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Christoblog

Articles avec #denis menochet

Les survivants

Premier film de Guillaume Renusson, Les survivants est une sorte de western hivernal. D'un côté un groupe de trois locaux voulant chasser du réfugié et de l'autre, un veuf bougon qui se trouve par hasard à aider une migrante afghane.

Curieusement, le rôle de Denis Ménochet présente beaucoup de similitudes avec celui qu'il joue dans As bestas : même visage taciturne et imperturbable, même confrontation violente avec des locaux obtus, même immersion dans une nature plus hostile qu'accueillante, même difficulté à exprimer ses sentiments.

Par rapport à celui de Sorogoyen, le film de Renusson est bien plus sec et moins tarabiscoté. La fuite de ce couple de circonstance est filmée comme une épure, souvent haletante et parfois d'une brutalité crue, qui pourra rappeler le cinéma de Peckinpah.

Il faut reconnaître au réalisateur une grande qualité : ne pas ajouter de superflu à ce thriller neigeux qui n'en a pas besoin (pas de sentiments amoureux entre les deux protagonistes, pas de scènes d'émotions tire-larmes et une fin sèche comme un coup de trique).

On est curieux de voir ce que l'efficacité démontrée ici par Renusson donnera, appliquée à un script moins linéaire et plus complexe.

 

2e

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As bestas

Beaucoup d'éléments intéressants dans le dernier thriller psychologique de Rodrigo Sorogoyen : une vraie maestria dans la mise en scène, sèche, nerveuse et souvent inspirée, et un casting irréprochable. La prestation de Ménochet est une fois de plus impressionnante, à la fois par la présence physique qu'il impose à l'écran, et les éclairs de fragilité qu'il parvient à insérer dans son rôle de personnage massif. Marina Fois est elle aussi excellente, dans un rôle où son jeu dépouillé fait merveille.

Le film ennuie toutefois par moment, du fait de l'étirement inutile de certaines scènes, et d'une inadéquation entre le script (qui tient en 5 lignes) et la durée du film (2h17). Autrement dit, tout est bien dans le film, mais tout y semble exagérément délayé.

Le personnage de la fille ne m'a pas semblé extrêmement utile dans le développement du film, et le sujet de la différence de classe sociale entre les protag aurait pu être à mon sens creusé. Reste au final une oeuvre intéressante, parsemée de moments de tension bien réalisés.

Rodrigo Sorogoyen sur Christoblog : Que Dios no perdone - 2017 (*) / El reino - 2019 (***) / Madre - 2020 (**) 

2e

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Peter von Kant

On se demande parfois quelle mouche pique les réalisateurs.

Faire un remake de son réalisateur fétiche, mais en changeant tout (le couple lesbien devient gay, la période et le lieu changent) : quel intérêt ? La sécheresse abrupte de Fassbinder est ici délayée dans le style carton-pâte et roman feuilleton qu'affectionne souvent Ozon, et dont Huit femmes est le meilleur exemple.

Le résultat est artificiel, laborieux et appliqué. Adjani joue une parodie d'elle même et Ménochet propose un numéro impressionnant mais qui tourne un peu à vide : son jeu tantôt à fleur de peau, tantôt très composé, aspire le film comme parfois celui de Depardieu le fait. Ménochet est donc le principal intérêt du film, et peut-être même son objet.

Aucune émotion n'est générée par cet essai cinématographique, pensum en forme d'acte de dévotion. Allez, on attend qu'Ozon produise de nouveau un grand film, le dernier (Grâce à Dieu) date un peu.  

 

2e

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Seules les bêtes

Dominik Moll, cinéaste trop rare, nous offre ici un thriller d'une redoutable efficacité, bâti sur une utilisation simple mais efficace de l'effet Rashomon : les mêmes scènes sont vues plusieurs fois sous des angles différents, offrant à chaque fois un complément d'information sur l'intrigue.

On progresse ainsi dans les arcanes d'une histoire tortueuse, marquée par d'incroyables coïncidences, mais qui présente l'immense intérêt de décrire avec une grande acuité deux milieux très différents et rarement montrés au cinéma : les étendues désolées du causse Méjean et le monde des brouteurs d'Abidjan (si vous ne savez pas ce que c'est, alors allez voir le film).

La sensibilité de la mise en scène, la densité du jeu des acteurs (tous incroyablement bons), la qualité du scénario font de Seules les bêtes un divertissement de haute tenue.

Je le conseille.

 

3e

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Grâce à Dieu

En choisissant de s'attacher au cheminement personnel de trois des victimes du père Preynat, plutôt qu'à l'enquête en elle-même, François Ozon réussit un coup de maître.

Son film évite en effet du coup le piège du film-dossier et celui du film à charge : Grâce à Dieu est avant tout le portrait sensible de trois personnalités fort dissemblables qui vont devoir lutter contre le même démon, avec des armes bien différentes, mais une pugnacité équivalente.

Le spectateur est plus d'une fois submergé par l'émotion durant ce film. Le scénario à la fois fin et détaillé, la mise en scène sobre et prenante : tout concourt à nous prendre à la gorge, au coeur, et aux tripes.

Mais le plus remarquable dans ce très beau film, c'est la prestation des trois acteurs principaux. Melvil Poupaud, en fervent catholique tenace et un peu naïf, est comme d'habitude parfait. Denis Ménochet trouve dans ce film un rôle qui lui convient à merveille : athée gouailleur et gentiment éruptif, il a un petit quelque chose de Depardieu. Quant à Swann Arlaud, il livre une prestation exceptionnelle, donnant ici le meilleur de lui-même : sensible, écorché et fragile.

Le film est un miracle : il parvient à émouvoir constamment sans accabler les bourreaux, qui paraissent au final faibles et ridicules. 

Le meilleur film d'Ozon, et probablement un des meilleurs films français de 2019.

 

4e 

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Jusqu'à la garde

Xavier Legrand, avec ce premier film récompensé doublement à Venise, et encensé par la critique, signe une entrée retentissante dans le cinéma français.

Il reprend approximativement  les deux personnages de son précédent court-métrage (Avant que de tout perdre) là où il les avaient laissé. Denis Ménochet et Léa Drucker jouent toujours Miriam et Antoine. Le divorce a maintenant eu lieu, et il s'agit d'organiser la garde des enfants.

Ceux qui connaissent le court-métrage seront probablement moins surpris par l'évolution de l'histoire que ceux qui découvrent cette famille classique - et infernale. 

La grande force du film est de revisiter intégralement le naturalisme à la française. Si la première scène au tribunal est de facture relativement classique (champ/contrechamp, montage ordinaire bien que millimétré) Xavier Legrand enchaîne ensuite avec une mise en scène étouffante, originale et très maîtrisée. L'attention portée aux sons est par exemple incroyable : le bruit de la ceinture de sécurité ou celui de l'interphone sont des personnages de l'histoire. La scène de la fête d'anniversaire, filmée en condition réelle par de longs mouvements de caméra, est de toute beauté.

La densité du jeu des acteurs, le dépouillement spartiate des péripéties, le travail sur la banalisation des décors : beaucoup d'éléments dans le film contribuent à en faire une oeuvre d'exception dans le paysage du cinéma français actuel, qui n'avait encore jamais montré avec cette acuité l'emprise psychologique d'un homme violent sur sa famille.

Il ne manque pas grand-chose pour la note maximale : peut-être le besoin de ressentir un peu plus le film, plutôt que de l'admirer.

 

3e

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Grand central

http://fr.web.img2.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/035/21003539_20130506123520021.jpgJ'attendais beaucoup de la nouvelle production du tandem Rebecca Zlotowski / Léa Seydoux, dont j'avais beaucoup aimé le précédent film, Belle Epine.

Hélas, après avoir patienté plusieurs heures à Cannes pour déguster le film dans une salle d'Un certain regard pleine à craquer, j'ai bien du me rendre à l'évidence : quelque chose dans le film cloche et l'empêche de réellement fonctionner.

Peut-être cela vient-il de Tahar Rahim, acteur qui me pose beaucoup de problème, puisque je ne le trouve pratiquement jamais crédible ? Ou suis-je gêné par la juxtaposition amour sensuel / radioactivité, sorte de prototype de la fausse bonne idée, uniquement fondée sur un contraste frontal qui ne sert en aucun cas le développement des deux thématiques ? Il faut dire que le fait de devoir tourner toutes les scènes à l'intérieur de la centrale nucléaire en Autriche n'aide pas à la fluidité du film, qui semble au final très "découpé" et peu cohérent.

En réalité, je n'ai pas cru une seule seconde à l'histoire d'amour entre les deux personnages principaux. Léa Seydoux ne parvient pas à être assez vulgaire pour rendre son personnage crédible (et l'artifice de la coupe de cheveux n'y aide pas). Dans cette escalade à vouloir représenter une certaine sorte de vulgarité, le casting semble presque trop construit (Olivier Gourmet et Denis Ménochet, ensemble !).

Le film ne donne pas l'impression de former un tout, mais plutôt un assemblage d'éléments disparates. Il vaut plus pour son ambiance que par une analyse psychologique ou un développement narratif : en somme les défauts de Belle Epine amplifiés par un budget plus important, sans que les qualités du premier film ne subissent le même sort.

 

1e

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