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Christoblog

Articles avec #mathieu demy

Magma

Les intentions de Cyprien Vial sont estimables.

Décrire une profession peu montrée au cinéma (vulcanologue), donner de la Guadeloupe une vision non touristique, tenter une illustration de ce qu'est la gestion du risque par les autorités publiques : autant d'idées ambitieuses qui auraient pu donner un film original.

Malheureusement toutes ces bonnes intentions se heurtent à un manque de moyen criant qui finit par nuire au film. Difficile en effet de faire monter un suspense de film catastrophe sans avoir les moyens de montrer autre chose qu'un petit panache de fumée à l'horizon.

Si Marina Foïs est très bien, elle ne trouve pas de quoi vraiment s'exprimer dans un scénario un peu scolaire qui tente trop de choses. Aux thématiques déjà évoquées, il faudrait en effet encore ajouter le racisme latent dans l'île, la transmission du savoir, les couples mixtes, le sacrifice de la vie privée au profit de la carrière, l'identité culturelle guadeloupéenne. C'est trop pour qu'un seul de ces thèmes puisse être correctement illustré. 

La mise en scène ne présente aucune aspérité, elle est aussi transparente que le scénario est évanescent. 

Le principal intérêt du film est donc finalement presque documentaire : on approche de près la réalité du travail de vulcanologue, dans sa vérité scientifique un peu austère.

 

2e

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La pampa

On a longtemps reproché au cinéma d'auteur français sa tendance au parisianisme, et plus globalement son incapacité à sortir des grandes métropoles pour s'intéresser aux périphéries et à la campagne.

Mais depuis plus d'un an, des cinéastes français proposent des films touchants dans lesquels la vie qui est menée dans la France profonde semble correctement représentée à l'écran, support d'histoires intenses (Chiens de la casseVingt Dieux, Nos enfants après eux, Le roman de Jim, En fanfare).

La pampa vient s'inscrire dans cette tendance. Nous sommes au bord de la Loire et les loisirs des deux jeunes lycéens que nous découvrons au début du film sont très communs : faire du moto-cross, draguer vaguement les filles, pénétrer dans les maisons abandonnées et profiter la nuit des piscines des autres.

Rien de bien anormal, jusqu'à ce qu'un évènement très particulier que je ne peux dévoiler ici vienne perturber cette vie tranquille. Le réalisateur Antoine Chevrollier, dont c'est ici le premier film (il a réalisé des épisodes du Bureau des légendes et de Baron noir), ne manque pas d'ambition. La pampa balaye en effet un spectre très large de thématiques : différence de classe sociale, deuil, homophobie, difficultés de communication entre générations, éveil du sentiment amoureux, déracinement, culpabilité.

Il faut une écriture subtile et l'interprétation incroyablement convaincante du jeune Sayyid el Alami pour que l'ensemble ne soit pas indigeste. C'est au contraire un souffle épique de coming of age tragique qui vient dynamiser ce beau tableau social.

Une révélation du dernier Festival de Cannes, où le film était présenté à la Semaine de la critique.

 

3e

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Le procès du chien

Ce premier film de Laetitia Dosch est une fantaisie sympathique et légère, originale et parfois intrigante.

Le procès du chien commence comme un autoportrait en creux : du chien, il n'est que superficiellement question, le vrai sujet avec lequel la caméra se régale est l'actrice / réalisatrice elle-même.

On a plaisir à suivre ses déambulations d'avocate spécialiste des causes perdues, à la vie sentimentale brinquebalante. 

Le film se déploie ensuite avec parfois un peu de maladresse dans plusieurs directions : comédie burlesque, réflexion sur la nature animale, et même romcom attendrissante. Tout n'est pas réussi, mais l'impression d'ensemble est celle d'un acte d'auteur qui affirme une voix originale dans le cinéma francophone actuel, qui rappelle un peu dans son style les oeuvres déjantées du trio franco-belge Abel / Gordon / Romy (La fée, Rumba).

On attend le deuxième film avec impatience.

 

2e

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Rien à perdre

La filmographie de Virginie Efira devient passionnante. L'actrice, au faîte de sa renommée, choisit de plus en plus ses films, offrant à des réalisateurs/trices méconnus son image bankable et la garantie d'un certain nombre d'entrées.

Delphine Deloget, dont c'est le premier long-métrage, bénéficie ainsi d'une tête de gondole haut de gamme, pour illustrer un scénario formidable qu'elle a elle-même écrit. Virginie Efira est par ailleurs entourée d'un casting d'une qualité irréprochable : Félix Lefebvre, Mathieu Demy, Arieh Worthalter et India Hair sont absolument parfaits.

Rien à perdre brille par de nombreux aspects. Sa principale qualité est un scénario d'une finesse incroyable. Dans cette histoire d'enfant dont les services sociaux pensent qu'il est peut-être en situation de danger, on passe alternativement par plusieurs états d'âmes, adoptant alternativement les différents points de vue. 

Chaque personnage du film agit avec profondeur, aucune situation n'est traitée avec vulgarité ou facilité, et on est souvent surpris par le développement d'une situation. 

L'émotion n'est jamais loin, servi par le jeu à fleur de peau de Virginie Efira, qui atteint encore ici des sommets.

Du grand cinéma.

 

4e

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Club zéro

Rien ne va dans le nouveau film de Jessica Hausner.

S'il est entendu qu'il s'apparente plus à un conte qu'à un récit réaliste, il n'en demeure pas moins que l'école qui sert de décor au film est tellement invraisemblable qu'on a beaucoup de mal à entrer dans le film. La décoration, les costumes, les locaux : tout est froid, stylisé, désincarné à l'extrême (le cours de mandarin, le trampoline, la danse). 

On ne s'identifie évidemment à aucun personnage (la profondeur psychologique est nulle), mais plus grave, on se désintéresse assez vite de ce que l'on voit. 

Les dialogues semblent une compilation de tous les sujets à la mode, sans que l'on saisisse jamais où veut en venir la réalisatrice. S'il s'agit de dénoncer les excès de certaines théories, alors le film est très maladroit. S'il s'agit de dénoncer les abus d'une classe dominante, cela a été fait mille fois. 

Je me demande si le sujet du film n'est pas tout simplement de filmer des décors stylés comme une maison de poupée.

Une petite chose prétentieuse sans intérêt, qui pète plus haut que son cul, et qui ne me réconcilie pas avec la réalisatrice autrichienne, déjà coupable du calamiteux Little Joe.

Jessica Hausner sur Christoblog : Litlle Joe - 2019 (*)

 

1e

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Les conquérants

http://fr.web.img6.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/176/21017650_20130704165632037.jpgUn film en mode mineur peut être complètement raté (comme le récent Tirez la langue, mademoiselle), ou plutôt réussi.

Il s'en faut de pas grand-chose : des acteurs parfaits plutôt que moyens (ici Mathieu Demy et un exceptionnel Denis Podalydès), des idées un peu originales plutôt que rebattues (ici un soupçon de fantastique), et un solide sens de la mise en scène plutôt que des approximations de téléfilmeur.

Ne me faites cependant pas dire que Les conquérants est un film génial. Il est bourré par ailleurs de défauts : un rythme un peu alangui, une intrigue cyclothymique.

C'est finalement par l'originalité légèrement suréalistes de certaines observations (les cours de philo à l'équipe de foot), par la virtuosité légère de certaines scènes (comme celle de l'enterrement) que le film parvient à être plutôt bon que mauvais. Il baisse d'intensité une fois dans la montagne, une certaine complaisance du réalisateur vis à vis des paysages pyrénéens entrant peut-être en ligne de compte.

L'impression finale est qu'il faudra suivre de prés la carrière de Xabi Molia (8 fois debout), dont c'est le deuxième film.

 

2e

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Tomboy

Laure a 10 ans. Arrivée dans un nouveau quartier, un quiproquo la fait passer pour un garçon : elle joue le jeu. La confusion des genres dure tout l'été, jusqu'au jour où...

Ce deuxième film de Céline Sciamma (Naissance des pieuvres)  est merveilleux. Il accumule les bienfaits pour l'oeil et l'esprit : beau jeu des jeunes acteurs/actrices et des parents (Mathieu Demy parfait), scénario tendu comme la course d'une flèche, très belle photographie, délicate et précise (le film a été tourné avec le fameux appareil photo Canon 7D).

Mais c'est la mise en scène qu'il faut ici surtout saluer. Il y a dans ce film la même qualité que dans Lady Chatterley : c'est ce que je me disais pendant tout le film, avant de voir la réalisatrice remercier Pascale Ferran dans le générique de fin. Le parti pris est de filmer les enfants à leur hauteur, et les parents sont presque toujours hors champ. Cela donne un ton inimitable au film, à la fois très intérieur et très sensuel. La deuxième particularité de Tomboy est de tirer un profit maximal d'un décor a priori quelconque : un immeuble lambda d'Ile de France. Sous les caresses de la caméra de Céline Sciamma, la forêt devient un lieu de danger, un pont et ses rambardes rouges semble sortir d'un film d'Imamura, une baignade dans un plan d'eau devient un combat initiatique...

Mouvements fluides et cadres au cordeau, la réalisatrice ne nous donne pas seulement une leçon de beau cinéma, elle nous offre une oeuvre dans laquelle tous ses choix font sens, et servent admirablement le propos.

Tomboy, c'est un thriller psychologique d'1h20 qu'on suit en apesanteur, ravi et anxieux à la fois. Pour moi le meilleur film français de l'année.

 

4e

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