Ajami
J'éprouve rarement le sentiment enivrant de voir un film génial. Vous le savez, si vous venez souvent sur ce blog, j'ai plutôt la dent un peu dure.
Lisez donc bien ce billet, et ensuite foncez voir Ajami si vous avez la chance d'avoir une projection près de chez vous.
Pour faire simple : c'est le plus beau film choral que j'ai vu, et quand vous songez à la concurrence dans ce domaine (Short cuts en tête), ce n'est pas un mince compliment. Nous suivons à travers plusieurs chapitres les destinées d'Omar, plongé malgré lui dans une affaire de règlement de compte avec un clan mafieux, amoureux d'une chrétienne, de Malek, jeune clandestin de la région de Naplouse, de Dando, policier juif dont le frère a disparu, de Binj, jeune arabe branché qui sort avec une juive et dont le frère fait une grosse bêtise, et de plusieurs autres personnages. Chacun, outre son caractère propre, parfaitement dessiné, nous donne à réfléchir sur la société israélienne d'aujourd'hui.
Tous ces personnages vont se croiser, leurs histoires se heurter, s'entrechoquer. Comme dans les meilleures histoires de ce type, plusieurs scènes sont revues, avec à chaque fois un angle qui nous fait découvrir un évènement différent : du grand art.
Un scénario machiavélique, une galerie de personnages hors du commun, une vision magnifique de Jaffa, ville cosmopolite où les différentes communautés religieuses cohabitent, mais encore une mise en scène formidable, tout le contraire d'une machine tape à l'oeil : sereine, intelligente. Les deux réalisateurs savent jouer d'une palette subtile alternant les mouvements de caméras élégants, jouant magnifiquement avec les lumières orientales, offrant des gros plans de visages extrêmement touchant. Ils redonnent aussi un sens véritablement dramaturgique - presque moral pour paraphraser Godard - au fondu au noir.
Le premier vrai gros choc de l'année 2010. A voir absolument.
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