Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Christoblog

Moi, Daniel Blake

Disons le tout de suite : le fait que Moi, Daniel Blake ait obtenu la Palme d'Or va fausser la plupart des appréciations le concernant.

La question traditionnelle de l'apprenti critique ("Que vaut le film ?") se transformera bien souvent en "Mérite-t-il la Palme d'Or ?", avec au passage un très probable coup de rabot sur ses qualités intrinsèques.

Ceci étant dit, je vais essayer de ne pas tomber dans ce travers.

D'abord, première évidence difficilement contestable, les deux acteurs principaux sont exceptionnels. Dave Johns compose un personnage qu'on n'oubliera pas de sitôt, une sorte d'incarnation de la dignité terrienne et bienveillante. Hayley Quires est une belle découverte, dans un rôle qui la voit s'exposer dans une composition difficile, mélange de fragilité et de ténacité. La scène du magasin alimentaire est à ce titre un des plus beaux moments de cinéma de l'année.

Deuxième point, le film aborde frontalement un sujet que je n'avais pas encore jamais vu traité au cinéma : la difficulté, devenue radicale, de vivre aujourd'hui dans notre société sans avoir la pratique de l'informatique en général et d'internet en particulier. Ken Loach ne se contente pas ici de creuser confortablement le sillon qui est le sien depuis le début de sa carrière (la misère sociale), il peint un monde dans lequel tout le monde (ou presque) est sympa, et qui pourtant se révèle être un enfer. Par là-même, Moi, Daniel Blake réussit un tour de force étonnant : nous montrer la méchanceté de notre société sans nous désigner les méchants. Il peut de ce fait avoir par moment des aspects de film d'anticipation, de dystopie.

La mise en scène de Ken Loach est d'une rigueur exemplaire. Le scénario de son complice de toujours, Paul Laverty est très très bon au début du film (quelle idée géniale que la conversation téléphonique initiale, qui finalement s'avère être le coeur palpitant du film), avant de fournir dans la deuxième partie quelques traits trop appuyés à mon goût. Ce n'est pas très grave au regard du poids émotionnel que charrie le film.

Moi, Daniel Blake est finalement un beau portrait, qui s'affranchit de son terreau social par la grâce de ses interprètes. A voir.

 

3e

Voir les commentaires

Captain Fantastic

Vu du spectateur, Captain Fantastic commence bien et finit mal. Pour les personnages, c'est en gros l'inverse.

Dans sa première partie, j'ai été tour à tour séduit (la mise en scène est sacrément efficace, comme la première scène le prouve), intrigué (mais vers où le film va-t-il nous entraîner ?) et perturbé (faut-il penser que cet homme est fou, ou qu'il est génial ?).

La partie centrale du film (le road trip) confirme la première impression favorable. Le tableau dressé de l'Amérique est cruel mais cinglant, les situations parviennent à être retorses, à l'image de la scène de drague qui emmène l'aîné de la famille dans un quiproquo très bien amené.

Malheureusement, la troisième et dernière partie de Captain Fantastic verse dans une sensiblerie et des facilités qu'il avait habilement évité jusque là. On ne peut que regretter que Matt Ross, qui parvient à faire du réalisme et de la vérité exposée aux enfants un ressort efficace de son film nous expose une péripétie mortuaire absolument irréaliste. 

Même si la fin gâche un peu le plaisir que procure le film, Captain Fantastic s'avère tout de même être un moment plaisant et stimulant intellectuellement.

PS : Comme souvent, Viggo Mortensen est très bon.

 

2e

 

Voir les commentaires

Olli Mäki

Vu le dernier jour de mon séjour cannois 2016, on ne peut pas dire qu'Olli Mäki m'ait vraiment enthousiasmé, malgré son prix à Un certain regard.

En mai dernier le film portait encore le doux nom de Hymyileva mies, et je me souviens avoir été intrigué devant ce morne exotisme : un nom à coucher dehors, un noir et blanc grisâtre, une histoire dont on se contrefout. Dans l'effervescence cannoise, on apprécie le contretemps. 

Il y a chez le réalisateur Juho Kuosmanen une sacrée dose de folie pour souhaiter raconter l'histoire d'un obscur boxeur finlandais qui concourt pour le titre de champion du monde à Helsinki en 1962, et échoue lamentablement au deuxième round, peut-être parce qu'il est tombé amoureux, mais peut-être aussi parce qu'il n'a pas envie de gagner.

Le film est beau comme les premiers Jarmusch, intéressant comme le Courir de Jean Echenoz, et totalement inutile, bien que servi par des acteurs formidables et une photographie superbe.

Olli Mäki est proche de la perfection esthétique (peut-être trop, rapporté à son sujet : la loose), mais j'hésite quand même à le conseiller, tant le sujet est anecdotique et le plaisir qu'il procure spécifique.

 

2e

 

Voir les commentaires

Concours DVD Argentina (Terminé)

A l'occasion de la sortie en DVD du film de Carlos Saura  Argentina, je vous propose de gagner 5 DVD.

Pour ce faire :

- répondez à la question suivante : "Qu'est ce que la chacarera ?"

- joignez votre adresse postale

- envoyez moi le tout par ici

avant le 2 novembre 20 h.

Un tirage au sort départagera les gagnants.

Vous recevrez ensuite le DVD, envoyé directement par le distributeur.

 

 

Voir les commentaires

Mal de pierres

Malgré un scénario sur le papier intéressant, Mal de pierres s'avère être d'une platitude consternante.

Difficile dans ces conditions de ne pas incriminer la mise en scène de NIcole Garcia, et peut-être encore plus sa direction d'acteur.

Marion Cotillard arbore la même expression durant tout le film, révélant une fois de plus l'extrême atonie de son jeu. Alex Brendemühl ne fait guère mieux et Louis Garrel cabotine en sourdine.

La mise en scène est invisible et d'un classicisme pesant (ces plans de coup sur le sanatorium...), et si ce n'était faire insulte à quelques productions télévisuelles, on dirait volontiers qu'elle est digne d'un téléfilm. Le découpage du film ne vaut que par son twist final, qui curieusement ne parvient pas à nous frapper autant qu'il le devrait : la faute à la mollesse indigente de tout ce qui le précède ?

Peu incarné, aucunement original, Mal de pierres entre dans notre cerveau par un neurone et en ressort instantanément par un autre.

Nicole Garcia sur Christoblog : Un balcon sur la mer - 2010 (**) / Un beau dimanche - 2013 (***)

 

1e

 

Voir les commentaires

Ma vie de courgette

Il y a un phénomène de l'ordre de la magie pure dans Ma vie de courgette, qui transforme des marionnettes aux grosses têtes et aux bras filiformes en petit garçons et petites filles très réalistes. 

Tout ce qui peut éveiller une émotion (les yeux des personnages, les voix, la précision des textes, le scénario millimétré de Céline Sciamma) est ici réalisé à la perfection.

Le résultat est percutant, vivifiant, émouvant. Claude Barras distille juste ce qu'il faut de drame et d'humour pour que son film soit parlant à tous les âges. 

A tous ces compliments, il faut ajouter le plus important : une qualité esthétique hors du commun. Les plans de Ma vie de courgette sont des vrais plans de cinéma dans lesquels chaque élément (éclairage, cadrage, profondeur de champ) compte. Le travail sur les couleurs est fascinant, et dans chaque décor on trouvera des détails remarquables.

Puisque j'en suis à lister les innombrables qualités du film, je finirai par un montage parfait. Le rythme sur la longueur est parfaitement tenu, tout en étant très libre dans chaque séquence. Le séjour au ski, par la perfection de ses enchaînements, est en lui-même un petit chef d'oeuvre.

Si sa morale est somme toute classique, Ma vie de courgette brille par sa perfection stylistique et sa faculté à susciter de fortes émotions par des procédés proches de l'épure. Un des meilleurs films de l'année.

 

4e 

Voir les commentaires

Miss Peregrine et les enfants particuliers

Les derniers Tim Burton m'ayant plutôt déçu, c'est un peu à reculons que je suis allé voir Miss Peregrine.

Aussi, ai-je été plutôt agréablement surpris par l'entame du film, délicieuse mise en place d'une histoire merveilleuse, dans un environnement américain tout ce qu'il y a de plus prosaïque.

L'aimable caractère et le pragmatisme serein du jeune héros concourent à faire de toute la première partie du film un moment plaisant. L'apparition de la délicieuse Eva Green et des enfants particuliers est très réussie. 

Le film subit ensuite un petit coup de mou en son milieu, avant de rebondir grâce à un scénario très malin qui exploite parfaitement les anomalies de tous les enfants, et aussi parce que le méchant est excellemment joué par un formidable Samuel L. Jackson. 

Miss Peregrine se termine en fanfare par une explosion d'inventivité où l'on retrouve (enfin !) le burlesque attendrissant, morbide et enjoué de Tim Burton. La scène de combat finale est ainsi un festival de trouvailles où l'on retrouve l'esprit de la période de Edward aux mains d'argent.

Le retour en forme d'un cinéaste qui s'était un peu perdu. 

Tim burton sur Christoblog : Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street - 2007 (**) / Alice au pays des merveilles - 2010 (*) / Dark shadows - 2012 (*)

 

2e

 

Voir les commentaires

La fille inconnue

Je ne porte pas (ou plus) les Dardenne dans mon coeur, comme les plus fidèles de mes lecteurs le savent, et ce n'est pas ce dernier opus qui va me faire changer d'opinion.

D'abord, les frérots sont bien meilleurs quand ils tournent avec des acteurs inconnus. 

On a ici bien du mal à croire à Adèle Haenel dans un rôle de médecin, et même, disons-le, dans un rôle d'adulte. Sa confrontation avec le vieux docteur qui part en retraite sonne particulièrement faux. Même si sa prestation s'améliore tout doucement en cours de film, elle peine vraiment à emporter l'adhésion, comme d'ailleurs l'ensemble du casting.

Alors que le cinéma des Dardenne est réputé réaliste, leurs films me semble de plus en plus artificiels. 

Le schéma de La fille inconnue, assez semblable à celui du terrible Deux jours, une nuit (un personnage féminin fait du porte à porte pour avancer dans l'intrigue), n'aide pas beaucoup les acteurs à rendre le propos du film captivant. On part d'un pitch, puis on déroule un peu mécaniquement une histoire sans grande surprise ni émotion. La fille inconnue est un film-dispositif, et il est en cela assez contraint.

Comme les Dardenne ne sont pas des maîtres du suspense, le résultat est souvent poussif (le suicide dans la douche !), sans être complètement indigne. On est parfois réveillés par quelques explosions de violence, qui ne sauvent cependant pas le film du gouffre d'indifférence dans lequel il sombre tranquillement.

Les Dardenne sur Christoblog : Le silence de Lorna - 2008 (**) / Le gamin au vélo - 2011 (***) / Deux jours, une nuit - 2014 (*)

 

2e

 

Voir les commentaires

Fuocoammare, par-delà Lampedusa

Ours d'or à Berlin cette année, Fuocoammare fait partie de ces documentaires magnifiques (comme ceux de Depardon ou de Wiseman) qui suscitent autant d'émotions que les plus grandes oeuvres de fiction.

Emotion esthétique d'abord. Les images de Gianfranco Rosi sont d'une beauté souvent renversante : ciel plombé, cadrages parfaits, palette de couleur délicate et nuancée, alternance de gros plans et de plans larges, scènes de nuit ahurissantes, poésie sous-marine. C'est stupéfiant de maîtrise et de variété.

Emotion ensuite devant ce qui est montré. Le film met en parallèle la vie d'une poignée d'habitants de Lampedusa, dont un petit garçon de douze ans, et celles des immigrants qui arrivent, morts ou vivants. Cette juxtaposition peut surprendre et intriguer : elle est pourtant au final pleine de sens et ménage bien des niveaux de lecture potentiels.

On pourra par exemple considérer que le réalisateur veut montrer à quel point les européens sont finalement étrangers au drame qui se déroule parfois à quelques mètres d'eux : les problèmes de vision de Samuele comme une métaphore de notre aveuglement.

Pour ma part, j'ai ressenti bien d'autres sentiments face à cet accolage parfois intrigant. Il m'a semblé par exemple que le film mettait en exergue dans les deux cas l'instinct humain qui conduit toujours à vouloir progresser et découvrir. Les migrants veulent une meilleure vie, comme Samuele dans son champ et à son échelle, avec un enthousiasme obstiné : il veut mieux voir, tenter des expériences, découvrir de nouvelles sensations.

Fuocoammare est à bien des moments tout à fait sidérant. On est pétrifié par l'incroyable humanité qui se dégagent des images de Rosi : le regard extraordinairement digne d'un migrant, un hélicoptère qui s'élève dans la nuit, une musique bouleversante qui passe à la radio, une femme qui fait méticuleusement un lit conjugal qui ne sert visiblement plus qu'à elle seule.

Au-delà du sujet des migrants, Fuocoammare donne à voir un émouvant et passionnant portrait de l'humanité, ce qui en fait l'un des tout meilleurs films de cette année.

 

4e 

Voir les commentaires

Mercenaire

Bonne surprise de la dernière Quinzaine des réalisateurs, Mercenaire est un premier film tout à fait prometteur.

Sacha Wolff nous fait d'abord découvrir les îles Wallis, et ne serait-ce que pour cette raison, le film mérite d'être vu.

Les paysages sont superbes (le film a été tourné en Nouvelle-Calédonie) et le film donne un bon aperçu de la complexité culturelle wallisienne.

Pour ce qui est de la partie tournée en France, le film réussit ce que j'ai rarement vu au cinéma : montrer le monde du sport sans indulgence, et avec un grand degré de réalisme. Là où échouait le pourtant talentueux Samuel Collardey avec Comme un lion, sur le milieu du football, Sacha Wolff le réussit ici avec le rugby. 

Agents verreux, triche anti-dopage, joueurs sous-payés : le tableau est glaçant, mais jamais pénible à regarder. La force morale du personnage principal tient toute l'architecture du film sur ses (solides) épaules, et le réalisateur réussit parfaitement son coup en maniant habilement les ellipses. Il évite intelligemment clichés et faute de goût.

Sensible, malin, délicat.

 

2e

Voir les commentaires

Jeu concours Captain Fantastic (Terminé)

A l'occasion de la sortie le 12 octobre du film Captain Fantastic, je vous propose de gagner 5 x 2 invitations valables partout en France.

Pour ce faire :

- répondez à la question suivante : "Quel est l'acteur principal du film ?"

- joignez votre adresse postale

- envoyez moi le tout par ici

avant le 11 octobre 20 h.

Un tirage au sort départagera les gagnants.

Vous recevrez ensuite les invitations, envoyées directement par le distributeur.

Voir les commentaires

Dogs

La bande-annonce de Dogs semble promettre un exercice de style dépouillé, un peu à la manière d'un Winding Refn des Balkans, et le début du film confirme cette promesse.

Le premier plan, un long mouvement de caméra au ras du sol puis de l'eau, qui se finit sur une vision malsaine et ambigüe, est de toute beauté.

L'irruption du vieux flic dans la narration du film permet au réalisateur Bogdan Mirica d'enchaîner plusieurs scènes époustouflantes, dont celle de la chaussure dans l'assiette (ceux qui ont vu le film comprendront).

Malheureusement, Dogs se normalise progressivement, perdant un peu en cours de route son mordant initial. Le personnage principal manque de personnalité pour emporter le film vers les sommets. Il faut des artifices un peu brutaux, dont une ellipse géante, pour redonner au film son lustre d'objet à la fois violent et contemplatif, quelque part entre les frères Coen et Nuri Bilge Ceylan.

A conseiller tout de même aux amateurs de premiers films noirs et bancals.

 

2e

Voir les commentaires