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Christoblog

Les hauts de Hurlevent

C'est avec peine que je rédige cette critique, moi qui adore le cinéma d'Andrea Arnold.

Son dernier film me laisse en effet perplexe, et si on ne peut nier qu'il est par bien des aspects impressionnant, il ne me semble pas aussi limpide que ses deux premiers opus (Red road et Fish tank)

Les hauts de Hurlevent commence pourtant sur les chapeaux de roue.

Les parti-pris de la cinéaste (format carré, très gros plans, jeu sur la profondeur de champ, naturalisme extrême) fonctionnent au départ admirablement bien. Nous découvrons la vie rude que mène la famille d'accueil du jeune Heathcliff avec un oeil quasi documentaire, d'une puissance esthétique inouïe.

L'ambiance du film, qui associe dénuement extrême et espaces immenses, rappelle beaucoup le sublime film de Wang Bing, Three Sisters. La caméra d'Arnold atteint parfaitement son objectif de nous fait ressentir les sentiments des protagonistes par les sens : toucher (caresser un cheval), goût (lécher une blessure), ouie (le bruit d'un arbre qui heurte une fenêtre), vue (le soleil qui éblouit), odorat (fleurs, boue, animaux).

Le sentiment amoureux naissant entre Heahtcliff et Catherine est ainsi très bien esquissé, et la tension sexuelle qui règne dans le film est étouffante. Dans la deuxième partie du film, tout ce qui a plu dans la première paraît soudainement virer à la recette, au placage formaté et sans imagination, comme si Arnold s'était laissée enfermer dans son système.

Les inserts de paysages sont bien trop variés pour être réalistes, ceux sur les animaux paraissent dresser un catalogue d'entomologiste, les plans montrant Heathcliff espionner la maison de Cathy deviennent exagérément répétitifs.

Les deux acteurs qui jouent les rôles des personnages adultes sont peu crédibles, contrairement à ceux qui jouent les personnages enfants. Kaya Scoledario ne ressemble pas du tout l'actrice qui joue Catherine jeune. Elle semble immature et ses états d'âme nous restent aussi étrangers que ceux de sa jeunesse nous paraissaient proches. James Howson, qui joue Heathcliff adulte, en ajoute beaucoup trop dans le mutisme. Dans son cas non plus, on ne comprend pas réellement le chemin psychologique parcouru.

Les personnages d'Isabella et d'Edgar sont sacrifiés. La fin du film laisse donc une impression de déception, de délitement, qui ternit un peu l'enchantement que la sensualité de la première partie procure. Dernier point : le film s'arrête approximativement au milieu du roman, et toute la suite de la vengeance de Heathcliff, ainsi que sa fin, est ignorée. Ce n'est évidemment pas un défaut en soi, mais cela rend le personnage de Heathcliff moins complexe, moins subtil et moins inquiétant que dans le roman.

 

2e

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M
Étonnant quand même, avec cet aveu, tu brises le mythe de ta mauvaise foi légendaire, prêt à reconnaître les défauts d'un film alors que tu partais conquis d'avance, vendu que tu es à Arnold.<br /> Certes, ça ne rattrapera pas les coups de Drive ou Detachment, mais tu es sur la bonne voie et j'ai bon espoir.
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C
<br /> <br /> 1 - ma mauvaise foi est un mythe, et non une réalité<br /> <br /> <br /> 2 - ton goût, par contre, semble s'améliorer avec le temps : tu es de plus en plus souvent d'accord avec moi<br /> <br /> <br /> <br />