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Christoblog

Articles avec #lars von trier

The house that Jack built

Il y a quelque chose d'effroyablement triste dans la façon dont Lars von Trier saborde son talent au fil du temps.

Les petites provocations du film (dont l'ablation d'un sein dans l'indélicate intention d'en faire un porte-monnaie, une fois la peau tannée) ne paraissent finalement que roupie de sansonnet face à l'incroyable naufrage en continu que constitue la filmographie de Lars von Trier.

Le nouvel opus de l'âme damnée danoise se situe dans le prolongement de l'exercice précédent, l'inégal et indécent Nymphomaniac : scènes tirées d'une même vie à plusieurs années de distance, voix off omnisciente, focus sur une addiction mal contrôlée, le tout entrelardé de considérations diverses sans grand rapport avec le schmilblick (Glenn Gould, Gauguin, les nazis, Klimt, les cathédrales...).   

Pour ma part je n'ai pas vraiment ressenti de malaise en regardant ce film censé en générer. La logorrhée incontrôlée du personnage principal devient au fil des séquences de plus en plus ennuyeuse, et à l'initiale curiosité malsaine succède vite un ennui carabiné.

La descente finale aux Enfers n'est au final suivi que d'un oeil attristé, bien loin de l'effet dantesque qu'elle est probablement destinée produire. 

Peu dérangeant, ponctuellement séduisant, The house that Jack built finit par paraître inutile, tant l'ego malade de son auteur en vient à contaminer son oeuvre. Une petite chose.

Lars von Trier sur Christoblog : Melancholia - 2011 (**) / Nymphomaniac 1 - 2014 (****) / Nymphomaniac 2 - 2014 (**)

 

2e

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Nymphomaniac (Volume 2)

La première partie de Nymphomaniac m'avait ravi, par son originalité et sa vivacité intellectuelle.

La deuxième partie m'a beaucoup déçu, les qualités manifestées dans la première semblant avoir disparues. Les digressions délicieuses du vieil homme sont rares et moins percutantes, les historiettes sont extrêmement prévisibles et le mystère qui planait sur le premier épisode est ici bien éventé.

Si la partie masochiste est encore acceptable (l'ambiance de la salle d'attente est bien vue), l'ensemble du développement criminel avec Willem Dafoe est bien pauvre, et peu captivant. La relation de Joe et de P., qui aurait sans nul doute méritée d'être développée, est baclée.

Si lors des premières minutes on retrouve avec plaisir les personnages découverts il y a un mois, cette deuxième partie se regarde avec un ennui croissant, jusqu'à un dénouement grotesque, que je ne dévoilerai pas ici.

Dommage.

 

2e

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Nymphomaniac (Volume 1)

http://fr.web.img6.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/13/12/02/16/30/380373.jpgJe n'étais pas loin de craindre le pire en allant voir le dernier Lars von Trier : une sorte de démesure dans la dégradation de la femme, et de Charlotte Gainsbourg en particulier, voilà ce que le passé du réalisateur (Antéchrist), le titre et la bande-annonce me laissait présager.

Et puis vint la première scène, lors de laquelle Seligman, le personnage joué par le très bon Stellan Skarsgård, découvre Joe (Charlotte Gainsbourg) inconsciente. Elle est somptueuse. Les mouvements de caméra y sont divins, les cadrages et la bande-son audacieux, tout y est parfait.

A partir de cette entrée en matière alléchante, le film met en scène un dialogue entre une femme qui va raconter l'histoire de sa vie, et un vieil homme. Il y a de la Schéhérazade dans le personnage de Joe : Seligman est suspendu à la progression de l'histoire, et le couple s'amuse pour chacun des épisodes à faire correspondre les éléments du récit à quelque chose qui se trouve dans la pièce : une mouche pour pêcher, une fourchette à gâteau, un tableau, une cassette de musique. Ce procédé donne au film un charme intense, entremêlant détails et anecdotes philosophiques, scientifiques ou religieux  avec le récit de Joe.

Le miracle de Nymphomaniac est bien là : on croit venir voir un film porno un peu trash, et on a droit à des exposés sur la suite de Fibonacci, sur la musique de JS Bach, ou sur les feuilles de frênes. Lars Von Trier utilise des procédés de mise en scène que certains ne trouveront pas forcément de très bon goût (vraies ou fausses images d'archive, noir et blanc un peu tapageur, split-screen, accélérés, incrustations, répétitions, musiques très contrastées), mais qui contribuent à donner à l'oeuvre l'aspect d'une construction subtile et ludique.

Autre surprise, on rit franchement à plusieurs reprises, et de différentes façons. On sursaute aussi, au moins une fois, je vous le garantis. Et on est aussi agréablement mal à l'aise lors d'une scène stupéfiante, lors de laquelle Uma Thurman donne toute la mesure de son talent.

Vous pensez sûrement à ce stade de la critique : mais quand va-t-il de parler de sexe ? Eh bien au risque de vous décevoir, je ne vais pas en dire grand-chose. Joe est victime d'une addiction au sexe, mais elle pourrait être tout autant dépendante de l'alcool, du mensonge ou du risque. La multiplication des partenaires (jusqu'à 10 par jour) donne à son activité sexuelle un aspect routinier qui en enlève pratiquement tout intérêt sensuel. La nymphomanie est donc ici plutôt le prétexte à décrire la solitude de Joe d'une part, et à fournir au film des ressorts scénaristiques intéressants, d'autre part.

Pour finir, il faut signaler que tout le casting est excellent, car outre les acteurs déjà nommés, Stacy Martin (Joe jeune) est confondante, et Shia LaBeouf, que je n'apprécie pas habituellement, est ici une parfaite tête à claque. Les seconds rôles sont éclatants : Christian Slater campe par exemple le père de Joe avec une belle dignité.

2014 commence en beauté.

 

4e

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Melancholia

Kirsten Dunst & Charlotte Gainsbourg. Les Films du LosangeMelancholia s'ouvre par une série de plans fixes à la beauté glaçante et aux lumières irréelles.

Par son aspect poseur, voire pédant, cette ouverture rappelle celle (complètement ratée) de Minuit à Paris. Elle fait également penser au long insert cosmo-panthéiste de Malick dans The tree of life. D'une certaine façon, les spectateurs pressés pourront se contenter de ces quelques plans : ils contiennent les plus belles trouvailles du film, le résume parfaitement (en en dévoilant d'ailleurs la fin) et illustre une de ses caractéristiques principales, la lenteur.

Deux soeurs : Justine (sublime Kirsten Dunst) et Claire (la sombre Charlotte Gainsbourg).

Deux parties. Dans la première, Justine se marie. Le mariage tourne au fiasco au fur et à mesure que Justine perd pied avec la réalité. Le film lorgne incontestablement vers le repas de famille du formidable Festen, le film de Thomas Vitenberg. Il n'en a malheureusement pas la force. Kiefer Sutherland, le héros de 24, semble importer ses tics de justicier, il regarde par dessus ses épaules avant de frapper à une porte comme si une armée de terroristes allait débarquer. Bref, sans être complètement nulle, cette partie dogme semble avoir été vue mille fois, et on s'ennuie ferme. Peut-être faut il être (ou avoir été) dépressif, comme Lars von Trier lui-même pour saisir toutes les nuances de la chute de Justine. Pour ma part, j'ai souffert et ne me suis pas passionné pour ces petits psychodrames mesquins et sans intérêt.

Dans sa deuxième partie, le film décrit les jours qui précèdent la collision de la planète Melancholia avec la Terre. Même décors (un hôtel de luxe et un golf), mêmes personnages (hors le mari éconduit, bien sûr). Au fur et à mesure que l'échéance approche, les personnages semblent inverser leur polarité : Justine devient sereine (elle préfère une grandiose catastrophe à de menues satisfactions) et Claire panique. Cette partie est plus réussie que la première, elle souffre cependant d'un goût curieux pour certains effets kitchissimes (le dernier plan !) et pour certains messages douteux (la Terre est mauvaise). Le scénario étire jusqu'à la rupture une intrigue minimale.

Melancholia laisse au final un sentiment d'oeuvre malade, riche de potentialités, mais n'étant parvenue à les concrétiser complètement.

 

2e

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