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Christoblog

La grande bellezza

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/073/21007325_2013052116483405.jpgIl est assez étonnant de lire beaucoup de critiques sur ce film qui le relient à La dolce vita, car les deux films n'ont finalement pas grand-chose à voir, si ce n'est Rome et le goût des fêtes décadentes. Pour le reste, que ce soit pour la mise en scène, les thématiques ou les péripéties, les films sont assez différents. Le film de Fellini est beaucoup plus noir et désabusé que celui de Sorrentino.

Alors pour commencer, je dois dire que j'ai adoré l'interprétation de Toni Servillo, impérial en dandy vieillissant, qui parvient à jouer le détachement sans aucun cynisme. Ensuite, le film m'a impressionné par la puissance évocatrice de ses scènes, dont beaucoup sont ennivrantes, comme celle de la première fête, qui fait ressembler les orgies de Spring breakers à des réunions de séminaristes.

Au-delà de la virtuosité formelle de Sorrentino, qui est exceptionnelle, le film regorge également de personnages diablement attachants, comme la sainte de 104 ans, ou plus encore, la magnifique femme qui est mortellement malade (superbe scène où elle écoute Jap pérorer à propos de la conduite à tenir dans les enterrements, alors qu'elle se sait condamnée, et pas nous).

Evidemment, l'exubérance créatrice de Sorrentino n'évite pas un certain mauvais goût (les flamands roses), mais cela me semble négligeable au regard de la puissance visuelle du film.

Une des scène les plus violentes vues à Cannes figure dans ce film : celle durant laquelle Jap dit ses quatre vérités à une femme qui la ramène un peu trop, avec le sourire, mais avec une exhaustivité et une précision destructrice. D'autres scènes marquent profondément le spectateur : ce cabinet étrange de docteur dont on ne saisit pas vraiment l'activité, le berceau dans le palais, cet artiste contemporain qui se prend en photo tous les jours, ce couple qui propose une bizarrerie sexuelle à Jap que je n'ai pas comprise...

La grande bellezza traite du temps, de la mort et des souvenirs. A ce titre, le passage du voyage vers le Concordia, et les souvenirs du premier amour qui y sont associés, sont splendides.

Un bien beau film, sous un fatras un peu tape-à-l'oeil, c'est vrai.

 

4e

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Shokuzai

Kiyoshi Kurosawa est certainement un des meilleurs cinéastes japonais en activité avec Hirokazu Kore-Eda, Shinji Aoyama et bien sûr Takashi Miike. Souvent cantonné au film de genre tendance fantastique, il fut révélé au grand public par son dernier film Tokyo Sonata. Malgré ce succès, il a toujours beaucoup de mal à financer ses projets de long-métrages, et s'est donc décidé à réaliser en attendant une mini série de 5 épisodes d'une heure pour la chaîne japonaise Wowow.

Shokuzai (Penance en anglais, Pénitences en français) commence comme un film de serial killer : un homme repère 5 petites filles qui jouent au ballon, il en choisit une, la viole et la tue. Les petites filles ne peuvent pas aider à identifier le tueur, et la mère de la victime les maudit pour cela : chacune devra aider à trouver le coupable ou devra payer une "contribution".

Les quatre premiers épisodes retracent la vie des quatre petites survivantes, quinze ans après les faits, et montrent comment elles payent leur dette. Le premier épisode est très réussi, dans un genre qui tire vers le fantastique, et un travail sur l'image magnifique. Le second est dans une tonalité mélodramatique et donne à voir la vie à l'intérieur d'une école japonaise avec ses drôles de rites. Le troisième est une sorte de thriller psychologique et le quatrième tranche totalement avec tous les autres en explorant un registre burlesque et cruel.

Dans ces quatre petites histoires, on ne peut qu'admirer la parfaite maîtrise de Kurosawa qui propose une mise en scène d'une exceptionnelle beauté : décors minutieusement choisis et astucieusement filmés, mouvements de caméra gracieux, cadres splendides, direction d'acteurs irréprochable, scénario mitonné aux petits oignons (il fallait voir les spectateurs du Festival des 3 Continent rivés à l'écran pendant 5 heures de suite), montage chirurgical. Chaque épisode commence par un retour sur la scène fondatrice (un peu comme un "previously in Shokuzai") qui nous la fait découvrir sous un angle différent à chaque fois : c'est très bien fait. Si les qualités intrinsèques sont les mêmes dans les quatre premiers opus, ils ont chacun leur style particulier, thème musical, photographie, tonalité des décors, utilisation de gros plans ou de plans larges, rythme du montage : dans la mise en scène de Kurosawa tout fait sens, rien ne semble laissé au hasard.

Le cinquième et dernier épisode est une sorte de feu d'artifice qui revient à l'époque du drame (et  même avant) et qui lorgne cette fois-ci du côté des coréens façon Park Chan-Wook ou Bong Joon-Ho. Le rythme devient halletant et les révélations succèdent aux rebondissements. Si le plaisir de spectateur est dopé à ce moment-là, il faut avouer que ce n'est plus à force de bon goût et de crédibilité, mais peu importe, le niveau de qualité global de l'ensemble reste impressionnant.

Le film est sorti en France sous forme de deux films : Celles qui voulaient se souvenir (1h59) et Celles qui voulaient oublier (2h28).

 

4e

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Only god forgives

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/091/21009179_20130529135745784.jpgRegardez bien l'image ci-contre et imaginez Ryan Gosling en train d'essayer de garder exactement cette même expresssion pendant 1h30.

Voilà à quoi ressemble le dernier film de Nicolas Winding Refn, dont on peut dire qu'il est effroyablement raté. Scénario affligeant, personnages mutiques et caricaturaux, tics visuels vus un million de fois en mieux ailleurs, suspense inexistant, violence aseptisée qui ne fait même pas peur, le film est désastreux du début à la fin.

Only god forgives (au passage, quel titre ridicule, on dirait un James Bond) reprend nombre de situations de Drive, en thaï et en pire, comme la scène rigolote ou un homme se fait littéralement épinglé devant une assemblée de jeunes femmes se fermant les yeux, scène qui fait écho à celle du cassage de gueule dans Drive, perpétré devant un parterre de danseuses topless.

Pour fonctionner, un film de genre comme celui-ci doit pousser les limites, être super-inventif ou terriblement rythmé, sinon il déclenche une vague d'ennui effroyable.

Alors, pour me distraire durant la projection, j'ai imaginé toutes les façons de dérider Ryan Gosling :

  • lui chatouiller l'oreille avec une plume
  • pyro-graver ses pectoraux au fer à souder
  • le teindre en rouge, pour qu'il soit raccord avec la lumière du film
  • lui demander pourquoi il n'a pas eu le cran de venir à Cannes se faire siffler (au lieu d'inventer cette stupide histoire d'assurance à la noix)
  • lui dire que Winding Refn veut tourner une comédie avec lui (aïe, aïe, aïe) 

Plat, creux, glacé, c'est comme si toutes les défauts de NWR et aucune de ses qualités étaient réunis dans un seul film. Je ne suis même pas sûr que Dieu lui pardonne.

Nicolas Winding Refn sur Christoblog : Le guerrier silencieux / Drive

 

1e

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Le passé

http://fr.web.img6.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/97/39/33/20540906.jpgJ'aime beaucoup le cinéma d'Asghar Farhadi, que je défends depuis longtemps sur Christoblog. C'est peut-être pour cette raison que je suis très exigeant avec lui, et que je trouve que Le passé, bien qu'étant un bon film, est tout de même un peu décevant.

Premier point, il me semble que la mécanique scénaristique farhadienne, portée à son point le plus diabolique dans Une séparation, est ici un peu trop (pré)visible. Les rouages me paraissent légèrement grippés, et beaucoup d'enchaînements sont prévisibles.

Pourquoi le personnage d'Ahmad, entouré de mystère, disparaît-il aux deux tiers du film ? En quoi les causes du suicide de la femme de Samir sont-elles si importantes ? Courriels de la fille ou jalousie envers l'employée du pressing, quelle importance quand la relation de Samir et Marie allait devoir éclater au grand jour ?

Comme symbole de la perte relative de subtilité de Farhadi, il  me semble que la fin du film est exemplaire : plaquée, larmoyante, un peu too much - tout le contraire de la dernière scène d'Une séparation. Cette fin orientée vers la femme de Samir escamote le personnage de la jeune fille et le sujet de sa culpabilité, qui était le véritable ressort dramatique du film.

Ceci étant dit (qui aime bien, chatie bien), il faut reconnaître que le savoir-faire habituel du cinéaste iranien rend tout de même le film agérable : réseau dense de signes et de symboles, transparences diverses, espaces confinés, utilisation optimale des intérieurs, sens du détail, perspectives superbes. La mise en scène de Farhadi est parfaite, presque trop, et il me semble qu'elle empêche un peu l'expression des acteurs, Tahar Rahim étant encore une fois assez moyen dans ce film. Le titre du film, enfin, une fois n'est pas coutume, me semble très peu en adéquation avec son contenu.

Peut mieux faire.

 

Asghar Farhadi sur Christoblog : Les enfants de Belleville (***) / A propos d'Elly (***) / Une séparation (****) / A propos d'Une séparation : le vide avec un film autour

 

2e

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Cannes 2013 : mon palmarès

D'abord, une précision : j'ai vu 19 des 20 films de la compétition, il me manque le Desplechin.

Autre point, je respecte le règlement qui dit qu'un même film ne peut recevoir deux prix, sauf le prix du scénario ou le prix du jury, qui peut se combiner à un prix d'interprétation. Sinon les deux personnages de La vie d'Adèle seraient évidemment récompensées en plus de la Palme.

Ceci étant dit, mon choix est le suivant (et je mets rétrospectivement en regard les choix de Spielberg et de son jury, pas si différents) :

Palme d'Or : La vie d'Adèle, d'Abdellatif Kechiche / La vie d'Adèle

Grand prix du jury : Nebraska, d'Alexander Payne / Inside Llewyn Davies des frères Coen

Prix du jury : Tel père, tel fils, d'Hirokazu Kore-Eda / Tel père, tel fils

Prix de la mise en scène : Jia Zhang-ke, pour A touch of sin / Heli d'Amat Escalante

Prix du scénario : Borgman, d'Alex Van Warmerdam / A touch of sin

Prix d'interprétation masculine : Michael Douglas, dans Behind the candelabra / Bruce Dern dans Nebraska 

Prix d'interpréation féminine : Emmanuelle Seigner, dans La Vénus à la fourrure / Bérénice Bejo dans le Passé

Un peu triste de ne pas pouvoir récompenser La grande bellezza, Heli et Only lovers left alive, mais c'est la loi du genre.

RDV dans quelques heures pour la comparaison avec les choix du jury officiel.

 

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Journal de Cannes 2013

25 mai

Grasse matinée ce matin, et je ne commence les projections qu'à midi avec La danza de la realidad, qui marque le retour d'Alexandre Jodorowsky à la réalisation, après des décennies d'absence. Le film est une chronique d'enfance mettant en scène ses parents, et traitée de façon surréaliste : sa mère est fellinienne et ne s'exprime qu'en chantant, un nain fait la promotion du magasin familial, etc... c'est confus et débridé, il y manque un liant poétique et de la cohérence.

Je vois ensuite les 9 courts-métrages en compétition pour la Palme d'Or du court. Noyade, dépression, agression, séparation, drogue, spleen, suicide, impuissance, frustration sexuelle : on ne peut pas dire que les réalisateurs fassent dans la comédie ! Mon préféré est le film coréen Safe, bien rythmé et amusant : une femme qui tient la caisse dans un tripot clandestin se réfugie lors d'une attaque dans son coffre-fort ... avant de se rendre compte que personne ne viendra probablement la chercher, le patron étant mort dans l'attaque. Flippant !

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/074/21007456_20130522112953902.jpgSoirée glam avec deux montées des marches en noeud pap. Le nouveau Polanski, La Vénus à la fourrure, est un huis clos théâtral bien joué par Mathieu Amalric et une remarquable Emmanuelle Seigner. Agréable, sans prétention, ce sera un bon film de samedi soir, comme Carnage, en mieux. Le quarantième et dernier film de mon séjour cannois est le très beau Jim Jarmush, Only lovers left alive. On se demande pourquoi Jarmush n'avait pas traité le sujet des vampires avant, tellement il semble le premier à saisir aussi parfaitement  le spleen de nos amis au sang froid. Le film est beau, avec une musique parfaite, des images de toute beauté, et une histoire très mince. Finalement représentatif de la sélection cette année : peu de coups de coeur enthousiasmants (à part bien sûr La vie d'Adèle), mais d'un bon niveau. A l'année prochaine, folks, et merci à ceux qui m'ont lu jusqu'au bout.

 

24 mai

Une mauvaise journée. Le premier film est une énorme déception : on ne retrouve pas du tout dans The immigrant la grâce des autres films de James Gray (Little Odessa, The yards, Two lovers). Prisonnier de décors et de costumes pesants, d'une lumière jaunâtre et d'un scénario peu imaginatif, le film n'est jamais parvenu à m'atteindre. J'ai trouvé Marion Cotillard http://fr.web.img3.acsta.net/r_160_240/b_1_d6d6d6/pictures/210/079/21007923_20130523155127348.jpgtrès mauvaise. Michael Kohlhaas, d'Arnaud des Pallières, est plus intéressant. L'action se passe au XVI ème siècle dans les Cévennes. C'est dépouillé, austère, voire aride par moment, mais Mads Mikkelsen et les paysages sont spendides. Un commerçant, épris de justice, se révolte contre le seigneur local. Un sujet adapté de Kleist, et qui peut trouver quelque écho avec le monde actuel.

N'ayant rien de prévu l'après-midi, je rentre dans la salle de la Quinzaine au hasard et je vois un polar philippin, On the job, qui marie une intrigue complexe et un traitement rudimentaire. Plutôt poussif au début, le film ménage quelques surprises à la fin, et attaque violemment la corruption des politiques dans le pays. Rien d'exceptionnel toutefois.

Enfin en soirée je vais voir le film italien qui a été primé à la Semaine de la Critique hier soir, Salvo. Une idée dans ce film : un tueur de la mafia s'entiche de la soeur aveugle d'une cible qu'il vient d'abattre, et qui retrouve miraculeusement la vue à son contact. Les réalisateurs, Fabio Grassadonia et Antonio Piazza, diluent cette unique idée durant 1h43 en accumulant tous les poncifs du film d'auteur, c'est très éprouvant.

 

23 mai

http://fr.web.img3.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/004/21000447_20130422161538164.jpgC'est pour des matinées comme celle de ce matin que je viens à Cannes. A 8h30 j'ai été transporté par Nebraska, le nouveau film d'Alexander Payne (The descendants, Sideways). Tourné dans un noir et blanc magnifique, le film s'attache à suivre un père dont la santé mentale se dégrade et son fils, de retour dans la ville natale du père. C'est beau, touchant, fin, émouvant, cruel et drôle. Une ambiance springsteenienne (et clin d'oeil à ce dernier dans le film à travers une annonce de concert entendue à la télé).

Je faisais de Nebraska ma nouvelle Palme, quand je me suis retrouvé projeté dans les 3h de La vie d'Adèle, d'Abdellatif Kechiche (L'esquive, La graine et le mulet, Vénus noire). Autant le dire, on tient là un pur chef-d'oeuvre. Le film est traversé par un souffle, une ambition, une grandeur qu'on n'a pas vu depuis longtemps. Des scènes de sexe explicites entre les deux actrices limiteront peut-être son audience. Dans la salle de Cannes, elles ont généré une telle tension que le public a applaudi à la fin de la première d'entre elles sans qu'on sache si c'était une réaction de soulagement, d'émotion ou d'admiration. Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos atteignent un sommet. Les réactions sur la Croisette sont dithyrambiques. Sublime, le type de film qui marque une décennie de cinéma.

Le reste de la journée paraît bien fade après ces deux films. A la Quinzaine, j'attendais beaucoup de La fille du 14 juillet d'Antonin Peretjako, jeune cinéaste français. Le résultat est un peu décevant : il s'agit d'une comédie décalée sous forme de road movie sur fond de crise, sorte d'Amélie Poulain trash ou de Tati cheap. Il y a de bons gags, et le film trouve son rythme en son milieu. C'est mieux que Tip top, dans un genre comparable. Avant de rentrer je vois un film de Daniel Noah, Max Rose, avec Jerry Lewis. L'intérêt est de voir ce dernier encore relativement alerte pour ces 87 ans. Le film, sur le deuil qui frappe un vieil homme, ne vaut pas tripette. Dans la petite salle du Soixantième, Michel Legrand, Agnès Varda, Régis Wargnier, Laurent Gerra, Daniel Auteuil.

 

22 mai

Hilarant réveil avec Les garçons et Guillaume, à table ! de Guillaume Gallienne, à la Quinzaine. La salle littéralement écroulée de rire à plusieurs reprises, au point que les dialogues deviennent inaudibles. Cette chronique d'une enfance marquée par la recherche de l'identité sexuelle est un film à montrer à tous. Elle va rencontrer un grand succès en salle, c'est certain.

De retour au Palais, j'enchaîne trois films à la suite. All is lost, de JC Chandor (Margin call) est un film curieux, qui traite des incidents que subit un voilier en plein mer, et comment le marin (Robert Redford) y fait face. On dirait un documentaire, tellement c'est sec et dénué de pathos. Difficile d'adorer ou de détester. Dans la foulée Only god http://fr.web.img3.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/046/21004695_20130510142723609.jpgforgives est pour moi un véritable calvaire, tellement je le trouve mauvais. J'y reviendrai bientôt dans un article dédié. Le film reçoit un accueil très mitigé. Je ne sais pas ce qu'en a pensé Nicole Kidman, membre du jury, qui était assise à 17 sièges du mien, sur la droite. Enfin, Grigris, de Mahamat-Saleh Haroun (Prix du jury en 2010 pour Un homme qui crie). Le film n'est pas exempt de quelques défauts, mais il respire l'amour du cinéma, et se termine bien, ce qui cette année est un luxe dans les films en compétition. J'ai bien aimé. L'acteur Souleyman Deme a fait une jolie démonstration de danse sur les marches.

Enfin, pour finir cette journée intense à 5 films, je découvre à la Quinzaine Les apaches de Thierry de Peretti. Chronique d'un groupe de jeunes corses qui dérapent lors d'une soirée, cambriolent une villa et vivent un enchaînement de violence. Le film souffre de faiblesses techniques à mon sens : son limité, éclairage mal dosé, découpage un peu approximatif. Du coup j'ai eu beaucoup de mal à accrocher à l'histoire, par ailleurs assez classique.

 

21 mai

Ce matin, bon départ avec Behind the candelabra, qui doit être d'après Soderbergh sa dernière oeuvre. Le film est réussi et on suit avec intérêt les amours de Liberace, icône queer des années 60/70 et de son jeune chauffeur Scott, joué par Matt Damon. Le film vaut entre autre pour la performance époustouflante de Michael Douglas, que tout le monde donne gagnant pour le prix d'interprétation masculine.

http://fr.web.img2.acsta.net/r_160_240/b_1_d6d6d6/pictures/210/021/21002178_20130429173420254.jpgDans la foulée je me surprends à beaucoup aimer le nouvel opus de Paolo Sorrentino, La grande bellezza, qui sort demain sur les écrans français. Au-delà des banalités (référence à Fellini, et "Mon Dieu que Rome est belle"), le film est aussi une profonde réflexion sur le temps qui passe, l'amour, l'amitié et la mort. Là encore, l'acteur principal, Toni Servilo, est exceptionnel, suprêmement élégant. Mise en scène ébouriffante, presque trop.

Fin d'après-midi consacré à Un certain regard. Le film palestinien Omar, de Hany Abu-Hassad est une construction habile autour de trois amis d'enfance qui font leur première dans la résistance aux Israéliens. Le film tisse une intrigue mêlant la guerre, l'amour et la jalousie. C'est très joliment fait, je vous le conseille.

Pour finir, Les salauds de Claire Denis, devant un public de qualité : entre autres Leos Carax, Jane Campion et Catherine Deneuve étaient parmi nous. Même si je reconnais au film des qualités, notamment dans ses intentions, je me suis au final assez ennuyé et le développement de l'intrigue m'a même d'une certaine façon énervé par son opacité.

 

20 mai

Démarrage en trombe ce matin avec Shield of straw, thriller survitaminé de Takashi Miike. Le pitch est effroyable : un grand-père immensément riche propose 1 milliards de yens à celui qui tuera l'assassin de sa petite fille. Après 15 minutes de film il y a déjà eu quatre tentatives d'assassinats, médecin et policiers compris. Les choses se compliquent encore plus quand le grand-père accorde 100 millions à toute tentative, même qui échoue. Le film commence comme un film d'action, puis devient presque Eastwoodien. C'est très agréable à regarder, mais comme toujours quelques sifflets en fin de projection posent la question des films de genre en compétition.

Hésitant à me payer les immenses files d'attente de la Quinzaine, je profite ensuite d'une opportunité pour aller voir Blood ties, le polar américain de Guillaume Canet avec Clive Owen, Marion Cotillard et Mila Kunis. Le film est une catastrophe de première ampleur, tout y est sabordé avec une bonne conscience d'élève appliqué. Il faut absolument que quelqu'un empêche Canet de faire des films.

Valeria.jpegPremière montée des marches pour moi en 2013 avec l'équipe du film Un chateau en Italie de Valeria Bruni-Tedeschi. Le film est une chronique familiale à la fois grave (l'héroïne du film a 44 ans, vit seule et a envie d'enfant, et son frère meurt du SIDA) et légère, à travers plusieurs situations cocasses. Le film ne prête pas beaucoup à conséquence, mais ne restera pas dans les mémoires. Il me fait penser que le prolétariat n'est pas présent en sélection officielle, on est beaucoup entre bobos et bourgeois (cf Borgman, Jeune et jolie...).

Fin de soirée très intéressante, après 2 heures de queue, je parviens à entrer aux Arcades voir La bataille de Solférino de Justine Triet (3 perosonnes seulement non détendeurs de la carte ACID ont pu entrer). Le film se déroule le jour de l'élection de François Hollande, et montre un couple se déchirer pour la garde des enfants. C'est frais, passionant à beaucoup d'égards, même si les dialogues ont souvent tendance à former des sortes de boucles. Je reviendrai plus longuement sur ce film au moment de sa sortie, en septembre.

 

19 mai

Grasse matinée jusqu' à 9 h et réveil sous le soleil. Le bonheur. Premier film en compétition avec Inside Llewyn Davies, le nouveau film des frères Coen, tranche de vie d'un chanteur de folk imaginaire en galère. Un très beau livre d'image et une jolie reconstitution des années 60, à l'intérêt proche du zéro. Ce n'est pas qu'on s'ennuie, mais on ne voit pas où le film veut aller, et quand la fin arrive on a l'impression qu'il n'a pas commencé. Premier film à mon avis indigne de la compétition.

http://fr.web.img2.acsta.net/r_160_240/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/97/65/46/20541862.jpgLa sensation de la journée vient ensuite avec le trublion flamand Alex Van Warmerdam et son Borgman étrange et un peu provocateur. Un clochard manipulateur fait irruption dans une famille bourgeoise et va la faire imploser. On pense tour à tour à Haneke, à Pasolini, à Carax, à Kitano. Ca ne ressemble à rien de déjà vu et on se dit que Thierry Frémaux devrait sélectionner plus de film de ce type, au lieu de donner libre accès aux habitués comme les Coen.

Fin de cette petite journée avec la comédie de Serge Bozon, Tip top, à la Quinzaine. J'avais entendu du bien de cette pochade avec Isabelle Huppert, Sandrine Kiberlain et François Damien. J'ai été consterné par un comique constitué de petites scènes dans lesquelles chaque acteur fait son numéro, pour le meilleur (rarement) et pour le pire (souvent). C'est artificiel, horripilant par moment, et le scénario n'a aucun intérêt.

 

18 mai

Alors d'abord, précisons qu'il a plu absolument toute la journée, ce qui a rendu humide tout ce qui peut l'être chez le festivalier (chaussures, vêtements, papiers divers).

Pour une fois, je débute la journée à la Quinzaine, avec Blue ruin, un thriller du jeune américain dont on cause, Jeremy Saulnier. Construit sur une trame assez classique de vengeance, le film séduit par son mélange des genres : personnage de héros maladroit qui s'excuse avant de tirer, ambiance de film d'horreur et suspense haletant.

J'enchaîne sur un film en compétition, Tel père, tel fils, de mon chouchou Hirokazu Kore-Eda. Comme je ne suis pas objectif avec ce réalisateur, je me contenterai de dire que sa petite musique si caractéristique et si plaisante, se teinte ici de nuances malicieuses et élégiaques. Sur la même trame que La vie est un long fleuve tranquille (un échange de bébés), Kore Eda signe un film plein de subtilité et de profondeur.

http://fr.web.img3.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/205/346/20534614_20130423105848723.jpgDéception ensuite en salle Debussy avec le deuxième film de Rebecca Zlotowski, Grand central. Une romance entre Tahar Rahim et Léa Seydoux dans le monde sans pitié des sous-traitants qui travaillent dans les centrales nucléaires. On voit approximativement où la cinéaste voulait aller (peinture d'un nouveau sous-prolétariat, effets de style sur les radiations), mais curieusement on a l'impression de la voir se perdre en route. Malgré quelques qualités, le résultat est artificiel.

Soirée Quinzaine pour finir. D'abord avec le film de l'anglaise Clio Barnard, The selfish giant, qui fait le buzz sur la Croisette. On est ici dans du pur drame social anglais (on pourrait dire "à la Ken Loach", mais en pire). C'est interprété magnifiquement, très bien réalisé et captivant. Coup de coeur de la journée. Pour finir, Ugly, un thriller très noir de l'indien Anurag Kashyap (présent déjà l'année dernière avec Gangs of Wasseypour). Le film commence sur les chapeaux de roue avant de devenir un peu confus sur la fin, mais un bon moment quand même. Pour l'instant, et contrairement à 2012, je me rends compte que je n'ai pas vu de films nuls. Tant mieux !

 

17 mai

Début de journée sous le soleil avec Le passé, d'Asghar Farhadi. Pour la première fois, je trouve que le cinéma de l'iranien vire un peu à la recette mécaniquement répétée. Tout y est parfaitement huilé scénaristiquement, un peu comme dans Une séparation, mais en moins intéressant. Cela reste d'un bon niveau, mais le fond est tout de même assez anecdotique.

Le deuxième film de la compétition, A touch of sin, de Jia Zhangke, est une fresque de 2h13 qui tente de nous raconter la Chine à travers quatre destins et plusieurs thématiques : la corruption, la criminalité, la condition de la femme, l'exploitation des ouvriers, etc. Cela peut être violent comme un Tarantino (étonnant de la part de ce réalisateur à la posture plutôt hiératique) et c'est parfois sublime, la mise en scène étant d'une élégance rare. Un peu trop long et parfois lent, surtout après une nuit de 4 heures !

Dans l'après-midi, mon coup de coeur du jour, Suzanne, deuxième long-métrage de Ketell Quillévéré, remarquée pour son premier, Un poison violent. Il s'agit du portrait à travers le temps d'une jeune femme et de sa famille. Servi par un trio d'acteurs et actrices extraordinaires (Sara Forestier, Adèle Haenel, François Damiens) le film est un grand mélo sur les classes populaires, bourré d'émotion.

Fin de journée à la plus modeste des sections parallèles, l'ACID, pour un documentaire, une fois n'est pas coutume, Braddock, America de Jean Loïc Portron et Gabriella Kessler. On visite une ancienne ville sidérurgique des USA, complètement sinistrée. Le film est intéressant par ce qu'il montre de la réalité américaine d'aujourd'hui, et par l'émotion qui se dégage des témoignages, même s'il est parfois un peu répétitif. Dodo avant minuit ce soir, pour changer.

 

16 mai

Fruitvale.jpgDébut de la compétition à 8h30 avec Jeune & Jolie, de François Ozon, qui aborde de façon décomplexée (voire décontractée) la prostitution d'une étudiante de 17 ans. Si ses états d'âmes sont aussi hermétiques que celle de Belle de jour, le traitement a moins de classe. C'est quelconque et même parfois d'assez mauvais goût. L'actrice principale (l'inconnue Marine Vacth) plait à tout le monde ici,  et je ne sais pas trop pourquoi, car je trouve qu'elle joue mal. Bref, le film me laisse perplexe.

Le contraste est saisissant avec le second film de la sélection, vu à 11h, Heli, du mexicain Amat Escalante. Chronique noire de la vie d'une famille tranquille confrontée à la violence des gangs, c'est la première controverse sur la Croisette : le film comprend une scène de torture que certains jugeront insoutenable, comme le viol d'Irréversible. Pour ma part (au risque de passer pour un dangereux sadique) la scène ne me dérange pas tant que ça, tellement elle s'insère dans une mise en scène hyper-maîtrisée, à la fois naturaliste et symbolique, et que je trouve splendide.

Plus de 2 heures d'attente pour entrer d'extrême justesse à la cérémonie d'ouverture de la Quinzaine et voir Jane Campion (La leçon de piano, Bright star) recevoir avec émotion son Carosse d'Or. Ensuite, le film très attendu d'Ari Folman, Le congrès, dont on avait beaucoup parlé pour la sélection officielle, m'a déçu. Pourtant il regorge de bonnes idées, mais je n'ai pas accroché du tout à l'esthétique des parties d'animation.

Fin de soirée Salle Debussy, pour le grand prix de Sundance (photo ci-contre), le bouleversant Fruitvale Station. Ce premier film du jeune Ryan Coogler, a ému la salle aux larmes. Le film raconte simplement sur un mode réaliste la dernière journée d'un homme abattu par la police à San Francisco. C'est magnifiquement bien joué par des acteurs d'exception, et j'ai rarement entendu une salle retenir son souffle avec une telle intensité. Magnifique.

 

15 mai

En attendant de lire mes premiers avis, un petit tour sur Le Plus, pour une interview de votre serviteur.

A peine arrivé à Cannes, il commence à pleuvoir. Après le retrait du Pass, l'installation à l'hôtel, je tente vaguement d'entrer IMAG0472-copie-1.jpgdans le Grand Théâtre Lumière pour la cérémonie d'ouverture, mais c'est très compliqué. Je regarde plutôt les talons de 10 cm patauger dans les flaques et les robes arachnéennes se décomposer sous l'averse. Quant aux coiffures, certaines, très élaborées, retombent comme des choucroutes avariées. Tout à coup, derrière une forêt de parapluies (qui rappelle opportunément l'hommage du festival à Demy et aux Parapluies de Cherbourg), des hurlements. C'est Leo qui monte les marches, je le distingue sur l'écran géant.

Allez, au dodo, demain programme d'ouverture chargé.

 

J'aime  Palme

La vie d'Adèle 11/10

 

J'aime 4e

Les garçons et Guillaume, à table ! (QR) 10/10
Nebraska 9/10
The selfish giant (Le géant égoïste) (QR) 9/10
Suzanne (SC) 9/10

 

J'aime 3e

Fruitvale Station (UCR) 8/10
A touch of sin 8/10
Tel père, tel fils 8/10
La grande bellezza 8/10
Heli 7/10
Borgman 7/10
Blue ruin (QR) 7/10
La bataille de Solférino (ACID) 7/10
Behind the candelabra (Ma vie avec Liberace) 7/10
Omar 7/10
Only lovers left alive 7/10
Grigris 7/10
La Vénus à la fourrure 7/10

 

J'aime 2e

Le passé 6/10
Shield of straw 6/10
Le congrès (QR) 5/10
Ugly (QR) 5/10
Braddock, America (ACID) 5/10
La fille du 14 juillet (QR) 5/10
Inside Llewyn Davis 5/10

 

Je n'aime pas 2e

Michael Kohlhaas 4/10
Un chateau en Italie 3/10
Les apaches (QR) 3/10
Les salauds 3/10
All is lost (Hors compétition) 3/10
On the job (QR) 3/10

 

Je n'aime pas 1e

Jeune & jolie 2/10
Grand central (UCR) 2/10
La dansa de la realitad (QR) 2/10
Tip top (QR) 2/10
Max Rose (Hors compétition) 1/10
Blood ties (Hors compétition) 1/10
Only god forgives 1/10
Salvo (QR) 1/10
The immigrant 1/10

 

UCR : Un certain regard / SC : Semaine de la Critique / QR : Quinzaine des réalisateurs

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L'hypnotiseur

http://fr.web.img6.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/92/19/69/20432715.jpgJe me demande bien a posteriori pourquoi j'ai été voir ce film.

Peut-être l'espoir d'y retrouver cette ambiance si caractéristique des polars nordiques (Millenium, les romans de l'islandais Indridason) ou la rigueur nerveuse de la série The killing.

Bien mal m'en a pris puisque L'hypnotiseur est complètement raté. Si la mise en scène de Lasse Hallström est à peine potable, c'est du côté de l'interprétation que le film péche le plus.

Le policier à le charisme d'un cocker neurasthénique, l'hypnotiseur se la joue taciturne par principe et les seconds rôles sont tous plus transparents les uns que les autres.

Quant au scénario, mal ficelé lui aussi, il cumule invraisemblances crasses, grosses ficelles éculées et attermoiements inutiles.

A éviter de toute urgence.

 

1e

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Enfance clandestine

http://fr.web.img2.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/31/55/20106543.jpgComment grandir avec des parents qui ont des activités clandestines dangereuses ?

Voilà la question que pose l'argentin Benjamin Avila, dont la mère a elle-même disparu lors de la dictature militaire sévissant en Argentine de 1976 à 1983.

En choisissant délibérément le point de vue du jeune garçon, remarquablement joué par Teo Guttierez Moreno, Avila parvient à trouver un ton très séduisant, qui donne au film des nuances d'éducation sentimentale plutôt que de chronique politique.

On suit ainsi les premiers émois amoureux du jeune Juan, plus concentré sur les charmes de sa jeune amoureuse que sur les risques encourus par ses parents. L'oncle, qui vit dans la maison, joué par l'excellent Ernesto Altiero, donne à son jeune cousin - et à toute la famille - des leçons de vie à la fois émouvantes et joyeuses. L'actrice qui joue la mère, la lumineuse Natalia Oreiro, très populaire en Argentine, est également excellente.

La grande réussite du film est que l'on s'habitue progressivement au danger qui plane sur la famille, comme le fait Juan, et qu'on finit par être plus préoccupé par la naissance du sentiment amoureux que par la mort qui rôde.

Avila multiplie les gros plans pour mieux nous immerger au plus près des personnages. Il n'hésite pas à utiliser de multiples effets (dessins animés à l'intérieur du film, scènes de rêve, écrans noirs, ralentis, effets sonores, caméra subjective) qui ne semblent pas toujours homogènes, mais qui au final ne nuisent pas au souffle vital qui traverse le film, ce qui explique l'accueil public enthousiaste que ce dernier reçut à la Quinzaine des Réalisateurs 2012.

Le film de la semaine.

 

3e

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Post tenebras lux

http://fr.web.img4.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/20/70/20102674.jpgCertains films ont été à l'évidence conçu pour m'atteindre personnellement.

Albert Serra (Le chant des oiseaux), Bela Tarr (Le cheval de Turin) et donc aujourd'hui Carlos Reygadas, semblent avoir constitué une sorte de confrérie visant à abattre mon moral, à saper mes certitudes en matière de beauté et à attaquer la solidité de mon amour pour le cinéma.

Alors oui, la première scène est géniale. On y voit un enfant, des animaux, un format d'image bizarre et une lumière envoutante. Elle dure cinq minutes.

Toute la suite du film s'avère une longue décomposition narrative, pénible, et insultant l'intelligence du spectateur, un assemblage de scènes qui ne se raccordent en aucune façon.

Ainsi Reygadas montre alternativement du rugby (eh oui, il aime ce noble sport, encore heureux qu'il ne soit pas fan de curling), une partouze dans un sauna parisien (Reygadas aime-t-il cela autant que le rugby ?), des considérations sur la nature et les arbres, une famille attaquée dans une maison isolée, des enfants énervants, un personnage qui arrache sa propre tête et un diable cornu. Ne cherchez pas à comprendre, c'est la pire des erreurs que vous puissiez commettre, car Reygadas vous accule dans cette impasse esthético-sentimentale : si vous m'aimez, aimez moi sans comprendre, vous dit-il. Mais avec moi, ça ne marche pas, Monsieur, j'ai une plus haute conception des relations unissant un créateur et son public !

Le pire de Wheerasetakhul et de Malick assemblé, sans leur grâce, voilà ce que propose Reygadas.

Le film a reçu un prix à Cannes 2012 (je ne souhaite pas me rappeler lequel), et Reygadas le ramassa en méprisant ouvertement la presse qui n'avait pas été tendre avec lui : ce cinéaste est à l'hermétisme prétentieux et poseur ce que Jean-Marie Bigard est à la vulgarité.

 

1e

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3, chronique d'une famille singulière

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/31/35/20110386.jpgLors de mon séjour cannois en 2012 je suis entré dans des salles de la Quinzaine ou d'Un certain regard sans abolument rien connaître du film que j'allais voir. Ce fut parfois pour de délicieuses surprises comme Rengaine, Gimme the loot ou Gangs of Wasseypur, ce fut d'autres fois pour des expériences d'un ennui abyssal comme pour 3, chronique d'une famille singulère.

Le film s'appelait d'ailleurs à l'époque simplement 3, ce qui était un nom stupide et anti-commercial au possible. Depuis, un assistant stagiaire y a ajouté chronique d'une famille singulière, ce qui ajoute un petit air idiot à ce qui est déjà inconsistant. Pourquoi pas 2, journal d'un couple spécial ou 16, saga d'une tribu formidable ?

Tout cela est très mauvais, mais je vous le raconte quand même un peu pour vous faire sentir tout le désintérêt que peut inspirer ce film. La fille est gardien de hand. Oui, je sais, c'est déjà dur à assumer. Elle va redoubler. Elle a petit copain, mais drague un peintre. La mère tombe amoureuse d'un mec obèse. Le père, maniaque, arrête de jouer de foot car il se fait insulter. Parfois les 3 personnes se rencontrent, et dansent d'une façon un peu ridicule, comme des pingouins.

Voilà.

Sinon, le film a un avantage (et un seul), c'est qu'il est uruguayen. Et bien qu'il ne dise rien de l'Uruguay d'aujourd'hui, il me permet de cocher un pays sur ma grande mappemonde mentale du cinéma.

PS : Attention, certains essayent de vous vendre ce pensum pour une comédie. Ce sont les mêmes qui vous diront que Amour de Haneke est une comédie musicale.

 

1e

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The plague dogs

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/88/69/94/20032785.jpgEst sorti en DVD en 2013 un film d'animation à l'aura de film culte : The plague dogs, de Martin Rosen (1982).

A cette époque, il était totalement fou de réaliser un film pareil pour une distribution en salle : deux chiens montrés de façon hyper-réaliste, victimes d'expérimentation de la part de scientifiques, et dont l'histoire finit mal ! Inutile de dire que le film fut à l'époque un échec cuisant. Les enfants ne pouvaient supporter pareille noirceur, et les parents ne s'intéressaient pas à ce type de film.

Plus de trente ans après sa réalisation, The plague dogs surprend encore aujourd'hui par son approche extrêmement réaliste du comportement des deux chiens, dont les caractères sont assez extraordinairement représentés, avec une belle sensibilité. Le film est également une charge politique contre les mensonges de l'Etat, et une dénonciation plus générale de l'ethnocentrisme. Tout cela en fait une oeuvre curieuse, ambitieuse, et plutôt attachante.

Malheureusement, j'ai eu un peu de mal à m'habituer aux décors, qui ont assez mal vieilli, surtout en ce qui concerne les extérieurs (les visions initiales du labo sont par contre splendides, dans une veine un peu expressionniste). J'ai trouvé le film très sombre, pas seulement au figuré, mais aussi au sens propre, avec des passages entiers dans des tonalités presque noires. La deuxième partie du film, avec un personnage de renard un peu plus convenu et une chasse assez classique, m'a moins touchée que la première.

Pour les amateurs de films d'animation The plague dogs est certainement un incontournable, pour les autres il est surtout une curiosité.

 

2e

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En route pour Cannes 2013 (2)

Voir mon avis sur la sélection officielle et Un Certain Regard : En route pour Cannes 2013 (1)

Dans les sections parallèles, le trait dominant est l'irruption massive du jeune cinéma français, tel que célébré dans le dernier numéro des Cahiers du Cinéma.

Ainsi verra-t-on à la Semaine de la critique Suzanne de Katel Quillévéré / 33 ans (très remarquée avec son premier film Un poison violent), Nos héros sont morts ce soir de David Perrault / 37 ans, et Les rencontres d'après-minuit du déjà culte Yann Gonzales / 36 ans, en séance spéciale.

A la Quinzaine, c'est La fille du 14 juillet, d'Antonin Peretjatko / 39 ans qui fait le buzz.

Enfin côté ACID, Vincent Macaigne, acteur fétiche de cette nouvelle génération, apparaîtra dans La bataille de Solférino de Justine Triet / 35 ans, et Deux automnes, trois hivers de Sébastien Bedbeder / 38 ans.

Pour ma part, j'essaierai de voir également à la Semaine Les amants du Texas de David Lowry avec (excusez du peu) Rooney Mara et Casey Afleck, et à la Quinzaine Le congrès d'Ari Folman, qu'on a longtemps annoncé en compétition officielle, ainsi que les nouveaux films de Yolande Moreau et Raphael Nadjari. A noter enfin Tip top, comédie de Serge Bozon avec Sandrine Kiberlain.

Cannes c'est aussi des stars sur la Croisette. En vrac et dans le désordre, devraient défiler sur le tapis rouge cette année les acteurs et actrices suivants :

Michael Douglas, Robert Redford, Marion Cotillard, Leonardo di Caprio, Joachim Phoenix, Matt Damon, Léa Seydoux, Ryan Gosling, Bérénice Béjo, Mads Mikkelsen, Sergi Lopez, Bruno Ganz, Céline Sallette, Louis Garrel, Justin Timberlake, Carey Mulligan, Orlando Bloom, Forest Whitaker, Mathieu Amalric, Benicio del Toro, Emmanuelle Seigner, Mila Kunis, Clive Owen, Matthias Schoenaerts, Charlotte Rampling, Frédéric Pierrot, Toni Servillo, Luis Tosar, Tahar Rahim, Jeremy Renner, Emma Watson, Vincent Lindon, Chiara Mastroiani, Lola Creton, Casey Affleck, Nicole Kidman, Daniel Auteuil, Isabelle Huppert, Rooney Mara, Sandrine Kiberlain, Eric Cantona, Béatrice Dalle, Emily Browning, François Damiens, Harvey Kietel, Paul Giamatti, Denis Ménochet, Olivier Gourmet, Golshifteh Farahani, James Franco, Audrey Tautou, Tilda Swinton, Kim Novak...

Impressionnant, non ?

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Stoker

La question était : Park Chan-wook, le délirant réalisateur coréen, allait-t-il perdre de sa superbe en tournant aux Etats-Unis ?

La réponse est non. Le style est toujours le même, flamboyant, du genre à avoir une idée par plan. On n'en finirait pas de lister les figures de styles plus ou moins novatrices qui parsèment le film. Deux moments seulement, magnifiques, qui sont deux exemples parfaits d'enchaînement de plans : celui où un oeuf apparaît en surimpression sur l'oeil de la jeune fille, et celui où cette dernière marche dans une rue, puis sur une route, dans la continuité.

Park Chan-wook, c'est un peu les montagnes russes de l'imagination derrière une caméra. Nul doute que certains pourront du coup ressentir une impression de trop-plein.

Le fond, lui, est fortement empreint de perversion, comme souvent chez Park Chan-wook. Bien plus que le triste pensum de Brian de Palma (Passion), c'est bien dans Stoker qu'on pourra voir un ultime hommage au cinéma de Hitchcock. L'intrigue, bien qu'un peu trop flottante pour faire réellement référence, rappelle assez certains films de sir Alfred. Nicole Kidman est aussi une héroïne hitckockienne en diable. Alors bien sûr, la virtuosité de Park lui fait assez souvent perdre de vue la vraisemblance de l'intrigue, mais on est toutefois dans un registre infiniment plus maîtrisé que celui du délirant Thirst.

Stoker est un film brillant, que certains trouveront trop superficiel pour être marquant, et que d'autres adoreront comme on peut se laisser entraîner par un feu d'artifice particulièrement réussi.

 

3e

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Printemps, été, automne, hiver... et printemps

http://fr.web.img6.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/35/19/68/18371851.jpgPrintemps... fut le film qui fit connaître Kim Ki-duk au public européen et en particulier français, alors que son film suivant, moins connu, Samaria, décrochait simultanément l'Ours d'argent à Berlin, en 2004.

Rien d'étonnant à ce que ce film, pétri de philosophie, symbolique à plusieurs niveaux, et littéralement imbibé de la présence de la nature ait été plébiscité au milieu des années 2000 : il a un petit côté new age qui entrait parfaitement en résonance avec l'époque.

Aujourd'hui le film a plutôt bien vieilli, si l'on excepte l'affreuse musique pas toujours en harmonie avec les images, et le jeu parfois artificiel des enfants. Pour le reste, après la première "saison" un peu inquiétante (est-on en train de voir un reportage animalier ou un ersatz du National Geographic ?), le film prend son envol romanesque. Eté est captivant, Automne bouleversant, et Hiver impressionnant.

Les ficelles sont certes un peu grosses, mais le film fonctionne comme un bulldozer narratif et sensuel, entremêlant les perceptions changeantes du temps, les ellipses géantes, la symbiose avec la nature. Le déplacement du temple sur le lac place les personnages autant hors du temps que de l'espace. Il est impossible de résister à la puissance du film qui emporte tous les petits bémols sur son passage.

 

3e

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Survivre

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/96/85/49/20502441.jpgDrôle de projet que de porter à l'écran l'aventure de ce marin islandais, seul rescapé d'un naufrage, qui parvint en 1984 à survivre dans l'eau glacée pendant 6 heures, en contradiction totale avec toutes les certitudes scientifiques sur le sujet.

Un peu dubitatif avant le début du film, j'ai été complètement happé par sa justesse de ton. La première partie montre les difficiles conditions de vie sur ces petites îles volcaniques avec un sens aigu du raccourci, et se conclut par la scène très réaliste du naufrage.

Le réalisateur parvient ensuite à retranscrire les pensées du nageur d'une façon extrêmement subtile, grâce à de pseudo vieux films au format carré et aux coins arrondis. Il parvient à susciter l'émotion sur un sujet assez austère, là où échouait dans des conditions similaires Danny Boyle dans 127 heures.

L'après-naufrage est un petit peu moins intéressant à mon goût, mais le film continue toutefois de dérouler sa chronique sans aucune faute de goût.

Le réalisateur Baltasar Kormakur est certainement promis à un grand avenir, si Hollywood ne le mange pas tout cru : il filme en ce moment un polar avec Denzel Washington et Mark Wahlberg.

 

2e

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The land of hope

http://fr.web.img5.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/92/92/02/20225198.jpgCurieux de découvrir pour la première fois un long métrage du réalisateur culte Sono Sion, auquel Deauville Asia a rendu hommage cette année, j'attendais beaucoup de The land of hope.

Le film est une réflexion autour de Fukushima. L'action se déroule quelques années après la catastrophe, dans une ville fictive appelée Nagashima (contraction de Nagasaki et de Fukushima ?), qui revit les mêmes évènements : tremblement de terre, tsunami, catastrophe nucléaire.

Le début du film est très prometteur : il peint habilement le tableau d'une famille d'agriculteur traditionnelle. Le patriarche est magnifiquement joué par un acteur de 72 ans, Isao Natsuyagi, particulièrement charismatique. La mère souffre d'une maladie mentale, le fils surjoue un peu dans l'hystérie typique des jeunes japonais, la belle-fille est migonne à croquer.

Quand la catastrophe survient, le village où habite la famille est partagée en deux par une ligne d'exclusion délimitant le rique de radiation : le caractère ubuesque de la situation est considérable et fournit un ressort dramatique très efficace au film. Cette ligne inspire à Sono une série d'allégories sur les pieux (y compris sonores) particulièrement originale et inspirée. Le travail sur la bande son du film est dans son ensemble très recherché.

Malheureusement, The land of hope s'égare ensuite sur la longueur en tentant de suivre des personnages annexes sans grand relief (le couple qui erre dans les ruines), et en multipliant des effets un peu lourds (l'arbre en feu, le jeu vraiment exagéré du jeune homme).

Au final, le film me laisse donc très sentiments contrastés, entre curiosité étonnée et énervements passagers.

 

2e

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