Tirée du roman d'Amélie Nothomb qui raconte sa (toute) petite enfance au Japon, le film de Mailys Vallade et Liane-Cho Han est surprenant.
Si sa technique d'animation est assez simple (voire simpliste), le choix des couleurs est résolument original, fournissant des visions radicales, qui peuvent osciller entre des environnements éclatants de couleurs vives, des tableaux pastel et des scènes d'apparences beaucoup plus réalistes.
Le film se distingue aussi par une écriture extrêmement recherchée (je pense par exemple à la scène de cuisine lors de laquelle Nishio-San raconte son enfance et la guerre) et une mise en scène sophistiquée.
Le tout parvient à faire émerger assez rapidement de puissantes émotions, et il st difficile de ne pas avoir les yeux humides à certains moments du film. Peut-être un peu trop sérieux pour les tout-petits (on y parle de mort, de guerre, de tristesse) et un peu trop enfantin (en apparence) pour certains adultes, le film ne trouvera peut-être pas son public : ce serait dommage, car Amélie et la métaphysique des tubes est un film d'animation très réussi.
Voici le film "de Laurent Cantet, réalisé par Robin Campillo", suite à la mort de son ami.
Le résultat est étonnamment situé exactement à mi-chemin des univers des deux réalisateurs : fine chronique sociale et rapports de classe intra-familiaux côté Cantet, trouble homoérotique et éveil des désirs physiques (sexe, danse) côté Campillo.
Le début d'Enzo bénéficie de cette ambigüité pour installer une ambiance à la fois solaire et inquiétante, qui attise le désir du spectateur. Malheureusement, une fois le cadre posé, le film piétine un peu dans son entre-deux thématique : les personnages des parents et du frère sont sacrifiés et dessinés de façon caricaturale, le sujet de la guerre en Ukraine est survolé et semble servir de faire-valoir, le jeu limité d'Eloy Pohu ne contribue pas à développer son personnage de façon intéressante. Dans sa deuxième partie, Enzo pêche par manque d'incarnation et de réalisme (la scène de la chute).
Je suis donc devenu assez rapidement extérieur au film lui-même, regardant avec indifférence le témoignage d'affection de Campillo pour son pote, estimable, mais un peu artificiel.
Loveable m'amène à me poser une question simple : peut-on faire un bon film avec un personnage principal antipathique ?
Et ma réponse est résolument négative dans ce cas d'espèce. Les états d'âme de Maria sont très communs : elle a du mal à gérer ses enfants et sa vie professionnelle. OK. C'est probablement le sort de plus de la moitié de la population mondiale féminine, mais dans le cas de Maria, cela semble insurmontable.
Assez terrible en tout cas pour décider de partir (puis le regretter), de regarder dans le vide pendant plusieurs minutes (des heures en temps ressenti par le spectateur), d'aller voir une psy (qui l'invite à dormir, à court d'arguments thérapeutiques peut-être), de régler quelques comptes avec sa mère (très mal jouée), de se faire larguer une deuxième fois (par un mari trop beau et trop lisse pour être crédible, même si on lui donne instinctivement raison), puis de rembarrer une amie sincère.
J'ai personnellement voué une sincère animosité envers le personnage joué par l'actrice Helga Guren, jamais à court d'expédients grotesques (grimaces devant le miroir, torsions acrobatique de la bouche et dos tristement vouté), servis il est vrai par un scénario et une mise en scène ne reculant devant aucune facilité (artiste de rue chantant "Ne me quitte pas" juste après la scène de séparation, scènes rejouées maladroitement, fin ouverte irrésolue).
C'est une catastrophe dont je ne m'explique pas le succès critique. Pas aimable, du tout.
Au vu de sa famélique distribution en France, peu de personnes verront ce film indien et on peut le regretter.
Sans son exposition à la Quinzaine des Cinéastes 2024, il est même peu probable que ce film féministe et fantastique ait pu trouver le chemin des salles françaises.
Le film commence comme un documentaire sur l'Inde, mais on se rend rapidement compte que quelque chose ne va pas : les personnages se meuvent mécaniquement (on songe à Tati ou à Kaurismaki), la bande-son punk-rock détonne, et on se dit que tout cela ça trop loin quand l'héroïne commence à manger les animaux vivants, qui reviennent ensuite sous forme de marionnettes fantômes (?!).
Dans sa seconde partie, Sister midnight n'est plus très tenu, et tout part subitement en vrille, entre chronique d'une libération féminine par le corps et road movie initiatique.
Même si la fin est un peu décevante, le film de Karan Kandhari possède vraiment une patte particulière, entre univers pop coloré et Cronenberg hindi : il faudra suivre ce cinéaste.
Passé relativement inaperçu lors de sa sortie fin 2024, ce beau film espagnol mérite d'être regardé à l'occasion de son arrivée sur Canal+.
Tiré d'une histoire vraie, il décrit avec une précision chirurgicale l'histoire d'une jeune femme victime de harcèlement sexuel dans les années 90, et qui décida de porter plainte. D'une certaine façon, L'affaire Nevenka est donc une sorte de vestige du temps passé, préfigurant avec une acuité étourdissante ce que le mouvement Metoo mettra en lumière des décennies plus tard.
Le film est remarquable par la qualité de son écriture. Le scénario prend le temps de mettre en place tous les éléments du crime : le mécanisme de séduction, les affres de l'emprise, le sentiment de culpabilité, la pression sociale, les hésitations intimes, la souffrance psychologique, le machisme ambiant, les rouages du monde politique, l'intelligence machiavélique de l'agresseur. Les deux principaux protagonistes (Mireia Oriol et Urko Olazabal) fournissent une prestation exceptionnelle d'intensité, dans des registres très divers.
Icíar Bollain confirme ici ses qualités de réalisatrice sensible et efficace, qui m'avaient séduit dans son précédent film. Un peu à l'écart des grands festivals, elle mérite une plus ample reconnaissance.
Jeunes mères marque un double tournant dans la filmographie des frères Dardenne. Il s'agit en effet pour eux de suivre ici pour la première fois tout un groupe de personnages, et non plus un ou deux en particulier. Et surtout, le ton est ici beaucoup moins doloriste (certains diraient sadique) que dans les derniers films du duo belge.
On suit quatre jeunes filles hébergées dans une maison maternelle, qui s'apprêtent à devenir mère et vivent des situations familiales et sentimentales délicates. Garderont-elles leur enfant où recourront-elles au placement : c'est une des questions principales qu'aborde Jeunes mères, avec toutefois moins d'intensité que Pupille.
Le résultat est contrasté, du fait de deux éléments. La prestation de chacune des actrices est d'une qualité très variable : Elsa Houben (Julie) crève l'écran, alors que Lucie Laruelle (Perla) semble un peu à la peine. Les contextes familiaux et l'intensité des personnages secondaires sont aussi d'un intérêt très hétérogène : l'histoire d'Ariane et de sa mère possède une intensité dramatique bien supérieure aux trois autres.
Mon avis est au final plutôt positif, car Jeunes mères "rafraîchit" en quelque sorte de cinéma des Dardenne dont les derniers développements m'exaspéraient par leur dialectique sans surprise.
Le prétexte du Répondeur (un écrivain recrute un imitateur pour répondre à sa place à tous les appels téléphoniques qu'il reçoit) peut laisser perplexe, tant il semble invraisemblable.
Pourtant, la réalisatrice Fabienne Godet parvient à nous faire entrer dans cette histoire par la grâce d'une écriture millimétrique et d'une excellente direction d'acteur.
Denis Podalydès est plutôt très bien dans un rôle qu'il joue en retenue, mais c'est surtout Salif Cissé qui crève l'écran. On l'avait déjà vu dans beaucoup d'excellents films (Juliette au printemps, mais surtout le formidable A l'abordage de Guillaume Brac), et il est ici une nouvelle fois parfaitement convaincant, imposant son physique massif et sa douceur raisonnable avec un naturel charmant.
On passe donc au-dessus des quelques facilités, des seconds rôles un peu faibles et de la morale attendue du film, pour simplement passer une bonne soirée, amusante et parfois touchante.
De retour dans ce merveilleux festival, si jeune, convivial et cosmopolite. C'est toujours un plaisir immense de retrouver les petites manies d'avant-séance : ses "lapin !", ses vols d'avions en papier, ses bruits d'eau et ses "il va faire tout noir" (ceux qui connaissent comprendront).
Je commence cette année avec une superproduction chinoise des studios Winsing, Into the mortal world(3/5), d'une qualité technique tout à fait digne des productions américaines. L'animation 3D est parfaite, le film inclut les petites bêtes fétiches toutes mignonnes et le scénario est très ambitieux : il s'agit pour résumer d'un conflit entre dieux qui trouve un prolongement sur Terre. L'ensemble est spectaculaire mais j'ai trouvé qu'il y manquait l'émotion et un peu de clarté. Le scénario est tiré d'un conte chinois et présente l'intérêt de nous initier à plusieurs aspects de la culture chinoise. Je poursuis mon expérience asiatique avec l'excellent ChaO (4/5), des studios japonais Studio4°C. Le réalisateur Yasuhiro Aoki parvient à nous charmer avec un dessin extrêmement poétique (qui rappelle les aspects les plus oniriques de Miyazaki), une mise en scène imaginative et un scénario délicieux. Une franche et belle réussite, qu'on pourra découvrir dans les salles françaises puisque le film a un distributeur, Eurozoom.
Fin de journée dans la grande salle Bonlieu pour la présentation de Planètes (3/5), le film-ovni de Momoko Seto, dont les quatre personnages sont des akènes de pissenlit voyageant de planète en planète. Sans parole, le film parvient à rendre l'épopée de ces aimables végétaux palpitante, mélangeant animation douce et prises de vue réelles. Dans ce film hors norme, chevaucher une limace devient une aventure. Présenté en clôture de la Semaine de la Critique à Cannes, Planètes sera à coup sûr un des films d'animation à voir dans les mois à venir (sortie prévue en avril 2026).
13 juin
Deuxième journée au Festival avec un film allemand en stop motion, Memory Hotel (2/5). Le réalisateur Heinrich Sabl est présent dans la salle, visiblement très ému. Il nous dit que le film représente 20 ans de sa vie. Malheureusement, le résultat est trop confus pour être vraiment plaisant. Le sujet est ardu (le sort tragique d'une jeune allemande pris au piège d'un hôtel lors de l'arrivée de l'Armée Rouge), aucun des personnages n'est vraiment attachant, le style est difficile d'accès (un Wes Anderson expressionniste, si vous pouvez imaginer). C'est ambitieux, mais cela n'entraîne aucun plaisir.
Amélie et la métaphysique des tubes (3/5) est beaucoup moins ambitieux, mais bien plus réussi. Tiré d'un récit d'Amélie Nothomb, le film raconte la toute petite enfance de l'écrivaine au Japon. L'animation est sage et sans aspérité, les couleurs pastels sont kawaï, le scénario joue la corde sensible à bon escient et j'ai été finalement charmé par cette évocation des tourments de l'enfance. La petite Amélie est craquante. Mon questionnement est de savoir à quel public s'adresse le film : un peu trop sérieux pour les enfants (on y parle de Dieu, de la mort, de la guerre), et peut-être un peu trop "mignon" pour les adultes.
A l'occasion de la sortie en DVD chez Epicentre Films de Young Hearts, du réalisateur Anthony Shatteman, le 17 juin 2025, je vous propose de gagner le DVD du film.
Pour ce faire :
- Répondez aux questions suivantes:
1) Quelle est la nationalité du réalisateur ?
2) Quelle sont les prénoms des deux personnages du film ?
3) Dans quel grand festival le film a t il reçu un prix ?
- joignez votre adresse postale
- envoyez moi le toutpar iciavant le 17 juin, 20 h.
Un tirage au sort départagera les gagnants. Vous recevrez ensuite le DVD envoyé par le distributeur. NB : un des trois DVD sera attribué par tirage au sort à un participant ayant aimé ma page FB oumon compte Twitter ou s'étant abonné à la Newsletter du blog (n'oubliez pas pour participer à ce tirage au sort spécial de me donner votre pseudo dans votre réponse, pour que je fasse le lien).
Il y a quelque chose de désarmant dans le cinéma de Cédric Klapisch : une candeur qui ne devient jamais lourde, servie par une foi immense dans le pouvoir du cinéma.
Dans cette improbable histoire qui mêle préoccupations contemporaines et plongée rétro dans le XIXème siècle , il y a une réflexion diffuse, qui ne fournit pas la matière première du film : il s'agit d'un questionnement autour de la modernité, articulé autour de la permanence des sentiments.
Adèle se confronte en effet aux innovations de son temps (la photographie, l'impressionnisme), comme ses très lointains descendants (réseaux sociaux, solitude), mais trouve sa vérité en aimant, comme d'ailleurs le feront les lointains cousins du XXIème siècle. Dans le cinéma de Klapisch, il est finalement toujours question de liens.
Le film serait donc seulement une fantaisie kitsch vaguement sentimentale si le talent de Klapisch ne parvenait à la sublimer par des parallèles charmants et un montage parfois vertigineux. On prend au final un plaisir certain à suivre les évolutions d'un casting cinq étoiles, dans lequel j'ai envie de distinguer Suzanne Lindon, parfaitement à l'aise dans le rôle d'une jeune fille mal à l'aise, Cécile de France méconnaissable et un Paul Kircher qui me convainc ici totalement pour la première fois de sa jeune carrière.
Les Wes Anderson se suivent et se ressemblent malheureusement un peu trop .
Nous avons donc ici les recettes qui sont généralement mises en oeuvre par l'Américain : cadrage corseté, jeu sans expression des acteurs, décors stylisés, postures hiératiques, fétichisation d'objets kitsch et colorés.
La relative bonne nouvelle est que dans cet opus la stylisation à outrance s'efface un petit peu au profit d'émotions plus humaines : amour filial, peur de la mort, croyance en Dieu, trahison et rédemption. L'image est aussi un peu moins remplie à ras-bord que dans les deux derniers films, ce qui permet une meilleure respiration dans la narration.
Certaines scènes parviennent même à retrouver la légèreté rieuse et caustique qui semblait avoir déserté le cinéma d'Anderson : la scène de basket-ball est ainsi très réussie. Une sorte de gore bon enfant et revigorant est aussi de retour, par exemple dans la scène du premier crash.
The phoenician scheme est donc une relative réussite dans le genre "maison de poupée pour adulte" qui semble être devenu le style durable du cinéaste, style qui n'est pas mon préféré, vous l'aurez compris.
L'opus précédent de Mission Impossible m'avait beaucoup plu. J'avais apprécié son alacrité décomplexée, sa capacité d'aller droit au but et de proposer de nombreuses idées de scénario et de mise en scène.
Malheureusement, ce nouvel épisode est presque l'opposé du précédent. L'action peine à démarrer (il faut attendre plus d'une heure pour que l'action débute vraiment, ... et le film dure 2h49), la lourdeur est plutôt de mise (avec force clin d'oeil aux autres épisodes) et les scènes d'action sont moins enlevées que celle du train dans MI7.
Les choses se débloquent un peu avec une séquence sous-marine plutôt réussie, qui rappelle plus l'ambiance magique du Abyss de James Cameron que les galipettes habituelles de Tom Cruise. La grande scène finale est une cascade aérienne certes impressionnante dans des décors sublimes, mais dépourvue de véritables enjeux dramaturgiques.
Le film se complaît par ailleurs dans une sorte de gloubi-boulga de bons sentiments et de considérations à tendance scientologique qui m'a laissé complètement froid.