Wadjda
Wadjda court le risque d'être réduit à son statut de "premier-film-saoudien-qui-plus-est-réalisé-par-une-femme".
Heureusement pour lui, il vaut plus que ça.
L'argument du film est simple, voire simpliste : une petite fille souhaite battre un copain à la course en vélo, et pour atteindre son but elle lorgne sur une magnifique bicyclette, évidemment inacessible pour de multiples raisons, dont la principale est qu'elle est une fille. On pense instantanément à une foule de référence haut de gamme, comme le néo-réalisme italien ou les premiers Kiarostami qui mettaient génialement en scène les enfants dans la cité. On a raison : Wadjda possède cette force intérieure qui lui confère un statut de conte universel.
Le mérite en revient évidemment à la jeune actrice Waad Mohammed, absolument craquante, bloc résolu de volonté pure au milieu d'un océan de conventions : "Faire du vélo empêche d'avoir des enfants", "Ne touchez pas le Coran si vous avez vos règles", "Ne laissez pas le Coran ouvert, le Diable crache dessus". La friction entre sa fraîcheur déterminée et les pesanteurs de la société traditionnelle saoudienne constitue le véritable carburant du film, qui fonctionne très bien sur cette base.
Le plus fort est que la réalisatrice Haifa El Mansour laisse filtrer sous le poids des conventions quelques sentiments purs (le père envers sa fille, la mère envers son mari) : le carcan craque aux entournures, et c'est dans ses fêlures que le film devient beau.
On est tout simplement conquis par l'efficacité du dispositif, tout en distinguant nettement les grosses ficelles que la réalisatrice manipule : tant pis, ou tant mieux, dans tous les cas le film est un véritable bain de jouvence cinématographique.
Coup de coeur.
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