Un amour de jeunesse
La première chose qui cloche dans Un amour de jeunesse, c'est l'acteur qui joue le jeune garçon, et que nous appellerons Bouclettes pour plus de commodités dans la suite de cet article.
Que la jeune héroïne voue un amour fou à cet éphèbe décérébré, qui annone un texte idiot avec une diction pitoyable, et qui ne semble pas réfléchir plus loin que le bout de son nez, n'est tout simplement pas crédible.
Je sais que l'amour ne s'explique pas et que le cinéma nous a montré qu'on pouvait éprouver de la passion pour un garde chasse inculte, une poupée gonflable, un gorille ou un porte-clef, mais là je ne marche pas. Personne ne peut aimer Bouclettes à ce point, ce n'est tout simplement pas possible. Et en plus il s'appelle Sullivan ! A propos d'amour, on pense évidemment au cinéma de Christophe Honoré, et il vous suffit de comparer Bouclettes à Louis Garrel (pourtant frisé lui aussi, mais avec quelle classe !) pour comprendre mon point de vue...
Cet aspect n'est pas le seul problème lié au réalisme dans le film. Un autre est l'écoulement du temps. 8 longues années s'égrènent sans que l'héroïne n'évolue vraiment physiquement, et Bouclettes encore moins (d'ailleurs, on dirait aussi qu'il garde le même vélo tout au long de ces années). Dans Blue Valentine, pour une durée de 6 ans, le changement des deux personnages est autrement réaliste.
Toujours dans la même veine, Lola Creton en chef de chantier, c'est ridicule, on n'y croit pas une demi-seconde. Le caractère très littéraire des dialogues renforce tout au long du film le sentiment de non-réalité. Le film semble être le squelette d'une histoire d'amour, la vision idéalisée, épurée d'une sorte archétype idéal. Rien n'accroche, rien ne dépasse, mais tout semble creux et lisse.
La mise en scène, rigoureuse, n'échappe pas parfois à la tentation maladroite du surlignage (le chapeau de paille qui s'envole au ralenti dans un des derniers plans, les 70 plans de boites aux lettre, etc). Dans la partie ardéchoise, on sent bien que Mia Hansen-Love aimerait filmer la nature de façon panthéiste, comme le font Mallick ou Pascale Ferran dans Lady Chatterley, mais elle n'y parvient pas.
Pour finir, j'aimerais signaler que le corps nu de Lola Créton me semble exposé un peu trop souvent, alors que celui de Bouclettes reste sagement en dehors du champ, pour une raison que je ne m'explique pas, mais qui nous empêche de vérifier que son surnom vaut pour autre chose que pour ses cheveux.
Le film me laisse au final une profonde impression de frustration et d'incompréhension.
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