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Christoblog

Shutter

Trouvant toujours rigolo de parler d'un film d'horreur thaïlandais que personne n'a vu, je me lance dans une courte recension de Shutter (sans Island), visionné ce soir en DVD.

Alors voilà : le cinéma thaïlandais peut aussi produire son film de fantôme avec une fille aux cheveux mouillés et aux yeux ensanglantés, dans le genre Ring. Cela se regarde d'un oeil distrait, en mangeant une île flottante et en comptant le nombre de poncifs accumulés : 267. Dont : les rideaux qui volent, les bocaux de formol contenant des organes d'origine louche, les apparitions uniquement visibles sur les photos, les animaux empaillés, la caméra subjective, les tableaux qui tombent, les faux rêves, etc.

La mise en scène n'a aucun intérêt et on est très loin de l'exubérance narrative et formelle du redoutable Slice. En fait, je réalise que je dois être très peu réceptif aux films de fantômes car je n'en ai jamais vu un qui me fasse vraiment peur.

Tout l'intérêt du film réside dans les 2 dernières minutes qui contiennent un twist que je devinais un peu, mais pas exactement. Sinon, une confirmation : les réalisateurs thaïlandais ont vraiment des noms à coucher dehors, après Weerasethakul, Palme d'or, voici messieurs Wongpoom et Pisanthanakun. On se dit qu'il doit il y avoir une contrepèterie dans le nom de ce dernier, mais laquelle ?

 

1e

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La dernière piste

Des femmes traversent une rivière avec des paniers sur la tête. Une autre lit la Bible. Un essieu casse, il faut le réparer. Un oiseau passe dans le ciel. Un chapeau s'envole, il faut courir pour le ramasser. Des nuages passent devant la lune. Dans le ciel il y a aussi le soleil.

Un homme grave "LOST" sur un bois mort. Un indien apparaît, qui va tomber amoureux d'une boîte à couture. La nuit il fait noir. Le jour il fait jour. Les femmes ont des jolis bonnets et des robes aux couleurs différentes. Leurs manches sont sales. Une femme est gentille. Un homme est méchant. Il y a aussi un oiseau dans une cage et une horloge qu'il faut jeter. A la fin, il y a un arbre, mais pas de fin.

La critique s'extasie sur ce petit bout de film au format carré, sans que je m'en explique la raison. Si Le désert des Tartares au far west revu par Antonioni et filmé au ralenti vous dit, le film est pour vous.

 

2e

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Balada triste

SNDVoilà sans conteste un film qui ne plaira pas à tout le monde.

Du grand guignol (relativement) maîtrisé, de l'esbroufe assumée, de la bouffonnerie ampoulée : il y a de tout ça dans le nouvel opus d'Alex de la Iglesia.

On n'aime pas du tout, ou on se laisse emporter par le découpage ultra-speed, les changements de ton incessants et les audaces formelles (le plus souvent d'un affreux mauvais goût).

L'histoire est tellement grotesque qu'on a peine à la raconter sans rire : un enfant binocleux perd son père en 1937 dans des circonstances abracadabrantes, on le retrouve en 1973 essayant piteusement de devenir clown, comme son géniteur. Il tombe amoureux de la belle artiste blonde, propriété du patron du cirque (visiblement, et bien qu'il la frappe, ce sont les choses du sexe qui la fixe à lui). S'ensuit une compétition à mort entre les deux hommes qui comprendra (dans le désordre) : un duel dans le site bien connu de la Valle de los Caidos, diverses défigurations, dont une au fer à repasser brûlant, des mitraillages divers, la main de Franco mordue, l'absorption de viande de cerf crue, le suicide d'un homme volant à moto, un attentat terroriste projetant une voiture sur un toit...

C'est n'importe quoi et j'ai bien aimé, mais je ne garantis absolument pas que vous éprouverez le même plaisir que moi ! Si vous avez du goût, ce sera même probablement le contraire.
 

 

3e

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Blue Valentine

Michelle Williams. Films sans FrontièresUn couple à deux moments de son histoire : la rencontre amoureuse, et un triste week-end, 6 ans après.

La rencontre obéit aux canons du genre : coup de foudre pour lui, moins pour elle. Lui est issu des bas quartiers, peu diplômé, elle a un gros potentiel, elle pourrait devenir médecin. Elle tombe enceinte. Chez l'un comme chez l'autre on peut déjà discerner des traits de caractère qui s'avéreront décisifs ultérieurement.

6 ans après, le couple est au bord de la rupture : réussira-t-il à retrouver la magie des premiers instants dans la chambre futuriste d'un improbable love hôtel ?

Le film montre la décomposition de la liaison amoureuse avec une intensité qui est proportionnelle à la vacuité du pensum calamiteux de Sam Mendes, Les noces rebelles. Il est pour cela servi par un couple d'acteurs aussi discrets que brillants : Ryan Gosling, dont la transformation physique et comportementale entre les deux époques est impressionnante, et Michelle Williams, anti-spectaculaire à l'extrême.

Le montage alterné des deux périodes est remarquable (avec parfois des plans raccord, ce qui produit un effet vertigineux), la mise en scène est efficace. A noter que les deux époques sont tournée avec des techniques différentes : le passé en 16 mm et le présent en digital. Le film aurait probablement gagné en intensité en étant un peu raccourci, certains dialogues notamment mériteraient des coupes tant ils deviennent oppressants dans leur répétition, mais l'ensemble se tient remarquablement bien.

Le cinéma indépendant américain confirme son éclatante santé après Winter's bone, Beginners et La dernière piste.

 

3e

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Pater

Pater est vendu pour ce qu'il n'est pas.

A lire la presse, il serait un OVNI cinématographique. Comparable à Mulholand drive, d'après Lindon lui-même - excusez du peu. Or, le film est d'une simplicité biblique : au départ Cavalier (le metteur en scène) fait la connaissance de Lindon (l'acteur), puis petit à petit se met en place une fiction dans laquelle Cavalier (président de la république) se heurte à Lindon (premier ministre). Le glissement se fait de façon assez nette et peu ambigüe : c'est une des grosses déceptions du film. Un seul moment est vraiment jouissif dans le domaine de la confusion des genres, c'est la crise de jalousie de Lindon envers son successeur au poste de premier ministre, dans laquelle il attaque l'acteur autant que le personnage.

Les deux acolytes manient le niveau zéro du discours politique, accumulant (à dessein ?) grosses erreurs (les ministres ne sont pas élus) et simplification outrancière (les jeunes veulent du fric). De programme il n'est pas question, la dimension politique du film se résume à une question anecdotique sur le montant du salaire maximum, par rapport au salaire minimum. 

Le bac à sable est équipé fort simplement, il s'agit de ne pas faire riche. Tout est donc pauvre : l'éclairage, les débats, les cravates en laine, le jeu des acteurs. D'ailleurs, Lindon ne réussit jamais à entrer complètement dans son rôle. En de nombreuses occasions, il reste coi, fixement d'un oeil bonasse Cavalier faire son show, ne sachant visiblement pas quelle attitude adopterait un premier ministre en de telles circonstances (le bar, la visite chez le boulanger, la conversation à trois entre les portes).

C'est donc finalement à un caprice d'enfant qu'on assiste, Alain Cavalier cabotinant devant sa propre caméra, mêlant la psychanalyse de comptoir au bricolage d'atelier cinéma, niveau CM2.

Je ne comprend vraiment pas ce qu'une partie de la critique trouve au film, si ce n'est de considérer que la mise en abyme cheap devient trendy pourvu qu'elle soit arrosée de grands crus, indépendamment de l'angélisme de son propos et de l'approximation de sa confection.

1e

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Beginners

Mélanie Laurent. MK2 DiffusionJe tiens à le signaler immédiatement : c'est pour faire plaisir à mymp que j'ai été voir ce film. Comme il m'a fait envoyer deux invitations suite à jeu scandaleusement facile organisé sur son blog, je ne pouvais pas ne pas y aller sans le vexer. Vous voyez le topo.

Le film est mimi tout plein, et parfait pour les jeunes gens romantiques (ce qui n'est pas, malheureusement et a priori, mon cas).

En effet le film possède une sensibilité extrême. Il réussit parfaitement à faire ressentir cette sensation de solitude que Somewhere s'échinait sans succès à décrire. Ewan McGregor et Mélanie Laurent forme un très (trop ?) joli couple, et il semble y avoir une vraie complicité entre eux, qui est assez étonnante. Le film multiplie les inserts originaux : un chien qu'on voit penser, des photos d'époque, des dessins qui illustrent l'histoire. Beginners fait partie de la même catégorie que Medianeras, en tenant beaucoup mieux la distance que ce dernier.

Les thèmes évoqués sont assez tristes (la mort, l'inaptitude à aimer, la solitude, le poids écrasant des parents) mais le film curieusement ne l'est pas. Il faut dire que l'appétit de vivre du père, gay qui fait son coming out à 75 ans, est rudement entraînant (excellent Christopher Plummer).

Tout est donc quasiment parfait jusque vers la dernière demi-heure. A ce moment, je trouve que le film s'épaissit un peu. Cela correspondant au moment où Mélanie Laurent parle en français et devient tout à coup vulgaire, alors qu'elle était solaire jusque là. Et puis les "trucs" séduisants du début ne surprennent plus.

Au final, le film est tout de même tout à fait plaisant et incite à suivre la carrière de Mike Mills. Donc finalement, merci mymp...

 

3e

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Pourquoi tu pleures ?

Parce que je t'ai vu !

Voilà la réponse que j'ai envie de faire au titre du film, qui l'a bien cherché.

Biolay n'est pas un chanteur qui m'intéresse beaucoup et je le trouvais légèrement antipathique avec ses "la chanson française me débecte". J'étais presque content quand Benabar lui a foutu une rouste.

Et ben, là : pareil. J'avais tout le temps envie de lui botter les fesses, de lui tirer les oreilles, de le pousser du haut des escaliers en lui disant, mais fais quelque chose, nom de dieu. Ces airs de marshmallow boboïsant et sa mèche derrière l'oreille m'ont profondément indisposé.

J'ai vu le film il y a plusieurs jours et en gros j'ai déjà tout oublié : rentré par un oeil, sorti par l'oreille. Aucun intérêt. On passe d'un appart rempli d'ouvriers à un autre rempli d'une gonzesse, en passant par celui de la future mariée rempli de juifs d'Israel. Les copains sont des parodies de Parisiens. Hé, vous êtes pas tous comme ça à Paris, rassurez moi ! Si ? Pardon alors.

Je sauve de ce naufrage mou-du-genou la pétulante Valérie Donzelli, dont nous avons tous hâte de voir La guerre est déclarée.

 

1e

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Festival de printemps : résultats

La Marguerite d'or va sans surprise à Une séparation qui récolte un nombre de suffrages impressionnant : 123 points sur 128 possibles, et 12 premières places sur 16 votants. 

Asghar Farhadi Asghar Farhadi. Memento Films Distributionrafle dans l'élan le prix de Meilleur réalisateur devant Terrence Malick, et de Meilleur scénario (à l'unanimité, une première toute catégorie confondue, dans un festival sur Christoblog) devant les Dardenne. Il s'installe dans la cour des grands, en attendant de futurs projets, peut-être en Europe.

Le triomphe englobe les acteurs : Peyman Moadi et Sareh Bayat remportent leur catégorie. Les points accumulés par Shahab Hosseini, Leila Hatami,  et Sarina Farhadi (la fille de son père) me pousse à proposer un prix collectif à l'ensemble des acteurs et actrices du film, comme la Berlinale et comme certains d'entre vous me l'ont fortement suggéré.

Le film écrase tellement la compétition qu'il ne reste que des miettes pour ses compétiteurs et c'est finalement Le gamin au vélo et The tree of life qui s'en tirent le mieux en cumulant les places d'honneur dans toutes les catégories.

Le prix spécial revient à X-men : le commencement, qui avait failli être dans la sélection.

Résultats complets :

Marguerite d'or : Une séparation (123 pts) / Le gamin au vélo (101 pts) / The tree of life (87 pts) / Le complexe du castor (65 pts) / Minuit à Paris (57 pts) / Le chat du rabbin (56 pts) / London boulevard (46 pts) / La conquête (41 pts)

Meilleur réalisateur : Asghar Farhadi (14 pts) / Terrence Malick (11 pts) / Les frères Dardenne (7 pts)

Meilleur scénario : Une séparation (16 pts) / Le gamin au vélo (8 pts) / Le complexe du castor (4 pts) / Minuit à Paris (3 pts) / The tree of life (1 pt)

Meilleur acteur : Peyman Hoadi (12 pts) / Thomas Doret (5 pts) / Shahab Hosseini et Mel Gibson (4 pts) / Brad Pitt (3 pts) / Denis Podalydes, Colin Farrel, François Morel et Jérémie Rénier (1 pt)

Meilleure actrice : Sareh Bayat (9 pts) / Jessica Chastain et Cécile de France (8 pts) / Leila Hatami (4 pts) / Sarinah Farhadi (2 pts) / Florence Pernel (1 pt)

Prix spécial : X-Men : le commencement (3 pts) / Medianeras et The prodigies (2 pts) / Infiltration, La ballade de l'impossible, La défense Lincoln, Beginners, Gianni et ses femmes, Blue Valentine (1 pt)

 

fest ete petit visuelEt maintenant place au festival d'été dont le programme vous sera dévoilé dès ... tout à l'heure ! En espérant vous retrouver aussi nombreux et enthousiastes.

Un grand merci à tous les participants : ffred, pierreAfeu, heavenlycreature, Gagor, Jérémy, Christophe, Jul, Bob Morane, Viggofan92, Claire, fredastair, Squizz, neil, Marcozeblog, Fabien qui vont recevoir le tableau complet des votes d'ici quelques minutes.

 

 


 

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Une séparation

Une séparation est impeccable et magistral.

Quelque soit l'angle sous lequel vous le considérez, il brille d'un éclat unique.

Prenons par exemple le scénario. Je n'ai pas vu une telle qualité et une telle intelligence depuis ... Rashomon ? La comtesse aux pieds nus ? Le film, après un démarrage curieux, un peu froid et en même temps brillant, devient à partir du début du conflit une extraordinaire machine a vous faire reconsidérer vos opinions. Le moindre petit évènement (un coup de fil passé, la position qu'occupait un personnage dans une pièce) prend une importance capitale. C'est racé, nerveux, méticuleux.

Considérons les acteurs. Qu'ils (et elles) aient décroché collectivement les prix d'interprétation à Berlin, en plus de l'Ours d'Or (un cas à ma connaissance unique dans l'histoire des grands festivals) n'est que justice. Ils jouent comme des instrumentistes virtuoses dans un grand orchestre : chacun exécute parfaitement son rôle. Bien entendu les deux couples principaux sont parfaits, mais la jeune fille est émouvante, la petite fille bouleversante, le grand-père apporte un poids presque magique à la situation, le juge est redoutable. J'ai été plusieurs fois étourdi par l'extrême qualité de l'interaction entre les personnages et par la finesse de leur jeu. Ils réalisent une performance collective admirable.

Quand aux différents niveaux de lecture du film, c'est le point qui en fait pour moi un réel chef-d'oeuvre. A la fois chronique sociale sur la vie d'aujourd'hui en Iran, drame sentimental, tragédie grecque, procedural, conte moral, exploration philosophique (où est la vérité, qu'est-ce que la responsabilité, l'amour ?), thriller psychologique et enfin film politique, au plus beau sens du terme, qui donne à voir ce qu'est le rapport de classes.

Le film est un bijou conceptuel, éthique et esthétique. Asghar Farhadi semble touché par la grâce et manie sa caméra sans ostentation, mais avec une précision chirurgicale et des idées brillantes (le générique de début à la photocopieuse, la première scène ou le spectateur tient la place du juge, les jeux de reflets durant tout le film).

Vous l'avez compris, vous n'avez pas le droit de ne pas aller voir ce film, il en va de l'honneur de notre pays de cinéphilie de lui réserver un triomphe !

Voir mon complément d'analyse : Le vide avec un film autour

 

4e

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Le vide avec un film autour, retour sur Une séparation

L'émotion profonde et durable que m'a procuré la vision d'Une séparation m'amène exceptionnellement à revenir sur le film, au-delà de ma première critique.

 

Un labyrinthe organisé

Le film fonctionne comme une expérience dans lequel nous serions (spectateurs et personnages) des souris de laboratoire.

Farhadi nous met à l'entrée d'un labyrinthe dans lequel nous allons évoluer pendant toute la durée du film. Comme la souris, nous ne voyons à un moment donné que le couloir devant nous, et à chaque intersection, plusieurs perspectives toujours tronquées ou partielles s'offrent à nous. Le film nous conduit à des cul-de-sac, où nous ramène à un point où nous sommes déjà passé, en nous faisant redécouvrir un carrefour sous un autre angle.

Très concrètement, le labyrinthe est organisé matériellement par un montage très recherché dans lequel chaque plan est une case qui nous fait progresser. Pour renforcer cette impression de progression bridée, Farhadi nous enferme dans des lieux clos (appartements, palais de justice, école, cours) souvent exigus (les voitures, la salle d'audience dans laquelle les deux protagonistes sont très proches du juge).

Non seulement les personnages évoluent en lieux clos, mais ils passent une bonne partie de leur temps à fermer des portes (celle de l'entrée de l'appartement évidemment, celle de la chambre du père), matérialisant dans l'espace propre du film les cases conceptuelles du scénario : à chaque case sa vérité.

Subtilité ultime de la mise en scène, il arrive qu'on puisse jeter un coup d'oeil dans une autre case, ou de l'autre côté du couloir de labyrinthe, par de multiples jeux de transparence ou de miroir (dans l'appartement lui-même en partie labyrinthique, dans les pare-brise ou les rétroviseurs de voitures, à travers/sur des vitres ou des miroirs)

Bel exemple du labyrinthe exigu et vitré : la cuisine de Hodjat et Razieh, à la fois tellement petite que le conflit entre mari et femme devient physique, et donnant sur le couloir par une vitre.

 

Eloge des plans manquants

Le labyrinthe que constitue Une séparation nous permet de tourner autour .... de ce que le film omet de montrer.

C'est évidemment vrai à propos de la scène de l'accident, siphon béant au coeur du film qui aspire en spirale tous les protagonistes, mais en y réfléchissant un peu plus profondément, c'est vraiment la caractéristique du film de ne pas montrer ce dont il parle.

Par exemple aux deux extrémités du film, il nous manque deux plans que n'importe quel film "normal" aurait montré : le plan du juge au début, et celui qui montre le choix de Tameh dans le dernier.

Ce triptyque de plans manquants justifie que le titre du film soit Une séparation et non La séparation. Une parce qu'on peut choisir : séparation du couple, séparation du foetus, séparation d'une adolescente d'un de ses parents.

Entre l'oeil du cyclone et ces deux extrêmes le nombre de plans manquants est colossal : pour ne parler que des plus importants, on peut citer celui où la caméra serait dans l'escalier quand Razieh en est expulsé, celui qui montrerait cette dernière chez le médecin ou celui qui montrerait l'endroit où l'argent a été volé.

D'une façon encore plus subtile, manque beaucoup de contrechamps aux champs reflétant le vécu d'un des personnages : contrechamp sur la prof de Termeh quand Nader l'appelle pour avoir le numéro de téléphone du médecin, contrechamp sur les invités quand Razieh et Hodjat se disputent dans leur cuisine, etc.

Non seulement, il n'y a donc pas de sortie au labyrinthe, mais tous les endroits de ce dernier ne sont pas accessibles.

La force incroyable du film se loge probablement dans ce hiatus : alors que la plupart des oeuvres vous marquent parce qu'elle vous montrent ce qu'elles vous montrent - et que le temps efface le souvenir d'avoir vu, Une séparation vous marque par ce qu'il ne vous montre pas ce qu'il vous montre - et que le temps efface plus difficilement ce que vous avez profondément ressenti sans le voir.

 

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Gazette du festival de printemps

FestivalPrintVLe règlement et la sélection ici : festival de printemps.

Une innovation pour cette édition : Christoblog vous tiendra au courant de l'évolution de l'actualité concernant les films de la sélection : liens vers d'autres sites, état d'avancement des critiques des blogueurs participants, revue de presse, etc.

Et le maître-graphiste, le Chopin de la palette, le Tintoret de Photoshop, j'ai nommé pierreAfeu, offre au festival un complément visuel à sa magnifique bannière (là, sur la gauche).

Let's go, folks : ffred, Tching, pierreAfeu, heavenlycreature, Gagor, Jérémy, Herodonte, Christophe, Jul, Bob Morane, Viggofan92, Stoni, Anna, Gabriel, Hallyne, Claire, fredastair, Ben, Squizz, Marnie, neil, Marcozeblog, Fabien

 

19 juin 


Dernier billet avant les résultats demain dans la soirée. 14 votants à ce jour : ffred, myself, fredastair, Christophe, Bob Morane, Marcozeblog, pierreAfeu, heavenlycreature, GagorJul, Robin, Claire, Squizzneil
Marnie, Stoni, Anna, Tching avaient annoncé leur abandon certain ou probable.
Restent donc potentiellement les avis de Fabien, Ben, Gabriel, Hallyne, Jérémy, et Herodonte.
Certains ont dit que ce festival était d'une qualité médiocre. Pour me faire une idée objective j'ai calculé la moyenne de mes notes (sur 5) :
- pour le festival de printemps : 2,75
- pour le festival d'hiver : 2,50
- le festival d'automne : 2,29
Pour moi donc, pas une mauvaise cuvée, avec 3 films qui marqueront l'année 2011.
Encore un grand merci à tous pour votre implication, et à demain !

 

16 juin 


6 votants à ce jour (dans l'ordre d'arrivée dans ma boite mail) : ffred, myself, fredastair, Christophe, Bob Morane et Marcozeblog.
Une séparation réalise un box office exceptionnel avec 151 217 entrées en première semaine sur un nombre réduit de salles. Je n'ai pas souvenir d'un tel résultat pour un film d'auteur, de plus ni américain ni français. Le point de comparaison le plus proche me semble être La vie des autres, qui avait réalisé à la surprise de tous 135 000 entrées la première semaine pour finir sa carrière à plus de 1 400 000. Du coup le nombre de salle a largement augmenté pour la deuxième semaine, tant mieux pour Farhadi. Le bouche à oreille a l'air de fonctionner à plein.
Plus que 4 jours pour vos votes, m'sieurs dames.

 

12 juin

 

4 votants pour l'instant (dans l'ordre d'arrivée dans ma boite mail) : ffred, myself, fredastair, et Christophe. Je ne dirai pas grand-chose mais : 2 films prennent une longueur d'avance avec ces 4 votes et laissent le troisième assez loin déjà. Côté scénario, metteur en scène et acteur/trices, peu de noms cités, cela se joue dans chaque catégorie entre 3 ou 4 nominés. Pour le prix spécial par contre, 4 films différents cités, donc ex aequo ! N'hésitez pas à réagir sur la liste des pré-sélectionnés pour le festival d'été... des changements sont possibles.

 

10 juin

 

ffred a été le premier à m'envoyer son vote. Pour ma part, festival terminé également, je sors de London Boulevard qui n'a été pour moi qu'un long tunnel d'ennui. Ffred et moi avons le même trio de tête pour les films, mais je n'en dirai pas plus, je ne dévoilerai mon vote qu'à la fin. Il reste 10 jours à tout le monde pour finir !
Voici le pré-programme du festival d'été :

10 août : Melancholia de Lars Von Trier
17 août : La piel que habito de Pedro Almodovar
17 août : Comment tuer son boss ? de Seth Gordon
24 août : Les Bien-aimés de Christophe Honoré
31 août : La guerre est déclarée de Valérie Donzelli
7 septembre : Habemus papam de Nanni Moretti
14 septembre : La fée de Dominique Abel, Fiona Gordon et et Bruno Romy
21 septembre : L'Apollonide, souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello
21 septembre : Restless de Gus Van Sant

 

7 juin

 

Dernière ligne droite pour le festival de printemps avec demain la sortie des deux derniers films de la sélection : Une séparation (dont on lit ici où là d'excellentes critiques) et London Boulevard. Donc théoriquement les premiers votes pourraient m'être transmis très rapidement (dès jeudi ?) par les plus rapides d'entre vous, à savoir : ffred, Gagor, Bob Morane (?). En ce qui concerne j'aurai probablement bouclé mon festival vendredi. N'oubliez pas : la date limite pour m'envoyer vos votes est le 20 juin... de telle façon que les résultats soient proclamés le premier jour de l'été, le 21 juin, avant d'aller faire la fête yeah !
Autre date à retenir : samedi 11 juin pré-programme du festival d'été (mi-août / fin septembre) dans cet article. J'en salive d'avance.
Je précise enfin que vous pouvez citer un film ne faisant pas partie de la sélection pour le prix spécial pourvu qu'il soit sorti pendant le festival, donc le 15 juin ça marche. 

 

1er juin

 

En parcourant les articles d'Herodonte, neil et Viggofan92 je me dis que The tree of life devrait engranger chez eux la première place. Personnellement je place beaucoup d'espoir dans Une séparation, que Claire et fredastair ont déjà vu et placent très haut.
En attendant mercredi prochain je vais faire un peu relâche ce week-end par rapport au festival de printemps.
Au programme :
- lecture au soleil, car il va faire chaud à Nantes (l'intégralité du Chat du rabbin en BD)
- rattrapage d'article sur le blog (La défense Lincoln, l'expo Kubrick)
- et quelques DVD parce qu'il n'y a pas grand-chose qui me dit au ciné cette semaine
- préparation du festival d'été (a priori quelque chose comme 10 août - c'est la date de sortie de Melancholia / 30 septembre)

 

30 mai

 

A lire les premières critiques concernant  Le complexe du castor ( ffred, pierreAfeu, heavenlycreature, Fabien, myself) ce dernier vient s'insérer dans la mêlée pour les premières places. Vous savez que je n'aime pas les cancans (?!), mais quand même, si vous voulez en savoir plus sur les turpitudes de Mel et la façon dont Hollywood l'a ostracisé vous pouvez aller ici. A lire ces lignes, on voit le film un peu autrement et on apprécie d'autant plus le cadeau que Jodie Foster lui a fait. Ceci dit, cela ne nous regarde pas, comme dirait Lars von Trier.

 

25 mai

 

Lors des premiers festivals sur Christoblog un film a toujours écrasé la compétition : Potiche en automne, puis Black swan en hiver. A mi-chemin du festival de printemps, aucun film ne se détache vraiment : The tree of life sera parfois classé dans les premiers, mais aussi souvent dans les derniers (pour quelle moyenne à la fin ?), Minuit à Paris trouvera des défenseurs et peu de blogueurs en disent vraiment beaucoup de mal. Le gamin au vélo est rarement porté en triomphe, mais assurera une note correcte. Seule La conquête parait nettement en retrait dans vos critiques. Pour les nominations "annexes" (scénario, réalisateur, acteur, actrice), pas d'évidence pour l'instant non plus, même si je pense pour ma part tenir mon meilleur (petit) acteur, et aussi le réalisateur !
Bref gros suspense à l'entrée de la deuxième partie. Chat, persan, rongeur ou thriller ?

 

22 mai

 

A l'annonce du palmarès, un petit sourire naquit sur mon visage, mettant à mal ma modestie légendaire. Le gamin au vélo Grand prix et The tree of life Palme d'or : n'avais-je pas prédit dans mes critiques de beaux destins à ces deux films ?
Un choix qui va alimenter les polémiques et peut-être amener le record de commentaires sur un des articles de Christoblog à évoluer (173) !
Sinon, on en est où des publications ?
4 critiques : ffred (who else ?)
3 critiques : myself, Gagor, Bob Morane
2 critiques : Tching, pierreAfeu, heavenlycreature, Jérémy, Herodonte, Jul, Viggofan92, Stoni, Claire, neil
1 critique : Anna (mais elle est en direct de Cannes la veinarde !), Gabriel, Hallyne, Ben, Squizz, Marnie, Marcozeblog, Fabien
Allez, m'sieurs dames, le rythme des sorties se calme à partir de maintenant, tout le monde peut y arriver !

 

19 mai

 

Je sors de The tree of life, et ... j'ai plutôt aimé ! Incroyable, non ? Je rejoins donc Squizz et Ben pour défendre ce film, loin d'être la catastrophe décrite entre autres par Christophe.
Je tiens par ailleurs à saluer l'attitude exceptionnelle du renégat lucide Viggofan92 qui publie une critique revue du Allen en abaissant sa note de 3 à 1, belle leçon d'honnêteté intellectuelle.
Sinon, mon favori pour la marguerite d'or, Le gamin au vélo, a de très jolies critiques dans la presse et chez Gagor et Bob Morane.
Jul est une des premières à critiquer La conquête qui s'annonce bof bof. Quelques mauvais esprits critiquent le niveau global des films, mais je me souviens du festival d'automne, dont le niveau était bien pire selon moi.

 

17 mai

Dézingage en règle de Woody chez pierreAfeu, heavenlycreature, et Claire. Malick est pulvérisé chez Tching, qui publie la première critique du film. Les Dardenne s'en tirent beaucoup mieux pour leur premier post chez moi.

 

15 mai

C'est LA grosse semaine du Festival de Printemps qui commence avec 3 films en compétition dont The tree of life, le film le plus attendu de l'année, voire du siècle. La conquête sera-t'il éclipsé par les frasques sexuelles de DSK ? Les Dardenne et Cécile de France vont-ils réussir un hold-up belge sur la Palme, une fois (ou plutôt trois) ?
Pendant ce temps, une majorité des membres du jury encensent Minuit à Paris (Gagor, Viggofan92) faisant preuve d'un enthousiasme que je juge disproportionné et après tout, bien chauvin : si le film avait pour cadre Berlin ou Vienne, je suis certain que les nombreux défauts du film sauteraient aux yeux de tous ... ah, ces Parisiens ! Heureusement que Bob Morane a bien vu le même film que moi. Je n'indiquerai désormais d'ailleurs que les mauvaises critiques de Minuit à Paris, en toute mauvaise foi. 

13 mai

Excellent démarrage de Minuit à Paris qui réalise 40 000 entrées en une séance (ou deux maximum) pour la journée du 11, puisque Woody Allen avait exigé que le film ne soit pas diffusé avant sa projection à Cannes. C'est beaucoup plus pour une première journée d'exploitation que son précédent opus : Vous allez sérieusement vous emmerder. Les critiques sont très bonnes dans la presse : 4 ou 5 * du Monde au Figaro en passant par Libé, La Croix, L'express ou le Nouvel Obs. Cet enthousiasme me laisse pantois (cf ci-dessous). Parmi les premiers jurés à avoir commenté le film : ffred a bien aimé. C'est toujours la même rengaine, Fred le gentil, et Chris le méchant. Anna a bien aimé aussi mais, dès qu'il y a Owen Wilson dans un film, elle n'est plus objective.

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Infiltration

Imaginez la première partie de Full metal jacket dans un camp d'entraînement israélien dédié aux appelés souffrant de handicaps physiques ou mentaux, et vous obtiendrez Infiltration. Qui porte d'ailleurs assez mal son nom, car d'infiltration il n'est pas question.

Au menu donc : des instructeurs sadiques et limités (Sir, yes sir !), des souffre-douleur, des gros durs qui ont des projets, des beaux gosses qu'on suit lors des permissions, des épileptiques russes, etc.

Le film est l'adaptation d'un gros roman à succès et c'est là une de ses limites : on sent qu'il y a potentiellement de la matière scénaristique pour deux ou trois films, voire une série. Chacun des personnages n'est donc qu'esquissé, et on en conçoit une légère déception. On se questionne d'ailleurs jusqu'au bout pour connaître les raisons qui font que les uns et les autres sont là, et je suppose que le roman apporte les réponses.

Malgré une belle interprétation, une aisance dans la narration et une mise en scène fluide et efficace, le film ne décolle jamais vraiment, maintenant notre attention tout juste au-dessus du niveau où l'intérêt s'étiole.

 

2e

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Medianeras

Un sympathique petit film : voilà comment caractériser le premier long métrage visible en France de Gustavo Taretto.

Lui est phobique (influence Woody Allenienne clairement revendiquée), elle est architecte qui ne construit rien et ne prend jamais l'ascenseur. Tous les deux sont seuls et cherchent l'amour, maladroitement.

Le film multiplie les inventions plus ou moins originales, comme si le réalisateur/scénariste jetait toutes ses bonnes idées d'un coup dans son premier film. Parmi les plus intéressantes il faut citer les passionnantes digressions sur l'architecture de Buenos Aires, et la scène du suicide du chien, qui m'a beaucoup plu.

C'est frais, ça se regarde sans ennui (avec toutefois un gros coup de mou vers le milieu) et ça inspire naturellement la sympathie. Typiquement le genre de film à collectionner les prix du public, consensuel, mignon, parfois percutant... et se terminant bien !

Les bégueules (dont je ne fais pas partie) disent que tout ça n'a pas beaucoup de fond et fait très bobo. Ils se gaussent de l'utilisation par le scénario des livres-jeux Où est Charlie ? Ces gens là n'ont pas de coeur, où ne sont pas seuls. Ou les deux.

 

2e

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X-men : le commencement

Dieu sait si je peux être réfractaire au concept de film de super-héros, et aux comics en général.

C'est donc un peu contraint par les bons retours sur ce film que je m'y suis rendu, et aussi parce dans le casting (il faut dire incroyable, tous les jeunes dont on parlent y sont, ou presque) figurent deux de mes acteurs favoris : le merveilleux Michael Fassbender et la craquante Jennifer Lawrence.

Surprise : la première partie du film est une séries d'études psychologiques plus qu'un film de baston. Etre spécial, accepter sa différence, devenir adulte, faire des choix (entre le bien et le mal, sans vraiment savoir où se trouvent l'un et l'autre), entretenir une amitié, discipliner ses capacités : je n'aurais pas pensé trouver tout cela dans un film Marvel.

J'ajoute que la mise en scène est très belle, limpide, rappelant parfois Spielberg ou les meilleures réussites des films de genre, comme Casino Royale par exemple. L'ambiance 60ies a beaucoup de charme, les décors sont splendides et utilisés avec beaucoup de discernement. Tous les acteurs ont une pêche d'enfer (James McAvoy en gentil et Kevin Bacon en méchant sont parfaits) et même les scènes d'action de la deuxième partie sont belles, et n'en ajoutent pas dans le spectaculaire.

Le prototype du parfait pop-corn movie. Du coup, au risque d'être déçu, j'ai bien envie de voir ce qui va arriver à tous ces mutants fort sympathiques en regardant le reste de la saga, que je ne connais pas.

 

3e

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London boulevard

London Boulevard est ridicule à tout point de vue et écrire un trop long article à son propos serait lui faire trop d'honneur. Scénario vu, revu et re-revu, bleuette à l'eau rose, personnages hyper caricaturaux, montage elliptique pour cacher les carences du film, incongruités scénaristiques, acteurs à côté de leurs pompes.

Il n'y a guère que deux choses à sauver dans le film : la bande-son et les sourcils de Colin Farrell. Ce dernier possède en effet des sourcils absolument extraordinaires, fournis, épais, long, d'un noir de jais alors que ses tempes grisonnent. Fascinant. Comme DSK.

 

1e

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L'épouvantail

L'épouvantail commence par un premier plan d'anthologie : sous un ciel magnifique, un homme descend une colline calleuse avant de franchir maladroitement une clôture de fils de fer barbelé.  Son béret, ses lunettes rondes, ses vêtements élimés et ses cigares vont rapidement nous devenir familiers. Sa violence compulsive et son goût pour la bagarre aussi. Gene Hackman trouve probablement en Max le meilleur rôle de sa carrière. Il donne une profondeur charnelle et fragile à ce clochard monomaniaque qui sillonne l'Amérique.

Face à lui, le tout jeune Al Pacino est absolument magistral. Il campe un Francis lunaire, petite boule d'énergie noiraude rappelant le jeune Springsteen des débuts, évoluant vers une prestation de clown lunaire. Le film prend d'ailleurs parfois des airs de tragi-comédie italienne : la tristesse vient après, ou par le rire.

Nos deux compères ont leurs manies. Max a économisé pour ouvrir un car wash, il empile les couches de vêtement et dort toujours en plaçant une chaussure sous son oreiller. Francis veut retrouver la femme qu'il a quitté enceinte il y a 6 ans, et transporte avec lui un cadeau pour son enfant qu'il ne connait pas : une lampe de chevet.

Le road trip plutôt sympa devient au fur et à mesure des étapes une suite d'épreuves dont on pressent qu'elles pourraient, qu'elles vont, devenir tragiques. La force du film est de ne pas dévoiler trop tôt d'où viendra la catastrophe, mais de semer dans plusieurs scènes très belles des indices qui amènent à reconsidérer l'ensemble de l'aventure une fois terminée. Dans sa dernière demi-heure la narration atteint des sommets de violence mentale, et ceux qui ont vu le film n'oublieront pas de sitôt la scène étourdissante de douleur lors de laquelle Al Pacino téléphone à Annie.

Jerry Schatzberg, dont la carrière sera pour le moins irrégulière, réussit un coup de maître dans ce film qui lui vaudra la Palme d'Or à Cannes en 1973. Sa mise en scène, sans être renversante, est plutôt efficace, alternant curieusement les plages assez lentes (la première scène, celle de la rencontre au bord d'une route déserte, dure 7 minutes) et les accélérations brutales, parfois même chargées d'adrénaline.

Mais c'est surtout pour la performance des deux acteurs que le film mérite d'être vu. Hackman et Pacino sont époustouflants en clochards funambules.

4e
 

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Exposition Kubrick à la Cinémathèque

Lisa et Louise Burns. Collection Christophe L.Visiter une exposition sur Kubrick, c'est un peu comme imaginer la musique de Mozart en regardant un piano.

Cela ne donne un aperçu que très lointain du génie de l'artiste et des qualités de son oeuvre (rythme, catharsis, mouvement...).


On se sent donc archéologue lorsqu'on pénètre dans l'exposition, muni de sa truelle conceptuelle et de son petit marteau mémoriel, empli de la curiosité malsaine et agréable de celui qui va pénétrer dans un tombeau jusque là inviolé.

 

Premier choc : les objets de tournage. Leur matérialité brute s'impose à nous et ils fonctionnent comme des madeleines de Proust. Ainsi, les robes des petites filles de Shining, exposées dans une vitrine bizarrement éclairée, glacent le sang.

 

Deuxième choc : les objets utilisés par Kubrick pour préparer ses tournages. Ils montrent avec une évidence incontournable que le cinéaste était un maniaque obsessionnel de premier plan, comme on en voit peu. Photo de repérage où le cadrage est indiqué au millimètre près, plan d'une rue pour Eyes wide shut sur lequel Kubrick a scrupuleusement indiqué le type et le nom de chaque magasin, maquette de la salle de commandement de Docteur Folamour ou du labyrinthe de Shining, tout est minutieusement préparé et aucune place ne semble laissée au hasard.

 

Troisième choc : les très belles salles consacrées aux films non tournés, aux rêves de films. On découvre ainsi les décors d'AI (finalement réalisé par Spielberg), les essais de costume de l'actrice principale pour Aryan papers, et surtout le matériel préparatoire pour ce que Kubrick disait devoir être (la modestie ne l'étouffait pas) le plus grand film jamais réalisé, son Napoléon. Il faut voir cet immense papier ou chaque petit carreau de 5 millimètres représente 72 secondes d'un film qui devait durer pratiquement 4 heures, avec indication pour chacun d'entre eux de la scène concernée. Ou le meuble qui contient des milliers de petites fiches colorées rassemblant les notes que Kubrick prenait sur Napoléon. Vertigineux, inquiétant. 

 

Quatrième choc : l'évidence que Kubrick sentait parfaitement son époque. A la fois pour la heurter (Docteur Folamour en pleine guerre froide, Lolita et Orange mécanique censurés dans plusieurs pays) ou la devancer (les innovations technologiques comme cet objectif inventé pour filmer les scènes éclairées de simples bougies dans Barry Lyndon, les photos magnifique du photographe Weegee, l'implication de grandes marques dans le design de 2001, l'Odyssée de l'Espace).

 

L'expo ne donne donc pas à « sentir » les films, mais en projetant leur reflet intellectualisé sur l'écran de notre mémoire, elle nous donne envie de nous replonger dans l'oeuvre, histoire de vérifier que cette précision d'horloger engendre bien au final l'émotion dont on a gardé le souvenir.

 

4e

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Gianni et les femmes

Pyramide DistributionGianni a la soixantaine bien tassée. Il est à la retraite, n'a jamais vraiment réussi dans la vie et ne remplit pas les canons du mâle séducteur italien. Il se laisse même bouffer par les femmes de sa vie : sa mère tyrannique, son épouse active et absente, sa fille au fort caractère. En ressent-il de la tristesse ou de l'amertume ? Peut-être un peu.

Quand son ami avocat lui explique qu'à son âge tout le monde a une maîtresse, et qu'il se met en tête de rompre son train-train quotidien pour en trouver une ... les ennuis commencent.

Gianni di Grogorio se met en scène dans la suite de son film précédent, Le déjeuner du 15 août, qui avait marqué ses débuts de réalisateur à 59 ans !  Il campe son personnage d'homme en prise au temps qui passe et à la dégradation de sa propre image avec une décontraction distante et un peu anxieuse, qui en fait une sorte de Woody Allen italien.

Mais si l'américain est obsédé par le sexe, Gianni semble mener sa recherche un peu à contre-coeur, et s'il est attiré par quelque chose, c'est probablement plus par l'amour, ou tout au moins par le fait de "ne plus être transparent", comme il le dit dans la belle scène du bar.

Le film, malgré son ton touchant et ses anecdotes assez bien amenées, ne parvient pourtant pas à nous entraîner totalement, semblant suspendu au bord de la réussite, contemplant ce qu'il aurait pu être si les gags éclataient vraiment, si le rythme était un poil plus assuré, les clichés un peu moins convenus. Il fait partie de ces films qu'on aurait aimé aimer, et dont on a du mal à dire du mal.

 

2e

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La défense Lincoln

Matthew McConaughey. Metropolitan FilmExportAyant attendu quelques jours pour écrire cette critique, me voici dans la désagréable situation de celui qui a oublié une grande partie du film, ce qui n'est pas très bon signe en ce qui concerne sa qualité, vous en conviendrez.

De quoi s'agit-il ? Un avocat sans scrupule (pas mal ce Matthew McConaughey que je ne connaissais pas bien) doit défendre un jeune homme friqué, suspecté d'avoir tenté de violer et tuer une jeune prostituée. Rapidement il apparaît que le suspect est bien le coupable, et que ce bastard a déjà zigouillé une autre fille dans les mêmes circonstances.

 

L'avocat est donc le cul entre deux chaises, et doit monter une machination assez maline (mais qu'on voit arriver à 40 kilomètres) pour piéger son client sans se mettre en danger lui-même, et sans enfreindre les codes de son métier.

Le film est mis en scène à la va comme j'te pousse, le scénario se déroule sans surprise, reflétant avec justesse l'art de Michael Connelly, et Los Angeles est toujours photogénique. Ce n'est pas désagréable à regarder et cela contentera les spectateurs de TF1 du dimanche soir.

Mais le film est surtout intéressant quand il montre le fonctionnement de la justice américaine. On y est forcément plus attentif, affaire DSK oblige, et tous les traits typiquement américains sont très bien montrés : détruire la crédibilité d'un témoin, sortir une carte de sa manche lors du procès, etc... L'affaire DSK s'invitait aussi dans La conquête quand le candidat Sarkozy drague une journaliste en lui disant "Savez-vous que tous les hommes politiques sont des bêtes sexuelles ?".

On voit par là que tout est dans le cinéma et que le cinéma est dans tout.

 

2e

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