Un prophète
La critique a tellement encensé Un prophète, le donnant gagnant à Cannes pour la Palme d'Or pendant toute la compétition, qu'on s'attend réellement à voir un très, très grand film.
Et c'est vrai qu'Un prophète possède bien des qualités.
Son aspect réaliste est prenant. Sa description de l'univers carcéral contemporain est frappant. L'interprétation de Tahar Rahim est remarquable, pleine de densité, et celle de Niels Arestrup est encore meilleure.
Le scénario se tient, palpitant jusqu'à l'insoutenable dans la première demi-heure. La mise en scène est élégante et puissante à la fois, Audiard impose un style, qui était déjà bien présent dans De battre mon coeur s'est arrêté.
Bien des qualités mais aussi quelques défauts, qui empêche le film d'être le chef d'oeuvre annoncé.
Le scénario prometteur au début s'étiole progressivement. Les aventures de Malik deviennent confuses et longuettes (le film dure 2h28, mais paraît en durer plus de 3), plusieurs des personnages semblant conduire les intrigues secondaires dans des culs de sac.
Le principal écueil est qu'on ne sent pas réellement les raisons de l'ascension de Malik. Si son emprise progressive sur les Corses est clairement montrée, sa légitimité vis à vis du groupe des barbus reste obscure (ils passent de la défiance à la soumission sans qu'on comprenne vraiment pourquoi).
Son aspect "prophétique" est anecdotique (il voit une biche traverser la route avant qu'elle le fasse) et le titre est un peu mensonger de ce point de vue. Certains tics de mise en scène agacent aussi (les écritures sur l'écran, les plans de remplissage, les images très sombres).
Un prophète est un film marquant, mais sur lequel plane cependant l'ombre d'un autre grand film carcéral récent : Hunger.
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