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Christoblog

Le tout nouveau testament

Jaco van Dormael n'est pas réellement un cinéaste subtil, mais son film est drôle, réjouissant et longuement blasphématoire. Cela devrait inciter un bon nombre de spectateurs à aller se faire plaisir.

Le tout nouveau testament regorge de trouvailles : l'idée géniale des dates de décès balancées dans la nature (et toutes les digressions que cette plaisanterie autorise), la machine à laver, la création de l'homme, le nombre d'apôtres calé sur les équipes de hockey ou de base-ball.

Chaque personnage est croqué en quelques plans vifs et acidulés, comme dans une Amélie Poulain sous acide.

Si les rapports entre les six personnages se construisent un peu benoitement, le film parvient à maintenir son rythme grâce à un mauvais goût poétique et lourdingue qui pourra rappeler dans ses meilleurs moments les Monty Python : plus c'est gros, plus c'est drôle. Van Dormael se maintient constament à la limite  de la pochade bon enfant et du burlesque (le gorille, l'Ouzbekistan). Il emporte le morceau par ses trouvailles visuelles insensées (la main qui danse, le poisson fluorescent) et la gouaille gourmande de ses bons mots. 

Un film qui fait un bien fou.

 

3e    

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La niña de fuego

Froid et désincarné, le deuxième film du jeune réalisateur Carlos Vermut est un divertissement intellectuel un peu vain. 

Le scénario, prétendument complexe, est en fait assez simple : un banal chantage entre deux personnes qui se rencontrent par hasard. Assez classiquement, le maître chanteur, issu d'une classe sociale moins favorisée que sa sa victime, passe à l'acte pour des raisons sentimentales.

Le pseudo-mystère du film se construit autour de deux fausses bonnes raisons : un agencement temporel présentant les trois principaux personnages de façon séquentielle, et un énorme trou noir au milieu du film, par ailleurs limpide, autour de la personnalité de Barbara.

La jeune femme, personnage principal du film, cumule donc les mystères. On ne saura rien (attention, spoilers) de son passé sulfureux, de ses pratiques sexuelles, se son traitement médical, des liens qu'elle entretient avec son mari, de son état psychologique, de ses cicatrices, de ces relations avec l'organisatrice des orgies, de ce qu'elle a vécu par le passé avec le personnage de Damian (et pourquoi celui-ci a fait de la prison)...

Les acteurs semblent passer dans ce schéma mental sur pellicule un peu par hasard, n'incarnant qu'à contre coeur leur personnage. Les péripéties sont par ailleurs souvent à la limite du crédible (l'enregistrement nocturne sur le téléphone portable par exemple).

La niña de fuego est intellectuellement stimulant, mais manque cruellement de chair.

 

2e

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La belle saison

Impossible de ne pas penser à La vie d'Adèle en découvrant le nouveau film de Catherine Corsini.

Les points communs sont en effet nombreux entre les deux films : deux femmes qui s'aiment, une blonde et une brune, une plus âgée et expérimentée que l'autre, de milieux sociaux très différents, des repas avec les parents sans que ceux-ci connaissent la relation qu'entretiennent les deux femmes, une réaction violente de ces derniers, une narration qui commence avant la passion et qui se finit après, un écoulement du temps très variable durant le film, des scènes de nus et de rapports corporels, etc....

Je pourrais continuer la liste des similitudes encore pendant un bon paragraphe, alors que curieusement, les deux films ne se ressemblent absolument pas. La vie d'Adèle était fiévreux et parfois maladif là où La belle saison est solaire, Kechiche filmait avec génie et en cadres très serrés son histoire d'amour, là ou Corsini se contente d'une mise en scène plus classique et cadrée plus large, le contexte social était pratiquement ignoré dans La vie, alors qu'elle est largement présente dans La saison.

Si Adèle et Emma semblaient passionément malheureuses, Delphine et Carole paraissent elles totalement épanouies dans leur passion.

Après un film complètement raté (Trois mondes), Catherine Corsini réussit ici une très jolie chronique qui parvient à mêler un intérêt documentaire certain (étonnant tableau du MLF des années 70), le tableau fidèle d'une certaine ruralité et des numéros d'acteurs saisissants.

Izia Higelin est formidable, Cécile de France est presque à la limite d'en faire trop, mais leur couple est au final diablement attachant. La plus grosse performance est celle de Noémie Lvovsky, qui joue une scène de haine réellement sidérante de violence. Kevin Azaïs confirme tout le bien qu'on peut penser de ce jeune acteur.

A défaut d'être génial, La belle saison est un bon film de fin d'été.

 

3e    

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While we're young

A chaque film de Noah Baumbach, je m'efforce de me présenter dans les meilleures dispositions d'esprit possibles, plein de bienveillance et d'ouverture d'esprit.

A chaque fois pourtant je suis (un peu) déçu. 

Avec While we're young, ça partait pourtant pas mal : un couple de quarantenaires qui se laisse séduire par un couple de jeunes, c'est plutôt bien vu.

Surtout quand ce sont Naomi Watts et Ben Stiller qui jouent les vieux tentés par un retour en jeunesse. Le scénario utilise bien dans cette partie les ressorts comiques mis à disposition par la situation : les jeunes écoutent des vinyls et refusent d'être tout le temps scotchés à leur portable (!), les vieux sont addicts des nouvelles technologies. L'oscillation cyclique entre ce qui est ringard et ce qui devient vintage est très bien vue.

On rit franchement à certaines situations (le concert pour bébé par exemple, un grand moment d'horreur comique), même si le trait est parfois un peu trop appuyé, comme souvent chez Baumbach.

Dans sa deuxième partie, en exposant une intrigue moralisatrice qui dessert trop brutalement un des protagoniste, le film perd de sa légèreté et de son équilibre. On retrouve alors le cinéma très appliqué et lourdingue qui m'avait déplu dans Frances Ha, et qui font parfois de Baumbach un Woody Allen en chaussure de plomb (alors qu'il a prouvé dans Greenberg qu'il pouvait faire preuve de finesse).

Ajoutons que les réflexions sur le cinéma documentaire sont très superficielles et on pourra conclure que While we're young est un film bancal, à moitié raté ou à moitié réussi, suivant l'humeur du moment.

Noah Baumbach sur Christoblog : Greenberg (**) / Frances Ha (**) 

 

2e

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Dheepan

Avec son sujet exotique (combien de spectateurs pourraient situer l'origine du peuple tamoul sur une carte du monde ?), ses acteurs inconnus et son titre curieux, le film de Jacques Audiard ne cherche pas la séduction facile.

Pourtant, la première chose qui frappe en découvrant la Palme d'Or, c'est sa fluidité, l'élégance de sa mise en scène qui semble débarrassée des afféteries coutumières d'Audiard. 

Ici, tout semble simple : les scènes s'enchaînent habilement, même si elles sont âpres et violentes, suscitant la curiosité et l'intérêt. L'intégration de la famille sri lankaise interpelle : elle est à la fois facile et impossible, commandée par une impérieuse énergie et figée vers une utopie de départ qui rend le passage français accessoire dans la trajectoire des personnages. L'invention d'une famille est également une magnifique idée de cinéma, que j'aurais aimé voir creusée en profondeur.

Toute la première partie est fraîche, originale et admirablement mise en scène, zébrée de visions magistrales et enveloppée par une bande-son impeccable. Un régal. 

Le film se brise malheureusement en son milieu pour verser dans un film d'action et de violence assez lambda. Le héros Dheepan se transforme tout à coup en Sylvester Stallone sévèrement bur(i)né. C'est qui faut pas l'énerver, le Tamoul. 

Si ce virage scénaristique peut se défendre, c'est la façon de le filmer comme une explosion de violence qui gâche un peu le film. Tout devient alors too much (cette montée d'escalier interminable), alors que tout était dans le mystère et la retenue quelques minutes auparavant.

Les choses empirent encore d'un cran dans les ultimes scènes (que je ne révèlerai pas ici), avec une rupture de ton encore plus grande et un basculement dans la mièvrerie qui laisse un goût amer.

Audiard frôle le chef-d'oeuvre, mais le hiatus au coeur du film l'empêche de concrétiser.

Jacques Audiard sur Christoblog : Un prophète (***) / De rouille et d'os (****)

 

3e    

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Coup de chaud

Raphaël Jacoulot, 44 ans, est un des réalisateurs français à surveiller de près.

Son troisième film, Coup de chaud, est un suspense psychologique sec et efficace, qui présente les mêmes qualités que sa production précédente, l'intéressant Avant l'aube.

L'action se situe ici dans le Sud-Ouest, dans un village filmé de telle façon qu'il paraît franchement moche : le château d'eau écrase les maisons de sa présence et les lotissements sont aussi moches qu'ailleurs. Le film évite le pitoresque pour se centrer sur ses personnages, et leurs relations.

Jacoulot excelle dans l'exercice délicat d'installer une ambiance. Il fait chaud, les paysans risquent de perdre leur récolte, et le comportement légèrement déviant de Josef, fils de la famille de ferrailleurs, énerve tout le monde. Il a un problème mental.

Le film s'ouvre sur une scène où Josef erre dans les rues, poignardé, et déroule ensuite un flash back diablement intrigant : qui a fait cela, et pourquoi ?

La perfomance de Karim Leklou est exceptionnelle, et contribue à installer une impression de malaise dérangeante qui ne faiblit pas tout au long du film. Les prestations de Grégory Gadebois, impressionnant en gros nounours introverti, et de Jean Pierre Darroussin, en maire débonnaire et dépassé par les évènements, sont à la hauteur de leur réputation.

Au final, on passe un bon moment à suivre cette histoire manipulatrice, très bien structurée autour d'un scénario solide, comme on a peu l'habitude d'en voir dans le cinéma français. 

Raphaël Jacoulot sur Christoblog : Avant l'aube (**)

 

3e  

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Aferim!

On ne peut qu'être abasourdi par l'ambition que manifeste Radu Jude dans ce film : filmer en noir et blanc une exotique chasse à l'homme dans la Roumanie du dix-neuvième siècle, en  centrant son intrigue sur un personnage principal a priori antipathique

Présenté comme cela, le film en effraiera plus d'un.

C'est dommage, parce que Aferim! (Bravo ! en turc) est un bijou de beauté et d'intelligence.

La photographie est d'abord absolument splendide. Le noir et blanc très contrasté met en valeur des paysages magiques : montagnes désertes, forêts immenses, marais touffus, campagnes bucoliques. Les décors (masures de paysans, chateaux, fêtes foraines) sont admirablement choisis. La direction artistique du film est particulièrement réussie.

Radu Jude s'avère également un réalisateur très doué (Ours d'argent pour ce film à Berlin), et un directeur d'acteurs hors normes. Le terrible Costandin est joué à la perfection par l'excellent acteur Teodor Corban, qu'on a déjà vu chez Mungiu, Nemescu et et Muntean.

Aferim! s'avère un délice si l'on aime être dépaysé au cinéma, découvrir des paysages et des pans d'histoire (ici l'incroyable dureté de l'esclavage des roms par les roumains), être confronté à une intrigue originale et tortueuse.

En mélangeant burlesque et drame, plaisir esthétique et méditation sur l'histoire, Aferim! parvient à étonner et - pour peu qu'on soit enclin à se laisser entraîner dans une balade légèrement lymphatique - à séduire.

 

3e

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Mission : impossible - Rogue nation

Dans le dernier Mission impossible, Tom Cruise fait à peu près la même chose que ce que fait Daniel Craig dans les derniers James Bond.

Il s'accroche à des aéronefs, conduit toutes sortes d'engins motorisés, utilise des accessoires qui font bip-bip, tchlak, et bzoin-bzoin en clignotant de façon inquiétante ou encourageante suivant le contexte, retourne les situations les plus désespérées, fait croire à ses ennemis qu'il est foutu pour mieux les surprendre, semble bénéficier de fonds financiers en ressources illimitées, fait des exercices de musculation et peut se battre en utilisant toutes sortes d'armes.

En terme de cinéma d'action, rien de bien nouveau dans Rogue nation, ni au niveau du ton (ce qui était le cas dans l'excellent Kingsman, vu en début d'année), ni au niveau des péripéties.

Ce qui rend le film plutôt agréable, c'est son aspect humble (les scènes d'actions parviennent à un certain degré de réalisme, ce qui n'est pas toujours le cas dans ce type de film), et sa solidité scénaristique. Sans être complètement échevelé, le scénario se révèle en effet bien construit, avec un dévoilement progressif de ce qui se trame et une dernière partie plutôt réussie.

Dans le même ordre idée (humilité et efficacité), il faut signaler les interprétations solides de Jeremy Renner, de Rebecca Ferguson (qui impose son physique athlétique - mais pas que) et de Simon Pegg, très à l'aise dans son rôle habituel d'écureuil coincé et volontaire. Difficile de croire que Tom Cruise a 53 ans au regard des cascades effectuées : il a l'air très à l'aise sur une moto, bien plus que dans les scènes d'amour, où il a toujours l'air d'avoir 14 ans et de ne pas savoir quoi faire.

Tourné sur pellicule, Rogue nation a un petit côté old school plutôt sympathique, à l'image de cette étonnante et agréable poursuite (à pied !) dans les rues embrumées de Londres.

 

2e

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Love

J'aurai donc longuement hésité : Gaspar Noé est-il un génie incompris (de moi), ou un charlatan doué pour l'esbrouffe cinématographique ?

La réponse me fut accordée dans la nuit du 20 au 21 mai, vers 0h40, alors que devant mes yeux passablement fatigués débuta le navet narcissique que constitue Love.

Comme je n'ai pas aimé du tout le film, je ne vais pas y aller par quatre chemins : rester éveillé jusqu'à 3h20 du matin en plein festival de Cannes pour voir une éjaculation 3D face caméra me reste en travers de la gorge. Si je puis dire.

Résumons ce qu'est Love :

- un best of des morceaux de musique classique les plus nunuches (sur fond de hand job)

- une compilation des tics les plus voyants de Noé, déjà exposés dans ses précédents films, comme les écrans noirs, les effets de stroboscope, le plan sur un pénis vu de l'intérieur d'un vagin, etc...

- une intrigue concourant pour le prix de la minceur absolue, digne d'une psychologie de roman-photo

- un acteur masculin dont l'expressivité la plus grande est condensée entre le nombril et les cuisses ("a dick has no brain" dit-il, dans un éclair de lucidité)

- un exemple parfait d'effet stylistique (la destructuration temporelle) qui n'a ni sens, ni but, et évoque la course d'un poulet sans tête

- une démonstration monstrueuse d'égocentrisme absolu (le bébé s'appelle Gaspar, le galleriste s'appelle Noé)

Et pour finir je remarquerai que d'un point de vue purement pornographique, Love est un film sexiste, puisqu'à aucun moment un sexe féminin n'est montré en gro plan alors que l'organe de l'acteur sans cerveau est lui filmé sous toutes les coutures. Si je puis dire, à nouveau.

C'est quand même incroyable toutes les conneries que ce film insignifiant me fait écrire.

Gaspar Noé sur Christoblog : Irréversible (***) / Enter the void (*)

 

1e

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La isla minima

Le dernier film d'Alberto Rodriguez, présenté comme le meilleur film espagnol de l'année (il a raflé 14 prix, dont 10 Goyas), n'est somme toute qu'un polar très classique.

Les ingrédients sont bien connus : un couple de flics très différents, dont l'un semble avoir un lourd passé, des jeunes filles assassinées, violées et torturées, une ambiance glauque.

Le film cherche à paraître original par deux aspects annexes à sa trame principale : la période (celle de l'après-franquisme) et son cortège de compromissions, et le lieu (le delta du Guadalquivir). Les paysages, filmés parfois de très haut en plongée esthétisante, sont en effet incroyables, comme le montrent ces quelques exemples.

Malheureusement, ces deux aspects du film sont plaqués sur une histoire assez peu prenante au final, pleine de trous et de clichés (la vraie fausse médium), illustrée par une mise en scène scolaire et tape à l'oeil. 

Le film n'ennuie que ponctuellement, mais on peut aisément s'en passer.

 

2e 

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