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Articles avec #kim sang-kyung

Conte de cinéma

Conte de cinéma est le sixième film de Hong Sang-Soo. Après la trilogie qui l'a fait connaître en occident, puis deux films ambitieux pour lesquels il a bénéficié de plus de moyens (Turning gate et La femme est l'avenir de l'homme), le réalisateur coréen conçoit ici son premier film dont la construction entière est basée sur un concept qui trouble le spectateur. Conte de cinéma inaugure ainsi une lignée qui aura de nombreux successeur dans la filmographie de Hong Sang-Soo (de Hill of freedom à Un jour avec, un jour sans).

Nous assistons dans la première partie du film à une histoire dont le sujet, le ton et la réalisation détonne légèrement par rapport aux autres films de HSS, même si on y trouve des thématiques habituelles du cinéastes (la lâcheté masculine, le suicide). Par exemple c'est la première fois que le zoom optique est utilisé, me semble-t-il.

Au milieu du film, on comprend qu'on vient de voir un film réalisé par un cinéaste qui est en train de mourir (les subtils décalages détectés sont donc normaux, puisque le film n'est pas de HSS !). L'actrice principale du film sort d'une salle de cinéma où elle regardait le même film que nous, et est suivie par un homme qui la drague, et lui révèle être celui qui a inspiré le personnage principal du film. S'en suit une seconde partie très sombre, peut-être une des plus noire de tout le cinéma de HSS, dans laquelle la femme s'avérera particulièrement dure.

Le film dans son entier semble marqué par l'emprise de la mort (suicide, maladie). Les mensonges et l'incompréhension entre les êtres humains semblent portés ici à leur maximum, et le sens de la vie s'échappe des mains des protagonistes comme du sable entre les doigts, sous l'ombre tutélaire de la tour de Séoul, qui ouvre le film et revient régulièrement tout au long de ce long-métrage.

D'un point de vue formel, le cinéma de HSS s'allège un peu dans Conte de cinéma. La durée diminue nettement, la touche est plus légère, même si elle reste cruelle. Il s'agit sans nul doute d'une des oeuvres pivots de la filmographie du coréen.

Intellectuellement très stimulant. 

 

2e

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Turning gate

Ce quatrième film de Hong Sang-Soo suit la trilogie initiale qui fit connaître le cinéaste coréen en France, et marque la mise en place des grands thèmes que HSS va ensuite développer durant toute sa carrière.

Nous avons donc ici des hommes qui cherchent l'amour, des femmes séduisantes et insaisissables, un simulacre d'amitié, des phrases qui se répètent dans la bouche de plusieurs personnages, des scènes de beuverie et de restaurant, des allusions sexuelles directes, des artistes plus ou moins ratés, des coïncidences, des situations qui rendent mal à l'aise, des défauts de mémoire, des objets symboles et un récit en deux parties.

Les seuls éléments vraiment nouveaux qui apparaîtront dans la suite de la filmographie de Hong Sang-Soo seront les déformations de la trame temporelle de la narration, complètement inexistantes ici.

Dans ce film fondateur de la grande période classique du coréen, on suit la trajectoire d'un beau personnage masculin, Gyung-Soo, qui promène sa grande carcasse dans la campagne coréenne : une vraie curiosité pour le coup, puisque Séoul est le théâtre habituel utilisé par HSS. Il rend visite à un ex-ami, couche avec la petite copine de celui-ci qui le manipule, rencontre ensuite une fille avec qui il était au collège et dont il ne souvient plus, en tombe amoureux, et se fait larguer.

On voit que tout cela n'est pas très gai, et l'acteur Kim Sang-Kyung interprète à merveille ce pauvre gars à la fois maladroit et poète (très jolie scène où il écrit une déclaration posée dans la rue à l'aide d'un kaki).

Turning Gate est une très bonne introduction à l'univers de Hong Sang-Soo, donnant à voir à la fois l'incroyable habileté du réalisateur à saisir les plus petits mouvements de l'âme, et sa capacité à parfois égarer le spectateur dans les méandres de plans plus ou moins utiles. Le film est à cet égard remarquablement long pour un HSS (1h55) : il semble rempli à ras bord des intentions de son réalisateur.

 

3e

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HA HA HA

Deux amis mangent une dernière fois ensemble avant que l'un d'entre eux parte à l'étranger. Le repas est montré à l'aide de photographies en noir et blanc. Chacun raconte alternativement (en voix off) ce qui s'est passé dans les dernières heures de sa vie. Ces tranches de vie font l'objet de flashbacks.

On découvre progressivement que chacun des deux amis, sans jamais se rencontrer, ont fréquenté les mêmes personnes, en étant parfois séparés uniquement par une fine cloison. Cette mécanique donne lieu à toute une série de situations légèrement burlesques, subrepticement décalées, dans lesquelles la comédie humaine déploie toute sa gamme de sentiments : humour, désespoir, dérision, amour, désillusion, violence, indifférence, cruauté.

Si les films de Hong Sang-Soo se ressemblent un peu tous, celui ci est particulièrement réussi. Le développement de l'histoire est très amusant à suivre, même si le réalisateur peut se révéler particulièrement cruel. Certaines scènes dégagent en effet une férocité très policée : une mère débite des atrocités sur le père devant son fils, un groupe "d'amis" éclate de rire autour d'en dépressif qui déclare sa maladie, et plus globalement, tout le monde critique tout le monde (et comme tout le monde s'essaye lourdement à la poésie ou au piano, les occasions ne manquent pas).

Le scénario est évidemment du grand ouvrage, qu'on dirait tissé main, chaque filament d'histoire étant subtilement relié aux autres. On relèvera les quelques objets qui se promènent d'un personnage à l'autre (la casquette rouge en particulier, ou l'appartement de la mère), les reliant plus sûrement entre eux que leur sentiments...

On retrouve avec beaucoup de plaisir les tics du réalisateur : un personnage de réalisateur raté, de l'alcool à profusion (tous les personnages semblent passer leur temps à en absorber), et un rôle prépondérant des femmes, beaucoup plus volontaires et positives que les hommes.

Le genre de film dont vous sortez avec la sensation d'être plus intelligent.

 

3e

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Memories of murder

Un coin de campagne en Corée, dans les années 1980.

Une jeune fille habillée de rouge est retrouvée violée puis étranglée. Puis une deuxième.

Les deux flics du coin, une brute patibulaire qui croit reconnaître un coupable en le regardant dans les yeux, et un teigneux violent et obsédé, n'arrivent pas à gérer l'affaire.

Un jeune policier de Séoul, beau et malin, rompu aux méthodes plus modernes d'enquête, vient les épauler.

Un troisième corps est découvert grâce à lui.

A partir du schéma classique du serial killer, Bong Joon-Ho réussit un film très prenant et très beau.

Bien sûr, le développement de l'enquête qui ne ménage pas rebondissements et suspense, est captivant en soi. Je ne peux pas en dévoiler grand-chose sans gâcher votre plaisir de spectateur mais sachez qu'il faut toujours écouter les histoires que se racontent les jeunes filles dans les écoles, que la radio peut se révéler une aide précieuse dans ce type d'enquête, et que les hommes portant une culotte rose se réfugient dans les mines à ciel ouvert.

Au-delà du prétexte policier, déjà très agréable, Bong Joon-Ho nous offre une mise en scène raffinée, absolument étonnante chez un jeune réalisateur dont c'est le deuxième film. Les scènes de groupe démontrent par exemple un sens du cadre et de la composition remarquable (la scène du restaurant quand le commissaire vomit). L'alliance d'un réalisme très cru par moment (les cadavres) et d'un esthétisme discret mais très présent (le ralenti sous la pluie, la façon de filmer la nature, le brio des scènes d'action, l'atmosphère magique de la mine, l'épilogue élégiaque) donne au film une beauté plastique "qui fait sens". De ce point de vue Memories of Murder rappelle évidemment le style de David Fincher et préfigure d'une certaine façon Zodiac.

Percent également dans le film le sens de l'observation sociale qui sera le terreau de l'excellent The Host, et la finesse de l'étude psychologique avec des personnages qui évoluent beaucoup de ce point de vue tout au long du film. Tous les acteurs, Song Kang-Ho en tête, sont très bons.

A noter que l'intrigue se nourrit de faits réels, et fut tourné non loin du lieux des crimes.

Un classique en puissance.

 

4e

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