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Christoblog

Journal de Cannes 2012

Jour 8 - 26 mai

Déception de tôt matin avec Mud, de Jeff Nichols (Take shelter). Le film est classique, trop classique, ce qui constitue un défaut un peu général de la sélection 2012, qui manque d'étincelles. Le film n'est pas affligeant, il est simplement convenu, à l'image de son happy end à l'eau de rose. Il constitue tout de même une belle plongée dans le Sud des USA et dans le monde de l'enfance.

Pas grand-chose à dire du dernier film en compétition, Le goût de l'argent, de Im Sang-Soo, dont on se demande ce qu'il fait en compétition. Il s'agit d'une variation un peu vaine sur les mêmes éléments que The housemaid : sexe sur fond de lutte des classes entre domestiques et maîtres, intérieurs design. Là aussi, une fin stupide.

Comme c'est un peu l'habitude cette année, c'est dans les compétitions parallèles que je trouve mon bonheur. A Un certain regard d'abord, avec Gimme the loot, un petit film qui fait respirer l'air de New-York, dans le sillage d'un couple d'ados noirs. Nos deux compères (un gars et une fille) se sont mis en tête de tager la célèbre pomme dans le stade des Mets (une des deux équipe de base-ball de NY). Problème : il faut réunir 500 $ pour soudoyer le portier. Un courant d'air frais circule dans ce film.

31ème - et dernier -  film de mon périple cannois à la Quinzaine : No, film chilien de Pablo Larrain. Au début très suprenant (écran carré, image un peu trash) le film devient progressivement palpitant. Il montre comment lors d'un référendum organisé par Pinochet en 1988 un jeune publicitaire va changer la donne en orchestrant la campagne du NON. C'est du Mad Men low-fi, avec Gabriel Garcia Bernal dans le rôle principal.

En sortant de ce film un peu pointu, je tombe sur une Lamborghini orange V12 immatriculée au Koweit. Salut la Croisette, à la prochaine !

 

Jour 7 - 25 mai

Début de journée dans un grand éclat de rire avec l'euphorique Camille redouble de Noémie Lvovsky, à la Quinzaine. La salle a réservé une longue ovation pour ce film qui est promis à un grand succès en salle. Il s'agit d'une histoire fantastique, sentimentale et rigolote : foncez-y dès que ça sort.

Le retour à la compétition est rude avec le beau et dur Dans la brume du russe Sergei Loznitsa (My joy). Le film est d'une beauté formelle incroyable, et il soulève des questions très profondes sur le sacrifice et le devoir, dans le contexte de la seconde guerre mondiale en Biélorrussie. C'est dommage qu'il soit trop long. Très peu de photographes lors de la montée des marches (une dizaine) et une salle pas complète, mais qui a applaudi longuement le cinéaste et son équipe, visiblement très émue.

Contraste saisissant avec ce qui a suivi : une cohue indescriptible pour la montée des marches du Cronenberg à 19h, Pattinson qui roucoule avec Juliette Binoche, 400 invités laissés sur le carreau, des robes de soirée à foison, BHL qui fait son cinéma, le crépitement de milliers de flash, les tops modèles qui défilent ... et un film qui fait flop. Nombreux départs pendant la séance, applaudissements à peine polis et commentaires acerbes des spectateurs à la sortie. Cosmopolis est effroyablement raté, il faut bien le reconnaître.

Avant le dodo, petit détour au cinéma de la plage. Un écran géant, des centaines de transats, et une distribution de plaids. J'ai regardé 30 minutes de Red tails, un film américain qui décrit la vie d'un groupe d'aviateurs noirs pendant la seconde guerre mondiale. Un gros machin pyrotechnique sans grand intérêt, mais quel plaisir d'être au cinéma face à la mer, en regardant les mouettes voler et les doigts de pied dans le sable. Georges Lucas himself nous accueillait sur la plage, en tant que producteur. Cannes, c'est ça.

 

Jour 6 - 24 mai

Comme c'est maintenant l'habitude je commence la journée avec un film en compétition : The paperboy, de Lee Daniels. Quelques sifflets à la fin et un début de polémique sur la toile que je ne m'explique pas, car il s'agit d'un produit somme toute classique, que j'ai plutôt aimé pour son scénario complexe, la qualité de ses interprètes et le dynamisme de sa mise en scène (Daniels s'est assagi depuis Precious). Pour moi le meilleur film US en compétition. Les puritains seront peut-être choqués d'y voir Nicole Kidman uriner sur Zac Efron. J'embraye ensuite avec ma première séance dans la belle salle Debussy (Un certain regard) : Miss Lovely. Un film qui tente de tracer une voie réaliste dans le paysage du cinéma indien. Pas facile. C'est appliqué, scolaire et raté, sans être honteux. Retour à la compétition avec le pire film vu dans ce cadre : Post Tenebras Lux du sulfureux mexicain Carlos Reygadas, qui joue trop au rugby et à la prétention de faire du Malick sans être Malick, ce qui constitue une grave erreur. Faites moi confiance et n'allez jamais voir ce film, sinon vous le regretterez, je vous le promets.

Changement total de décors pour une autre première : un film dans le cadre de la sélection ACID, qui accueille des films sans distributeurs (Les vieux chats y avaient été présentés en 2011). Noor dure 1h18 (ça fait du bien,un film court) et raconte l'histoire d'un transgenre qui ressemble à une femme mais veut devenir un homme. Tourné au Pakistan le film est très plaisant et donne à voir des paysages à couper le souffle.

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/56/81/20106605.jpgA la fin de cette journée marathon je tente vaguement ma chance, sans y croire,  pour le nouveau Catherine Corsini, Trois mondes. Et en quelques minutes de patience j'obtiens une invit ... pour le carré VIP. Me voici assis à 1 siège de Pierre Salvadori, et quelques uns  de Catherine Corsini, Clothilde Hesme, Raphaël Personnaz et un peu plus loin Emmanuel Carrère, présenté par Thierry Frémeau comme "le plus grand écrivain français vivant". Le film est un thriller psychologique et sentimental sur le thème bien connu de l'accident-de-voiture-avec-délit-de-fuite-et-culpabilité-du-conducteur. Le film se laisse regarder sans déplaisir même si j'ai trouvé la véracité psychologique des personnages un peu flottante sur la durée.

 

Jour 5 - 23 mai

Début de journée réservé à la compétition avec Sur la route dès 8h30. Le film n'est que joliement illustratif (beaux paysages, belles gueules des personnages). Pour le reste, il est monotone, plat et trop long. Je n'ai pas accroché du tout. A midi, un des moments que j'attendais le plus dans ce festival : la projection de Holy Motors, premier film de Leos Carax depuis une dizaine d'année. Holy motors est une ode au pouvoir du cinéma, une expérience sensuelle et onirique hors du commun. Je suppose qu'il va diviser, mais il peut sans aucun doute prétendre à la Palme d'Or, comme Lynch le pouvait avec Mulholland Drive.

A 16h, séance spéciale avec la projection de Io e te, le dernier film de Bernardo Bertolucci, toujours alerte malgré son fauteuil roulant (montée des marches par l'ascenseur de service) et ses 71 ans.  Longue standing ovation à la fin de la projection. Le film est étonamment modeste et frais. On dirait un premier film. Une réussite. Fin de journée détente avec une amusante comédie anglaise à la Quinzaine, noire et décapante, Sightseers, où un couple de trentenaires qui découvre le tourisme en caravane s'avèrent être des monstres de beaufitude, puis des monstres tout court. Eclats de rire garantis.

 

Jour 4 - 22 mai

Grasse matinée... jusqu'à 9h. Premier film de la journée en compétition : La part des anges, de Ken Loach. Un bon cru, réaliste et optimiste. Toujours ancré solidement dans les problèmes de la société britannique, mais résolument joyeux. A la Quinzaine, je tente, après la séance de minuit hier soir, un autre défi d'importance : voir le film indien Gangs of Wasseypur qui dure ... 5h20. Le film est assez plaisant et on ne s'ennuie pas. Il faut imaginer un film de mafia type Les affranchis avec un petit côté Bollywood. C'est du mainstream indien, non destiné à l'exportation et donc rarement visible en Europe. Pléthorique équipe du film dans la salle, visiblement ravie d'être à Cannes.

Fin de journée encore à la Quinzaine avec 3, de Pablo Stoll Ward. Scénario évanescent, mise en scène quelconque, enjeux anodins, ce film restera uniquement dans les annales de Christoblog comme le premier film uruguayen chroniqué.

 

Jour 3  - 21 mai

Grosse journée, qui commence à 8h30 bien plus gaiment que hier, avec Vous n'avez encore rien vu, d'Alain Resnais, que je me suis surpris a beaucoup http://images.allocine.fr/c_100_100/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/88/64/60/20110419.jpgaimer. Le film est brillant, et même magistral par moment. Petit détour ensuite par la Quinzaine. Je me trompe de file et je vais voir un film que je n'avais pas prévu dans mon programme et qui s'avère très bon : Rengaine de Rachid Djaïdani. Une jeune femme musulmane qui a 40 frères veut se marier avec un jeune homme noir et chrétien. Problèmes en perspective... Rengaine est une comédie fraîche et énergique qui rappelle Donoma, sans avoir le souffle de ce dernier.

Retour à la compétition pour In another country de mon chouchou Hong San Soo, servi cette fois-ci par une Isabelle Huppert au mieux de sa forme. J'aime toujours la petite musique du coréen, mélange de Rohmer et de Woody Allen. Il nous propose ici 3 histoires pour le prix d'une.

En soirée, le Kiarostami de service tourné au Japon, m'ennuie au plus haut point. En réalité je n'ai rien compris à ce que propose Like someone in love, il faudrait que l'iranien se remette au cinéma et laisse les oeuvres conceptuelles pour les musées.

Clou de la soirée : la fameuse séance de minuit (en réalité 0h30) pour le nouveau Miike : For love's sake. Comme d'habitude c'est super déjanté, cette fois-ci dans le registre de la comédie musicale mélodramatique burlesque et grotesque. Indescriptible. La salle applaudit, siffle et s'esclaffe pendant le film. Réjouissant, bien que trop long (2h14).

 

Jour 2 - 20 mai

Début de journée en sélection officielle avec La chasse, le nouveau film de Thomas Vinterberg (Festen). On est ici à mille lieues de ce dernier. La chasse est en effet très sage, très prévisible, et ... très peu intéressant. En matière de rumeur http://s.excessif.com/mmdia/i/86/7/la-chasse-de-thomas-vinterberg-10694867eitkb.jpg?v=1destructrice de pédophilie, Outrault est malheureusement bien plus fort, et en vrai.

Suite avec Amour, le nouvel Haneke. On suit un couple de vieillards qui s'aiment, alors qu'elle s'enfonce dans la déchéance. Je n'aime pas le cinéma de Hanneke, et ce n'est pas avec celui-ci que ça va s'arranger. C'est affecté, poseur, artificiel et froid. On dirait un long clip médical pour la promotion de l'euthanasie.

Il se met ensuite à pleuvoir des trombes d'eau, dans un froid automnal. Drôle d'ambiance.

Du coup je passe la soirée au Studio 13, petite salle un peu miteuse et à l'écart, pour voir deux films dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs. D'abord Le repenti de Merzak Allouache, qui traite de la réinsertion des terroristes islamiques repentis suite à la Concorde Nationale algérienne. Le film est imparfait, comporte des longueurs, mais mon sentiment est plutôt positif, grâce à un scénario intelligent et à un beau final. Pour finir la journée, direction un lac assez exceptionnel en Colombie, pour La Sirga. Je suis beaucoup plus réservé sur ce film, qui est une sorte de désert des Tartares humide et lacustre. Pas nul, mais à 22h en quatrième film de la journée, un peu raide. Dans les deux cas, les équipes complètes des films étaient là, dans une ambiance MJC étonnante qui contraste avec le strass de la Croisette.

 

Jour 1 - 19 mai

Débuts un peu difficiles. Je cherche pendant plus d'une heure des invitations sans succés. Je fais la queue pour Antiviral, le film de fiston Cronenberg, sans pouvoir entrer. Et puis, alors que le découragement allait me gagner, un gentil monsieur me donne une place pour le dernier Mungiu : Au-delà des collines. C'http://www.lefigaro.fr/medias/2012/05/19/812ceed2-a19d-11e1-821f-68a64c57ee6f-493x328.jpgest peu de dire que le film du réalisateur de 4 mois, 3 semaines, 2 jours est une oeuvre ambigue et potentiellement polémique. Il est question de religion, de superstition, du malin et d'amour. C'est long (2h30), bavard, parfois énervant, souvent sublime, lassant et génial. Un prix à l'horizon (mise en scène, prix du jury ?).

Dans la foulée, je mets mon noeud papillon et coup de bol, j'obtiens quasi instantanément une invitation pour Lawless, en compétition offcielle également. Le film se déroule lors de la prohibition, dans la campagne américaine. De facture très classique, il n'est pas désagréable à regarder. Le rythme molasson est t zébré de séquences de violence quasi insoutenables, ce qui lui aliénera peut-être une partie du public. Sa sélection détonne quand même un peu.

Et pour finir séquence de rattrapage à la Quinzaine à 22h30 avec The we and the I, le dernier Gondry, que j'ai adoré. On suit des lycéens du Bronx dans le bus qui les ramène chez eux le dernier jour d'école. C'est vif, touchant, inventif. Du Gondry en grande forme.

 

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M
Ah, et sans trop me mouiller, je mise au moins sur Resnais et Audiard au palmarès!
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C
<br /> <br /> Raté !<br /> <br /> <br /> <br />
M
Chouette bilan, merci d'avoir partagé cette belle aventure avec nous! C'est mille fois plus intéressant d'avoir ton regard neuf et pas blasé sur le festival que de lire n'importe quel article de<br /> magazine, bien souvent dénué d'émotion et d'objectivité.<br /> Le palmarès se rapproche...<br /> Bonne continuation!
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C
<br /> <br /> Meric mille fois de ce commentaire ... et de m'avoir lu !<br /> <br /> <br /> <br />
A
Toi qui avais peur de ne pas voir grand chose, c'est un franc succès !<br /> <br /> Est-ce que tu aimerais y retourner l'année prochaine ?
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C
<br /> <br /> Effectivement, c'est plus facile que ce que je pensais, même s'il faut être très patient. Je ne sais pas si j'y retournerai, parce qu'au niveau fatigue et investissement c'est quand même lourd à<br /> gérer. D'un autre côté quand on a gouté à ça, difficile de se dire qu'on regardera la télé l'année suivante...<br /> <br /> <br /> <br />
A
C'est sympa de partager tes impressions, et cette passion, avec ta verve qui reste intacte.
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C
<br /> <br /> Merci Alain de ta fidélité !<br /> <br /> <br /> <br />
P
Ça c'est c'est du journal ! Je te reconnais bien là. Ton plaisir de festivalier est communicatif.
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C
<br /> <br /> Merci !<br /> <br /> <br /> <br />