de Pierre Schoeller.

 

2e

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Une jeune fille qui va bien

Curieux film, particulièrement culotté, que ce premier essai de Sandrine Kiberlain.

Une jeune fille qui va bien est basé sur un principe pas si courant au cinéma : on suit une histoire commune (une jeune fille est amoureuse, et nourrit beaucoup d'espoir pour l'avenir), tout en connaissant le contexte historique de l'histoire que nous découvrons, alors que les personnages, eux, en ignore tout.

Nous savons l'horreur de ce qui attend Irène et sa famille, mais pendant une demi-heure, rien n'arrive de spécifique concernant cette famille juive prise dans le vif de son quotidien de 1942. L'identification de l'époque n'est pas évidente. Cela rend d'autant plus touchant la manière dont les premières mesures anti-juives viennent heurter le récit d'apprentissage qui nous est présenté.

L'ensemble du film, et son principe fondateur à la fois léger et casse-gueule, ne fonctionne que par la grâce d'un casting plus que parfait : Rebecca Marder est absolument époustouflante, André Marcon parfait, Anthony Bajon convaincant à l'extrême (comme d'habitude...) et Françoise Widhoff génialement attendrissante en grand-mère compréhensive.

Une bonne idée de sortie !

 

3e

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Nightmare alley

Del Toro devait probablement finir par filmer des monstres de fête foraine, tout comme Tim Burton devait à un moment de sa carrière choisir un cirque comme décor (Dumbo).

Dans ce remake d'un film de 1947 que peu de spectateurs auront vu, le brillant réalisateur mexicain réussit un emberlificotage de haut niveau. Nightmare alley commence en effet comme un film holywoodien lambda : certes bien rythmé et remarquablement mis en scène, mais globalement convenu, engoncé dans une esthétique vieillotte et une photographie jaunâtre (j'ai songé à la direction artistique désuète du West side story de Spielberg).

Et puis progressivement, la narration au long cours du film vire au noir, de façon figurée et littéralement (la nuit prend de plus en plus de place). La deuxième partie du film devient donc une longue et tortueuse descente aux enfers, émaillée de choix faustiens, d'éclairs de cruautés de plus en plus saignants (culminant dans l'incongruité de l'épisode de l'oreille). Nightmare alley brasse alors une série d'allusions psychologiques traumatisantes qui ne trouveront aucune explication satisfaisante (la cicatrice du docteur, les traumatismes d'enfance du héros principal et sa relation aux vieux hommes, les horreurs perpétrées par Ezra Grindle aux jeunes filles).

Ainsi le miracle (le piège) opéré par le magicien Del Toro fonctionne-t-il parfaitement : le film commence comme un produit manufacturé de série et se finit dans un mauvais rêve cruel, à l'image du générique de fin. Nightmare alley aura profondément manipulé son spectateur.

Délectable : 2h30 qui passent en un clin d'oeil.

 

4e

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Salaud, on t'aime

Pour parler d'un film de Lelouch aussi lourdaud que celui-ci, il me faut abandonner mes critères habituels de cinéphile.

En effet, comment pourrais-je expliquer le plaisir enfantin ressenti devant cette histoire édifiante, ces rebondissements improbables, en appliquant ma grille d'analyse habituelle ? 

Le scénario est bancal. Les thèmes du film sont éculés, dans l'esprit "amitiés viriles et taiseuses" qu'affectionne de plus en plus le cinéaste. Le décor, un magnifique chalet dans les Alpes, est tape à l'oeil, et le film met en scène une tribu de Parisiens chics et friqués, a priori insupportables. Mais on n'est pas ici chez Canet, et ce qui rend le film au final plaisant c'est l'irréfragable confiance que Lelouch porte à la puissance du romanesque : on est surpris, touché, et béat devant tant de mauvais goût assumé, tant de péripéties semblant sortir d'un mauvais roman-feuilleton.

Johnny et Eddy sont excellents (leur conversation autour d'un film est un grand moment), et le sourire de Sandrine Bonnaire contribue à augmenter substantiellement la note du film.

Bref, j'ai aimé, mais j'aurais honte de le vous conseiller.

Claude Lelouch sur Christoblog : La bonne année - 1973 (***) / Les plus belles années d'une vie - 2019 (***)

 

2e

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Ouistreham

Dans le film d'Emmanuel Carrère, il y a trois films : le premier dresse un tableau des travailleurs précaires du nettoyage, le second est le récit d'une imposture (sujet de prédilection du réalisateur écrivain), le troisième est une belle galerie de portraits.

Le premier de ces films n'est pas très original. On a vu mille fois, chez Ken Loach et ailleurs, les ravages du travail précaire. L'originalité est ici de s'intéresser particulièrement au travail sur les ferrys, incroyablement dur.

Le second ne m'a pas réellement convaincu. Je trouve que le personnage joué par Juliette Binoche ne fait sentir que superficiellement les affres que traverse l'écrivaine infiltrée, dont on ne comprend pas forcément tous les choix.

C'est finalement le troisième film, qui fait la part belle à une galerie d'acteurs et d'actrices non professionnels, qui pour moi donne toute sa valeur à Ouistreham. Le spectateur n'oubliera pas de sitôt l'énergie brute de la formidable Hélène Lambert (Christèle), la bonhommie de Didier Dupin (Cédric), l'éclatante vitalité d'Emily Madeleine (Justine), la fraîcheur irrésistible de Léa Carne (Marilou) et tranquille sérénité d'Evelyne Porée (Nadège).

L'énergie de ces personnages finit par arracher quelques larmes, reléguant la prestation de Juliette Binoche au second plan et enjambant l'inconsistance de la mise en scène d'Emmanuel Carrère. Un beau film.

 

3e

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La bonne année

Il y a beaucoup de bonnes choses dans ce film de Claude Lelouch revu en ce début d'année à la télé : un parti-pris esthétique frappant (le passé est en couleur et le présent en noir et blanc), une histoire de braquage bien mené, un duo Lino Ventura / Charles Gérard qui rappelle irrésistiblement les grandes heures du cinéma à la Audiard, quelques moments de bravoure, une mise en scène étonnante de vivacité et de modernité.

Mais ce qui emporte vraiment le morceau, et rend le film remarquable, c'est le couple magnifique formé par la grande Françoise Fabian et Lino Ventura, sûrement un des couples les plus étonnants et les plus convaincants qu'il m'ait été de voir au cinéma.

Elle est d'un milieu très intellectuel, lui est un malfrat au sens de l'honneur aiguisé : leur rencontre fait des étincelles, et donne lieu à toute une série de répliques et de scènes mémorables (dont celle du repas avec les amis de Françoise). J'ai adoré les voir se rencontrer, se trouver, puis se retrouver dans un final étonnant de modernité et de féminisme, qui a du être dur à faire avaler à Ventura.

Pour moi, un des sommets de la carrière de Lelouch.

 

3e

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La main de Dieu

Sorrentino, qui donne souvent dans la démesure, fait ici preuve d'une retenue remarquable.

Si La main de Dieu commence comme un Fellini (créatures fantastiques et conte baroque), il évolue vite vers une chronique familiale d'abord burlesque, puis tendre et dramatique.

Le film est beau comme un Amarcord assagi, trouvant une énergie brute et solaire dans le magnifique décor de la baie de Naples. Il est non seulement un voyage agréable au soleil qui nous fait découvrir l'amour fou d'une ville entière pour un footballeur, mais aussi un intéressant aperçu de la jeunesse d'un apprenti cinéaste.

Comme d'habitude, c'est magnifiquement filmé.

Paolo Sorrentino sur Christoblog : This must be the place - 2011 (***) / La grande belleza - 2013 (***) / Youth - 2015 (**)

 

3e

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