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Christoblog

Articles avec #bruce springsteen

Western stars

La mode est à la projection unique d'un film évènement (souvent un concert) concernant un artiste. Le distributeur est ainsi quasiment certain d'engranger une grosse participation sur une seule séance, tous les fans veillant évidemment à être présents.

Vendredi soir, c'était au tour du Boss de sacrifier à cette tendance. Etait présenté partout en France Western stars, le film qu'il a co-réalisé avec Thom Zimny, et qui a été montré au dernier festival de Toronto.

Le film est constitué d'un concert filmé dans sa grange personnelle, et qui reprend morceau par morceau l'album éponyme, interprété par un orchestre d'une trentaine de musiciens. Les morceaux sont entrecoupés d'interludes constitués de plans plus ou moins esthétiques de Springsteen dans le désert, et d'images d'archives, personnelles ou pas.

La partie concert intéressera les fans. On aura rarement été aussi près du miracle de la voix springsteenienne : on la voit ici littéralement naître sous nos yeux, à quelques centimètres de la caméra, à travers le frémissement de la lèvre, le gonflement de la gorge ou la profonde intériorité du regard. C'est assez fascinant. Ce qui m'a également frappé, c'est la qualité d'écriture et l'extrême homogénéité de l'album, magnifié ici par de savants arrangements.

Les interludes gâchent le plaisir de la performance. Les images au ralenti, l'aspect hyper-esthétisant des images, le ton pontifiant des commentaires en voix off n'apporte rien au film. Les propos de Springsteen sont nettement en retrait de ceux qui figurent dans son autobiographie. De ce marasme pseudo-philosophique peut être sauvé l'image d'archive qui montre le Boss et Patti amoureux, dans un modeste chalet de montagne. Ce moment-là est à proprement parler confondant de grâce.

Un film pour les fans exclusivement.

Bruce Springsteen sur Christoblog : Springsteen on Broadway - 2017 (****) / The promise - 2010 (***)

 

2e

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Music of my life

Music of my life fait partie de ces cas aberrants dans lesquels le distributeur français change le titre original anglais (Blinded by the light) pour un titre ... en anglais. Il perd au passage la double connotation symbolique présente dans le titre d'origine : il s'agit du premier titre du premier disque de Springsteen, et il reflète le sentiment du héros, véritablement aveuglé par la lumière springsteenienne. 

Le film de Gurinder Chadha (Joue-la comme Beckham) ne renouvelle pas le genre de la comédie sociale anglaise. Si les fans de Springsteen pourront aisément s'identifier au héros laissé pour compte qui trouve dans les odes romantiques du Boss la force de s'extraire de son milieu, les autres trouveront certainement que les ficelles comiques comme mélodramatiques sont un peu grosses, voire grossières. Ces derniers pourront tout de même profiter du film pour découvrir l'univers springsteenien s'il n'en connaissent que la version faussement testostéronée de Born in the USA.

Music of my life propose également un nouveau type d'utilisation des chansons d'un artiste dans un film, que je ne me souviens pas avoir déjà vu : il ne s'agit pas d'une comédie musicale puisque les personnages ne chantent pas vraiment (ou alors faux), on ne voit quasiment pas Springsteen chanter, et il ne s'agit pas strictement d'une BO puisque chaque morceau s'insère dans le scénario à la fois narrativement (les paroles guident l'action ou l'illustrent) et visuellement (les mots s'incrustent dans le décor). Le niveau d'intrication des paroles et du récit est tel que les personnages parlent parfois en utilisant les paroles de certaines chansons.

Feel-good movie maladroit mais parfois agréable, tiré de l'autobiographie du journaliste Sarfraz Manzoor, Music of my live est aussi le tableau sans prétention d'une émancipation dans l'Angleterre thatchérienne et raciste des années 80. A voir si vous êtes fan.

Retrouvez ma critique de l'exceptionnel spectacle Springsteen on Brodway.

 

2e

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Show me a hero

Aux manettes de cette mini-série HBO, un des showrunners les plus vénérés, David Simon, dont la série The wire (Sur écoute) est très souvent citée comme la meilleure série de tous les temps.

A l'écran, un des acteurs hollywoodiens les plus prometteurs, Oscar Isaac (Inside Llewyn Davies, A most violent year, Star Wars), entouré d'une pléiade d'excellents professionnels, dont la merveilleuse Winona Ryder.

Derrière la caméra, un réalisateur chevronné capable du meilleur (Dans la vallée d'Ellah, Collision), Paul Haggis.

A l'arrière plan, une reconstitution exceptionnelle des USA dans les années 80. Tout y est : les voitures, les costumes, la décoration, les moeurs.

Avec tant d'atouts, on se dit que la série ne peut qu'être exceptionnelle. Elle l'est, dans le style propre à Simon, constitué d'une somme d'anti-effets qui ne facilite pas, dans un premier temps, l'addiction.

Dans Show me a hero, ne vous attendez pas à des cliffhangers de malade en fin d'épisode. Attendez vous plutôt à des terminaisons en demi-teintes, une complainte springsteenienne accompagnant trsitement le générique de fin. Le Boss est d'ailleurs très présent dans la série, aussi bien en musique diégétique qu'extradiégétique, époque oblige.

Sur le fond, l'histoire racontée est édifiante : comment un juge opiniâtre oblige les politiques à construire des logements sociaux, essentiellement destinés aux Noirs. Le tableau édifiant du racisme ordinaire est terrible, à l'image de ces réunions publiques indignes, qui rappellent avec une cruelle acuité les récentes violences verbales des habitants du XVIème arrondissement de Paris.

Comme dans The wire, Simon tisse sa toile dans de multiples directions, qui ne semblent jamais devoir se rejoindre, jusqu'au dénouement ultime que je ne dévoilerai pas, mais qui m'a laissé complètement pantois, éclairant rétrospectivement toute la série d'un éclat nouveau et lugubre.

 

3e  

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Twenty feet from stardom

http://fr.web.img2.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/pictures/210/215/21021589_20130722151350752.jpgComme l'année dernière avec le somptueux film de Werner Herzog, Into the abyss, on peut se demander pourquoi ce très beau documenataire n'a pas droit à une distribution plus large (5 salles en France !).

Le sujet peut paraître un peu abscons : qui sont les choristes qui accompagnent les stars du rock ?

En réalité, il s'avère passionnant à plus d'un titre :

- c'est toute l'histoire de la pop music qu'on revisite, avec des visions époustouflantes (David Bowie, grand bringue dégingandée s'esseyant au R'nB, Ray Charles monté sur ressort, Mick Jagger plus sex symbol que jamais)

- les histoires individuelles des cinq ou six protagonistes principales sont extrêmement émouvantes (tentatives de carrières solo, accident de parcours, fréquentations illustres...)

- le film est aussi un témoignage de la façon dont les Noirs se sont émancipés - et plus particulièrement les femmes noires

- on entend les témoignages très pertinents de plusieurs stars respectueuses de leurs choristes (essentiellement Bruce Springsteen, Stevie Wonder, Sting, Mick Jagger), qui réfléchissent subtilement sur ce qui sépare l'anonymat de la célébrité

- certains passages du film sont des moments de grâce, en particulier tous ceux dont la sublime Lisa Fisher est le centre

Histoire, destinées, émotions, beauté, Twenty feet from stardom vous fera à la fois rire et pleurer d'émotion. Et de plaisir. Un must.

 

3e

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The promise : the making of darkness on the edge of town

The promise est un documentaire de Thom Zimny, qui nous projette dans les sessions d'enregistrement du quatrième album de Bruce Sringsteen, il y a 32 ans. Constitué en grande partie d'images d'archive, il propose en contrepoint des témoignages récents des différents acteurs ayant participé à celle folle aventure.

Le film a été présenté et très bien accueilli au festival de Toronto 2010 (avec une bonne critique du Monde), puis à ceux de Londres et Rome. Il est disponible dans la box luxueuse parue en 2010, à l'occasion des 30 ans de Darkness on the edge of town.

Si dans sa forme le film n'a rien d'exceptionnel, ce qu'il donne à voir est tout simplement extrêmement rare : on n'aura jamais vu d'aussi près le moment décisif de la création artistique. Rappelons rapidement les faits. Springsteen a fait la une de Time et de Newsweek la même semaine à l'occasion de la sortie de son précédent disque, Born to run. Il est à un moment crucial de sa carrière : soit il va être un véritable artiste, soit un simple feu de paille.

Le film commence par nous exposer le combat juridique qui l'oppose à Mike Appel, son producteur, avec lequel il a signé naïvement un contrat qui le prive de ses droits de contrôle sur la musique qu'il produit. Plutôt que de céder, Springsteen refuse d'enregistrer, il est conscient que se joue là un épisode déterminant de sa vie. Le temps que le procès se déroule, le groupe tourne, survit comme il peut, la situation est difficile, mais on voit déjà les deux éléments majeurs qui caractérise la carrière du boss : il ne fera aucune concession, et le E Street Band le suivrait jusqu'en enfer, quelqu'en soit le prix.

Une fois réglés les problèmes juridiques, le groupe entre en studio. Le film montre alors une épopée absolument inimaginable de nos jours. Les sessions vont s'étaler sur pratiquement un an, les membres du E Street Band restent enfermés parfois 24 h sur 24, Springsteen écrit plus de 70 chansons, dont certaines en plusieurs versions. Il se dégage du film l'impression d'assister à un processus qui touche à la magie pure, une sorte de fontaine intarissable à produire de la musique et des textes, qu'un groupe de personnes s'approprie immédiatement comme les leurs.

Le plus incroyable, c'est observer comment la volonté pure de Springsteen recherche une sorte de perfection, comme indépendante de sa volonté. L'artiste cherche à peindre un tableau entier, complet, qui sera sombre, et parlera du sentiment tragique de la vie, mais aussi de la volonté de rechercher la rédemption et les raisons d'espérer. Il dresse ce faisant un tableau poignant de la société américaine comme de la condition humaine. Dans cette entreprise un peu folle, il est sidérant de le voir exclure les deux tubes potentiels de l'album pour les offrir à Patti Smith (Because the night) et aux Pointer Sisters (Fire), simplement parce que ces deux morceaux ne "rentrent" pas dans l'idée qu'il se fait de Darkness. Le fait de ne pas retenir non plus The promise, une des plus belles chansons qu'il ait écrite et sur laquelle le groupe a travaillé trois mois (?!) est encore plus incroyable.

Pour les  plus jeunes qui ne connaissent que Born in the USA, le film peut être un excellent moyen de faire découvrir le travail d'un des plus importants songwriters encore en activité.

 

3e

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