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Christoblog

Articles avec #robin campillo

Enzo

Voici le film "de Laurent Cantet, réalisé par Robin Campillo", suite à la mort de son ami.

Le résultat est étonnamment situé exactement à mi-chemin des univers des deux réalisateurs : fine chronique sociale et rapports de classe intra-familiaux côté Cantet, trouble homoérotique et éveil des désirs physiques (sexe, danse) côté Campillo. 

Le début d'Enzo bénéficie de cette ambigüité pour installer une ambiance à la fois solaire et inquiétante, qui attise le désir du spectateur.  Malheureusement, une fois le cadre posé, le film piétine un peu dans son entre-deux thématique : les personnages des parents et du frère sont sacrifiés et dessinés de façon caricaturale, le sujet de la guerre en Ukraine est survolé et semble servir de faire-valoir, le jeu limité d'Eloy Pohu ne contribue pas à développer son personnage de façon intéressante. Dans sa deuxième partie, Enzo pêche par manque d'incarnation et de réalisme (la scène de la chute).

Je suis donc devenu assez rapidement extérieur au film lui-même, regardant avec indifférence le témoignage d'affection de Campillo pour son pote, estimable, mais un peu artificiel. 

 

2e

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L'île rouge

Il y a beaucoup de films dans L'île rouge, qui me plaisent plus ou moins.

Le premier, et le plus important, est la vision par un enfant de sept ans de la vie familiale dans une base militaire française de Madagascar. Ce film-là est plutôt réussi. Les états d'âme des adultes, l'intrication de l'imaginaire et du réel, les subtils décalages liés à la sensibilité de l'enfant (que ses frères et son père traite ostensiblement de gonzesse) : tout cela est bien rendu par Campillo, qui règle ainsi quelques comptes avec son enfance.

Mais il y a dans L'île rouge beaucoup d'autres films, qui me plaisent moins et qui ne s'allient pas très bien avec le propos principal. En vrac : des aventures de Fantômette mises en image d'une façon assez laide, des incises sensorielles comme dans 120 battements par minute (le gravier, les paysages, l'oeil de crocodile), et enfin une parenthèse politique en fin de film qui ne semble pas connectée avec la première partie, ni par la forme, ni par le ton.

La mayonnaise n'a pas pris dans mon esprit et après avoir été agréablement surpris par le début du film, j'en suis progressivement sorti. Le jeu des acteurs, un peu artificiel à mon goût, et l'absence d'interaction avec la vie de la base militaire ont également contribué à me laissé en dehors du projet proposé.

Une déception.

Robin Campillo sur Christoblog : Eastern boys - 2013 (**) / 120 battements par minute - 2017 (**)

 

2e

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120 battements par minute

Dans 120 battements par minute coexistent au moins trois films différents, qui auraient pu chacun être très bons.

Le premier est de nature quasi-documentaire. Il analyse, avec un sens de la répétition parfois lassant, le fonctionnement et les luttes d'influence dans un groupe d'activistes. Que ce groupe traite du SIDA, n'est, pour cette partie du film, qu'accessoire : il s'agit de montrer comment l'expression collective est (ou n'est pas) prise en compte, comment le groupe trouve des moyens de capter l'attention, comment il identifie et s'attaque à ses ennemis, comment il gère son recrutement, etc.

Mon impression globale est que le film est principalement constitué de cette matière, que j'ai au départ trouvée assez intéressante (le fonctionnement des RH, les modes d'action), mais qui au final me laisse un peu sur ma faim : certains personnages semblent caricaturés ou accessoires (le personnage joué par Adèle Haenel par exemple) et surtout je n'ai pas vraiment ressenti l'impact du SIDA dans la société française. 

Le deuxième film dans le film est l'histoire d'amour de Sean et Nathan. C'est pour moi le coeur palpitant du film, très platement filmé au début, mais qui lui donne ensuite ses meilleures scènes : le long passage au lit, la fin tragique.

Le troisième est sûrement celui qui reflète le plus la sensibilité de Campillo. Ce sont toutes ces scènes quasi oniriques et très frappantes visuellement : la boîte de nuit, les particules de poussières flottant dans l'air, le virus, l'arrosage des plantes en gros plan (?!), la Seine entièrement rougie (une vision magnifique).

Le souci, c'est que Campillo ne parvient pas à associer dans une seule oeuvre ces trois tendances (naturaliste / lyrique / sensuelle) complètement divergentes : les différentes approches m'ont paru tout au long du film comme les pièces d'un puzzle qui ne s'ajustaient jamais parfaitement entre elles. Le film peine du coup à générer chez moi la dose d'empathie suffisante pour m'emporter complètement, et je n'ai pas pleuré durant 120 battements par minute, alors que je suis habituellement une madeleine au cinéma.

Reste une oeuvre suffisamment engagée et sincère pour méritée d'être vue par le plus grand nombre.

 

2e

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Eastern boys

Eastern boys est divisé en quatre parties distinctes aux noms bien pompeux comme "Sa majesté la rue" ou "Cette fête dont je suis l'otage". 

La première partie est somptueuse : la caméra filme de très loin le ballet de jeunes garçons qui draguent gare du Nord. Il faut être vigilant pour repérer dans le cadre ceux qui seront les personnages du film, et l'impression donnée est celle d'entomologistes qui regardent une fourmilière. 

La deuxième partie commence plutôt bien : Daniel, joué par l'excellent Olivier Rabourdin, qui a invité un des jeunes hommes à le rejoindre dans son appartement se fait envahir par une bande menée par un caïd charismatique, qu'on dirait tout droit sorti d'un film de Cronenberg. Cette partie comporte du très bon (l'ambiance étrange, un peu lynchienne) et du moyen (l'apathie de Daniel, difficilement explicable, et la longueur de la scène).

La troisième partie, elle, rompt avec l'unité de lieu et d'espace des trois autres, pour décrire l'amour naissant entre l'homme d'âge mûr et le jeune ado ukrainien. Ici encore, Robin Campillo alterne le surpenant (l'horreur racontée tranquillement dans les allées d'un supermarché) et le plus convenu (un drame sentimental gay inter-générationnel, des gros plans de porno soft).

La quatrième partie engendre une énième rupture de ton, en nous faisant pénétrer dans un hôtel bas de gamme, dans lequel toute la bande de jeunes est logée aux frais de la Préfecture. Daniel vient chercher le passeport de son jeune amant dont il souhaite favoriser l'intégration en France, et le film prend alors une tournure de thriller tourné comme une série TV française.

De ce tourbilllon de directions contradictoires je suis sorti un peu perplexe, agacé par certaines postures et charmé par des éclairs d'originalité. Si le film n'est pas totalement maîtrisé, il faut reconnaître qu'il est très prometteur.

Robin Campillo est l'auteur d'un premier film, Les revenants, qui est à l'origine de la série tournée par Fabrice Gobert (mais dans laquelle il n'a eu aucun rôle). La Gare du Nord était au centre du récent et très beau film de Claire Simon (ma critique).

 

2e

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