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Articles avec #michel piccoli

Les lignes de Wellington

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/31/65/20200358.jpgLes lignes de Wellington aurait pu être un film de Raoul Ruiz, puisque ce dernier y a travaillé avant de disparaître, mais c'est finalement un film de Valeria Sarmiento, la compagne du maître.

Le film nous transporte au début du XIXème siècle, durant la guerre opposant le Portugal, aidé des anglais, aux troupes napoléoniennes du général Masséna.

Le récit est très curieusement agencé, puisqu'on fait successivement connaissance avec une quinzaine de personnages qui semblent n'avoir aucun rapport entre eux, avant que leur destinée ne se rejoignent subtilement (et très partiellement).

Le scénariste Carlos Saboga tisse le même genre d'entrelacs savants qui faisaient le charme des Mystères de Lisbonne, d'une façon toutefois plus intellectuelle et moins romanesque que dans le chef d'oeuvre de Ruiz. On est ici plus du côté de Perec que de celui des Mille et une nuits ou d'Alexandre Dumas.

La réalisation de Valéria Sarmiento est souple, classique, mais il faut le dire, sans les éclairs de génie et les travellings de folie de son défunt mari. L'ambiance morbide et cruelle de l'exode est toutefois envoûtante, et on a rarement vu un film de guerre aussi long (2h31) sans y entendre quasiment un coup de fusil. Les ruptures de ton orientent l'oeuvre dans sa deuxième partie vers une farce languide et par moment désespérément noire : toutes les femmes (même vieilles, même mortes) semblent devoir y être violées, et par les deux camps s'il vous plait.

Un film hors norme, une curiosité dans laquelle quelques stars viennent, parfois brièvement, saluer le maître Ruiz : Catherine Deneuve, Michel Piccoli, Isabelle Huppert, Melvil Poupaud, Mathieu Amalric, Elsa Zylberstein, Marisa Paredes, John Malkovitch.

A voir si vous avez le temps.

 

2e

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http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/88/64/60/20110428.jpgUn metteur en scène est mort.

Il invite par message posthume tous les acteurs et actrices qui ont compté pour lui.

Arrivent alors en ordre dispersé une joyeuse troupe toute au plaisir de se retrouver : Pierre Arditi, Michel Piccoli, Sabine Azéma, Mathieu Amalric, Anne Consigny, Anny Duperey, Hippolyte Girardot… La réunion a lieu dans une bâtisse inquiétante, curieusement onirique et comme construite dans les limbes.  

Ils sont tous là, chacun jouant son propre rôle.

Les effusions passées, ce joli monde s’installe dans de confortables fauteuils et découvre le but de leur réunion : autoriser ou non une jeune troupe de théâtre à jouer l’Eurydice d’Anouilh dans une version moderne.

A cet effet est projetée sur un grand écran une vidéo de la représentation, et chacun est amené à donner son avis. Tous les acteurs invités ont déjà joué la pièce et sont donc habilités à porter un jugement, mais ils vont progressivement céder à la tentation de se renvoyer les répliques en même temps que les jeunes acteurs visibles à l’écran.

Ainsi vont se reformer sous nos yeux émerveillés les anciens couples Orphée/Eurydice : Arditi/Azéma, Wilson/Consigny… Le pitch du film peut sembler désuet ou anecdotique, d’autant que la pièce d’Anouilh est un peu datée, mais ce serait sans compter avec la virtuosité exceptionnelle d'Alain Resnais. A 90 ans, celui-ci se révèle être un magicien cinéaste (à croire que l’extrême âge rajeunit les cinéastes, comme en a témoigné aussi le magnifique Mystères de Lisbonne de Ruiz l’an dernier). Le film devient progressivement un pur enchantement de mise en scène, épuisant l’imagination et multipliant les figures de style novatrices. Les différentes scènes de la pièce sont jouées deux fois, se reflètent, se répètent, se répondent, les décors s’effacent, se transmutent, des portes apparaissent, des trains surgissent du néant. On est complètement saisis par la magie du théâtre, et les acteurs finissent par être comme des ectoplasmes flottant dans l’imaginaire, à la fois symboles et incarnation de la force créatrice d’un écrivain, et d’un cinéaste.

C’est beau, intelligent, divinement réalisé, magnifiquement joué (Amalric y est une fois de plus fantastique) et diablement émouvant. Le film n’a rien d’un testament, et est irrésistiblement joyeux. Un prix de la mise en scène aurait été parfaitement mérité à Cannes.

Le titre est très bien trouvé : je n’avais encore rien vu de pareil.

 

4e 

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