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Christoblog

Articles avec #cristian mungiu

R.M.N.

Ce nouveau film de Cristian Mungiu commence plutôt bien. L'acuité du tableau qu'il dessine, la profondeur des différents personnages et l'atmosphère d'étrangeté qu'il dégage rappellent les grandes heures du cinéaste roumain. De multiples pistes sont ouvertes (dont peu se résoudront).

La photographie est grise à souhait, la mise en scène d'une précision diabolique. La "méthode Mungiu" culmine dans un plan fixe d'anthologie regroupant au moins une soixantaine de personnages, assistant à une réunion publique sur le sujet de quelques travailleurs sri lankais venus travailler dans le village.

Cette scène est à la fois terrible par ce qu'elle montre (un racisme collectif et irrationnel, qui s'exerce à de multiples niveaux - Allemands, Hongrois, Roumains, gitans, Sri Lankais) et par la façon dont elle le montre (notre oeil de spectateur voyeur se fait presque complice de l'action). Elle mérite à elle seule qu'on aille voir le film.

Passé ce climax d'une qualité inouïe, le film se perd un peu, probablement à cause d'un point de vue un petit peu convenu sur le sujet de la xénophobie (on pense aux Dardenne) et d'un manque de précision dans le développement du scénario, qui ne sait pas vraiment conclure. Les dernières images du film sont à cet égard assez frustrantes : on ne comprend pas ce qu'on voit, et les interprétations qu'on peut donner à cette fin (que Mungiu refuse de commenter) sont vraiment trop variées pour que le procédé soit intéressant. Pour ma part j'y ai vu une allégorie de la xénophobie refoulée.

Du pour et du contre donc pour cette oeuvre un peu moins aboutie que les précédentes productions du cinéaste roumain.

Cristian Mungiu sur Christoblog : 4 mois, 3 semaine, 2 jours - 2007 (****) / Au-delà des collines - 2012 (***) / Baccalauréat - 2016 (***)

 

3e

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Baccalauréat

Mungiu, c'est du solide : le réalisateur roumain ne repart jamais bredouille du Festival de Cannes.

Comme chez Farhadi ou Zvyagintsev, on sait qu'il va être difficile d'être franchement déçu, tellement la somme des qualités qui entourent le film est grande : scénario millimétré, élégance suprême des mouvements de caméra, acteurs au top.

Baccalauréat commence en plus très nerveusement (pour un Mungiu), avec un jet de pierre dans la vitre, qui m'a brièvement rappelé une scène magnifique de la Palme d'or Winter sleep, puis une succession d'évènements plus ou moins violents et dérangeants.

Le film déploie après ce début plutôt surprenant toute une panoplie de thématiques profondes et intéressantes : la génération qui est revenue en Roumanie après la chute de Ceausescu, la corruption endémique, les conflits moraux de plusieurs ordres.

Dans ce film dérangeant et intelligent, Mungiu malmène notre sens du bien et du mal, avec un talent qui abandonne certaines fioritures de mise en scène pour tendre vers l'épure, au service de ses personnages.

Cristian mungiu sur Christoblog : 4 mois, 3 semaine, 2 jours - 2007 (****) / Au-delà des collines - 2012 (***)

 

3e

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Au-delà des collines

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/57/31/20103014.jpgMungiu n'est pas un cinéaste rigolo.

Il aime les sujets difficiles et désagréables. Celui de l'avortement clandestin cinglait dans 4 mois 3 semaines 2 jours, sec comme un coup de fouet.

Dans Au-delà des collines Mungiu s'attaque à un certain obscurantisme religieux sur fond de critique sociale, à travers le portrait d'une jeune religieuse et de son amie, qui vient la rejoindre au couvent pour essayer de la convaincre de partir. Le film est long, assez lent, mais il place méthodiquement ses pions dans une escalade assez saisissante vers un final attendu mais impressionnant.

La mise en scène de Mungiu est superbe : longs travelings inspirés, photographie admirable, direction d'acteurs exigeante, utilisation savante des focales, composition de plans comme des tableaux de maîtres. Le film est d'une beauté plastique à couper le souffle et possède un peu de cette violence sourde et peu engageante qui suintait de 4 mois 3 semaines 2 jours. On pourra juste regretter que la nervosité décharnée de ce dernier se mue un peu ici en un exercice de style souvent brillant (comme le travelling arrière sur le visage de l'héroïne principale vers la fin - quel regard !, ou les sidérantes scènes d'hôpital) mais parfois aussi un poil poseur, comme dans le plan final, définitivement "auteur".

Mungiu est clairement un cinéaste des tensions, et le film en est traversé  de part en part : Dieu / diable, tentatives d'échappées / retour au monastère, amour terrestre / amour céleste, enfermement névrotique / plongée dans la réalité externe, tendresse du passé / promesse du futur, folie / raison. De ce fait, Au-delà des collines est un film inconfortable, parfois ennuyeux et à d'autres moments littéralement transcendant. On songe à Bresson et à Nuri Bilge Ceylan, à un polar métaphysique teinté de naturalisme. Une oeuvre dense et complexe, servies par deux belles actrices qui n'ont pas volé leur Prix d'interprétation à Cannes.

 

3e

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4 mois, 3 semaines, 2 jours

Certains films sont physiquement éprouvants.

4 mois 3 semaines 2 jours font partie de ceux là.

Mungiu propose un cinéma physique, sensoriel, dans lequel un plan peut-être un vrai coup de poing en pleine figure, un regard un coup de poignard dans le coeur.

Ici, la nuit est vraiment noire, les bruits de repas sont assourdissants, le temps s'écoule comme de la colle.

Le film approche la perfection sur tous les plans, et la mise en scène discrète et efficace rappelle un peu maître Kieslowski (une utilisation des décors et une science du cadre hors du commun). Les actrices et acteurs - Monsieur Bébé !! - sont magnifiques, le restitution de la vie quotidienne impressionnante.

Le film réussit ce qui en cinéma est une sorte de Graal : montrer l'indicible avec la plus grande économie de moyen. C'est Bresson, Hitchcock, Kubrick qu'il faut convoquer.

Une palme d'or méritée, cela faisait longtemps. A voir absolument.

 

4e

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