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Christoblog

Articles avec #jeremy strong

Springsteen : deliver me from nowhere

A s'attacher à une période très spécifique de la vie de Springsteen (quelques mois de dépression et de grande inspiration), le film de Scott Cooper se heurte très rapidement à sa propre limite : il n'est pas facile de maintenir l'intérêt du spectateur pendant deux heures, alors qu'il ne se passe pratiquement rien à l'écran.

Il aurait fallu approfondir les deux sujets intéressants du film : la prééminence de la vision d'artiste sur le diktat de l'industrie (celui-ci est assez bien traité, mais on aurait aimé en savoir encore plus) et les sources profondes de l'inspiration quand elle est d'une telle puissance (le sujet n'est abordé que par le biais d'anecdotes, comme le film Badlands, la musique d'Alan Vega ou les écrits de Flannery O'Connor).

A défaut d'explorer plus profondément ces sujets, le scénario, écrit laborieusement, se voit dans l'obligation d'inventer une histoire d'amour d'une pauvreté affligeante, qui gâte le film par l'accumulation de scènes à l'eau de rose qu'elle nous impose.

Parmi les points faibles du travail de Scott Cooper, il faut également signaler la superficialité des personnages secondaires : les membres du E Street Band sont inexistants, la mère (dont on sait qu'elle est solaire quand on a lu l'autobiographie de Springsteen, Born to run) est réduit à un personnage de souffrance, et la figure de Jon Landau, véritable saint au service de la création - on ne le soulignera jamais assez, n'est pas aussi développé qu'on aurait pu le souhaiter.

Mon avis, en tant que cinéphile ET en tant que connaisseur de la carrière du Boss est donc partagé : d'un côté je reconnais que le traitement lo-fi qu'a choisi le réalisateur est bien en phase avec le processus de création du chef d'oeuvre dépouillé qu'est Nebraska, de l'autre il me faut avouer que plusieurs passages (l'accélération en voiture, certains flashbacks, la scène de sexe) m'ont semblé beaucoup trop clichés. 

Peut-être aurait-il fallu des parti-pris de mise en scène encore plus radicaux pour donner à sentir ce que le travail de Springsteen a eu de véritablement génial dans cette période, à l'image de ce qui reste pour moi le meilleur film inspiré par un musicien : le film Control, sur la courte vie de Ian Curtis.

Dernier point, Jeremy Allen White joue comme à son habitude avec une expressivité proche de la moule en fin de vie, ce qui en l'espèce n'est pas très gênant, puisque sur les photos de la période on voit bien que Bruce arbore en continu une moue boudeuse et figée, assez proche de celle que White possède naturellement.

A vous de voir, mais le plus important reste tout de même d'écouter ce classique intemporel qu'est le disque Nebraska.

 

2e

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The apprentice

A quelques semaines de la si importante présidentielle américaine, il faut absolument aller voir The apprentice.

Le film d'Ali Abbasi nous fait voir Donald Trump avant le succès. Il nous fait ressentir d'une façon presque charnelle l'extrême médiocrité du bonhomme et son incommensurable confiance en soi, qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer. 

L'extrême culot, allié à une souveraine mauvaise foi, soulève des montagnes, comme le montrait également la série Tapie. Mais Trump ne serait certainement pas Trump s'il n'avait pas rencontré l'avocat Roy Cohn, mentor d'une exceptionnelle immoralité, magistralement campé par un Jeremy Strong (Succession) au sommet de sa forme.

La mise en scène d'Abbasi est sage (on est loin de démence de ses films précédents). La reconstitution du New-York des années 70 est incroyablement réussie.

The apprentice se regarde avec une délectation honteuse (car les deux "héros", auxquels ont finit par s'attacher par la grâce de la narration, sont tout de même des salopards de la pire espèce) et une curiosité malsaine : le film nous fait entrer dans la fabrique du monstre. Ou comment un petit con écervelé peut devenir un dangereux magnat, pris en main par un Pygmalion génial et sans scrupule. 

Ali Abbasi sur Christoblog : Border - 2019 (****) / Les nuits de Masshad - 2022 (****)

 

2e

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Armageddon time

S'il est arrivé que James Gray se perde, il faut reconnaître qu'il se retrouve ici, dans une veine autobiographique et nostalgique, qui rappelle un peu la démarche de PT Anderson dans Licorice pizza.

Le grand mérite du film est de mélanger chronique intime (un petit garçon et son grand-père qui va mourir, des parents imparfaits et attendrissants, une ambiance new-yorkaise des confins, délicieusement rendue) avec un tableau saisissant d'un racisme américain qu'on se surprend à penser (avec effroi) congénital.

Ce tour de force est réalisé sur un mode mineur, sans esbroufe et avec une délicatesse de tous les plans. L'introspection qu'il propose à ses personnages devient petit à petit un examen de conscience de la nation américaine.

Anti-spectaculaire dans sa construction, Armageddon time est un petit chef-d'oeuvre sotto voce. La distribution est parfaite, d'Anthony Hopkins au faîte de sa forme à un Jeremy Strong surprenant, pour ceux qui le connaisse surtout dans le rôle phare de l'excellente série Succession. Le jeune acteur Banks Repeta irradie la pellicule, en alter ego du réalisateur (le film pourrait s'appeler "portrait d'un jeune garçon en futur artiste"). Anne Hathaway est une nouvelle fois formidable.

A ne pas rater, c'est pour moi le meilleur James Gray depuis longtemps.

James Gray sur Christoblog :  La nuit nous appartient - 2007 (**) / Two lovers - 2008 (***) /  The immigrant - 2013 (*) / The lost city of Z - 2016 (***) / Ad astra - 2019 (**)

 

4e

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Succession

C'est sans nul doute une des toutes meilleures séries de ce début des années 2020, si ce n'est la meilleure. Elle a d'ailleurs gagné l'Emmy Award de meilleure série dramatique en 2020 puis 2022, succédant ainsi à Games of thrones,  Breaking bad et autres Mad men.

Conduite de main de maître par le britannique Jesse Amstrong, Succession est passionnante. On suit le destin d'un vieil homme à la tête d'un empire dans le domaine du divertissement, magnifiquement joué par Brian Cox, et de ces quatre enfants. Entre ces cinq là, il n'y a pas de cadeau, et la moralité est bien la dernière des préoccupations des protagonistes de Succession.

Les deux saisons disponibles pour l'instant égrènent une série assez incroyable de coups de théâtres, de trahisons, de promesses non tenues, de coups bas, et d'humiliations en tout genre. Comme les quatre enfants ont chacun leurs défauts et addictions diverses, on ne s'ennuie pas une seconde.

La mise en scène peut troubler légèrement au début de la première saison (rythme épileptique, cadrages alambiqués, effets de zoom bien visible), mais elle s'assagit vite, à moins qu'on ne s'y habitue.

L'évolution des personnages est un des grands points forts de la série. Jeremy Strong (Kendall) et Sarah Snook (Shiv) sortent du lot, parmi un casting haut de gamme d'une dizaine d'acteurs principaux tous formidables.

Outre la mise en scène captivante des manoeuvres financières qui se trament au plus haut niveau du monde des affaires US, Succession se distingue également par un génie du lieu que je n'ai trouvé dans aucune autre série : certains épisodes sont entièrement tournés dans un seul endroit spécifique, et chacun de ces épisodes laisse une trace mémorable dans l'esprit du spectateur (un yacht en mer Egée, une fête underground à New York, un hôtel de luxe dans une station de montagne, un mariage à Londres, une villa dans le désert, un week-end en Hongrie, une ville en Ecosse, un hôtel en Toscane pour le final éblouissant de la saison 4). 

Bref, encore un chef d'oeuvre produit par HBO, visible sur OCS.

A ne rater sous aucun prétexte.

 

4e

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