Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Christoblog

Gazette du Arras Film Festival 2021

11 novembre

Première journée très cannoise à Arras cette année. Je commence côté Quinzaine des réalisateurs avec Ali & Ava (5/5), de Clio Barnard, dont j'avais adoré le premier film, Le géant égoïste. J'ai également beaucoup aimé celui-ci. Une sorte de Ken Loach en mode feelgood movie, extrêmement sensible et d'une belle densité. Le festival commence très bien.

Je continue avec Où est Anne Franck ! (3/5) d'Ari Folman, qui était lui présenté en sélection officielle en juillet sur la Croisette. Ari Folman rend bien hommage à l'incroyable vivacité intellectuelle d'Anne Franck, et le film est vraiment appréciable quand l'imagination visuelle du cinéaste israélien entre en résonance avec celle d'Anne Franck. La partie du film qui se déroule dans le monde d'aujourd'hui est plus faible, et le parallèle entre nazisme et traitement des migrants est pour le moins discutable. A conseiller tout de même pour les enfants et les ados. 

Enfin, Piccolo Corpo (4/5) avait été choisi par Charles Tesson pour la Semaine de la Critique. Ce premier film de Laura Samani est d'une beauté formelle remarquable. L'actrice principale, Celeste Cescutti, formidable dans le film, est présente dans la salle et nous parle de sa région natale, le Frioul, magnifiquement filmée dans ce très beau film. Un très beau moment dans la salle 2 du Casino.

Du fait de la présence de Claude Lelouch à Arras, je tente en soirée Salaud, on t'aime (3/5), qui date de 2014. C'est du Lelouch tout craché, incroyablement mauvais si on s'en tient à des critères objectifs. Mais finalement, je me suis laissé mener par le bout du nez, captivé par les yeux bleus de Johnny et le sourire éclatant de Sandrine Bonnaire.

 

12 novembre

La journée commence avec la compétition. Vera dreams of the sea (3/5) confirme, après la présentation à Cannes de La colline où rugissent les lionnes (de Luana Bajrami), l'émergence du Kosovo sur la carte du cinéma mondial. La première fiction de Kaltrina Krasniqi est très solide, sérieuse et convaincante. Le film dresse un joli portrait de femme et un tableau peu amène de la société kosovare contemporaine (corruption, mafia et violence au menu).

Toujours en compétition, Miracle (2/5) du roumain Bogdan George Apetri est un film exigeant, basé sur une construction intellectuelle alambiquée, à la mise en scène superbe, qui rappelle celle de Cristian Mungiu à son meilleur niveau. Le film a été présenté et primé dans de nombreux festivals (Venise, Zurich, Varsovie). Le propos est complexe et mérite une mise en perspective. J'y reviendrai dans un article dédié car le film m'inspire des sentiments contradictoires.

Dans la section Visions de l'Est, My thoughts are silent (2/5) est un film ukrainien que l'on doit à un tout jeune réalisateur de 27 ans, Antonio Lukich. Il s'agit d'un road trip loufoque et pince-sans rire, servi par un acteur dégingandé de plus de deux mètres, qui rappelle parfois le cinéma de Kaurismaki : c'est plaisant mais cela manque de consistance pour vraiment entraîner l'adhésion. Il est toutefois probable qu'on croise dans l'avenir le trublion Lukich dans de grands festivals, tant son cinéma détonne dans le paysage cinématographique de la région.

Pour finir cette journée très Europe de l'Est, Inventory (2/5), du slovène Darko Sinko, part d'une idée hitchcockienne intéressante : un quidam se voit visé par deux tirs nocturnes dans son appartement. Qui peut en vouloir à sa vie ? Malheureusement le film ne semble pas quoi faire de cette idée séduisante et devient progressivement insipide.

13 novembre

Coup de tonnerre en compétition ce matin avec l'excellent The blind man who did not want to see Titanic (5/5) du prolifique mais méconnu réalisateur finlandais Teemu Nikki. Ce film magnifique est un tour de force. Il suit un aveugle handicapé (l'acteur est réellement malade et atteint de sclérose en plaque) en se fixant à son visage et son corps, de telle façon qu'on vit littéralement sa cécité à l'écran, ne voyant jamais l'arrière-plan que de façon très floue. Le film est un ascenseur émotionnel incroyable, qui nous fait pleurer, rire, sourire et frémir. La révélation du festival.

En début d'après-midi, la pétulante Laure Calamy et la réalisatrice Cécile Ducrocq sont présentes pour la présentation d'Une femme du monde (3/5), dans lequel l'actrice césarisée met toute son énergie. Un joli premier film et un beau portrait de femme qui donne corps à une prostitution du quotidien. Retour à la compétition avec le film suisse de Fred Baillif, La Mif (4/5), fiction tournée avec des acteurs non professionnels évoluant dans leur milieu naturel (ici un centre pour jeunes délinquantes), sur le modèle d'Entre les murs. C'est très réussi. 

La soirée s'achève paisiblement avec un fiction danoise inoffensive, Erna at war (3/5), qui se laisse regarder : l'histoire raconte comment une mère se retrouve à faire semblant d'être un homme pendant la première guerre mondiale, pour surveiller son fils. Plaisant sans être renversant, avec une dernière partie un peu trop lourde à mon goût.

 

14 novembre

Quatrième et dernière journée dans cette belle ville d'Arras. Kadir (3/5), du turc Selman Nacar est un film méticuleux et précis comme un Farhadi, qui décrit la descente aux enfers d'un jeune homme de bonne famille, suite à un accident survenu dans l'usine de son père. Le contraste entre l'assurance apparente du personnage principal et la façon dont les événements vont le broyer est saisissant.

Le nouveau film de Bouli Lanners, Nobody has to know (3/5), est une belle histoire d'amour qui vaut principalement pour les merveilleux paysages des Hébrides, au nord de l'Ecosse, et par la prestation des deux comédiens principaux, Bouli Lanners lui-même et la magnétique Michelle Fairlay (la Catelyn Stark de Games of trones). 

Quinzième et dernier film de mon séjour, L'équipier (4/5) de l'irlandais Kieron J. Walsh est une plongée impressionnante dans le monde du dopage (et plus globalement du cyclisme) à travers le prisme du passage en Irlande du Tour de France en 1998. C'est efficace, rythmé en diable et saisissant de vérité.

Encore une formidable édition de l'Arras film festival, en espérant revenir l'année prochaine !

Commenter cet article