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Les quatre cents coups

On n'en finirait pas d'énumérer les raisons qu'un cinéphile a d'apprécier Les quatre cents coup :  manifeste d'un courant majeur de l'histoire du cinéma, clins d'oeil multiples (cameos de Jean Claude Brialy, Jeanne Moreau, Jacques Demy, Jean Douchet et Truffaut lui-même), aspects autobiographiques, hommages multiples au cinéma (les enfants volent des photos d'un film de Bergman, la famille va voir le dernier Rivette, le film est dédié à Bazin).

L'opportunité qu'offre l'arrivée des films de Truffaut sur Netflix nous permet d'aller au-delà de la légende, de revoir le film et de le juger pour ce qu'il est : un superbe portrait de la jeunesse. La photographie de Henri Decaë,  qui magnifie les rues de Paris, et la musique entêtante de Jean Constantin forment un écrin parfait à l'interprétation magistrale de Jean-Pierre Léaud, interprète définitif de l'innocence bafouée. 

Toute l'énergie sauvage du film est dans les yeux de son jeune interprète, énergique, avide de vivre et d'aimer. De la scène du manège tournant aux longs travellings finaux, la mise en scène de François Truffaut (récompensée au Festival de Cannes en 1959) ne vise qu'à nous faire ressentir cet appétit vorace d'Antoine Doinel pour la vie, la littérature et le cinéma, appétit empêché par le manque d'amour de ses parents et le poids des institutions. 

 

3e

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Boulevard du crépuscule

Au crédit du film culte de Billy Wilder, de nombreuses qualités : une belle photo, un scénario formidablement décadent, des décors hors du commun, un hommage décalé et nostalgique au cinéma muet du grand Hollywood, des idées de génie pour le casting (Cecil B. DeMille dans son propre rôle, Erich Von Stroheim en valet/mari inquiétant), une ambiance délétère très bien rendue.

Le film peine toutefois à générer l'enthousiasme du spectateur moderne. Le jeu outré (pléonasme !) de Gloria Swanson passe difficilement le test redoutable de l'écoulement du temps. On peine tout simplement à croire que le personnage de Joe puisse succomber à ses charmes artificiels simplement pour de l'argent.

Comme d'un autre côté il est évident que l'amour ne justifie pas non plus son inclination, le ressort principal du film (ce drôle de couple) reste comme inexpliqué, une sorte "d'éléphant dans la pièce".

Partant de ce constat d'incompréhension, on assiste de l'extérieur au déroulement d'un scénario qui ne présente par ailleurs aucune surprise, aucune aspérité, aucune déviation par rapport à son contenu programmatique, qu'on identifie clairement dès le début du film.

C'est très bien fait, mais un peu trop compassé à mes yeux de spectateur de 2020. D'autres films de Billy Wilder ont bien mieux vieilli, comme le très beau La garçonnière.

 

2e

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The irishman

En réunissant à l'écran Joe Pesci, Al Pacino et Robert de Niro pour cette crépusculaire histoire de mafiosi, Scorsese semble vouloir  donner à son oeuvre une sorte de codicille pré-posthume.

Le résultat se regarde facilement, sans une seconde d'ennui, tellement le script est fluide et l'intrigue passionnante. La petite histoire (la destinée d'un tueur anonyme) rencontre la grande (les Kennedy et la mafia), et forme un ensemble qui se dévore, comme une série. 

L'amitié entre le personnage de Jimmy Hoffa (extraordinaire Pacino) et son homme de confiance (un de Niro aux drôles de mimiques figées, probablement par la faute du fameux de-aging) est le coeur du film, et la trahison sans état d'âme du second illumine comme un diamant noir la fin élégiaque de cette saga aux multiples ramifications.

Si on reconnaît le savoir-faire inégalable de Scorsese, on ne peut s'empêcher de remarquer ici ou là les symptômes d'une certaine nonchalance dont on ne sait s'il faut l'imputer au support Netflix (faites ce que vous voulez...), à l'âge ou au sentiment que le chose racontée vaut désormais plus que la façon dont on la raconte. 

La mise en scène n'a donc pas la précision des chefs-d'oeuvre de la grande époque (Casino, Les affranchis), elle est même assez quelconque. Cela ne gâche pas le plaisir que procure la vision de ce film fleuve qui aurait probablement mérité un traitement en mini-série.

 

3e

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Rebelles

Voici plutôt une bonne nouvelle en provenance du cinéma français : une comédie décomplexée, dans laquelle les femmes ont la part belle, qui ne vise pas à autre chose qu'à fournir un bon moment sans second degré, un peu à la mode des frères Coen première manière.

Nous voici donc projeté dans le Nord Pas de Calais, dans un milieu ouvrier qu'on ne voit pas si souvent, au milieu d'un trio improbable de femmes : Sandra (Cécile de France) en ex-miss sur le retour, Nadine (Yolande Moreau) en mère de famille et Marilyn (Audreu Lamy) en punk socialisée.

Quand ce trio se retrouve par hasard en possession d'un beau magot, les évènements vont s'enchaîner sans temps mort, à notre plus grand plaisir. 

Le scénario est parfaitement huilé, la mise en scène d'Allan Mauduit efficace à souhait, et le tout est parfaitement agréable à regarder, ne lésinant pas sur certains écarts parfaitement incorrects et jouissifs (à l'image de la malencontreuse amputation qui démarre l'intrigue).

Rafraîchissant.

 

2e

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Uncut gems

Uncut gems fait partie de ces films toboggans qui vous emportent dans un tourbillon stylistique duquel il est impossible de sortir. 

Pour aimer le film, mieux vaut donc aimer les flots incessants de parole, le montage speed, les surimpressions sonores, la caméra à l'épaule et l'impression générale d'assister à la course d'un poulet sans tête à qui l'on aurait donné des amphétamines. 

Adam Sandler est excellent, en bijoutier juif possédé par toute une série d'addictions plus graves les unes que les autres : le sexe, la drogue, la famille, les bijoux, l'argent, le jeu, le sport, la gagne, le goût du risque, et peut-être tout simplement un appétit de vivre douloureusement insatiable.

Si on se laisse happer par l'ambiance si particulière du film et le brio d'une mise en scène de très haut niveau, l'expérience est presque physique : on est tendu comme un arc tout au long du film, se demandant comment Howard va s'en sortir, et partageant avec lui la moindre évolution de la situation désespérée dans laquelle il s'est mis lui-même, en dépit du bon sens le plus élémentaire. Dans le cas contraire, il ne sera pas facile d'aller au bout des 2h15 de cet exercice de style aux accents scorsesien, mené au rythme fou d'une valse jouée sur un tempo de hard rock.

Un coup de force des frères Safdie.

 

3e

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