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Christoblog

Articles avec #canada

Vampire humaniste cherche suicidaire consentant

Derrière ce titre accrocheur et très bien trouvé se cache un film québécois délicieux, mélange de comédie romantique et de coming of age movie, adoptant tous les codes des films de vampire pour mieux s'en détacher.

La jeune vampire Sasha, n'aime pas tuer les humains. Ses parents, un peu comme un couple de fauves qui essaierait d'apprendre en vain à leur rejeton de chasser des gazelles, se désespèrent : que deviendra leur fille si elle ne sait pas se procurer sa subsistance par elle-même ?

La jeune fille a alors une idée géniale : écumer les réunions de suicidaires anonymes pour faire son marché de sang frais, tout en en laissant sa conscience en paix. Les choses se compliquent lorsqu'elle tombe d'accord avec un jeune homme ... dont elle tombe amoureuse.

La réalisatrice Ariane Louis-Seize (quel nom !) nous donne une oeuvre délicate, très plaisante et superbement mise en scène, regorgeant d'idées amusantes et parfois, émouvantes. On s'amuse beaucoup en se demandant quelle issue pourra être trouvée à cette romance nocturne contre-nature, et on n'est pas surpris par la fin.

Une excellente surprise, qui fournit le plaisir de retrouver une des interprètes du très bon Falcon Lake, la jeune Sara Montpetit.

 

2e

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La femme de mon frère

Emballé par le film suivant de Monia Choukri (Simple comme Sylvain), je me suis décidé à regarder en séance de rattrapage le premier film de la Québécoise.

Mal m'en a pris. La femme de mon frère est en effet un brouillon indigeste et mal maîtrisé dans lequel coexistent plusieurs films : une chronique familiale à la limite de l'hystérie (l'influence de Xavier Dolan est manifeste), une comédie romantique décalée, un film d'auteur aux recettes alambiquées (la fin zarbi, le montage saccadé d'une même action), un portrait délicat de jeune femme célibataire en recherche d'identité. Bref, tout cela sent le "premier film dans lequel je veux mettre toutes mes idées".  

Le travail sur le son et la musique diagétique rend certaines scènes proprement insupportables : là encore, une afféterie inutile d'apprentie réalisatrice mesurant l'étendue de son pouvoir, y compris de nuisance.

Ce tableau d'un amour excessif entre une frère et une soeur aurait mérité mieux que le traitement kaléidoscopique et parfois épileptique que lui réserve Monia Choukri.

 

1e

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Simple comme Sylvain

Le nouveau film de Monia Chokri est certes une comédie parfaitement huilée, mais c'est aussi plus que cela : une comédie romantique, une fine description de trois classes sociales très différentes, une apologie de la sensualité et un beau portrait de femme.

Simple comme Sylvain décrit l'amour entre deux personnes de milieux très différents comme peu de films ont réussi à le faire ces dernières années : dans des genres différents, j'ai pensé à La vie d'Adèle et au magnifique Pas son genre, de Lucas Belvaux. 

Pour ce faire Monia Chokri utilise des procédés stylistiques qui ne reculent pas devant une certaine vulgarité volontaire (l'ombre de Xavier Dolan, pour qui elle a joué plusieurs fois, surplombe parfois le film) et un subtil décalage qui fait mine de singer l'émotion pour mieux la provoquer.

Il y a une foi en la magie du cinéma dans la démarche de la réalisatrice québécoise qui rend son film éminemment sympathique, en plus d'être tout simplement très bon, léger et profond à la fois.

 

3e

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Falcon lake

Ce premier film de Charlotte LeBon est formidable par sa forme.

Sa photographie crépusculaire, ses cadres de Polaroïd et son atmosphère moite, ses acteurs sensibles : tout cela contribue à donner à Falcon lake la patine d'un souvenir humide et cotonneux.  

La mise en scène aérienne de Charlotte LeBon fait merveille dans ce registre sensible.

L'intrigue n'est malheureusement pas totalement à la hauteur des autres qualités du film, et Falcon Lake n'avait notamment pas besoin de cette fin bancale, qui se veut ouverte et mystérieuse, mais qui ne fait qu'embrouiller un propos jusqu'alors limpide.  

Charlotte LeBon prend ici rendez-vous, et on a hâte de voir comment elle va négocier le délicat tournant du deuxième film.

 

2e

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Les crimes du futur

Quand le nouveau film de Cronenberg s'est terminé, j'attendais toujours qu'il commence.

Jusqu'alors, j'avais surtout l'impression d'avoir vu une sorte de court-métrage, entièrement nocturne (à l'exception de la première scène, la meilleure), tourné à l'évidence dans une zone portuaire grecque abandonnée, très verbeux et peu incarné.

Hélas, ce film - peut-être testament ? - du réalisateur canadien n'est pas réellement fini. Il comprend bien quelques scènes amusantes, mais rien n'est vraiment convaincant sur le fond : les personnages sont réduits à des caricatures et les idées originales ne sont pas réellement développées (comme celles des mangeurs de plastique).

Il m'est arrivé durant le film de me dire que certains dialogues exprimaient des idées plus intéressantes que toutes les images qui figuraient à l'écran. Pas très bon signe pour ce qui restera comme un manifeste auto-centré, creuse dystopie, développant une esthétique curieusement datée, rétro-kitsch si l'on veut, peu en lien avec l'époque actuelle et anesthésiant toute émotion.

Un chant du signe à peine esquissé, embryon d'un film que l'on attend encore.

 

1e

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Mon année à New-York

Le covid a brutalement interrompu la carrière de ce joli film présenté en ouverture du Festival de Berlin, en février 2020, et qui n'a jamais trouvé le chemin des salles françaises, englué dans l'embouteillage post confinement.

Mon année à New-York doit beaucoup à ses deux interprètes principales : Sigourney Weaver impériale en agent littéraire de JD Salinger et Margaret Qualley, irrésistible en jeune employée ingénue de la maison d'édition du prestigieux et mystérieux écrivain. Cette dernière, découverte dans la série Leftovers, et qui explose depuis (on l'a vu par exemple dans Once upon a time ... in Hollywood de Tarantino, et dans la série Maid), est rayonnante. Sa prestation enjouée entraîne le film dans un tourbillon frais et vintage.

Les années 90 sont délicieusement reconstituées, et forment un cadre parfait à ce récit d'apprentissage charmant et instructif, dans lequel l'informatique est encore balbutiante.

Une oeuvre sans chichi du québécois Philippe Fallardeau, à déguster en DVD ou sur Canal+. 

 

2e

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Matthias et Maxime

Dans ce film intime et modeste, Xavier Dolan, surdoué parfois hystérique, semble essayer de marquer une pause.

On retrouve ici certaines de ses préoccupations habituelles (le rapport à la mère toxique, les relations amoureuses) et d'autres plus nouvelles (la bande de potes bruyants). 

Il y a peut-être un peu moins de tics que d'habitude, même si on a droit à l'habituelle pluie de confettis / particules et aussi à la bande-son à fond, caméra rivée au macadam.

C'est décousu, souvent répétitif, parfois touchant, et un peu juste pour remplir tout un long-métrage. Il y a aussi une sorte de hiatus entre l'âge réel de Xavier Dolan et celui du personnage qu'il joue. Le film n'est pas exempt de maladresses criardes (le coup de fil pour avoir une recommandation), flotte de façon constante entre différentes intentions et n'est pas vraiment convaincant.

Une initiative sympathique, mais qui n'arrive pas à me convaincre totalement.

Xavier Dolan sur Christoblog : J'ai tué ma mère - 2009 (**) / Les amours imaginaires - 2010 (**) / Tom à la ferme - 2012 (**) / Laurence anyways - 2012 (***) /  Mommy - 2014 (****) / Juste la fin du monde - 2016 (*) / Ma vie avec John F. Donovan - 2019 (*)

 

2e

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Ma vie avec John F. Donovan

Le dernier film de Xavier Dolan semble constitué de guimauve. Il n'a ni sang, ni nerfs, ni colonne vertébrale.

Au milieu de l'océan de mièvrerie poisseuse que constitue Ma vie avec John F. Donovan j'ai longtemps guetté un éclair de génie, qui rappellerait Mommy ou Laurence anyways. Mais malheureusement le film m'a paru s'aggraver au fil des plans, devenant de plus en plus inconsistant.

L'histoire n'est d'abord ni très crédible, ni très intéressante. La mise en scène est grossière, multipliant certains tics dolaniens qui semblent ici toujours tomber sur la face "mauvais goût". La direction d'acteur est catastrophique : Kit Harington expose ses limites sans vergogne, Natalie Portman minaude, Thandie Newton est ridicule en dure journaliste soudain sous le charme du beau gosse enjôleur. 

Il y a dans le film, à l'instar de certaines parties de l'interview ou de cette scène horrible sous la pluie entre la mère et le fils, des moments où le spectateur a honte de faire partie d'une telle mascarade, où l'envie de hurler STOP s'empare brutalement de tout son cerveau : stop à l'enfilade de poncifs mielleux, stop à l'esthétique de roman-photo à l'eau de rose, stop au débordement dégoulinant d'égo sur la toile.

Xavier Dolan sur Christoblog : J'ai tué ma mère - 2009 (**) / Les amours imaginaires - 2010 (**) / Tom à la ferme - 2012 (**) / Laurence anyways - 2012 (***) /  Mommy - 2014 (****) / Juste la fin du monde - 2016 (*)

 

1e

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La chute de l'empire américain

Pas grand-chose à critiquer, ni à louer, dans le dernier film de Denys Arcand qui vient clôturer une trilogie très informelle débutée avec Le déclin de l'Empire Américain (1986), et poursuivie avec Les invasions barbares (2003).

Le film est une pochade sensible, baignée d'un mauvais esprit assez réjouissant. L'anti-héros de service (très bon Alexandre Landry) va à son corps défendant devenir propriétaire d'une énorme somme d'argent, qu'il va utiliser pour le bien commun en utilisant les possibilités de magouilles offertes par la finance internationale. Il sera épaulé dans son entreprise par un vieux briscard roué (Rémy Girard) et une call-girl aussi futée que sa plastique est attractive (l'étonnante animatrice télé Maripier Morin).

On passe un bon moment à regarder ce conte totalement irréaliste, qui trouve son intérêt dans la véracité des réactions psychologiques des différents personnages. Certaines scènes (la discussion introductive dans le bar, le défilé des prétendants au blanchiment) sont franchement jouissives.

Un divertissement sans prétention, à voir comme tel.

 

2e

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Room

Le sujet de Room est le sujet casse-gueule par excellence.

Pour résumer, et en spoilant le moins possible, le film raconte l'histoire de Joy, une jeune fille enlevée et séquestrée par un malade dans sa cabane de jardin. Après deux ans de captivité, Joy a un enfant, Jack, qui est donc élevé jusqu'à ces cinq ans dans une seule pièce, d'où le titre du film.

La liste est longue des façons dont le film aurait pu être raté. Il aurait d'abord pu être glauque et malsain, installant le spectateur dans la peau d'un voyeur honteux. Il aurait pu être insupportable en installant des processus de terreur pure. Il aurait enfin pu être inutilement larmoyant.

Au final Room n'est rien de cela : c'est un film délicat, sensible, intelligent, dont on sort le moral regonflé à bloc. C'est tout à fait étonnant qu'un film bâti sur un sujet aussi terrible puisse faire un tel effet sur le spectateur.

Le réalisateur irlandais de 49 ans, Lenny Abrahamson, complètement absent de mes radars jusqu'à aujourd'hui, fait preuve d'une maestria incroyable. Il utilise à la perfection tout l'arsenal de la mise en scène et du montage au service de son histoire, sans fanfaronner, et avec une modestie géniale.

Brie Larson, déjà remarquée pour son incroyable prestation dans States of grace, fait ici un sans faute de bout en bout. Le jeune acteur, Jacob Tremblay, est tout simplement exceptionnel. Souvent filmé en très gros plan, il parvient à exprimer une immense palette d'émotions. Lenny Abrahamson s'avère être un remarquable directeur d'acteur.

Room est un film dont on peut parier sans crainte qu'il laissera un impérissable souvenir dans la tête de tous ceux qui l'auront vu.

 

4e  

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Captives

Difficile de dire ce qui est le plus mauvais dans ce film : le méchant qui surjoue effrontément (Kevin Durand), le scénario incroyablement décousu, le montage alambiqué sans raison.

Le sentiment éprouvé à la vision de Captives est celui d'un grand gâchis : Egoyan fut un très bon réalisateur et il use ici son talent sur une bonne idée (un réseau de pervers qui prendraient son plaisir à voir la souffrance des autres) honteusement mal exploitée.

Le film a ceci d'étonnant qu'il parvient à échouer comme rarement à installer une quelconque tension. Il tente de masquer les faiblesses criardes de son scénario (les relations amoureuses des deux flics, le vraie consistance du réseau, son chef) par des tentatives pitoyables de maquillages temporels.

C'est un vrai mystère que ce film à la mise en scène faible et poussive ait été en sélection officielle à Cannes dernier. Sur un sujet voisin, le Prisoners de Denis Villeneuve, loin d'être un chef-d'oeuvre, était bien plus réussi.

 

1e 

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Mommy

On attendait la grande oeuvre de Xavier Dolan, la voici.

Tout ce que promettait le jeune prodige québécois explose ici avec une maîtrise exceptionnelle : direction d'acteurs admirable, énergie électrisante, sens de la mise en scène époustouflant. Je me souviendrai longtemps de la trouvaille visuelle qui accompagne la scène du skateboard et la musique d'Oasis (je ne veux pas en dire plus, au risque de gâcher l'effet de surprise) : je crois que c'est le moment de cinéma qui m'a le plus impressionné de toute ma vie de cinéphile. Mon coeur s'est littéralement dilaté. Des idées géniales commes celle-ci, le talent inné et complet de Dolan semble pouvoir en produire plusieurs à la minute.

Mommy est aussi - et sûrement avant tout - une tornade émotionnelle provoquée par deux actrices et un acteur qui repoussent les limites de l'art de jouer : ils sont géniaux de bout en bout, Anne Dorval en tête. La première scène de violence est déjà un paroxysme de tension et d'émotion, qui sera suivi par bien d'autres. Dolan y réussit également quelque chose d'un peu nouveau pour lui : changer de style visuel fréquemment, pour coller au sujet de la scène.

Le seul petit bémol pour moi se situe vers la fin du film, que je trouve moins convaincante : la projection dans l'avenir est un peu naïve, la scène du parking inutilement longue, et le tout dernier plan ne m'a pas entièrement convaincu. C'est toutefois bien peu de choses pour un film qui aurait fait une belle Palme d'Or. 

Xavier Dolan sur Christoblog : Tom à la ferme (**) / Laurence anyways (***) / J'ai tué ma mère (**) / Les amours imaginaires (**)

 

4e

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Tom à la ferme

Le style baroquisant de Xavier Dolan se prête à mon avis bien mieux aux envolées romanesques, narratives et/ou autobiographiques (Laurence anyways, J'ai tué ma mère) qu'aux épures (Les amours imaginaires, Tom à la ferme).

On retrouve certes dans son dernier film ce qui fait le charme du jeune réalisateur québécois : un sens de la caméra qu'on dirait inné, une cohérence impressionnante de tous les éléments artistiques du film (jeu d'acteurs, costumes, décors, lumières, musiques). L'ensemble m'a toutefois semblé manquer de souffle et d'énergie. Tom à la ferme tient sur un fil ténu et il peut parfois donner l'impression de tourner à vide (à l'image de la musique trop envahissante de Gabriel Yared), ou d'avoir dit ce qu'il avait à dire dès sa première partie. Celle-ci, qui décrit l'arrivée de Tom (et qui constitue d'ailleurs le coeur de la bande annonce) est pour ainsi dire parfait, et se suffit presque à lui-même. Les péripéties qui suivent semblent se répéter ad nauseam autour des thèmes exposés initialement : une attraction de Tom pour le frère violent de son boyfriend, les rapports faussés à la mère.

C'est comme si le film, très bien démarré, patinait en milieu de montée, puis s'arrêtait net, à l'image de cette fin cut un peu bizarre, qui semble laisser tous les personnages en lévitation.

Comme d'habitude avec Dolan, j'ai envie de dire : de grandes capacités, mais peut beaucoup mieux faire.

Retrouvez tout Dolan sur Christoblog.

 

2e  

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Le démantèlement

http://fr.web.img3.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/015/21001520_20130425112919374.jpgSujet a priori peu excitant pour ce long-métrage québécois : comment un éleveur de mouton doit se séparer de sa ferme pour venir en aide financièrement à une de ses filles.

Si Sébastien Pilote arrive à nous intéresser à cette histoire minimaliste, c'est par la justesse de ses observations quasi-documentaires (on perçoit réellement la dureté de ce métier, comme dans les docs de Depardon) et par le jeu à la fois retenu et terriblement expressif de Gabriel Arcand.

Le film, en décrivant minutieusement les différentes étapes par lesquelles passe Gaby, parvient à donner une profondeur de destinée à un évènement somme toute assez courant. C'est toute la vie du héros qui défile dans ses yeux tristes : la ferme aura été à la fois sa malédiction et sa raison de vivre.

Le film est donc intéressant et plaisant (à noter des seconds rôles très expressifs), même s'il lui arrive, c'est vrai, d'être un peu longuet.

 

2e

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Rebelle

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/89/64/35/20059620.jpgJe ne m'attendais à rien de bien précis en entrant dans la salle pour découvrir ce curieux film canadien traitant du sujet des enfants soldats africains.

Je me demandais d'ailleurs vaguement s'il s'agissait d'un documentaire, et je n'avais pas noté que la jeune actrice avait obtenu l'Ours d'argent de la meilleure interprète féminine à Berlin 2012.

Le film me cueillit donc à froid, avec son réalisme sans concession, ses scènes chocs dès les premières minutes, et son rythme effréné. J'ai été littéralement happé par le récit du voyage initiatique de la jeune Komona, 10 ans au début de l'histoire, 13 ans à la fin.

Autant le dire, le film est assez rude par moment (il est d'ailleurs interdit avec raison au moins de 12 ans), et il ne nous est épargné aucun des mauvais traitements que subissent ces jeunes victimes : obligation de tuer, viol, coups. Il est aussi doucement fantastique (la fillette à la faculté de voir des fantômes, les gri-gris sont omniprésents) et devient même amusant lorsque Komona s'éprend du jeune homme nommé Magicien, qui doit trouver un coq blanc pour se marier avec elle.

Rebelle a la faculté rare de nous faire passer des larmes aux rires sans transition. Le tableau qu'il dresse de l'Afrique est absolument saisissant de brutalité. La mise en scène de Kim Nguyen, vive et alerte, rend l'expérience inoubliable. Par certains côtés (les rebelles dans la forêt, la situtation de contrainte) Rebelle ressemble un peu au Captive de Brillante Mendoza, mais il lui est supérieur en tout point. On sort secoué de la projection, un peu sonné par le mélange de violence et de résilience qui irrigue le film, et curieusement séduit par la musique plutôt cool ou entraînante, en (apparente) contradiction avec la gravité du sujet. Une franche réussite, un film injustement passé innaperçu.

PS : des éléments étranges du film appellent des recherches complémentaires : quels sont ces bâtiments d'aspect chinois ? Où le film a-t-il été tourné ? Quel est ce regoupement d'albinos ? A suivre...

 

4e

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Laurence anyways

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/89/80/49/20129801.jpgPeu de films peuvent prétendre laisser un souvenir qui s'améliore à ce point avec le temps.

Disons-le tout net, pendant la projection, ce sont surtout les défauts du film qui m'ont sauté aux yeux : quelques hésitations des acteurs, des scènes qui s'étirent sans justification, des kitscheries à répétition, une narration qui s'emberlificote, une BO et une bande-son souvent poseuse.

Et puis, à l'usage, le temps passant, il faut bien reconnaître qu'on ressort marqué par le film et impressionné par le souffle romanesque qui le traverse. Le mérite en revient à l'interprétation incroyable de Suzanne Clément (prix d'interprétation à Un certain Regard cette année). L'actrice est sublime, tour à tour forte, faible, brisée, reconstruite, en colère, amoureuse : elle utilise un spectre d'une variété incroyable, tout en maintenant une densité de jeu exceptionnelle. Monia Chokri (sa soeur) est également très bonne, tout comme Nathalie Baye qui campe une mère capable d'une cruauté effarante.

J'ai été beaucoup moins convaincu par la prestation de Melvil Poupaud, dont la greffe québécoise tarde à prendre dans le film. J'ai eu beaucoup de mal à croire en son histoire, et j'ai trouvé son jeu parfois approximatif. Le film se déroulant, cette impression s'est heureusement progressivement estompée, au fur et à mesure que le personnage prend de l'assurance dans sa nouvelle vie.

Quant à la mise en scène de Xavier Dolan, j'en viens à penser qu'il faut la prendre dans son ensemble et l'aimer telle qu'elle est, en entier, ou pas. Après trois films, force est de constater que les mêmes tics se reproduisent de films en films : personnages filmés de derrière, ralentis, gros plans (en particulier sur les visages), incrustations bizarres, scènes oniriques, montage cut sur une BO jouée très fort, pluie d'objets, etc.

Après réflexion, j'ai décidé d'aimer son style, qui ici sert en plus habilement un propos à forte charge émotionnelle. Dolan devra chercher dans l'avenir à s'entourer de professionnels en qui il pourra avoir confiance : un vrai monteur professionnel l'aurait probablement aidé à construire son film de façon plus efficace. Il semble pour l'instant s'enfermer dans la posture d'une jeune artiste complet, démiurge omnipotent régnant sur son grand oeuvre.

Mises à part ces quelques réserves, Laurence anyways constitue le premier jalon d'une importance significative dans la carrière du jeune québécois, qu'on sent irrésistible.

Xavier Dolan sur Christoblog : J'ai tué ma mère / Les amours imaginaires

 

3e

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J'ai tué ma mère

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/70/49/31/19100866.jpgCe qu'il y a de plus intéressant dans J'ai tué ma mère (2009), c'est le parcours de son réalisateur Xavier Dolan. A 19 ans, alors qu'il n'a tourné aucun court-métrage, il manifeste une assurance incroyable, s'assumant à la fois auteur, acteur et réalisateur de son film. Il y a du Woody Allen dans la démarche de Dolan, dans cette façon de se mettre en scène sans éviter l'auto-dérision, ni l'impudeur.

Formellement, le film multiplie sans vergogne les audaces  : succession de plans fixes très rapides pour ouvrir certaines séquences, ralentis, caméra portée, accélérés, effets de lumière, textes incrustés... Le film peut du coup paraître un peu fourre-tout, sorte de couteau suisse de l'apprenti réalisateur. 

Il se regarde toutefois avec un certain plaisir, dû en grande partie à la qualité de jeu de l'actrice jouant la mère, l'excellente Anne Dorval.

De haine il n'est finalement pas question, tellement le film est à l'évidence un cri d'amour à sa mère lancé par un ado en pleine crise. Baigné de culture littéraire, picturale et cinématographique, J'ai tué ma mère est aussi le manifeste d'un futur grand, intégrant déjà tout un univers et une conception très mature de sa propre destinée.

Xavier Dolan sur Christoblog : Les amours imaginaires

 

2e

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Incendies

Incendies est tiré de la célèbre pièce de Wajdi Mouawad, que je n'ai pas vue.

Pour commencer, j'ai un problème avec le scénario. Je veux bien admettre les coïncidences, c'est même souvent le ressort dramatique par excellence, mais là, franchement, et même en considérant que le monde est petit, ça fait beaucoup. Je pense à la prison + la piscine, ceux qui verront le film comprendront.

Mais bon, passons. Ce ne serait pas si grave si le réalisateur canadien n'avait échangé sa caméra contre une truelle. Il utilise les morceaux musicaux comme des parpaings, les changements de focale comme des marteaux-piqueurs et les flashbacks comme des bulldozers. La nuance n'est pas son fort, témoin cette scène ridicule ou le jeune fils fait une plaisanterie sur le viol vraiment mal venue.

Les scènes de violence ne sont pas tournées de façon professionnelle (lors de l'assassinat de Wahab on dirait que le flingue est en plastique) et la volonté de faire de la belle image nuit cruellement au réalisme du film (le bus en feu...).

De nombreux plans de remplissage nuisent également au rythme du film, qui apparait finalement bancal et comme inachevé. Heureusement que les actrices jouant Nawal et Jeanne Marwan tirent leur épingle du jeu : elles sauvent globalement l'essentiel.

Denis Villeneuve fera bien mieux ensuite, lorsqu'il aura réduit son style à l'essentiel.

 

2e

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Les amours imaginaires

MK2 DiffusionLes amours imaginaires est une petite chose pimpante, qui va plaire aux amateurs de friandise.

Le bonbon est sucré, coloré, avec juste un peu d'amertume. Le résultat n'est pas désagréable.

Xavier Dolan emprunte à beaucoup de monde dans ce film : à Wong Kar Wai le ralenti amoureux et le battement de cil de 3 secondes, à Gus Van Sant la manie de filmer les gens marchant par derrière, à Gregg Araki une scène (celle de la pluie de marshmallows), à Christophe Honoré Louis Garrel (un faux blond, puis le vrai), à Almodovar ses couleurs et ses rouges à lèvres, à Audrey Hepburn son sourire, etc.... Je trouve qu'il ne fait pas preuve en cela d'une grande maîtrise et ne fonde pas un style très personnel. Le résultat est fait de bric et de broc, répétant des recettes à satiété (zoom avant arrière saccadé, filtre de couleurs...). L'émotion n'est jamais venue en ce qui me concerne, même dans les témoignages de personnes étrangères à l'histoire, un procédé beaucoup plus réussi dans Poetry.

Finalement ce qui m'a le plus plu dans le film ce sont les acteurs. Dolan lui-même est très bien. Il a de bonnes chances de rejoindre dans cette catégorie des acteurs-réalisateurs de talent : Allen, Moretti, Eastwood.

Monia Chokri est excellente, vintage jusqu'au bout des ongles, très "nouvelle vague". Niels Schneider m'a énervé, ses airs ne m'ayant jamais convaincu et son personnage ne crédibilisant pas le scénario.

Certaines scènes sont amusantes (les deux ruptures, la visite de la mère), caustiques sans être véritablement cruelles.

Une oeuvre de jeunesse, à mon avis en mode mineur, d'un cinéaste dont on devine qu'il peut beaucoup plus.

 
2e

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