Head on
Cela commence comme une sorte de mariage blanc. Sibel veut s'échapper de sa famille en se mariant à n'importe quel allemand d'origine turque. Cahit, veuf en deuil et auto-destructeur, s'en fout un peu. Tous deux viennent d'échapper à une tentative de suicide.
Le film continue comme une comédie romantique à la sauce germano-turque arrosée de cocaïne. Les préparatifs du mariage et la cérémonie elle-même sont montrés avec tous les artifices de la comédie ethnico décalée. Sibel profite ensuite de sa toute nouvelle liberté d'épouse pour baiser à tout va. Cahit fait de même avec sa vieille amie Maren. Mais comme dans toute bonne comédie romantique, ce qui est en train de se jouer dans ce couple bizarre et déjanté, c'est la germination d'un sentiment fragile... jusqu'au drame.
Le film glisse alors vers la tragédie antique en même temps qu'il file vers l'Est, direction Istanbul, en même temps que les cheveux de Sibel raccourcissent. Cette deuxième partie est une merveille d'écriture et de mise en scène, dont je ne dévoilerai rien, afin de ne pas ternir votre joie de spectateur.
On retrouve dans Head on toutes les qualités des deux films suivants de Fatih Akin (De l'autre côté, Soul kitchen) : un sens aigu du rythme, une bande son parfaite, un montage au cordeau, une direction d'acteurs exceptionnelle (Sibel Kekili est légère comme une plume - et elle porte si bien son prénom, Birol Unel sombre comme un puits sans fond), un génie de la mise en scène qu'on dirait inné, et un de ces merveilleux scénario en mille-feuilles qui capte l'attention de la première à la dernière seconde.
Le film est ponctué par de courts intermèdes musicaux proposés par un groupe de musique traditionnelle turque interprétant une chanson d'amour, filmé en plan large sur fond de Bosphore. Ce groupe apparaît en fin de film comme un choeur antique accompagnant la progression dramatique de l'histoire. Il nous salue en un dernier plan magnifique, en même temps qu'il annonce la naissance d'un grand réalisateur.
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