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Christoblog

Cellule 211

Alberto Amman. La Fabrique de FilmsCellule 211 vient de remporter le prix du jury du 20ème festival du cinéma espagnol de Nantes. Il a raflé d'autre part 8 récompenses aux derniers Goyas - l'équivalent espagnol de nos Césars, enfonçant l'Agora d'Amenabar au passage. C'est un des plus gros succès de tous les temps au box office espagnol.

Le pitch est le suivant : un jeune gardien de prison visite son nouveau lieu de travail la veille de sa prise de fonction. Une émeute éclate et il se trouve en situation de devoir faire semblant d'être un détenu....

Le film commence comme un film de prison tendance Prison break, un peu maladroit et caricatural. Il vire ensuite au thriller, puis au thriller politique lorsqu'entrent en scène des prisonniers de l'ETA. Par un enchainement très bien maîtrisé de l'intrigue il devient cornélien, puis cauchemardesque. Dans les dernières minutes, le cauchemar tourne à l'enfer.

Le film est tourné à l'américaine, avec une suprême efficacité et une violence parfois assez insoutenable. Les acteurs en prison sont très bons, ceux de l'extérieur très moyens. Le film ressemble à une sorte de bulldozer qui avance inexorablement et écrase tout sur son passage. Mieux vaut avoir les nerfs solides pour le suivre jusqu'au bout. Si vous aimez les sensations fortes et n'êtes pas trop regardant sur la subtilité....

 

2e

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Alice au pays des merveilles

Tim Burton est il un auteur ?

On peut légitimement se poser la question à la vision d'Alice, comme d'ailleurs à celle de ses deux Batmans, ou de la Planète des singes. Les vrais auteurs arrivent toujours à imprimer leur style à n'importe quelle oeuvre, fut-elle de commande.

Or ici, l'effrayante machine Disney arrive à formater le film suivant les pires standards en vigueur. De la légèreté et du sens de l'absurde de l'oeuvre initiale il ne reste plus qu'une confrontation binaire, des combats formatés Seigneurs des Anneaux, des monstres sortis des pires moments d'Harry Potter et des bestioles échappées du monde de Narnia.

Les bons sont fades, les méchants ne font pas peur, la poésie est aux abonnés absents. Comment Burton at-il pu accepter une scène d'un aussi mauvais goût que la danse finale ?

La bande son est insupportable, Depp est inconsistant, Alice transparente. Il n'y a guère que les premières minutes qui sont à sauver (scène du thé comprise), et encore.

A vite oublier. Une catastrophe.

 

1e

 

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Don Giovanni, naissance d'un opéra (en présence de Carlos Saura)

http://madamepickwickartblog.com/wp-content/uploads/2010/01/mozart17.jpgVu hier soir dans le cadre du festival espagnol de Nantes le dernier film de Carlos Saura. Le film a peu été montré pour l'instant (voir tout de même le site du tiff), et je ne crois pas qu'il sortira en France.

L'histoire contée est celle de Lorenzo da Ponte, libertin vénitien, prêtre, poète et célèbre librettiste de Mozart. On suit Da Ponte à Venise, puis à Vienne, où il subit une peine de 15 ans d'exil, rencontre Mozart et compose avec lui des opéras. Le film montre plus particulièrement la genèse de Don Giovanni et la façon dont chacun des protagonistes (Da Ponte, Mozart, Casanova) y met de ses obsessions et de ses sentiments. Il a été tourné avec des acteurs italiens, en italien.

Dans son introduction, Saura nous a dit brièvement qu'il avait voulu réalisé un mélange de cinéma, de théâtre et d'opéra. Et en effet le film ressemble beaucoup à du théâtre filmé, les décors extérieurs à Venise, puis surtout à Vienne, étant constitués principalement de toiles peintes. Cette option donne une connotation un peu cheap au film, qui par ailleurs donne paradoxalement à voir une débauche de moyens en ce qui concerne les costumes et les décors intérieurs. La lumière, très artificielle et travaillée, les décors de l'opéra lui-même, accentuent l'impression de mauvais goût par leur caractère ostentatoire, et parfois même anachronique (la lave en fusion dans la scène de la statue).

La vérité historique y est copieusement bafoué et l'amalgame Casanova / Don Juan est un énorme contresens. Le scénario enfin est cousu de fil blanc et l'histoire d'amour entre Da Ponte et Anetta est mièvre à souhait.

Malgré tous ces défauts, on trouve un intérêt à suivre ce film, surtout par la grâce des caractères particulièrement exceptionnels des trois protagonistes principaux. Le film donne donc envie d'écouter Mozart, de revoir Amadeus, de lire les mémoires de Casanova, et celles, moins connues, de Da Ponte.

Enfin, le lieu où le film était montré (le théâtre Graslin, dédié à l'opéra) donnait une saveur particulière à la projection. Carlos Saura (un peu chauve mais semblant très alerte) a été longuement applaudi à la fin de la séance.

Ceci étant dit le film est assez mauvais, et vous pouvez certainement trouver mieux à aller voir.   

1e

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Morse

Morse est sans aucun doute le chef d'oeuvre méconnu de 2009. Quelques rares cinéphiles avertis avaient repéré le film, mais j'avais pour ma part raté le passage en salle.

La sortie en DVD du film permet aujourd'hui une séance de rattrapage, avec choc esthétique et émotionnel garantis.

Choc esthétique parce que le film est d'une grande beauté formelle. La banlieue de Stockholm est filmée par Tomas Alfredson comme la Pologne par Kieslowski dans son Décalogue. La mise en scène est précise, calculée, sereine, jouant superbement des focales et des reflets. La photographie est magnifique, certaines couleurs semblant filmées comme jamais elles ne l'ont été (le filet vert dans le gymnase). Techniquement tout est parfaitement maîtrisé, tout fait sens, c'est absolument frappant en regardant le film une deuxième fois. Jusqu'à la bande-son qui alterne avec brio les plages silencieuses et des nappes de musique envoûtante.

Choc émotionnel ensuite. Le film hante durablement l'esprit du spectateur. Le début installe une sorte d'étrangeté distante, qui semble bien innocente au commencement, puis qui s'opacifie, se densifie progressivement. Les sentiments d'Eli et d'Oscar deviennent obsédants, ils sont à la fois humains, animaux et divins. Sans scènes gore (ou presque) le film réussit à faire un planer un malaise constant et délicieux dans sa deuxième partie, qui nous fait redouter (et espérer) le plan suivant avec de plus en plus d'intensité. Le jeu de l'ensemble des acteurs est pour beaucoup dans cette réussite.

Morse est un grand poème à la fois sombre et lumineux.

 

4e 

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Soul kitchen

Demir Gökgöl, Adam Bousdoukos, Anna Bederke, Birol Ünel, Moritz Bleibtreu, Pheline Roggan et Lucas Gregorowicz. Pyramide DistributionSi vous voulez passer un bon moment, allez voir Soul kitchen.

Le réalisateur, Fatih Akin,  possède des facilités hors norme pour décider quoi filmer et comment le faire, comme l'avait déjà prouvé le très bon De l'autre côté.

Son virage vers la comédie (presque) pure est pour le moins étonnant, mais assez réussi. Cela est du sans conteste à la performance des acteurs. Adam Bousdoukos est merveilleux en grand machin gaffeur, son frère Moritz Bleibtreu est parfait en cambrioleur à la petite semaine, et Birol Unel, déjà vu dans Head On (le film qui fit connaître Akin), joue avec délectation un cuisinier mégalo et violent. Les actrices sont parfaites également.

En s'appuyant sur un scénario millimétrique et une bande-son irrésistible, Akin se livre à une revue des différents types de comique : burlesque et visuel, de situation, de répétition, de dialogues. Après un démarrage en trombe, le film semble se diriger vers une sorte de success story à l'eau de rose, avant de bifurquer brutalement (et c'est sa force) vers une accumulation de catastrophes plus hilarantes les unes que les autres.

Bien sûr, tout n'est pas fin et plusieurs gags ont déjà été vus mille fois, mais globalement cela fonctionne. Et en plus de la comédie, Akin nous donne un joli portrait de Hambourg, entre friche industrielle et vieux immeubles.

 

3e

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La tisseuse

Yu Nan. Pretty PicturesDans La tisseuse, le réalisateur chinois Wang Quan An conte une histoire qui fait écho à celle du Mariage de Tuya.  Même actrice, et finalement même enfermement dans des choix rendus difficiles, voire impossibles, par manque d'argent.

Dans le Mariage de Tuya, l'héroïne avait un mari handicapé et cherchait un nouveau compagnon capable de l'entretenir, tout en exigeant de garder son mari à la maison. Elle était (paradoxalement) enfermée dans les paysages immenses de Mongolie intérieure.

Dans la tisseuse, le personnage principal apprend qu'elle est atteinte de leucémie. Elle n'aime pas son mari avec qui elle s'est mariée par dépit, après le départ de son premier amoureux à Pékin. Que faire de ces dernières semaines de vie ? Faut il payer un traitement médical très onéreux, au détriment de l'éducation de son fils, alors qu'elle est condamnée ? Wang Quan An filme les usines immenses comme la steppe : des lieux écrasants, ou l'humanité lutte sourdement pour exister.

Malheureusement le film ne décolle jamais. On sent un potentiel chez ce réalisateur, comme dans ce premier plan magnifique, mais le film tourne pour ainsi dire à vide, plombé par une direction d'acteur déficiente et un scénario qui hésite entre plusieurs voies, usant d'un pauvre artifice final pour tenter de paraître plus intéressant qu'il n'est.

Ce film, qui évite tellement le pathos qu'il finit par ennuyer, nous rappelle avec cruauté que les mélodrames ne peuvent être qu'excellents ou ratés. 

 

1e

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Le guerrier silencieux, valhalla rising

Mads Mikkelsen. Le PacteNicolas Winding Refn est le réalisateur de films cultes réputés pour leur violence et leur caractère minimaliste (la trilogie Pusher, Bronson). Avec Le guerrier silencieux, il propose une expérience cinématographique radicale.

Le héros principal, One eye, outre le fait d'être borgne comme son nom l'indique, est en plus muet et ne prononce pas un mot du film.

Les autres personnages ne sont guère plus loquaces : l'ensemble des dialogues doit tenir sur une feuille A4 recto verso.

Il y a deux façons de recevoir le film :

1 - Vous êtes éblouis par la splendeur des paysages, la qualité de l'ambiance, l'aspect panthéiste du film et la façon dont il donne réellement à sentir la puissance - l'indifférence - de la nature. Il y a du Terrence Malick (version Le nouveau monde) et du Werner Herzog (Aguirre) chez Refn. Si c'est le cas, l'envoûtement peut être puissant et durable.

2 - Vous considérez que le film est une version nordique et violente du calamiteux et méridional Chant des oiseaux. Même ésotérisme à 2 centimes d'euros, même tics de mise en scène. L'éviscération à main nue et l'éclatement de crâne à coups de pierre ne vous semblent pas les moyens les plus adaptés pour décrire la psychologie des personnages.

Pour ma part j'ai oscillé pendant tout le film entre les deux postures, la première finissant par l'emporter (de peu) sur la seconde. Ceci dit, pour être tout à fait franc, il y a quelque chose d'incroyable dans le fait de ne pas s'ennuyer en regardant ce film. Et c'est pourtant le cas.

J'ai oublié de vous parler du scénario, mais après tout, cela n'a peut-être pas beaucoup d'importance. Sachez qu'il est question d'un guerrier viking en colère, d'un enfant blond, de premiers chrétiens, d'une traversée (oppressante) en bateau, de l'Amérique comme terre promise, d'un enfer, puis d'un sacrifice.

Pour les aventuriers des salles obscures uniquement.

 

2e

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Damages (Saison 1)

Rose Byrne. Sony Pictures TelevisionDamages constitue une sorte de parangon de la série moderne. Déstructurée, bien jouée, réalisée avec une qualité cinéma, esthétiquement chic, manipulant le spectateur avec des rebondissements spectaculaires.

Le procédé est habile : on commence par nous montrer la fin (une jeune fille sort en sang d'un immeuble, rentre chez elle, et trouve son petit ami assassiné) pour ensuite parcourir chronologiquement les évènements qui précèdent, pendant 13 épisodes.

La série use (et parfois abuse) d'un montage complexe qui alterne des scènes se déroulant juste avant et juste après la découverte macabre montrée en ouverture (scènes filmées dans une sorte de sépia granuleux) et des scènes du passé, filmées normalement. Le principe nécessite une attention particulière, pas question de s'assoupir quelques minutes sous peine d'être perdu.

La série se déroule dans le monde des cabinets d'avocat, autour d'une seule affaire, mais ne comprend aucune scène de tribunal. Du point de vue scénario, Damages rappelle un peu les films tortueux de David Mamet : on ne sait jamais vraiment qui fait quoi, qui est l'allié de qui et les rebondissements sont nombreux, au point de nous embrouiller jusqu'à la fin, voire au-delà.

Ces procédés sont tous un peu too much, mais le show tient la route grâce à un casting impeccable. Glenn Close impératrice, égale à son image. Rose Byrne, la jeune héroïne, a la fraicheur et la pêche de Jennifer Garner dans Alias. Zeljko Ivanek joue un avocat fragile et taciturne avec une force impressionnante et Ted Danson est convaincant en chef d'entreprise à la fois enfantin et violent.

La saison 1 se termine par une ouverture très intéressante. L'éclairage sur chacun des 2 personnages principaux change radicalement à l'issue de ce final, et pousse incontestablement à découvrir la saison 2.

 

3e

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Precious

Ce que j'aime dans Precious, c'est le mauvais goût. Un peu comme dans The wrestler l'année dernière. Je me réjouis des moues dégoutées des bien-pensants et des esthètes.

Precious ne fait pas dans la demi-mesure, mais plutôt dans la démesure. Dès les premiers plans le ton est donné : scènes oniriques délirantes, dimensions corporelles hors normes de l'héroïne, viol incestueux, mère abusive, pieds de cochons en train de cuire : ouah, cela fait longtemps qu'un film ne m'avait pas happé dans son grand huit aussi brutalement.

La suite va nous entraîner dans cette histoire horrible de jeune fille que la vie accable en mêlant des scènes de drames, de comédie, de spectacles, de violence extrême. La mise en scène, hum, allez, fait un peu bric à brac, mais ça fonctionne (pour moi en tout cas), parce que son explosivité colle au sujet.

Une scène magnifique pour conclure : la confession de la mère de Precious à l'assistante sociale (une Mariah Carey méconnaissable), un grand moment de cinéma.

La prestation de l'actrice principale, Gabourey Sidibe, est exceptionnelle. Elle est comme un roc, un bloc pur d'énergie positive, hallucinante. Le contraste qu'elle forme avec la sculpturale Paula Patton est saisissant.

En ces temps de productions un peu trop aseptisées à mon goût, je conseille Precious à ceux qui aiment les plats relevés et le gros(!)-qui- tâche.

 

3e

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Eastern plays

Epicentre FilmsEastern plays ne serait qu'un film bulgare "de festival", montrant l'errance morale d'une jeunesse déboussolée, s'il n'y figurait la figure infiniment émouvante de l'acteur Christo Christov.

Ce dernier joue un grand frère toxico, qui intervient dans une agression contre une famille turc menée par une bande de néo-nazis dont fait partie son jeune frère. Il tombe amoureux de la jeune fille turque.

Il joue en partie son propre rôle, puisque dans la vraie vie il était lui même artiste (ce sont ses oeuvres que l'on voit fugitivement au début du film), et drogué.

Il est mort juste avant la fin du tournage.

La charge émotionnelle du film est donc immense et c'est une sorte de miracle de le voir jouer sobrement un personnage désorienté, lunaire, presque angélique. A mille lieues du cliché du junkie, maigre et les yeux exorbités. Une prestation incroyable, portée par une réalisation impeccable, même si elle se situe un peu trop à mon goût dans la veine "poésie urbaine et image un peu floue" chère aux cinéastes d'Europe de l'Est.

La manière dont la musique live est filmée montre parfaitement la sensibilité de Kamen Kalev, le réalisateur, passé par la FEMIS, et qui donnera probablement d'autres bons films. Il lui faudrait pour cela des scénarios plus consistants que celui d'Eastern Plays, vraiment un peu sommaire.

A voir si le film passe chez vous, ce qui est peu probable (21 salles seulement en France)


2e

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Shutter island vs The ghost writer : Polanski devance Scorsese

Ils ont beaucoup en commun :

- un réalisateur expérimenté (Scorsese est né en 1942, Polanski en 1933) qui ont tous deux emporté l'Oscar du meilleur réalisateur, comme me l'a fait remarquer ffred
- ils sont tirés de romans qu'on peut qualifier de thriller
- leur acteur principal est blond et né dans les 70's (et je pense que Di Caprio né en 74, comme McGregor né en 71, ne mesure pas beaucoup plus de 1,80m, mais je peux me tromper).
- les deux personnages principaux sont aussi paumés l'un que l'autre, semblant tous deux errer dans un labyrinthe
- une île joue un rôle primordial dans les deux films
- le premier plan de ces deux films concerne un bateau
- il fait mauvais temps dans les deux (pluie, tempête)
- les deux films se finissent sur un ultime rebondissement

Vous avez voté, et après une longue période indécise, Polanski l'emporte sur Scorsese dans le sprint final. L'analyse des commentaires montre que Shutter Island a généré des avis beaucoup plus tranchés que The ghost writer, et au final ce dernier doit probablement sa victoire à des opinions qui ne sont presque jamais franchement négatives.
Ce sont probablement ceux qui n'ont pas aimé du tout le Scorsese qui ont fait pencher la balance.

Shutter Island : 13

Anna, fredastaire, pL, Georges, nostalgic du cool, F, Fab R, garytheone, Gabriel, cristal!, Stoni, Thebat, Gagor

The Ghost Writer : 18
Chris, Silice, heavenlycreature, Phil Siné, PierreAfeu, Béatrice, fufu, ffred, dasola, Eragonfiniarel, Knorc, Phil, Alexandre, Ronnie, Nicolette, Céline, Jean Baptiste, Monsieur D et Miss J.

A une autre fois pour un autre match, si l'actualité s'y prête.

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Shutter island

Quelque chose cloche dans le scénario que Laeta Kalogridis (plutôt habituée à travailler sur les scénarios de Terminator Genisys ou de la série Altered Carbon), a élaboré à partir du roman de Dennis Lehane.

Ce dernier, que j'ai lu avant de voir le film, ne laissait rien deviner du retournement final. Dans le film, au contraire, les visions du héros donnent très vite des pistes sur sa santé mentale.

C'est un parti-pris osé, qui tente de se démarquer du procédé du "twist final qu'on a vraiment pas pu venir", utilisé abondamment par Le sixième sens et tous ses dérivés.

L'effort est louable. Pourtant, cela ne fonctionne pas. Le film parait boursoufflé, lourd, artificiel, parfois grand-guignolesque, et même mièvre. Scorsese a beau épuiser toute la panoplie de parfait metteur en scène, la mayonnaise ne prend pas. Prenez un dictionnaire concernant les techniques de prise de vue, et cochez au fur et à mesure, je pense que vous constaterez que Scorsese utilise tout  : du très gros plan au plan le plus général, de la contre plongée intégrale à la plongée verticale, toutes les sortes de travelling possibles, etc.

Mais la virtuosité n'entraîne pas forcément l'émotion.

Au contraire ?

 

2e

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Excalibur

Collection AlloCiné / www.collectionchristophel.frCet article est le premier d'une série concernant la légende du Roi Arthur et des Chevaliers de la Table Ronde, qui comprendra des billets traitant de Sacré Graal des Monty Python, ainsi que de notre série nationale Kaamelott.

Le film, culte en 1981, a plutôt bien vieilli.

Evidemment, après l'avènement des effets numériques et les combats dantesques du Seigneur des Anneaux par exemple, les échauffourées d'Excalibur semblent timides, et même parfois assez factices. De même les effets un peu gore, oeil arraché, bras coupé, (impressionnants à l'époque) font plutôt sourire aujourd'hui.

Mais la puissance du film est ailleurs : elle est dans ce mélange shakespearien d'humour (Merlin), de poésie (Lancelot), et de destin individuels contés sur la durée (Arthur, Perceval).

En y pensant, quel film du XXIème siècle prend le pari d'un scénario aussi universel, d'une telle ampleur, brassant autant de sentiments élevés (l'amour, la trahison, l'amitié, la fidélité) et de concepts difficiles (Dieu, les raisons de vivre, le mal) ? Je n'en vois pas.

Le film tient également la route grâce à une interprétation magistrale, très britannique, Nicol Williamson (Merlin) et Nigel Terry (Arthur) en tête, tous deux habitués du théâtre classique. La musique (Wagner, et l'air célèbre des Carmina Burana) joue bien son rôle de madeleine de Proust pour ceux qui ont vu le film dans les années 80.

Le film est devenu kitsch par bien des aspects, comme les reflets vert vif répandu par Excalibur, mais reste étonamment pertinent par d'autres : cette dureté froide qui émanent de certaines scènes comme l'assassinat de Urien par Merdred par exemple.

En tout cas, on ne s'ennuie pas une seconde en revoyant ce film, qui donne envie de se replonger dans la filmographie de John Boorman.

 

3e

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Démineurs

SNDL'ayant raté à sa sortie, et intrigué par la déculottée que la réalisatrice Kathryn Bigelow a mis à son ex-compagnon, James Cameron, aux Oscars, je me suis dit qu'un petit vendredi soir avec les démineurs pouvait être intéressant.

Hélas, ce ne fut que très partiellement le cas.

Le point de vue choisi par la réalisatrice manque en effet à mon sens radicalement d'originalité. Le coup de la caméra à l'épaule et du montage saccadé visant à donner l'impression de la réalité a déjà été trop exploité, surtout dans les films de guerre, et ne fonctionne finalement pas.

L'effet induit de ce parti pris est également de montrer les irakiens comme une masse informe de spectateurs potentiellement dangereux : c'est sûrement assez proche de ce que ressent le GI de base, bien sûr, mais en tant que spectateur, ce n'est pas passionnant. On a vu mille fois ces scènes de guerre où le soldat est complètement perdu et ne comprend plus ce qui se passe...

Le très injustement méconnu Battle for Haditha donnait de la guerre en Iraq une vision beaucoup plus nuancée, captivante. L'impression de réalité y était confondante.

Une déception pour moi, d'autant plus que les scènes de déminage proprement dit peinent à générer un véritable suspense.

Enfin, les scènes de retour à la vie réelle sont particulièrement gnan-gnan (la Kate de Lost, Evangeline Lilly, fait une brève apparition peu convaincante) et laisse une désagréable impression finale.

Beaucoup de bruit (boum !) pour rien.

 

1e

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Lost, S6, 6ème épisode

Jorge Garcia. ABC StudiosCe billet va tenter de résumer ce que je pense du début de la dernière saison de Lost, SANS GROS SPOILERS.

D'abord, c'est peu de chose que de dire que tous les fans attendaient cette ultime saison avec la dernière impatience. Sur le site Lostpedia, ou sur Allociné, un référencement des mystères à éclaircir après 5 saisons dépassent la cinquantaine.

De plus le vent de folie qui avait couru tout le long de la saison 5 avec des sauts dans le temps incessants (surtout au début) avaient tourneboulé plus d'un repère, et fait plonger la série dans un incroyable n'importe quoi plaisamment foutraque. La série était devenue un mythe, et les spectateurs patients qui avaient tenus jusque là (supportant le visionnage d'une dizaine - ou plus - d'épisodes ennuyeux ou indigestes) se voyaient justement récompensés.

Alors autant le dire, la saison 6 ne démarre pas du tout sur les mêmes bases. Pour faire court, elle ressemble plutôt à une sorte de miroir de la saison 1. L'innovation principale (et ce n'est pas un gros de spoiler de le dire, car ce mécanisme apparaît dans les 10 premières minutes du premier épisode) consiste à montrer deux réalités (du moins le suppose t'on) parallèles : on suit à la fois nos Losties sur lîle, comme si la manoeuvre de la fin de la saison 5 avait échoué, ET aussi à Los Angeles, comme si elle avait fonctionné. Artifice spécieux de ceux qui ne savent pas choisir ou projet suprême du showrunner : c'est la première question.

Les épisodes s'enchaînent ensuite suivant une mécanique bien rôdée : alternance de temps présent et de ce que les internautes ont baptisés les "flashsideways" (car ni les termes "flashbacks" ou "flahforwards" ne correspondent à la situation). Chaque épisode est centré sur un personnage qu'on va suivre particulièrement, dans les deux réalités.

D'où la deuxième question : est ce que cette monotonie va durer longtemps ? Parce que, comme dans d'autres saisons (et la 1 en particulier), l'intérêt varie énormément suivant le sujet : un Kate-centric est évidemment 100 fois plus ennuyeux qu'un Locke-centric. La monotonie engendre l'ennui, et seul le personnage d'Hurley, et partiellement celui de Locke, permettent d'y échapper pour l'instant.

Sur les mystères, on en apprend un peu, mais ce qui ce dévoile progressivement est très prévisible, d'où une troisième question : Lost va t'il nous la jouer convenu dans la dernière ligne droite. Ce serait dommage et à mon avis étonnant.

Voilà, je m'arrête là pour aujourd'hui. Vous l'avez compris je suis très dubitatif pour l'instant, mais la série nous a habitué à de tels retournements de situation que... prudence !

 

2e

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The ghost writer

Ewan McGregor. Pathé DistributionDifficile de comprendre l'emballement médiatique autour de ce film, si ce n'est de l'analyser à la lumière de la situation personnelle de Roman Polanski.

 

L'intrigue de The ghost writer est en effet bien maigre, voir maigrichonne. Franchement, on se fout un peu de ce qui se passe et le twist final nous laisse indifférents d'autant qu'il est curieusement anti-spectaculaire (c'est un twist qui révèle une vérité moins scandaleuse que la version qui existe dans notre esprit au moment où il se produit).

 

Les arabesques du scénario, si elles ne sont pas palpitantes, sont en plus un peu tirées par les cheveux, à l'image de l'assemblage improbable aboutissant à la révélation finale.

 

Reste le reste, qui tient la route. Une mise en scène stylée (qui abuse peut-être des gros plans sur le visage d'Ewan McGregor, il est vrai assez séduisant avec sa houpette et sa naïveté tintinesque). Des décors et paysages expressifs et bien exploités. Des acteurs assez bons dans l'ensemble. Quelques scènes très réussies, par exemple celle(s) avec le ferry. L'arrivée dans l'île, et l'atmosphère étrange qui y règne, rendent la première partie du film assez plaisante.

 

Un film académique, dont j'ai du mal à dire beaucoup de mal. Ou de bien. Un peu comme les derniers Eastwood.

 

Voir les résultats du match The Ghost Writer / Shutter Island.

 

2e 



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Téhéran

Il n'y a rien de vraiment photogénique dans la ville de Téhéran. Pourtant il est vrai que les films qui y sont tournés y trouvent un supplément d'âme, comme d'une certaine manière les films tournés à New York. Ce sont peut-être ces files interminables de voitures, ses quartiers variés et sur lesquels flotte un petit quelque chose qui les unit quelque soit leur standing : une sorte de qualité de vie, de tranquillité douce, de lumière spécifique jouant avec la poussière.

Téhéran - le film, avant d'être le polar que revendique l'affiche est avant tout un portrait de la ville. La trame noire de l'intrigue (Ebrahim loue un bébé pour faire la manche, se le fait voler par une prostituée, et doit beaucoup d'argent au trafiquant d'enfant à qui le bébé appartient) s'étend tranquillement, voire paresseusement, parfois à coup d'ellipses surprenantes.

On prend donc son temps pour découvrir une belle galerie de personnages :
- la femme d'Ebrahim, enceinte
- ses amis : Madjid, un homme naïf et coquet qui va être à l'origine de la perte du bébé et en paiera indirectement le prix, et Fatah, au physique de Marx Brother, dont le mariage chiite est une des scènes les plus surprenantes du film
- une prostituée magnifique, mais qui elle aussi paiera le prix pour ne pas respecter les règles
- les différents parrains, souteneurs, trafiquant qui ont tous cette cruauté froide et manipulatrice, qui partout dans le monde broie l'innocence sans états d'âme

Le parti-pris de vérisme extrême donne au film une patine très intéressante, Haut et Courtproche du documentaire, qui n'est pas sans rappeler le néo-réalisme italien, dont il s'approche également par l'aspect inéluctable de la destinée de ses personnages. Il y a un peu du Voleur de bicyclette dans Téhéran (Tehroun en VO)

Ce n'est pas dans mes habitudes mais je vous conseille la lecture du dossier de presse sur le site du producteur Haut et court, il est très bien fait et comprend une interview passionnante du réalisateur qui décrit les conditions de tournage, très difficiles.

L'Iran sur Christoblog : cinéma iranien.

 

2e

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Une éducation

BBC FilmsLes histoires de couples (hétéro ou pas) du siècle dernier sont à la mode.

L'année dernière Sam Mendes nous donnait de tristes Noces rebelles datées fifties, et en 2002 Todd Haynes offrait un aperçu gay (contrarié) de la même époque, dans Loin du paradis. Cette année, ce sont les sixties qui mènent la danse à travers toute une gamme de Men : la série Mad Men, dont je parlerai bientôt sur ce blog, A serious man des Coen (1967) et A single man de Tom Ford (1962).

Une éducation débute en 1961, de l'autre côté de l'Atlantique, en Angleterre. Une jeune fille de 16 ans, belle, intelligente, cultivée, tombe amoureuse d'un homme de plus de 30 ans, brillant, riche, qui lui fait découvrir la vie dont elle rêve (le jazz, Paris, etc).

Va t'elle abandonner ses études et une perspective de promotion sociale pour se marier avec lui : that is the question !

Le film vaut dans sa première partie par le jeu particulièrement réussi de lui (un Peter Sarsgaard aux airs de Jack Bauer assagi) et de elle (superbe et rayonnante Carey Mulligan). Le scénario du grand Nick Hornby tient la route et nous maintient dans un état de malaise latent particulièrement réussi. Malheureusement la fin est un peu moins bonne, et la toute fin, que je ne révélerai pas, me laisse un goût d'inachevé et de "je ne sais pas comment finir".

Mais bon, il y a de la qualité anglaise là-dedans, BBC films oblige, et donc c'est pas mal du tout.

 

3e

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La reine des pommes

Difficile de ne pas se laisser attendrir par le premier film de l'actrice Valérie Donzelli. Même s'il est en grande partie raté, il fait souffler un vent frais sur la comédie française.

Le grand-père paternel de La reine des pommes pourrait être Tati, pour l'aspect dégingandé et parfois lunaire de l'actrice. Le grand-père maternel serait Trénet qui illustre le générique de début, et dont la fantaisie débridée peut servir de référence tutélaire à l'oeuvre dans son ensemble.

Dans ce schéma familial, le papa serait sans conteste Eric Rohmer, pour les dialogues à la fois précis et artificiels, et le phrasé parfois pompeux. Des oncles et tantes recommandables pourraient être recherchés du côté de Truffaut (la voix off !), ou Agnès Varda.

Pour le grand frère, Christophe Honoré s'impose : cette façon de pousser la chansonnette au beau mileu du film est un hommage direct aux Chansons d'amour, ainsi que cette façon de vouloir à tout prix ressembler à Chiaria Mastroianni en plaquant ses cheveux sur le front. Un petit frère naturel est bien entendu Emmanuel Mouret (Fais moi plaisir, Un baiser s'il vous plait) pour l'alliage mystérieux du salace, du précieux et du burlesque. Enfin la soeur est Agnès Obadia (Romaine par moins 30), soeur en gaffes, en miss catastrophe et en gourde larguée par les mecs.

Petits moyens, caméra DV à l'arrache, scènes qui tombent à plat, approximations, tout est bancal mais rien est inintéressant, témoin ce pari impossible de faire tenir au même acteur les 4 rôles masculins principaux (et ça marche).

Etonnant, et vivement le deuxième. 

 

2e

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Le mariage de Tuya

Pretty PicturesLe mariage de Tuya est le film (son troisième) qui fit connaitre le réalisateur chinois Wang Quan An à l'étranger. Il décrocha l'Ours d'or à Berlin en 2007.

L'histoire est simple et cruelle : une femme a deux enfants et un mari qui est devenu handicapé, suite à des travaux de forage de puits. Dans les conditions de survie difficiles de la Mongolie Intérieure, elle doit de remarier (se vendre, en réalité) avec un homme valide capable de l'aider dans ses tâches quotidienne. C'est la dure loi de la steppe, probablement pas très éloignée de ce qu'on connut nos aïeuls dans les campagnes françaises, il y a quelque(s) siècle(s).

Là où les choses se compliquent, c'est que notre héroïne, en accord avec son mari, souhaite tout simplement que ce dernier reste à la maison, après avoir divorcé de lui.

A partir de cette trame triste et belle, Wang Quan An déroule une petite musique douce amère, toute en finesse. Quelquefois un peu lente, mais sans excès. Les prétendants se succèdent, avec plus ou ou moins de bonheur. Des drames se nouent. Des situations burlesques nous font sourire. Au détour d'une scène, les sentiments affleurent : la survie est une chose, et l'amour en est une autre.

Yu Nan est une actrice très convaincante qui est en train de devenir l'égérie du réalisateur, puisqu'elle est à l'affiche de La Tisseuse, actuellement sur les écrans. Elle réussit à être à la fois opaque et attachante.

A voir pour le dépaysement, un décors naturel de toute beauté, et un beau portrait de femme.

 

2e

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