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Christoblog

La trilogie d'Oslo : Rêves

Alors que l'opus intitulé Amour est radicalement polyphonique, Rêves est beaucoup plus resserré  : Haugerud s'intéresse ici exclusivement à l'histoire de Johanne, ou pour être plus précis à l'histoire que se raconte Johanne.

Autant Amour était ouvert sur le monde et la variété des sentiments, autant Rêves est presque claustrophobique par construction, à force de ne voir le monde qu'à travers les yeux de son héroïne.

L'exercice est donc complètement différent, mais ce qu'il y a d'interessant, c'est que les qualités d'écriture et de mise en scène sont les mêmes : attention extrême aux variations de l'âme qui effleurent sous les visages, classicisme épuré dans la façon de filmer, parfois zébrée d'éclairs chatoyants, douce causticité dans les dialogues, toujours ciselés.

Si j'ai été moins attiré par les états d'âmes de la jeune Johanne que par les tribulations des personnages d'Amour, je dois tout de même avouer que la découverte de ce cinéaste norvégien de 61 ans est pour moi un des faits marquants de 2025, tant son cinéma paraît évident et profond à la fois.

Je recommande cet exercice de style très contemporain, qui interroge la notion de réalité avec brio.

 

2e

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La trilogie d'Oslo : Amour

De la trilogie de Dag Johan Haugerud, Amour est pour moi le meilleur, opus et de loin.

Le film permet de suivre la trajectoire de personnages haut en couleur : Marianne, médecin célibataire, Tor, infirmier gay, Bjorn, papa récemment divorcé, et beaucoup d'autres.

Chacun est extrêmement attachant : Haugerud excelle à les filmer au plus près de leurs désirs, souvent très intenses, mais aussi décrits avec une grande finesse. J'ai souvent pensé au meilleur de Woody Allen, ou aux films les plus récents d'Emmanuel Mouret. Les conversations sont très crues quand elles portent sur le sexe, et contribuent à donner au film une teinte résolument moderne.

Un autre des points forts du film, c'est de prendre Oslo (et ses bateaux qui relient les différents quartiers) comme magnifique théâtre de l'action : rarement une ville aura été aussi bien filmée, notamment de nuit. La mise en scène est de ce point de vue d'une élégance rare.

J'ai été plusieurs fois ému, amusé, choqué, surpris par ce que proposait le film, riche en idées originales sur nombre de sujets : l'histoire, le sexe, l'amitié, la parentalité, la maladie, la mort, le plaisir, la vocation.

Du grand art.

 

3e

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The things you kill

Drôle d'objet que ce film tourné en Turquie par le réalisateur iranien Alireza Khatami, à mi-chemin entre le tableau naturaliste d'un cas de conscience, typique du cinéma iranien, et l'essai conceptuel dont le cinéma occidental est coutumier (les critiques évoquent, à mon avis abusivement, David Lynch).

Pour le premier point, la caméra de Khatami est d'une grande élégance. La mise en scène est subtile, signifiante, et capte merveilleusement les subtilités de jeu des acteurs. Les paysages de la Turquie évoquent ceux filmés par les grands cinéastes iraniens, et je me suis surpris à déceler ici et là l'influence d'un Nuri Bilge Ceylan, et plus loin celle d'un Jafar Panahi (certaines scènes résonnent curieusement avec la Palme d'or de cette année, Un simple accident). 

Vers le milieu du film, une faille conceptuelle s'ouvre, et nous assistons, sans trop déflorer le sujet, à un glissement de personnages. Ce tour de force est annoncé fort subtilement en amont par quelques astuces de mises en scène à peine discernables (flou, miroir). 

Le spectateur est alors pris d'une sorte de vertige de belle facture, très bien maîtrisé. On se rend compte alors que le film, qui semblait décrire une simple situation de film noir est en réalité l'exploration audacieuse de l'inconscient du personnage principal. 

A condition d'accepter sa construction complexe est déstabilisante, The thing you kill est un véritable plaisir de cinéphile : beau, intrigant et complexe.

 

3e

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Valeur sentimentale

Le nouveau film de Joachim Trier commence par une scène de toute beauté, dont le personnage principal est ... une maison.

Cette  introduction est tellement délicate et brillamment filmée qu'on se dit qu'on tient peut-être là un grand film, digne d'être comparé au chef-d'oeuvre de Trier, Oslo, 31 août.

Malheureusement, l'enchaînement avec les atermoiements de Nora, actrice de théâtre qui panique avant d'entrer en scène (?!), nous laisse de marbre. A l'image de tout ce qui va suivre dans le film, les états d'âmes du personnage joué par l'actrice fétiche de Trier, Renate Reinsve, ne parviennent pas vraiment à captiver (j'ai trouvé que l'actrice qui joue sa soeur, Inga Ibsdotter Lilleaas, était plus intéressante).

Il faut dire que le film cultive l'entre-soi : on est entre gens de la profession, qui se formalisent d'un rien, s'expriment mezzo voce, et souffrent pour des raisons qui nous semblent bien futiles (jusqu'à une révélation bien trop tardive, et dont le poids émotionnel n'est curieusement pas mis en valeur, ni par l'écriture, ni par la mise en scène).

L'impression globale générée par le film est celle d'un drame bourgeois filmé par un Bergman propre sur lui, plutôt bien écrit et filmé avec élégance, mais dont on ne sait trop quoi penser : parfois ennuyeux quand il décrit de chichiteuses souffrances, et parfois amusant quand il manie la causticité distanciée (le metteur en scène qui offre les DVD d'Irréversible et de La pianiste à son petit-fils). 

A vous de voir.

Joachim Trier sur Christoblog : Oslo, 31 août - 2012 (****) / Back home - 2014 (**) / Thelma - 2017 (*) / Julie en 12 chapitres - 2021 (**)

 

2e

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Alpha

J'ai été un ardent défenseur des deux premiers films de Julia Ducourneau, Grave et Titane.

Cela m'est d'autant plus douloureux de devoir constater qu'Alpha, malgré toutes ses bonnes intentions et son ambition, est en grande partie raté.

Pour commencer, le sujet traité est beaucoup moins original que ceux des deux premiers opus. Alpha raconte en effet les conséquences bien connues qu'entraîne l'apparition s'une maladie mal connue : incrédulité, ostracisme, attente angoissée des résultats de test, peurs irraisonnées, méconnaissance des modes de transmission. Bref, autant de choses déjà vues dans les nombreuses oeuvres consacrées au Sida. De ce point de vue, le film n'est pas très fort, et même parfois maladroit. 

Ensuite, le mode de narration qu'a choisi Ducourneau n'aide pas à entrer dans l'histoire. Le scénario mélange en effet plusieurs époques, à peine discernables quand on découvre le film pour la première fois, ce qui génère beaucoup de confusion (le meilleur indice pour se repérer dans ce méli-mélo temporel semble être ... la coiffure de Golshifteh Farhani). Bref, on y comprend pas grand-chose durant une bonne partie du film.

La direction artistique est plutôt moche et la bande-son affreuse, mélange hétéroclite de pop mielleuse et de classique plombant.

L'ensemble de ces points faibles conduira le spectateur presque à coup sûr vers un ennui poli mais profond, tout juste troublé par quelques scènes esthétiquement réussies (la transformation des corps en marbre) et la performance de Tahar Rahim, comme souvent sidérante d'engagement.

C'est mollement raté.

Julia Ducourneau sur Christoblog : Grave - 2016 (****) / Titane - 2021 (****)

 

2e

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Eddington

Le nouveau film d'Ari Aster, jusqu'à présent surtout connu pour des films de genre (Hérédité, Midsommer), commence comme un ancien film des frères Coen : personnages déjantés, ambiance cartoonesque, humour et violence mélangées.

J'ai été plutôt séduit par cette entame amusante, qui passe en revue beaucoup des problèmes de l'Amérique (et plus généralement du monde contemporain) : omniprésence des écrans, complotisme, extrémismes en tous genres, écologie, nouvelles technologies, sort des populations indigènes, sumprématisme blanc, emprise des sectes. 

Malheureusement, Eddington commence à bégayer vers son mitant, et la qualité du jeu de Pedro Pascal et de Joaquin Phoenix ne suffit plus à masquer le manque d'inspiration d'un scénario qui perd progressivement son fil. Au final, Aster renvoie dos à dos racisme et anti-racisme, progressisme et complotisme, dans une sorte de vortex idéologique qui semble avoir perdu tout sens moral : la gêne que génère cet anarchisme intellectuel n'est pas atténuée par la démesure un peu sotte de l'assaut final, qui franchit la frontière séparant spectaculaire et ridicule. Son anti-héros tout puissant n'a pas de contre-point à sa hauteur, ce qui au final déséquilibre le film.

C'est donc indigeste, et raté.

Aris Aster sur Christoblog : Midsommer - 2019 (***)

 

2e

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