Jusqu'à la garde
Xavier Legrand, avec ce premier film doublement récompensé à Venise, et encensé par la critique, signe une entrée retentissante dans le cinéma français.
Il reprend approximativement les deux personnages de son précédent court-métrage (Avant que de tout perdre) là où il les avaient laissé. Denis Ménochet et Léa Drucker jouent toujours Miriam et Antoine. Le divorce a maintenant eu lieu, et il s'agit d'organiser la garde des enfants.
Ceux qui connaissent le court-métrage seront probablement moins surpris par l'évolution de l'histoire que ceux qui découvrent cette famille classique - et infernale.
La grande force du film est de revisiter intégralement le naturalisme à la française. Si la première scène au tribunal est de facture relativement classique (champ/contrechamp, montage ordinaire bien que millimétré) Xavier Legrand enchaîne ensuite avec une mise en scène étouffante, originale et très maîtrisée. L'attention portée aux sons est par exemple incroyable : le bruit de la ceinture de sécurité ou celui de l'interphone sont des personnages de l'histoire. La scène de la fête d'anniversaire, filmée en condition réelle par de longs mouvements de caméra, est de toute beauté.
La densité du jeu des acteurs, le dépouillement spartiate des péripéties, le travail sur la banalisation des décors : beaucoup d'éléments dans le film contribuent à en faire une oeuvre d'exception dans le paysage du cinéma français actuel, qui n'avait encore jamais montré avec cette acuité l'emprise psychologique d'un homme violent sur sa famille.
Il ne manque pas grand-chose pour que le film obtienne la note maximale. Peut-être le besoin de ressentir un peu plus le film, plutôt que de l'admirer.
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