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Christoblog

Squid game

Au-delà de l'effet de scandale dû à l'impact de la série dans les cours d'école et de l'effet de hype provoqué par le fait que la série est la plus regardée de l'histoire de Netflix, que vaut vraiment Squidgame ?

Pour commencer, la série est extrêmement solide du point de vue scénario. La partie jeu mortel est très habilement menée : on est en permanence surpris, que ce soit par la nature des jeux, leur déroulement ou leurs implications morales.

Mais Squid game surprend surtout par ses à-côtés narratifs. Une grande majorité des trois premiers épisodes se déroule en dehors de l'île, et la façon dont la série décrit les travers de la société coréenne est très intéressant. Les relations entre les personnages, le basculement en milieu de série qui permet de comprendre le but des jeux, les péripéties concernant les gardiens : tous ces éléments renouvellent constamment l'intérêt.

La mise en scène et les moyens de la série impressionnent par leur démesure. Comme beaucoup de productions coréennes, Squid game est, de par son montage alerte et son identité visuelle, une réussite pleine d'efficacité qui n'a rien a envier aux productions américaines. La série atteint un haut niveau de réalisme, ne barguignant pas sur la cruauté et le sang, ce qu'une production US n'aurait pas pu se permettre.

Enfin, les acteurs sont tous et toutes formidables. La composition de Lee Jeong-Jae est en particulier saisissante dans sa variété.

Ce genre de série à suspense est une course en avant de surprises et d'effets qui peut se diluer ou se perdre au fil des épisodes dans de la surenchère irréaliste ou un délitement progressif. Squid game évite également cet écueil et négocie assez bien le piège de la dernière demi-heure, répondant avec une certaine élégance à plusieurs  questions, et en laissant irrésolues plusieurs autres, ce qui laisse augurer une seconde saison que l'immense succès mondial de la série rendait de toute façon indiscutable.

 

3e

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Homeless

Découvert lors du premier Festival du film coréen organisé à Nantes en 2021, ce court film (1h22) est une réussite.

Le jeune réalisateur Lim Seung-Hyeun s'intéresse à un sujet peu traité dans le cinéma coréen : les jeunes couples qui ne gagnent pas assez d'argent pour pouvoir se loger.

Le tableau dessiné est d'abord saisissant : la famille dort, comme d'autres, dans un magasin qui loue ses locaux pour la nuit. Quand, par hasard, meurt une vieille dame sans famille à qui le père a l'habitude de livrer ses repas, la tentation est grande de s'installer dans la maison.

Est ce que les dilemmes de conscience empêcheront la famille de profiter de l'opportunité ? Seront ils  repérés ? Et que faire du corps encombrant ?

On pense devant ce film modeste et délicat au formidable Un air de famille de Hirokazu Kore-Eda, l'amplitude en moins. Il y règne le même type de subtilité douce et les comédiens sont formidables.

Malheureusement, il est fort peu probable que le film sorte en France.

 

2e

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Olga

Olga réalise une double performance : il est à la fois un tableau fidèle et saisissant du sport de haut niveau, et un portrait de jeune fille très sensible.

Du premier point de vue, le film est un exploit comme on en voit peu. Bien souvent, le sport est mal représenté au cinéma : il est au pire caricaturé, au mieux esquissé à l'arrière-plan.

Ici on ressent physiquement le niveau d'effort et la maîtrise technique que nécessite la pratique de la gymnastique à un haut niveau. Le fait que les actrices soient elle-mêmes des gymnastes des équipes nationales (ou réserve) de l'Ukraine et de la Suisse expliquent bien sûr l'incroyable sentiment de réalisme que dégage le film.

Mais Olga n'est pas seulement un formidable film sur le sport, c'est aussi un très beau portrait de jeune fille. Nastya Budiashkina est à la fois solide comme un roc et vibrante comme une corde de violon. L'idée de confronter son immense volonté de performer à son amour de son pays natal est un ressort dramatique très puissant. 

La mise en scène est formidable à tout point de vue : photographie splendide, sens du montage spectaculaire (l'accident), brillant travail sur le son (la compétition à l'Euro), formidables transitions entre plans. 

A ne pas rater, un des sommets de l'année.

 

3e

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Haut et fort

Lorsque j'ai découvert le nouveau film de Nabil Ayouch à Cannes, je l'ai trouvé bien léger, surtout en comparaison des oeuvres précédentes du cinéaste marocain (Much loved, Les chevaux de Dieu).

Si le personnage de l'éducateur est sympathique, le canevas que propose le film est simpliste et a été vu mille fois : un groupe rejette le prof trop sévère, puis l'adopte, puis construit quelque chose ensemble, mais le chemin est bien difficile ma pauvre dame.

Les péripéties ne sont qu'anecdotiques, l'ancrage social est survolé (on aurait envie d'entrer plus avant dans les familles) et les scènes de rap sont inoffensives. Bref, le film est très superficiel et vaut principalement par les attachants portraits de jeunes qu'il dessine à grands traits.

Depuis, j'ai appris que le centre culturel est celui créé par le réalisateur, ce qui a ajouté à mon malaise. Haut et fort m'apparaît désormais comme une sorte d'auto-promotion. 

Je ne le conseille donc pas vraiment, d'autant plus qu'il y a beaucoup de très bons films sur les écrans en ce moment.

Nabil Ayouch sur Christoblog : Les chevaux de Dieu - 2012 (***) / Much loved - 2015 (****)

 

2e

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Memoria

Memoria est sûrement le film le plus abordable de son auteur, Apichatpong Weerasethakul.

Il possède d'abord une intrigue à peu près digne de ce nom : une scientifique entend parfois un bruit mystérieux, une sorte de bang, qu'elle seule semble percevoir. Elle va chercher à percer ce mystère.

L'histoire se développe cahin-caha, à coup de tentative d'explications scientifiques (un peu) et de quête mystique (beaucoup). Le personnage principal rencontre une sorte de médium, qui l'aide à franchir les frontières entre notre monde réel et celui d'où provient le bruit (il est le disque dur, elle est l'antenne, dit une des réparties du film).Tilda Swinton sert parfaitement le cinéma du Thaïlandais, étirant sa longue carcasse dans des villes et des paysages sud-américains magnifiquement filmés, comme toujours.

Le film est donc une longue rêverie déambulatoire au charme persistant. Il offre des scènes saisissantes, dont celle qui fournit au final l'origine du bruit entendu, d'une beauté à pleurer. Le moindre coin de rue est magnifié par la caméra du cinéaste palmé : c'est probablement ce qui se fait de plus beau d'un point de vue formel dans le cinéma contemporain.

Attention, on est tout de même chez Weerasethakul, donc mieux vaut être préparé et bien réveillé, car les plans sont longs et souvent fixes, les dialogues épars et le propos globalement assez abscons.

La meilleure introduction pour qui souhaiterait découvrir le cinéma de "Joe".

Apichatpong Weerasethakul sur Christoblog : Tropical malady - 2004 (***) / Oncle Boonmee - 2010 (*) / Cemetery of splendor - 2015 (**)

 

3e

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L'humanité

Incroyable deuxième film de Bruno Dumont.

Rarement un film m'aura à la fois autant dérangé, surpris et impressionné. 

Dérangé, parce que le début du film est profondément perturbant : un enchaînement d'images qu'on ne comprend pas, un personnage principal lunaire et mutique qui n'attire pas la sympathie, des images crues de cadavres et de sexe, une façon de filmer qui se plaît à jouer avec nos nerfs, entre naturalisme brut et stylisation à outrance.

Surpris, parce que la situation d'inconfort que le début du film installe se mue progressivement en interrogations : Que nous raconte exactement le film ? Qui a commis le crime abominable qui ouvre le film ? L'enquête de notre enquêteur emprunté aboutira-t-elle ? Quel est finalement mon rôle de spectateur : comprendre, deviner, ressentir, critiquer, imaginer ? Est ce que film va oser pousser à bout sa logique ?

Impressionné, parce qu'au final Dumont parvient à hausser progressivement le ton de son film pour aboutir finalement à une sorte de thriller métaphysique au goût de cendre. Les personnages endossent au cours du film des habits de nature presque divine, jusqu'au geste aberrant et christique qui clos cette incroyable aventure nordiste.

A la surprise générale, le film a obtenu Grand Prix, Prix d'interprétation masculine et féminine au festival de Cannes 1999 et a lancé la carrière de Bruno Dumont. L'acteur principal n'a jamais tourné dans un autre film. Au vu de sa prestation hallucinée, on comprend pourquoi.

 

4e

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Aline

Je ne me suis jamais intéressé à Céline Dion, ce qui est peut-être un tort. Je suis donc arrivé complètement vierge, et à vrai dire assez dubitatif, devant le film de Valérie Lemercier. 

Une des qualités d'Aline, c'est de commencer par un savoureux tableau de famille québécoise. Cette première partie est jouissive et extrêmement drôle. Elle met le spectateur dans d'excellentes dispositions, même s'il est circonspect, comme je l'étais.

Lorsque le talent de la petite fille commence à vraiment se manifester, le film prend un tour plus classique, commun à tous les biopics musicaux récents : premiers exploits, détection par un mentor, bifurcations hasardeuses, puis explosion progressive et son cortège d'interrogations et de risques. 

La particularité d'Aline, c'est qu'il n'est pas question ici d'addictions ou de déviances diverses, mais d'un autre type de problème : le curieux isolement dans lequel Aline se cloître plus ou moins volontairement. La description des relations entre Aline / Céline et Guy-Claude / René est aussi très belle, et pour tout dire émouvante.

Le film se concentre sur la personnalité et les relations de Céline Dion. Il ne s'intéresse que de très loin à son art et pas du tout au processus créatif qui aboutit aux fabuleux spectacles qui la rendront célèbre : autant le savoir avant d'entrer dans la salle si on est fan.

La performance de Valérie Lemercier est confondante. L'utilisation du deep fake pour plaquer son visage sur un corps d'enfant est bluffante. Tout le casting est formidable et la prestation de la doublure voix, Victoria Sio, est remarquable.

Je vous conseille ce bon film, à regarder au premier degré, qui vous intéressera, vous fera rire, et vous émouvra à coup sûr.


3e

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Gazette du Arras Film Festival 2021

11 novembre

Première journée très cannoise à Arras cette année. Je commence côté Quinzaine des réalisateurs avec Ali & Ava (5/5), de Clio Barnard, dont j'avais adoré le premier film, Le géant égoïste. J'ai également beaucoup aimé celui-ci. Une sorte de Ken Loach en mode feelgood movie, extrêmement sensible et d'une belle densité. Le festival commence très bien.

Je continue avec Où est Anne Franck ! (3/5) d'Ari Folman, qui était lui présenté en sélection officielle en juillet sur la Croisette. Ari Folman rend bien hommage à l'incroyable vivacité intellectuelle d'Anne Franck, et le film est vraiment appréciable quand l'imagination visuelle du cinéaste israélien entre en résonance avec celle d'Anne Franck. La partie du film qui se déroule dans le monde d'aujourd'hui est plus faible, et le parallèle entre nazisme et traitement des migrants est pour le moins discutable. A conseiller tout de même pour les enfants et les ados. 

Enfin, Piccolo Corpo (4/5) avait été choisi par Charles Tesson pour la Semaine de la Critique. Ce premier film de Laura Samani est d'une beauté formelle remarquable. L'actrice principale, Celeste Cescutti, formidable dans le film, est présente dans la salle et nous parle de sa région natale, le Frioul, magnifiquement filmée dans ce très beau film. Un très beau moment dans la salle 2 du Casino.

Du fait de la présence de Claude Lelouch à Arras, je tente en soirée Salaud, on t'aime (3/5), qui date de 2014. C'est du Lelouch tout craché, incroyablement mauvais si on s'en tient à des critères objectifs. Mais finalement, je me suis laissé mener par le bout du nez, captivé par les yeux bleus de Johnny et le sourire éclatant de Sandrine Bonnaire.

 

12 novembre

La journée commence avec la compétition. Vera dreams of the sea (3/5) confirme, après la présentation à Cannes de La colline où rugissent les lionnes (de Luana Bajrami), l'émergence du Kosovo sur la carte du cinéma mondial. La première fiction de Kaltrina Krasniqi est très solide, sérieuse et convaincante. Le film dresse un joli portrait de femme et un tableau peu amène de la société kosovare contemporaine (corruption, mafia et violence au menu).

Toujours en compétition, Miracle (2/5) du roumain Bogdan George Apetri est un film exigeant, basé sur une construction intellectuelle alambiquée, à la mise en scène superbe, qui rappelle celle de Cristian Mungiu à son meilleur niveau. Le film a été présenté et primé dans de nombreux festivals (Venise, Zurich, Varsovie). Le propos est complexe et mérite une mise en perspective. J'y reviendrai dans un article dédié car le film m'inspire des sentiments contradictoires.

Dans la section Visions de l'Est, My thoughts are silent (2/5) est un film ukrainien que l'on doit à un tout jeune réalisateur de 27 ans, Antonio Lukich. Il s'agit d'un road trip loufoque et pince-sans rire, servi par un acteur dégingandé de plus de deux mètres, qui rappelle parfois le cinéma de Kaurismaki : c'est plaisant mais cela manque de consistance pour vraiment entraîner l'adhésion. Il est toutefois probable qu'on croise dans l'avenir le trublion Lukich dans de grands festivals, tant son cinéma détonne dans le paysage cinématographique de la région.

Pour finir cette journée très Europe de l'Est, Inventory (2/5), du slovène Darko Sinko, part d'une idée hitchcockienne intéressante : un quidam se voit visé par deux tirs nocturnes dans son appartement. Qui peut en vouloir à sa vie ? Malheureusement le film ne semble pas quoi faire de cette idée séduisante et devient progressivement insipide.

13 novembre

Coup de tonnerre en compétition ce matin avec l'excellent The blind man who did not want to see Titanic (5/5) du prolifique mais méconnu réalisateur finlandais Teemu Nikki. Ce film magnifique est un tour de force. Il suit un aveugle handicapé (l'acteur est réellement malade et atteint de sclérose en plaque) en se fixant à son visage et son corps, de telle façon qu'on vit littéralement sa cécité à l'écran, ne voyant jamais l'arrière-plan que de façon très floue. Le film est un ascenseur émotionnel incroyable, qui nous fait pleurer, rire, sourire et frémir. La révélation du festival.

En début d'après-midi, la pétulante Laure Calamy et la réalisatrice Cécile Ducrocq sont présentes pour la présentation d'Une femme du monde (3/5), dans lequel l'actrice césarisée met toute son énergie. Un joli premier film et un beau portrait de femme qui donne corps à une prostitution du quotidien. Retour à la compétition avec le film suisse de Fred Baillif, La Mif (4/5), fiction tournée avec des acteurs non professionnels évoluant dans leur milieu naturel (ici un centre pour jeunes délinquantes), sur le modèle d'Entre les murs. C'est très réussi. 

La soirée s'achève paisiblement avec un fiction danoise inoffensive, Erna at war (3/5), qui se laisse regarder : l'histoire raconte comment une mère se retrouve à faire semblant d'être un homme pendant la première guerre mondiale, pour surveiller son fils. Plaisant sans être renversant, avec une dernière partie un peu trop lourde à mon goût.

 

14 novembre

Quatrième et dernière journée dans cette belle ville d'Arras. Kadir (3/5), du turc Selman Nacar est un film méticuleux et précis comme un Farhadi, qui décrit la descente aux enfers d'un jeune homme de bonne famille, suite à un accident survenu dans l'usine de son père. Le contraste entre l'assurance apparente du personnage principal et la façon dont les événements vont le broyer est saisissant.

Le nouveau film de Bouli Lanners, Nobody has to know (3/5), est une belle histoire d'amour qui vaut principalement pour les merveilleux paysages des Hébrides, au nord de l'Ecosse, et par la prestation des deux comédiens principaux, Bouli Lanners lui-même et la magnétique Michelle Fairlay (la Catelyn Stark de Games of trones). 

Quinzième et dernier film de mon séjour, L'équipier (4/5) de l'irlandais Kieron J. Walsh est une plongée impressionnante dans le monde du dopage (et plus globalement du cyclisme) à travers le prisme du passage en Irlande du Tour de France en 1998. C'est efficace, rythmé en diable et saisissant de vérité.

Encore une formidable édition de l'Arras film festival, en espérant revenir l'année prochaine !

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Tre piani

Dans Tre piani,  Nanni Moretti affiche une grande ambition : évoquer de lourds sujets (la culpabilité, la liberté, le désir, l'amour, la maternité, la rédemption) à travers trois histoires différentes, s'étirant sur une longue période.

Le résultat est intéressant par moment, mais globalement un peu froid et trop laborieusement écrit  pour séduire totalement. L'histoire la plus intéressante est celle du père qui imagine que sa petite fille a été abusée par le vieux voisin dérangé : on y voit parfaitement la construction d'une illusion. Dommage que les péripéties finales de cette partie semblent bien improbables.

Moretti joue quant à lui un personnage sans nuance, dans le moins intéressant des trois récits : c'est étonnant de l'acteur / réalisateur, qu'on a vu diablement plus inspiré.

Malgré quelques problèmes de rythme et d'écriture, Tre piani présente de temps à autres des moments de mise en scène assez convaincants (la scène d'ouverture par exemple), mais le résultat final est tout de même très mitigé. N'est pas Kieslowski qui veut.

   

2e

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Compartiment N°6

Quel incroyable plaisir j'ai éprouvé dans cette itinérance désabusée qui illustre très bien ce que l'âme russe a de plus détestable et de plus merveilleux à la fois.

Si le personnage de Laura est très finlandais (ouvert, en marge et en marche, bargeot), celui de Vadim et on ne peut plus russe (alcoolique, machiste, violent, romantique).

La photographie somptueuse, le merveilleux imaginaire que dessinent les trains russes, les mystères du Grand Nord et ses pétroglyphes : tout me plait dans ce film profondément original et poétique, qui ne ressemble à rien de connu, mélange improbable de Kaurismaki et de Zvyaguinsev. Le cinéma de Kuosmanen est modeste et génial à la fois.

Compartiment N°6 embrasse deux sujets très évocateurs : l'âme russe d'un côté, les infinies possibilités de la Rencontre de l'autre. Il y a un grand coeur battant dans le film, qui explose dans une des plus belles scènes vues au cinéma cette année : une échappée inquiétante dans une ville sans nom, qui mène à une maison obscure dans une rue glauque, dans laquelle notre couple se verra ... offrir deux bouteilles d'alcool. La Russie.

Juro Kuosmanen sur Christoblog : Olli Maki - 2016 (**)

 

4e

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The French Dispatch

A force de faire des films avec un rapporteur et un compas, Wes Anderson finit par oublier  que le cinéma est avant tout histoire de sensations.

Dans ce film manifeste qui se veut d'une certaine façon le couronnement d'une "méthode", le cinéaste américain multiplie les vignettes, d'une qualité inégale.

La première des trois histoires est assez plaisante, grâce à Léa Seydoux, Del Toro et Brody. La seconde est faible : je n'y ai vraiment rien trouvé d'intéressant et Lyna Khoudri n'est malheureusement pas à sa place, au milieu du casting le plus prestigieux qu'on ait peut-être jamais vu. Quant au troisième récit, il concentre le pire de ce qu'on peut reprocher au film : les procédés de Wes Anderson y deviennent des recettes éculées, servies par un style compassé, qui peut encore toutefois faire mouche. 

Trop d'idées, trop de plans, trop d'infos dans chaque plan, trop de détails, trop de langues, trop d'intentions, trop de caricatures. Et pas assez d'émotions. Le contraste avec le film précédent d'Anderson, L'île aux chiens, exigeant, simple et sombre, est frappant.

Wes Anderson sur Christoblog : La vie aquatique - 2003 (*) / A bord du Darjeeling Limited - 2007 (***) / Fantastic Mr. Fox - 2009 (****) / Moonrise kingdom - 2012 (****) / The grand Budapest hotel - 2013 (**)  / L'île aux chiens - 2018 (****)

 

2e

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Les Olympiades

Bien que le film ne soit pas totalement raté, on peut se demander ce qu'Audiard est allé faire dans cette galère, si éloignée de son univers habituel.

Le cinéaste n'est d'abord pas très à l'aise avec les scènes et sentiments intimes. Il avoue d'ailleurs dans une interview avoir embauché une "conseillère d'intimité" pour l'aider à tourner les scènes de sexe, qu'il ne sait pas comment filmer. Cela se sent : Les Olympiades "sonne" comme un premier film, maladroit et candide.

Deuxième point faible du film : l'hétérogénéité des récits, qui ne se raccordent que très superficiellement entre eux, laissant dans le script final de nombreuses scories scénaristiques (l'épisode de la grand-mère par exemple, insipide au possible). On peut certainement y voir la conséquence de la genèse du film, tiré de trois histoires différentes  de l'auteur Adrian Tomine, et du travail de trois scénaristes différents (Audiard lui-même, Léa Mysius, Céline Sciamma).

Le résultat est donc brinquebalant, non dépourvu de qualités (jolie photographie, mise en scène soignée, portrait original d'un quartier de Paris rarement montré au cinéma), mais globalement plutôt fastidieux dans sa volonté d'embrasser tous les thèmes dans l'air du temps, sur un air de tinder. Le film de jeune adulte à Cannes cette année, c'était décidément Julie en 12 chapitres !

Jacques Audiard sur Christoblog : Sur mes lèvres - 2001 (****) / Un prophète - 2009 (***) / De rouille et d'os - 2012 (****) / Dheepan - 2015 (***) / Les frères sisters - 2018 (**) 

 

2e

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La fracture

Chronique sociale à visée politique, comédie et thriller psychologique, le nouveau film de Catherine Corsini oscille entre plusieurs intentions.

Il est de ce fait imparfait bien qu'agréable, et son intérêt réside principalement dans son aspect quasi-documentaire.

De ce point de vue le film est impressionnant de réalisme : sensibilité des portraits de patients (la vieille femme, le déséquilibré), violence des émeutes, gestion de la pénurie, prégnance des dilemmes moraux, tableau naturaliste du métier de soignants.

La fracture est un film politique, qui ne s'affiche pas frontalement comme tel, mais la volonté de démonstration nuit tout de même à la puissance dramatique de l'histoire. Les péripéties narratives ne sont guère captivantes, et semblent parfois plus guidées par la nécessité de redynamiser l'intrigue que par l'évolution propre des personnages. La volonté de montrer (si ce n'est démontrer), dans une logique de "cases à cocher", est donc un peu contre-productive.

L'ensemble reste tout de même sympa à découvrir, à condition de supporter le cabotinage hystérique de Valeria Bruni-Tedeschi.

Catherine Corsini sur Christoblog : Trois mondes - 2012 (**) / La belle saison - 2015 (***) / Un amour impossible - 2018 (****)

 

2e

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First cow

Je ne suis pas un grand fan de Kelly Reichardt, pourtant portée aux nues par une partie importante de la critique, alors que par ailleurs, aucun grand festival ne l’a à ce jour récompensée.

Son cinéma atone, volontairement débarrassé de tout ce qui pourrait le rendre «agréable», ne me touche généralement pas. Je ne suis sensible ni aux longs plans dans lesquels rien ne se passe, ni au silence lancinant, ni à l'absence totale de musique extra-diégétique, ni à l’image perpétuellement grisâtre, ni aux scénarios erratiques et lymphatiques.

Ceci étant dit, First cow est probablement ce que j’ai préféré de cette cinéaste. On y trouve un synopsis assez intéressant, des scènes (presque) spectaculaires, et enfin, une véritable émotion. First cow parvient à nous donner le sentiment d’une immersion totale dans un passé réel et non fantasmé.

Les acteurs sont très bons également, avec une mention spéciale pour le génial Toby Jones (échappé de la série Detectorists), dans un rôle de grand propriétaire infect. A voir si vous êtes fan, ou simplement curieux de découvrir le travail de cette cinéaste.

 

2e

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