La vierge mise à nu par ses prétendants
Troisième film de Hong Sang-Soo, La vierge mise à nu par ses prétendants est la première manifestation dans la filmographie du coréen de sa propension aux exercices de distorsion de la réalité.
Le film est, comme souvent chez HSS, découpé en deux parties distinctes.
La première raconte d'une façon assez inhabituelle pour lui une histoire d'amour simple et partagée, presque idéale, découpée en sept tableaux. La seconde reprend la même histoire, tableau par tableau, en montrant quelques scènes complémentaires à chaque fois. Mais contrairement à un effet Rashomon "simple", les scènes ne sont pas exactement les mêmes que dans la première partie : par exemple une fourchette tombe à la place d'une cuillère, un personnage dit quelque chose au lieu d'un autre, etc.
L'interprétation de ce que l'on voit est donc complexe, si l'on se demande où se situe la réalité : dans la partie A (potentiellement vue à travers les yeux de l'amoureux transis), dans la partie B (plus mitigée, plus complexe, peut-être donc la même histoire vue par la femme), quelque part entre les deux ?
Le résultat est extrêmement stimulant, très agréable à regarder (un très beau noir et blanc qui sera utilisé dans beaucoup d'autres films par le coréen, dont le très beau Matins calmes à Séoul), parfaitement construit.
Après les deux premiers films qui comportaient encore des tentatives plus ou moins réussies, La vierge... est pour moi la première complète réussite de Hong Sang-Soo.