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Christoblog

Imagine

En cette amorce de réveillon, c'est le moment de parler d'un film qu'aucun de mes lecteurs n'a vu (si je me trompe, laissez moi un commentaire).

Imagine est le troisième film d'un réalisateur polonais prometteur : Andrzej Jakimowski (son deuxième film, Un conte d'été polonais, a remporté plus de trente prix dans différents festivals).

L'action se passe dans un monastère lisboète qui accueille des enfants aveugles. Un nouveau professeur arrive, non-voyant lui aussi, et utilise des pratiques pour le moins iconoclastes : il encourage les enfants à prendre des risques, à utiliser tous leurs sens et lui-même marche sans canne, au risque de se blesser.

Bien sûr, on voit tout de suite dans quelle veine poourrait se contenter de loger le film : Cercle des poètes disparus en mode mal-voyant, apologie de la liberté et exaltation des sens. D'autant que le jeune professeur, fort mignon, se lie avec une jeune fille très jolie.

Là où le film surprend et excite notre intérêt, c'est quand il vire vers une direction plutôt inattendue : le jeune professeur est-il un charlatan ? Et en quoi la liberté apprise d'un charlatan serait moins précieuse qu'une autre ? 

Le film devient alors tortueux et captivant. 

On pourra être un peu décontenancé par l'image très propre, les lumières un peu artificielles (le film baigne dans une sorte de réalisme magique) et les choix de mise en scène très formels. Ce fut mon cas, avant que je comprenne les parti-pris audacieux du réalisateur, en particulier cette façon d'exploiter toutes les ressources du cadrage et de la bande-son pour nous faire ressentir les sensations des protagonistes.

Une curiosité à découvrir.

 

2e

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La French

Un film qui fait vieux, avec des acteurs pas tout jeunes, pour une histoire des années 70/80. 

La French est un produit hors d'âge, qui joue sur tous les tons la po(au)se vintage.

C'est franchement pas affriolant, comme un dimanche après-midi chez Drucker qui enquêterait sur le milieu marseillais.

Dujardin n'est pas très bon (mais peut-il l'être ?), Lellouche est un peu plus crédible.

A porter au crédit du film : de très bons seconds rôles, un caractère documentaire instructif pour les jeunes générations, une jolie photographie de Marseille. A décharge : le reste.

Engoncé dans sa mollesse intrinsèque, le film parvient à susciter plus l'ennui curieux que le dégoût, ce qui n'est déjà pas si mal.

 

2e  

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Whiplash

Dans Whiplash, le héros est un salaud. C'est sûrement l'aspect le plus éblouissant de ce film par ailleurs fort aimable. 

Les poncifs ne manquent pas pour évoquer la fougue énergisante qui traverse le film de part en part : plaisir (mais ouch, quelle exigence ma bonne dame), récit initiatique de passage à l'âge adulte en mode Full Metal Baguette, thriller au rythme haletant. Mais Damien Chazelle parvient à nous faire rire des blagues sexistes et homophobes du sergent instructeur, c'est son véritable talent.

Le film se brise en son milieu, rebondissant comme ces balles hyper réactives dont on ne sait où elles vont finir.

Qui gagne ? Qui perd ? Dans ces rebondissements et retournements superbement rythmés, Damien Chazelle nous embrouille avec délice. On jouit de l'emberlificotage du scénario, et de la sobre efficacité de la mise en scène (cf la scène du camion par exemple).

Tonique, jouissif, énergique : un Grand prix à Sundance qui sort de l'ordinaire et une belle découverte (encore !) de la Quinzaine des réalisateurs à Cannes 2014.

 

4e

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Top 10 2014

1 - Winter Sleep / Nuri Bilge Ceylan : j'écris depuis plusieurs années sur ce blog que Ceylan est l'un des plus grands cinéastes vivants, et je ne suis désormais plus le seul à le penser 2 - Mommy / Xavier Dolan : le jeune prodige québécois canalise enfin son incroyable énergie créatrice 3 - Les trois soeurs du Yunnan / Wang Bing : le film le plus accessible de cet exceptionnel documentariste  4 - Boyhood / Richard Linklater : une vie sous nos yeux 5 - Bird people / Pascale Ferran : la magie faite cinéma  6 - Leviathan / Andrei Zviaguintsev : la Russie éternelle, grinçante, sentimentale et épique 7 - Les combattants / Thomas Cailley : la révélation française de l'année 8 - Nebraska / Alexander Payne : de l'intelligence dans tous les plans 9 - Sils Maria / Olivier Assayas : Juliette Binoche et Kirsten Stewart au sommet 10 - Pelo Malo / Mariana Rondon : un Tomboy vénézuélien

Les articles de Christoblog relatifs à chacun de ces dix films sont accessibles en cliquant sur les titres.

 

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Charlie's country

David Gulpilil, l'acteur principal de Charlie's country, est un vieil aborigène au charisme incroyable, qui tient le film sur ses frêles épaules.

Le première partie du film de Rolf de Heer se déroule dans le bush : elle est à la fois contemplative et amusante. Le film met alors très bien en évidence comment nos lois ne "collent" pas aux valeurs des aborigènes, et du coup, c'est l'ensemble de nos certitudes qui sont remises en question. 

Quand Charlie tombe malade, puis qu'il découvre la ville, le ton change du tout au tout. D'une atmosphère mystique et panthéiste, on passe sans ambage aux ravages de l'alcool : cette partie m'a semblé plus démonstrative et moins intéressante que la précédente.

Charlie's country fournit une vision immersive et détaillé de la condition aborigène, et il rappelle d'une façon brutale une réalité qu'on a tendance à oublier : en Amérique et en Océanie, les blancs ne sont finalement pas chez eux.

 

2e

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Marie Heurtin

On ne se souviendra pas éternellement du film de Jean Pierre Améris, mais il me faut bien avouer que Marie Heurtin est à la fois édifiant, instructif, bien joué et correctement réalisé.

On suit la destinée d'une jeune sourde aveugle, quasiment élevée dans un état sauvage, dans la France rurale du XIXème siècle. Et on s'intéresse à l'opiniâtreté presque maladive avec laquelle Soeur Marguerite va tenter d'apprendre à Marie cette évidence qui n'en est pas une : chaque chose possède un nom.

Isabelle Carré est une nouvelle fois stupéfiante dans ce rôle à sa mesure, alors que la jeune Ariana Rivoire est aussi très bonne dans le rôle de Marie Heurtin.

Le film est un tire-larme de première bourre, du genre : "Attention, nous prévenons qu'aucun spectateur ne sortira de la salle sans avoir les yeux rougis, et/ou en enlevant discrètement ses lunettes pour se gratter le haut de la joue, et/ou sans voir sa poitrine se lever compulsivement durant certaines scènes du film".

Le scénario ménage peu de surprises, et certaines scènes commandent un peu trop ouvertement les émotions, mais bon, ne boudons pas trop notre plaisir de simple spectateur : Marie Heurtin nous fait sortir de la salle de cinéma moins idiot qu'on y est entré. Et en plus, le film est projeté à toutes les séances en version sous-titrée pour les mal entendants, une initiative salutaire et pédagogique.

 

2e 

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Qu'Allah bénisse la France

Ce soir 2 décembre, salle comble à l'UGC Lille pour le premier film d'Abd al Malik. 

Avant d'en venir aux réactions de la salle, mieux vaut le dire tout de suite : le film est une nouvelle preuve que les bons sentiments ne font pas les bons films.

Rien à redire quant aux intentions d'Abd al Malik : montrer les jeunes de la cité, l'islam et le rap (quel programme !) sous un jour différent, et fondamentalement plus optimiste. Tiré de son autobiographie romancée, le film porte la forte d'empreinte de son créateur et de ses idées : la France républicaine, la France des idées et des grands intellectuels, cette France là peut sauver un jeune délinquant, fut-il strasbougeois d'origine congolaise.

En guise d'illustration à ces nobles propos, le film ne propose qu'une série de poncifs cinématographiques d'un intérêt très médiocre : plans approximatifs, ellipses brutales qui sentent le manque de moyens, dialogues pauvrement écrits, manque de rythme, acteurs parfois peu inspirés, romance à l'eau de rose. Difficile de descendre plus le film qui a un fond sympathique, mais disons pour être clair que je ne suis pas sûr qu'il ait trouvé un chemin en salle si le réalisateur ne s'appelait pas Abd al Malik.

Lors des questions en fin de séance, le réalisateur n'a laissé que quelques miettes aux deux acteurs présents, trustant la parole et assénant son message républicain devant un public applaudissant à chacune de ses interventions. La surprise vint comme souvent d'un spectateur qui s'interrogea sur le moment précis lors duquel le film passe du noir et blanc à la couleur .... alors que ce dernier est intégralement en noir et blanc ! Grand moment de solitude pour le spectateur (daltonien ?), mais révélateur du rapport que chacun d'entre nous peut entretenir avec l'écran de cinéma !

A la toute fin, à la demande d'une spectatrice, Abd al Malik a offert un petit slam à la salle, et tout à coup, il y eut plus de magie dans l'air que pendant toute la soirée.

 

1e 

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Timbuktu

Encensé par la presse francophone lors du dernier Festival de Cannes (et curieusement pas du tout par la presse anglophone) Timbuktu est un film surprenant et attachant.

Vu son sujet, je craignais principalement deux choses : une démonstration lourdaude et un misérabilisme social. Le film surprend totalement de ce point de vue dès son ouverture par la qualité somptueuse de ces images, son humour piquant et léger, sa joie de vivre communicative.

Abderrahmane Sissako fit preuve d'une intelligence peu commune en montrant dans un premier temps les islamistes comme des pieds nickelés un peu ridicules. L'enchaînement des scènes drôles enchantent le spectateur : l'islamiste qui drague, celui qui fume et qui danse, la marchande de poisson et les gants, la musique introuvable, la partie d'airfootball, les remontrances du vieil imam...

On pressent les failles béantes qui vont fissurer le film dans sa deuxième partie, explosant comme des bombes d'avilissement successif. Le film montre en chemin beaucoup de choses, par exemple le fait que les envahisseurs sont étrangers aux coutumes du pays. 

Timbuktu a des airs de conte, oscillant de l'humour le plus franc (extraordinaire confession du rappeur) à la cruauté la plus sombre (la lapidation). 

Je lui reproche juste une fin un peu décousue et certains rares moments de naïveté, heureusement compensés par une photographie sublime.

A voir.

 

3e

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Astérix - Le domaine des Dieux

Rien de négatif à dire à propos de l'adaptation d'Uderzo / Goscinny par Alexandre Astier.

Ce dernier reste bien sage et respectueux de l'original, en y ajoutant sa petite patte personnelle, comme par exemple lorsque les romains attaquent le village. A ce moment-là, le centurion Oursenplus prend les accents irrésistiblement drôles d'Arthur dans Kaamelott ("Mais c'est pas vrai !").

Sinon, difficile d'identifier d'autres signes distinctifs, sauf pour les fins connaisseurs qui reconnaîtront quelques répliques culte de la saga arthurienne de sire Astier (le "C'est pas faux" de Franck Pitiot par exemple).

En règle générale, les acteurs qui prêtent leur voix aux personnages sont plutôt convaincants (Roger Carel, Alain Chabat, Elie Semoun, Florence Floresti, Lionel Astier, etc), à l'exception notable de Guillaume Briat qui ne m'a pas plu du tout dans le rôle d'Obélix.

La mis en scène de Louis Clichy est propre et plaisante (j'ai vu le film en 2D) avec d'agréables jeux de lumière. 

Finalement, un des aspects les plus agréable du film est de remettre en lumière la pertinence du scénario de ce volume, particulièrement malin en ce sens qu'il brasse beaucoup de problématiques importantes  : l'acculturation par la colonisation, le confort contre la tradition, l'expansion du tourisme de masse.

Le plaisir qu'on éprouve à la vision du film tient donc à la fois à la densité de son propos et à la vivacité des dialogues. Une bonne soirée.

 

2e 

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White dog

Sensation de la section Un certain regard au dernier festival de Cannes, le film de Kornel Mundruczo est une oeuvre originale.

Les premiers plans du film sont intrigants et impressionnants. L'évolution de l'histoire est dans un premier temps palpitante : une jeune fille punchy, un père dépassé, un chien filmé comme un être humain. On se demande bien vers où le film va aller (film d'horreur, chronique socialisante, drame familial) et cette incertitude est délicieuse.

Quand le film tourne franchement au (attention, la suite de ma critique contient de graves spoilers) revenge movie à la sauce canino-fantastique, le regard du spectateur se trouble. Que suis-je en train de regarder exactement ? Un film à thèse sur les rapports d'exploitation homme/animaux ? Un film apocalyptique ? Une chronique imagée du passage de l'enfance à l'âge adulte ?

On se perd un peu dans les intentions du réalisateur, et White dog semble tout à coup too much : débordant d'intentions et de gestes cinématographiques, à l'image de ce dernier plan gratuitement spectaculaire. Il ne sert à rien, ne se raccorde à rien de bien logique, mais est profondément marquant.

Un cinéaste à suivre.

 

2e

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Mr Turner

On ne peut pas dire que je sois un grand fan du Mike Leigh british, à la mode Another year.

Aussi ai-je été plutôt agréablement surpris par ce biopic, qui est plus qu'un biopic.

Pourtant le film commence assez faiblement : l'acte de peindre est survolé, les personnages sont ennuyeux, la photo carrément kitsch. Timothy Spall (prix d'interprétation masculine à Cannes) surjoue dans un mode porcin, avec force grommellements et ahanements.

Tout cela ne présage rien de bon, jusqu'à ce que la folie dévorante pour la peinture n'envahisse progressivement l'écran, écrasant famille, amour, santé. Turner, homme du passé par son éducation et sa constitution, devient un homme d'avenir par son art. Il invente (presque) l'abstraction, observe avec gourmandise un nouveau monde naître avec ses daguerréotypes, ses trains et ses machines à vapeur.

La grandeur du film se situe exactement dans cette contradiction : alors que tous meurent autour de lui (père, fille, soeur, M Booth, enfant de Haydon, Noirs sur le bateau, noyée...) la modernité surgit partout, et seul Turner semble la distinguer. Le peintre est un visionnaire qui perçoit seul ce que les autres ne sont pas encore capable de voir. 

 

3e

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