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Christoblog

Articles avec #j'aime

Games of thrones - Saison 7

Je n'ai jamais eu envie jusqu'à présent d'écrire sur Games of thrones, peut-être parce que le fait d'avoir lu l'intégralité des romans de RR Martin m'ont fait regarder tout le début de la série avec un oeil détaché, puisque je connaissais l'histoire.

Le fait qu'on ait maintenant dépassé depuis deux saisons la fin des romans me procure un vrai plaisir de spectateur. C'est un délice de découvrir de nouveaux évènements à chaque épisode. Et puis cette saison 7, ramassée en sept denses épisodes, me plait beaucoup.

Tout d'abord, elle concentre les principales qualités de la saga : un mix particulièrement réussi de batailles homériques (sur mer, sur terre et dans la neige, elle sont cette saison particulièrement impressionnantes) et de conversations stratégico-politiques dignes des Rois maudits. Chacun aura bien sûr son idée sur la meilleure conduite à tenir en matière de tactique militaire, d'alliance stratégique, et le spectateur, plus que jamais, peut ici se rêver stratège.

Cette septième saison brille aussi par sa façon de resserrer encore plus l'intrigue sur l'essentiel. Les personnages secondaires (même très importants) continuent à mourrir, alors que le clan Starck se reconstitue à Winterfell, comme si les saisons 2 à 6 n'étaient qu'une vaste parenthèse aboutissant à un retour aux sources empreint d'une sourde nostalgie. L'empreinte du temps qui passe a durement marqué les visages des frères et soeurs que sont Arya, Sansa, Bran, Jon (et aussi Theon, élevé avec eux). Le simple souvenir des épreuves que chacun d'entre eux a traversé suffit à glacer le sang.

On retrouve également dans cette saison 7 le pouvoir de surprendre qui fait le charme des meilleurs moments de Games of thrones. Si certaines évolutions du scénario sont facilement anticipables, d'autres sont vraiment très bien amenées (je pense par exemple à l'extraordinaire confrontation Sansa / Arya / Lord Baylish).

Voici donc la série la plus célèbre au monde bien calée pour attaquer sa saison finale, qui comptera six épisodes et sera diffusée en 2019.

 

4e 

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Centaure

Difficile de rester insensible à ce joli film kirghize, qui a l'apparente simplicité d'une fable, mais s'avère au final assez fin.

Il est par exemple tout à fait jouissif de voir le voleur-plaisir soumis à la vindicte haineuse du voleur-professionnel qui voit dans l'activité du premier un déshonneur pour la profession. 

De même les relations qu'entretient Centaure avec les femmes embrouillent aussi bien le spectateur que les autres personnages du film, et nous amènent globalement à revoir nos stéréotypes. 

Tout Centaure est ainsi parsemé de plaisirs délicats : découvrir de magnifiques paysages et de curieuses coutumes, se confronter au prototype du nouveau riche d'Asie Centrale (Brrrr) et rire parfois (les oies).

Seul bémol à mon appréciation, je trouve la fin bien trop mélodramatique et pas du tout au diapason du reste du film. 

 

2e

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Total recall

La vision la semaine dernière sur Arte de Total recall m'a laissé une drôle d'impression.

La première partie du film m'a beaucoup plu. Le scénario diabolique issu de l'imagination de Philip K Dick est brillant, l'aspect cartoonesque de l'interprétation (Schwarzenegger, et encore plus Sharon Stone) colle bien au style visuel du film. On peut juste regretter à ce stade que certains éléments de décor (notamment les voitures) vieillissent particulièrement mal - mais c'est le lot commun, et paradoxal, de tous les films de SF. Le futur se démode plus que le présent.

La seconde partie m'a semblé beaucoup moins intéressante, abandonnant plusieurs des ressorts complexes du début pour se muer en un film d'action beaucoup plus traditionnel. 

Il reste quand même sur toute la durée du film une patte Verhoeven reconnaissable, même s'il s'agit ici d'un film de commande, comme par exemple le mauvais goût assumé de nombreuses scènes gore, au nombre desquelles celle des deux bras sectionnés par l'ascenseur fait figure de joyau. 

 

2e

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Certaines femmes

Le problème avec le cinéma de Kelly Reichardt, c'est que je n'en perçois pas les intentions.

Quel intérêt de voir Michelle Williams se promener dans les bois, faire des sandwichs et boire du vin pendant que son mari regarde du sport à la télé ?

S'il s'agit de montrer sa tristesse ou de matérialiser sa solitude, alors le film est un grand pléonasme, tant la façon qu'à Reichardt de filmer (pas de musique, une image terne et sombre, des scènes qui s'étirent) souligne les thèmes abordés (incommunicabilité, solitude). La réalisatrice filme de façon dépressive et minimaliste des situations déprimantes.

Il est intéressant de comparer ce film à Moonlight. Les deux films partagent en effet un certain nombre d'éléments communs : ils sont constitués de trois parties distinctes, abordant chacune une thématique différente, et mettent tous deux en scène des personnages en difficulté dans leur relation aux autres. Alors que Moonlight est porté par une foi dans le cinéma qui lui permet de donner de sublimes plans presque joyeux dans la façon dont il sont conçus, Certaines femmes ajoute de l'ennui à l'ennui, et de la tristesse à la tristesse. 

Vingt-quatre heures après l'avoir vu, il faut tout de même que je reconnaisse que certains moments laissent une empreinte profonde : la scène du cheval dans la troisième partie par exemple. Ces quelques séquences ne rendent pas le film passionnant, mais juste intéressant.

 

2e

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Pentagon papers

La première partie du nouveau Spielberg m'a légèrement ennuyée. Ce n'est qu'a posteriori, quand l'action se déclenche véritablement, qu'on comprend que cette longue mise en place était nécessaire, notamment pour bien dessiner l'ensemble des enjeux qui pèsent sur la décision que doit prendre May vers le milieu du film.

Pour résumer, cette héritière peu légitime (elle ne doit son poste qu'au décès de son mari) doit en quelques heures prendre une décision qui engage non seulement la réputation de son journal, mais aussi son sort propre (elle risque la prison), la fin d'une longue amitié politique et l'équilibre financier de son entreprise. 

Meryl Streep assume ce rôle avec une classe impeccable et beaucoup de subtilité. Tom Hanks est très convaincant en pitbull bonhomme, et l'ensemble du casting est parfait.

Spielberg assure le boulot avec classe, à travers une mise en scène très fluide et très classique, dans la droite ligne d'un de ses films précédents, avec Tom Hanks également, Le pont des espions. Le découpage du film est assez curieux, enchaînant avec précision des mini-ellipses à répétition qui permettent au scénario de déployer d'amples parenthèses au sein d'un film d'une durée raisonnable (1h55).

Pentagon papers est un vibrant plaidoyer pour la liberté de la presse, et donc une missive personnelle à l'actuel locataire de la Maison Blanche. Si ces effets sont parfois un poil appuyés, le résultat final est à la fois instructif et plaisant.

 

3e

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La juste route

Ce n'est pas seulement parce qu'il est hongrois et tourné en noir et blanc que La juste route est un film étonnant : c'est surtout parce que le traitement de son sujet est profondément original.

Nous sommes en 1945 et deux juifs reviennent dans un village de la Hongrie profonde, suscitant toutes sortes de réaction chez les habitants, qui ont spoliés et dénoncés des Juifs durant la guerre.

Le réalisateur, Ferenc Torok, filme l'arrivée des Juifs dans la ville comme un mélange de film noir américain et de suspense à la Hitchcock : cadrage serré, forte expressivité des visages, petite musique cristalline et oppressante.  C'est un peu comme si Le ruban blanc de Haneke était croisé avec Les oiseaux

Comme toute la mise en scène est hyper-maîtrisée, le film donne le sentiment d'une réussite formelle indéniable, appliquée à un sujet qui n'est pas vraiment adapté à cette forme. On oscille durant tout le film entre intérêt pour l'histoire racontée (bien servie par la performance des acteurs, tous très bons), et observation distanciée du savoir-faire de Torok. J'ai par exemple remarqué qu'un nombre incalculable de plans comprenaient un premier plan flou induisant que le spectateur est aussi un voyeur.

Une curiosité résolument originale, qui a remporté de nombreux prix en festival, dont un dans la section Panorama de la Berlinale 2017.

  

2e

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Les heures sombres

Difficile de ne pas être intéressé par ce film si on aime l'Angleterre ou l'histoire. 

Les heures sombres retrace en effet une période de l'histoire anglaise palpitante : ces quelques jours durant lesquels on voit à la fois Lord Chamberlain démissionner, Churchill parvenir au pouvoir et Hitler envahir la France. 

Le film montre très bien, et c'est vraiment son principal intérêt, les hésitations de Churchill et l'extrême précarité de sa situation politique. A l'image de l'emblématique opération Dynamo, les décisions qu'il prend sont sur le moment assez folles, et le film montre bien que Churchill joue sa tête à de multiples reprises.

Le réalisateur Joe Wright rend une copie très propre, trop propre à mon goût. Il n'évite ni les tics maniéristes (la caméra qui s'élève à la verticale dans les airs jusqu'au ciel), ni les excès d'une direction artistique trop bien léchée (les décors et la photographie sont un peu tape-à-l'oeil). 

Le résultat, d'un point de vue visuel, donne une impression de reconstitution sortie du formol, impression renforcée par le jeu très marqué de Gary Oldman, méconnaissable sous les couches de maquillage.

La fin du film fait cependant basculer l'impression générale du côté positif : difficile de résister aux talents d'orateur de Churchill et à l'anecdote de sa visite dans le métro.

 

2e

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3 billboards, les panneaux de la vengeance

Voici un film qui possède tout ce que j'attends du cinéma : des surprises, de la beauté, des émotions.

La réussite est quasi générale quel que soit l'angle sous lequel on observe 3 billboards, mais ses deux points forts sont sans conteste son scénario et son casting.

Cela faisait bien longtemps qu'un scénario ne m'avait pas ébloui à ce point (disons Une séparation). On ne sait jamais vraiment là où le film va nous entraîner, que ce soit au niveau d'une scène (va-t-elle frapper ?) ou d'un pan entier de l'histoire générale. L'intrigue rebondit ainsi plusieurs fois dans le film sans qu'à aucun moment on ait l'impression d'être manipulé. Notre regard sur chacun des personnages ne cesse d'évoluer tout au long des développements de l'intrigue. Du grand art.

Côté interprétation, c'est du très très très haut niveau. Frances McDormand est évidemment impériale. Plutôt que d'insister comme tout le monde sur son côté John Wayne, je parlerais plutôt de l'incroyable plasticité de son visage. Woody Harrelson et plus encore Sam Rockwell sont parfaits également, mais la réussite ultime du film, c'est la farandole de seconds rôles parfaitement choisis. Je pense évidemment à Peter Dinkladge échappé de son rôle de Tyrion, mais aussi par exemple à Caleb Landry Jones dans le rôle de Red Welby.

Le talent de Martin McDonagh manipule différentes tonalités dans un ensemble parfaitement cohérent. On passe ainsi d'une série de punchlines jouissives à une scène très violente, qui peut être immédiatement contredite par une émotion profonde (les lettres post-mortem) ou un clin d'oeil tendre (le dialogue des pantoufles). Ce n'est pas le moindre des nombreux mérites du film que de fondre en un seul creuset une critique du Sud redneck, un dilemme moral de haut vol et l'ambiance d'un film noir.

3 billboards invente un nouveau genre, qu'il porte à la perfection : le mélodrame drôle et humaniste.

 

4e 

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In the fade

Constatons pour commencer que l'ensemble de la critique dite "sérieuse" descend le dernier film de Fatih Akin.

Ces critiques portent-elles sur des considérations liées aux qualités du film ? Souvent non. Les articles focalisent dans la plupart des cas sur des problèmes d'ordre politique ou moraux.

On reproche à Fatih Akin le parcours de son personnage, comme si le réalisateur affichait de facto sa solidarité avec lui (l'article de Serge Kaganski dans les Inrocks est à ce titre d'un niveau de bêtise inouï). En raisonnant aussi bêtement, on pourrait reprocher à Scorsese les errements du personnage de Taxi Driver, à Coppola le comportement des soldats de Apocalypse now, etc.  A travers cet écheveau de jugements négatifs en tout genre, c'est finalement une sorte de nouvel ordre moral qui semble émerger de façon inquiétante.

Mais je reviens au film. Katjia perd son mari et son fils dans un attentat. Qui sont les auteurs ? Le passé de son mari explique-t-il l'attentat ? Comment la justice va-t-elle agir ? Comment le deuil de Katjia peut-il s'exprimer ?

Akin répond à ses questions dans trois parties très différentes, dont la variété donne du piment au film. Personnellement, j'ai souvent été égaré par la conduite de l'intrigue, et cela m'a beaucoup plu. L'accusation de certaines critiques sur la prévisibilité des évènements me semble absolument injuste, le dénouement final possédant un véritable effet dramatique.

La prestation de Diane Kruger est exceptionnelle (prix d'interprétation féminine à Cannes) et on aura rarement ressenti avec autant d'acuité la difficulté du travail de deuil, qui irrigue le film du début à la fin. La mise en scène de Fatih Akin retrouve le niveau de qualité de ses débuts (on songe à De l'autre côté) : elle est à la fois ample et déliée.

En synthèse In the fade ne me semble pas mériter la curée dont il est l'objet. Même s'il est globalement un peu trop appliqué pour vraiment décoller, il n'est pas sans mérite : la presse américaine lui a octroyé le Golden globe de meilleur film en langue étrangère.

 

2e

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I'm not a witch

Parmi les bonnes surprises que peut réserver un Festival comme Cannes, il y a celle de se retrouver un petit matin dans une salle de la Quinzaine à regarder un premier film qui sort de nulle part (en fait de Zambie), et de dialoguer ensuite avec sa lumineuse réalisatrice.

Quel plaisir de suivre les méandres de ce conte qui s'inspire de la réalité (à moins que ce soit le contraire) et qui parvient à la fois à être drôle (les scènes avec le représentant du gouvernement) et beau (les rubans, et une myriade d'inventions).

Subtilement critique, à la limite de l'esthétisme gratuit, I'm not a witch étonne par la sûreté et la cohérence de ses choix de mise en scène. L'Afrique a définitivement besoin de ces films qui la raconte, loin des stéréotypes, dans un geste créatif parfait techniquement.

Une délicieuse surprise.

 

3e

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L'échange des princesses

De mon point de vue, Marc Dugain est le premier écrivain à vraiment réussir un film.

L'échange des princesses est en effet appréciable de bout en bout et présente de nombreuses qualités.

Le film est tout d'abord une merveille à regarder : photographie admirable sans être ostentatoire, direction artistique (costumes, décors, musique) qui parvient à donner une sensation de réalisme comme j'en ai rarement vu dans un film en costumes.

Le scénario est ensuite admirable. A travers ce double mariage croisé entre les cours de France et d'Espagne, Marc Dugain donne à voir l'absolue dureté avec laquelle on traitait les enfants royaux ou nobles à l'époque. Comme le dit un des personnages du film, les petites filles sont de la "chair à marier". De ce point de vue, L'échange des princesses réussit un miracle : il parvient à être à la fois plaisant à regarder (on sourit, on est intrigué et ému), et extrêmement noir sur le fond.

Ajouter à toutes ces qualités un casting très convaincant (la petite Juliane Lepoureau - photo - est craquante) et une découverte quasi-documentaire des rites de l'époque, et vous obtiendrez le prétexte à une excellente sortie de début d'année.

 

3e

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Downsizing

Impression mitigée à la vue du dernier Alexander Payne, qui est un réalisateur (Nebraska, Sideways, The descendants) que j'aime beaucoup.

Côté positif d'abord.

On retrouve dans Downsizing cet art de l'understatement narratif, cette façon de ne pas y toucher qui fait souvent mouche et qui peut, sous ses aspects très policés, être particulièrement cruelle.

Le film fourmille de petits détails qui émoustillent intellectuellement et qui font sourire à l'occasion (un exemple : l'explosion qui condamne de tunnel, sorte de manifeste anti-spectacle caractéristique du cinéma de Payne).

A porter également au crédit du film : une dénonciation non voilée du mode de vie américain, un sens du merveilleux qui touche parfois (la découverte des différents milieux est jouissive), une interprétation hors pair (Christoph Waltz est une nouvelle fois impayable).

Côté négatif ensuite.

On voit assez bien ce qui sera reproché au film : une nonchalance qui peut parfois ennuyer, une incapacité à installer une vraie tension dramatique, une séquence finale qui pourra paraître un peu gnangnan et enfin une morale qui manque de subtilité. Et de cruauté.

Au final, cette histoire d'hommes qui rapetissent pour le bien de la planète (ou pas) m'a plutôt séduit. L'art de la litote permanente au service d'histoires de ratés chroniques me touche toujours, à titre personnel.

Alexander Payne sur Christoblog : The descendants - 2011 (****) / Nebraska - 2013 (****)

 

2e

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The wedding plan

Comme souvent, le dernier petit film israélien à débouler sur nos écrans s'avère très bon.

Le pitch est imparable. Michal, 32 ans, est heureuse. Après avoir cherché pendant des années l'âme soeur, elle va enfin se marier dans une vingtaine de jours.... quand, patatras, son futur mari la laisse tomber.

Michal n'en peut plus d'attendre, elle prend donc une décision qui surprend tout le monde : elle maintient sa cérémonie de mariage, en espérant que Dieu lui enverra un mari d'ici là. 

Le film est très plaisant pour plusieurs raisons. Il donne déjà à voir des rites et habitudes exotiques (l'action se passe dans un milieu qui est orthodoxe, sans être ultra). Le personnage de Michal est ensuite très émouvant. Elle est pleine de force et de fragilités en même temps, parfois séduisante et parfois énervante.

Le suspense presque métaphysique qu'il entretient tout du long donne le tournis. Michal y arrivera-t-elle ? Dieu l'aidera-t-il ? Comment moi-même je peux y croire ? Evidemment, je ne révèlerai absolument rien de la fin de l'histoire, savamment préparée par un scénario qui brille par son intelligence et sa subtilité.

Une sorte de comédie romantique à la fois triste, charmante et dépaysante.

 

3e

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The Florida project

Très remarqué pour son film précédent, Tangerine, le premier bénéficiant d'une vraie distribution en France, Sean Baker était attendu pour son nouveau film.

Le résultat est très satisfaisant : The Florida project, tableau à la fois coloré, décapant et parfois émouvant, met en scène une jeune femme white trash vivant dans un motel avec sa petite fille.

Le film parvient, un peu à la façon des comédies italiennes des années 70, à manier de front plusieurs registres.

Le premier est le film d'enfants. La petite Moonee est renversante, et Sean Baker saisit parfaitement ce qui fait le sel des jeux d'enfants et des amitiés naissantes. L'aspect quasi documentaire du film (la petite fille jouant Jancey a été recrutée sur place suite à un casting sauvage) est très intéressant.

Le second registre du film est le drame qui montre la descente aux enfers progressive de la jeune femme jouée par l'explosive Bria Vinaite. Ces parties sont un peu moins convaincantes, par la faute probablement d'un scénario un peu faiblard et par le sentiment d'avoir déjà vu ce type d'enchaînement dramatique des dizaines de fois (par exemple dans Moi, Daniel Blake, dans un tout autre genre, évidemment).

Le troisième dominante du film, la plus plaisante pour moi, c'est le tableau vivant de la petite communauté vivant dans ces motels hyper-colorés jouxtant Disney World. Outre le décor extrêmement photogénique, on appréciera particulièrement la prestation tout en subtilité de Willem Dafoe. Sean Baker parvient à signer des scènes à la fois poétiques (le safari des vaches, les échassiers devant le motel), tendre (la locataire qui doit cacher ses seins) ou inquiétante (le pédophile qui rôde).

Un petit miracle chamarré, imparfait et attachant.

 

3e

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Le grand jeu

Pour ce premier film de 2018, je joue la sécurité. Pas beaucoup de surprise en effet avec le premier film d'Aaron Sorkin, mythique scénariste des quatre première saisons de A la maison blanche (et accessoirement de quelques films, comme Steve Jobs ou The social network).

On sait pour quoi on vient. Un scénario un tout petit peu alambiqué, des dialogues copieux parsemés de punchlines, et un vrai récit. 

Jessica Chastain est absolument renversante, les autres acteurs sont très bien (Idriss Elba en tête), et il est vraiment difficile de ne pas se laisser emporter par cette histoire abracadabrante - et néanmoins vraie, comme souvent. 

Sans être parfait (la mise en scène est ... hétéroclite), Le grand jeu est bon film de début d'année, qui n'a pas d'autre objet que de nous distraire en nous racontant une histoire étonnante.  

Je le conseille pour ce premier mercredi de sorties.

 

3e

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L'intrusa

L'intrusa, présenté à La Quinzaine des réalisateurs 2017 (où je l'ai vu), n'a bénéficié que d'une sortie confidentielle en France. 

C'est dommage, parce que ce film quasi - documentaire est intéressant à plusieurs titres.

Giovanna gère un centre qui accueille des enfants défavorisés dans la banlieue de Naples. Quand une des familles logée dans l'enceinte du centre héberge un assassin de la Camorra, une question se pose :  faut-il l'expulser, comme le demande les familles des parents et les professeurs (qui considèrent avec raison le centre comme une alternative à la mafia) ou pas ?

C'est ce cas de conscience qui donne tout son sel au film. Chacun aura sa propre opinion sur le sujet, et en changera très probablement au cours du film.

La manière de filmer de Leonardo di Constanzo, très naturaliste, est convaincante. Les acteurs sont tous formidables. Le film péche peut-être un peu par les propres limites qu'il s'impose, mais le résultat est tout de même assez cohérent  pour que le film puisse être conseillé.

 

2e

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Mariana (Los perros)

On avait repéré Marcela Said avec son précédent film L'été des poissons volants.  La voici de retour avec une oeuvre élégante et froide. 

Mariana, la quarantaine bourgeoise, cherche à s'émanciper de son père et de son mari. Elle se rapproche de son professeur d'équitation au passé trouble. A partir de ce synopsis minimal (mais qui résume assez bien la totalité du film), la réalisatrice tisse un écheveau de situations assez convenues, mais qu'elle tente de rendre décalées et mystérieuses : il faut par exemple un certain temps pour comprendre quel est le sujet du film.

Le résultat est assez réussi, et si le film n'est pas vraiment palpitant, il intéresse par sa maîtrise technique assez remarquable et par un goût extrêmement sûr. Les thématiques abordées (frustration sexuelle, condition de la femme au Chili, digestion des années de dictature) ne sont qu'effleurées, et c'est un peu dommage.

Le véritable intérêt du film tient finalement dans son personnage principal, joué avec brio par Antonia Zegers, tour à tour gaie, belle, énervante, triste, délurée, réfléchie, vulgaire et dépressive.

On a hâte de voir ce que peut faire Marcela Said à partir d'un scénario plus riche.

 

2e

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Le sens de la fête

Il y a dans le cinéma de Toledano / Nakache une volonté de bien-faire, un respect pour le travail des acteurs et une sorte d'aversion pour la vulgarité crasse qui place le duo dans la lignée d'une comédie française à la Gérard Oury.

Difficile en effet de ne pas comparer la prestation de Bacri à celles qu'offraient Louis de Funès ou Bourvil au réalisateur du Corniaud.

Les ressorts comiques étaient chez Oury à la fois prévisibles et délicatement efficaces, exactement de la même façon qu'ici Vincent Macaigne enchaîne les différentes variantes d'un même running gag. 

Ce n'est jamais franchement hilarant, mais presque toujours plaisant, et même touchant (la scène du concert improvisé est un parangon d'efficacité). La diversité des thématiques évoquées (l'amour du métier, le sens de la débrouillardise), l'efficacité de la mise en scène et la performance des acteurs rendent le film diablement aimable. 

On ne peut vraiment lui reprocher que deux éléments : les histoires d'amour un peu gnan-gnan et des procédés qui tournent trop facilement à la répétition. C'est peu de chose, en comparaison du plaisir simple qu'il procure.

Une excellente soirée détente.

 

2e

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Makala

On peut parier sans grand risque que le nom d'Emmanuel Gras deviendra bientôt familier aux oreilles des cinéphiles du monde entier. Makala est en effet un second film d'une puissance exceptionnelle.

Résumons brièvement ce que cet admirable documentaire nous raconte : Kabwita est un jeune villageois qui espère donner à sa famille une vie meilleure. Il fabrique du  charbon de bois (tiens, comme dans Les gardiennes), et va le vendre à la ville, après un épuisant voyage de plus de cinquante kilomètres, durant lequel il pousse son vélo chargé de charbon.

Dès les premières scènes, dans lesquelles Kabwita abat un arbre, on est comme pétrifié par le beauté des images, la qualité de la bande-son (le vent !) et la présence à l'écran de Kabwita. Quand ce dernier se retrouve sur la route, le film prend une dimension mythique et se transforme en une sorte de suspense du minimal. Le vélo tiendra-t-il jusqu'au bout du voyage ? Kabwinta parviendra-t-il à pousser son chargement au sommet de la colline ? Vendra-t-il ses sacs à bon prix ?  Evitera-t-il les bandits et les policiers corrompus ? 

En nous faisant ressentir physiquement les aventures de son personnage principal (le soleil qui tape, l'inquiétude que génère la nuit, la désorientation que procure l'arrivée en ville), Emmanuel Gras se révèle être un cinéaste d'exception. Ses plans sont magnifiques, ses images somptueuses. Le film respire le cinéma, jusqu'à une scène finale absolument bluffante. Du grand art.

 

4e 

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Un homme intègre

Les références que convoque le dernier film de Mohammad Rasoulof sont plutôt flatteuses : l'argument ressemble en partie à celui du chef d'oeuvre de Zvyagintsev Leviathan (la lutte du pot de terre contre le pot de fer, en pays corrompu) , alors que le style, à base d'ellipses délibérées, évoque irrésistiblement celui de Farhadi, en particulier dans Une séparation.

Un homme intègre est un poil moins convaincant que les films précédemment évoqués, principalement parce que l'interprétation de l'acteur principal est trop monocorde. Il constitue toutefois une pièce de choix, qui révèle son intérêt principalement dans la dernière partie. 

Pour résumer le propos sans déflorer l'intrigue plus que nécessaire, on dira que l'homme juste doit réfléchir à deux fois à ce qu'il fait (d'une part) et que l'apparence est parfois bien éloignée de la réalité (d'autre part). Vous pouvez penser qu'il s'agit là de bien communes banalités, mais le mérite de Rasoulof est d'en fournir une illustration complexe, en multipliant les fausses pistes. 

Le film a de nombreuses qualités : il dresse un tableau saisissant de l'Iran contemporain (corruption à tous les étages), joue avec la notion de bien et de mal sur un mode dostoïevkien, et bénéficie d'une qualité de photographie et de mise en scène évidente.

A ne pas rater pour les amoureux de cinéma iranien.

 

3e

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