Ida
Il y a dans Ida une volonté de formalisme à outrance profondément désagréable. Le réalisateur Pawel Pawlikowski multiplie les effets de style : format carré (1,37:1 exactement), photographie en noir et blanc, éclairages très travaillés, succession de plans rigoureusement fixes d'une quinzaine de secondes (la caméra ne bouge pas une seule fois pendant le film).
Ces poses de styliste boulimique s'accumulent, jusqu'à devenir une signature perpétuelle qui mange tout le cadre, puis toute l'histoire, et enfin toutes les émotions. Par exemple, la manie de ne jamais cadrer les personnages au milieu de l'écran, mais toujours décentrés, et le plus souvent vers le bas, devient une afféterie un peu précieuse et disons-le, ridicule, lorsqu'elle conduit à couper les visages en deux.
Tout est tellement construit pour paraître joli (les intérieurs, les paysages, le soleil, la musique) que le film dans son ensemble paraît vain et comme engoncé dans sa propre carapace de naphtaline.
Rien d'étonnant alors que Ida tourne à l'exercice de style, et donne l'impression fâcheuse de survoler des sujets pourtant essentiels : le massacre des juifs par la population polonaise lors de la seconde guerre mondiale, la vocation religieuse, la tentation de vivre sa vie d'être humain avant de se confier à Dieu, la solitude, les procès politiques, l'alcoolisme, le suicide.
A l'image de la scène lors de laquelle les corps sont déterrés, le film est trop propre, trop froid, trop désincarné pour laisser passer de vraies émotions. Il ne parvient au final qu'à être une collection d'images que certains jugeront peut-être admirablement composées, mais qui ne sont en fait que parfaitement arrangées pour séduire.
Ida n'est pas hideux, mais sans idées.
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