Gomorra
Quand on a lu le livre avant de voir le film, on est toujours déçu. Ce vieil adage de lecteur cinéphile se vérifie une fois de plus avec Gomorra.
Le livre de Roberto Saviano est une bombe documento-romanesque. Tout y est : des visions d'apocalypse (comme le premier chapître, qui donnerait une scène d'ouverture au film beaucoup plus forte que la vraie, déjà vue cent fois chez Scorsese et d'autres), des histoires romanesques, de la profondeur psychologique et sociologique. Le livre est à la fois un brûlot politique et un écrit plein de suspense (l'écrivain est infiltré). Bref de la matière à cinéma.
Le résultat filmé est décevant. Face à la richesse surabondante du livre, Matteo Garrone a sélectionné quelques destins individuels. Mais sans le background explicatif et journalistique du livre, les maigres intrigues du film deviennent presque incompréhensibles (qui comprendra pourquoi Maria est tuée ? comment fonctionne le marché de la contrefaçon et à quoi correspondent les enchères que montre le film ?), et on a beaucoup de difficultés à s'attacher aux personnages.
L'ennui n'est pas loin, surtout dans la première partie du film.
Reste une mise en scène assez élégante, mélangeant avec bonheur le style "caméra à l'épaule" et une recherche esthétique et mélancolique dans les tons et les ambiances (la voiture accidentée parmi les fausses statues, le buldozzer sur la plage...).
La récompense cannoise semble un peu généreuse, c'est probablement le caractère social du film qui l'explique. Un conseil : lisez le livre.
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