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Christoblog

Articles avec #john hawkes

Winter's bone

Ree Dolly vit avec sa mère folle, son petit frère et sa petite soeur au sud du Missouri. Elle s'occupe de tout, mais les temps sont durs et l'argent manque. Le cheval est cédé aux voisins, il faut manger des écureuils. Son père, fabricant de drogue, vient d'être libéré de prison moyennant une grosse somme. Il a intégré sa maison dans la caution et s'il ne se présente pas à une certaine date, la maison sera saisie.

Pour Ree, une seule solution : trouver son père.

Commence alors un parcours difficile pour la jeune fille dans son propre village, pour comprendre ce qu'a fait son père et ce qu'il est devenu, pour tenter d'approcher la vérité. Elle va rencontrer la peur, la violence, la pauvreté, l'indifférence, la compassion, l'horreur.

Winter's bone porte en son sein une sorte de perfection apaisée. Tout y est parfaitement mesuré, idéalement décidé, magnifiquement réalisé.

Rarement une mise en scène m'a paru aussi fluide, aussi élégante, aussi sereinement sûre d'elle. La caméra oscille, tangue légèrement, s'approche des visages ou des mains, les caresse, puis s'éloigne dans un plan large brillamment composé. Le montage est exigeant, parfait. 

Le décors et les tronches des habitants évoquent irrésistiblement le contexte de Délivrance, le film de Boorman, banjo compris : il est vraiment rare de voir cette Amérique profonde au cinéma. Le film tire un profit maximal d'un décor étonnant. Une nature à la fois sauvage, superficiellement apprivoisée, et en même temps, quelconque dans sa tristesse hivernale. De ce décors expressif, troussé de caravanes à junkie, de fermes en friche et de décharges domestiques, sourd une atmosphère particulièrement anxiogène.

Tout cela ferait un excellent documentaire, si l'intrigue n'était pas elle-même subtile et déroutante, se dévoilant provisoirement dans sa limpidité et son horreur, approfondissant les relations entre les êtres en même temps qu'elle explore les personnalités.

Enfin, que dire de la prestation époustouflante de Jennifer Lawrence, littéralement bluffante et présente à l'écran de façon quasi continue du premier au dernier plan, sorte d'îlot de volonté pure (qui ne craquera que deux fois), à la fois solide et tendre.

Le film égrène sa musique sensuelle, triste, intelligente, bouleversante, assez proche de celle distillée par les héroïnes fragiles et puissantes à la fois qu'Andrea Arnold (Red road, Fish tank) nous montre dans d'autres milieux, urbains ceux-ci, mais tout aussi pauvres et violents. Au cours de ce voyage quasi-immobile se succèdent des scènes d'anthologie qui chacune mériterait une analyse détaillée : un concert improvisé, un rêve en noir et blanc, un recrutement de l'armée américaine, une visite à la ville, une poursuite dans un hangar à bestiaux. Et LA scène, bien sûr....

Le premier grand rôle de Jennifer Lawrence est aussi peut-être le meilleur.

 

4e

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