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Christoblog

Memories of murder

Un coin de campagne en Corée, dans les années 1980.

Une jeune fille habillée de rouge est retrouvée violée puis étranglée. Puis une deuxième.

Les deux flics du coin, une brute patibulaire qui croit reconnaître un coupable en le regardant dans les yeux, et un teigneux violent et obsédé, n'arrivent pas à gérer l'affaire.

Un jeune policier de Séoul, beau et malin, rompu aux méthodes plus modernes d'enquête, vient les épauler.

Un troisième corps est découvert grâce à lui.

A partir du schéma classique du serial killer, Bong Joon-Ho réussit un film très prenant et très beau.

Bien sûr, le développement de l'enquête qui ne ménage pas rebondissements et suspense, est captivant en soi. Je ne peux pas en dévoiler grand-chose sans gâcher votre plaisir de spectateur mais sachez qu'il faut toujours écouter les histoires que se racontent les jeunes filles dans les écoles, que la radio peut se révéler une aide précieuse dans ce type d'enquête, et que les hommes portant une culotte rose se réfugient dans les mines à ciel ouvert.

Au-delà du prétexte policier, déjà très agréable, Bong Joon-Ho nous offre une mise en scène raffinée, absolument étonnante chez un jeune réalisateur dont c'est le deuxième film. Les scènes de groupe démontrent par exemple un sens du cadre et de la composition remarquable (la scène du restaurant quand le commissaire vomit). L'alliance d'un réalisme très cru par moment (les cadavres) et d'un esthétisme discret mais très présent (le ralenti sous la pluie, la façon de filmer la nature, le brio des scènes d'action, l'atmosphère magique de la mine, l'épilogue élégiaque) donne au film une beauté plastique "qui fait sens". De ce point de vue Memories of Murder rappelle évidemment le style de David Fincher et préfigure d'une certaine façon Zodiac.

Percent également dans le film le sens de l'observation sociale qui sera le terreau de l'excellent The Host, et la finesse de l'étude psychologique avec des personnages qui évoluent beaucoup de ce point de vue tout au long du film. Tous les acteurs, Song Kang-Ho en tête, sont très bons.

A noter que l'intrigue se nourrit de faits réels, et fut tourné non loin du lieux des crimes.

Un classique en puissance.

 

4e

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Kuch kuch hota hai

http://glanigan.free.fr/wp-content/uploads/Kuch_Aff.jpgKuch kuch hota hai (qui veut dire "quelque chose s'est passé") est le prototype de la comédie romantique.

Après une introduction dramatique plutôt réussie, le film glisse vers un loooong flash back (1h10 !).

L'action se passe alors dans une université où Rahul, Anjani et Tani terminent leurs études.

Anjali et Rahul sont amis, font des parties de basket endiablées que Anjali gagne toujours au grand dépit de Rahul, Anjali aime secrètement Rahul, qui aime Tani, la fille du proviseur arrivant de Londres. Dans cette partie le film développe une esthétique résolument criarde (le gars chargé des costumes semble avoir abusé de substances euphorisantes) et une approche qu'on peut qualifier de "film d'ado".

L'impression globale est de regarder une sorte de Grease indien.

Les passages chantés se font attendre un bon moment et sont assez convenus. Le plus impressionnant est d'un kitsch phénoménal (le concours interscolaire de chansons), mais comme d'habitude l'énergie des acteurs emporte la mise.

Puis Tani et Rahul se marient, et Tani meurt en accouchant d'une petite fille qui s'appelle Anjali. Tani a le temps de laisser une lettre par an que sa belle mère doit lire à Anjali le jour de son anniversaire (Au passage on peut se demander ce que retient d'une lettre une enfant de 1, puis 2, puis 3 ans, mais bon, la vraisemblance n'est pas le fort des films bollywoodiens) .

Pour son huitième anniversaire, Tani révèle à Anjali (sa fille) l'existence d'Anjali (l'ex copine de son mari). La petite fille va rechercher l'ex copine de son père, la trouver dans un camp de vacances (le costumier a du reprendre de l'ecstasy pour ce passage et en donner une dose au décorateur) et .... arrivera ce qui doit arriver dans tout bon Bollywood. Cette deuxième partie, comme dans Veer Zaara, fonctionne sur la base d'un contraste saisissant : l'Anjali garçon manqué de la première partie devient une beauté extrêmement féminine. Les scènes de retrouvailles sont assez réussies.

La complicité de l'acteur principal (notre ami Shah Rukh Khan) et de la ravissante et expressive Kajol crève l'écran. Les seconds rôles sont bons aussi, surtout dans le registre grotesque. C'est évidemment très surjoué, mais les 3 heures et quelques passent facilement, ce qui me parait a posteriori toujours fascinant.

Le film a raflé toute une série de prix à travers l'Inde et l'Asie, il a je crois été le premier film indien a entrer dans le top ten britannique.

Un bon moment, toutefois en retrait pour moi par rapport à l'intensité dramatique et la magnificence des décors et chansons de Veer Zaara. 

 

2e

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Les plages d'Agnès

Agnès Varda. Les Films du LosangeAvec un peu de retard je vois Les plages d'Agnès.

Je passe un assez bon moment sans que le film ne bouleverse ma hiérarchie 2008 (ouf !).

Pour dire vrai, en inventant un nouveau concept, l'autodocumentaire, Agnès Varda se place un peu en dehors de toute compétition.

Son habile patchwork intéresse en montrant à la fois l'histoire d'une famille, la vie d'une artiste, des fragments d'histoire culturelle (Morrison, LA), des lieux géographiques emblématiques (Venice, Sète, Paris), des gens (le ferrovipathe !!), des installations de plasticienne pas inintéressantes (les pommes de terre, les photos de théatre, la maison faite de pellicules), et surtout, oui surtout, car c'est vraiment le moment ou le film devient film, une histoire d'amour et de mort (avec Jacques Demy).

Est ce un film ? Peut-être pas. Est ce du cinéma ? Oui, sûrement.

 

3e

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Lola

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/91/04/14/20126855.jpgPremier film et premier bijou. Nous sommes en 1961 et la nouvelle vague vient juste de démarrer, A bout de souffle est sorti en 1960, les 400 coups en 1959. Godard a présenté son copain Jacques Demy au producteur De Beauregard qui va financer Lola (comme le raconte Agnès Varda dans Les plages d'Agnès). Le film est totalement inséré dans son époque : Demy y paye un tribu direct à Max Ophuls auquel Lola est dédicacé (en souvenir de Lola Montés ?), l'actrice Elina Labourdette renvoie au cinéma de Bresson, le directeur de la photo (Raoul Coutard) est celui d'A bout de souffle, le personnage principal masculin de Lola dit qu'il avait un seul ami , Michel Poiccard, qui s'est fait descendre (A bout de souffle encore !), etc...

A la fois dans son époque donc, et déjà porteur de tout l'univers Demy. Dialogues ciselés, mise en scène élégante et virtuose, importance des femmes.

Marc Michel joue clairement un alter ego de Demy, désanchanté mais/et enthousiaste. Mais ce sont surtout les personnages féminins qui emplissent le film. Lola d'abord, extravertie, légère, dont on se dit que le destin va être tragique et puis non, car Demy à l'art de la pirouette heureuse (ou qui semble heureuse pour être plus précis), Cécile ensuite, qui est Lola jeune, et enfin la mère de Cécile, qui est Lola plus vieille, ou disons une autre Lola qui aurait évolué différemment si les circonstances de la vie s'y étaient prêtées (elle fut danseuse comme Lola).

Le film entrecroise les destins, comme Demy savait le faire, les personnages se croisent sans se voir, il échangent ou répétent les mêmes répliques ("on part pour Marseille, on arrive en Argentine"), traversent les mêmes situations (Cécile et le soldat revivent à la fête foraine ce que Lola, qui s'appelle en réalité Cécile, a vécu avec Michel). Et à la fin tout le monde part, ou veut partir, d'une façon ou d'une autre à Cherbourg.

Le film donne une double impression : celle de pétiller irrésistiblement comme du champagne, et celle d'être parfaitement contrôlé. A certains moments il devient solaire par la grâce conjuguée du jeu d'acteur, de la mise en scène et de la photo. C'est le cas quand Anouk Aimée et Marc Michel tourne autour du passage Pommeraye, lors de la fête foraine ou lorsque Lola chante.

Nantes est enfin magnifiquement filmée (les grues du port, la place Graslin, le Katorza qui est toujours là 50 ans après), ville ouverte, où chacun rêve de partir. Le temps qui s'écoule est filmé de façon sensible, alors que le temps de narration est court (3 jours), il donne l'impression de voir des destinées entières se nouer et se dénouer.
Lola et Roland Cassard reviendront dans d'autres films, car Demy, comme Balzac, conçoit son oeuvre comme un tout.

Tout l'univers de Demy est présent dans Lola, mêlant comme nul autre légéreté et gravité. 

 

Tout Demy sur Christoblog.

 

4e

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L'étrange histoire de Benjamin Button

Rarement un film m'aura inspiré des sentiments aussi partagés que celui-ci, pour finalement aboutir à une opinion résolument positive.

L'histoire est limpide bien qu'invraisemblable : un homme nait vieux et rajeunit au fil du temps.

A partir de cette trame ténue et fragile tirée d'une très courte nouvelle de FS Fitzgerald (25 pages) David Fincher tire un film fleuve de 2h44.

Ce qui est de remarquable et étrange dans le film est le rapport qu'il entretient aux temps : temps de la projection, long, pas ennuyeux, confortable comme de vieilles pantoufles, temps de la narration, 80 ans, à l'envers, ou à l'endroit suivant le point de vue, ou symétrique, ou même parallèle si on considère l'idée géniale d'installer le jeune vieux dans une maison de retraite, temps de l'appropriation, car les sentiments qu'inspirent le film ne sont pas les mêmes pendant la projection, en en sortant, et le lendemain.

Cette faculté exceptionnelle qu'à David Fincher de rendre sensible la fine trame du temps m'avait enthousiasmé dans Zodiac, son meilleur film à mon avis. Ici, elle est dévoilée avec moins de finesse, plus d'emphase. Mais probablement est-elle susceptible de rencontrer un plus large public.

Quant à la réalisation, d'une curieuse façon, elle résiste à l'analyse : elle est volontairement "old school" par moment (les coups de foudre, l'horloge) et à d'autres (le bateau, quelques paysages, une vision des docks, les scènes avec le pygmée...) on se demande si son aspect vieillot est assumé ou pas.

J'ai détesté le non-jeu de Brad Pitt sur le moment, puis à la réflexion je me dis qu'il était difficile de jouer le personnage autrement. Et puis toutes les manipulations numériques en "motion capture" peuvent expliquer le manque d'expressivité de l'acteur (ou de ce qu'il en reste).

Cate Blanchett m'a par contre émerveillé sur ses premiers plans (elle est d'une vivacité incroyable), puis m'a énervé quand elle "allume" Pitt dans une des scènes les plus lourde du film, puis m'a semblé exceptionnellement émouvante dans la dernière partie du film, où la mélancolie le dispute au vertige (voir Brad Pitt plus JEUNE qu'il n'est est encore plus troublant que de le voir plus vieux).

En somme, le film tiraille le spectateur entre des sentiments contradictoires, des sensations étranges, comme un grand fleuve boueux dont les tourbillons sont à la fois nettement dessinés et totalement incompréhensibles.

 

3e

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Espion(s)

Guillaume Canet et Géraldine Pailhas. Mars DistributionOui, bien sûr il ne s'agit que d'un thriller français qui veut faire dans le réalisme. Donc, forcément ça ne peut pas aller bien loin.

Cette petite pique étant lancée, Espion(s) n'est pas un mauvais film.

Il commence sur les chapeaux de roue avec une immersion anxyogène dans le monde des bagagistes de Roissy, s'enlise un peu dans les méandres d'une intrigue prévisible
et londonienne, ménage quelques beaux portraits : un Guillaume Canet mal dégrossi qui ressemble de plus en plus à Jean Gabin, une Géraldine Pailhas à son meilleur niveau qui rend crédible une histoire d'amour naissante et des douleurs anciennes, un H Girardot parfait en méchant froid et manipulateur.

Par une pirouette dont le cinéma a le secret il se trouve que les deux amants se retrouve dans une salle projetant le sublime film Veer Zaara dont vous trouverez la critique quelque part ci dessous, et en plus il s'agit de la scène absolument génialissime dite "de la danse de Lodi".

Quand on connaît l'histoire d'amour intense et tragique de ce film indien, difficile de ne pas y voir l'écho de celle vécue par les deux personnages d'Espion(s).

La mise en scène de Saada est épurée, agile, assez convaincante.

Pas un mauvais moment, pas un chef-d'oeuvre non plus.  

 

2e

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