Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Christoblog

Articles avec #sidse babett knudsen

Le fil

N'est pas Justine Triet qui veut.

Difficile en effet de ne pas comparer Le fil à Anatomie d'une chute : même sujet (l'accusé a potentiellement assassiné son conjoint), même ambigüité sur ce qui s'est réellement passé, même accent mis sur le rôle des différents protagonistes (et de l'avocat en particulier), même relativité des témoignages et mêmes coups de théâtre.

Dans le film de Daniel Auteuil, tout paraît un ou plusieurs crans en-dessous de la Palme d'or. Les second rôles sont mal dessinés (Sidse Babett Knudsen ne campe pas une compagne très crédible), l'ambiance du tribunal est assez mal rendue, les aléas semblent téléphonés et Le fil est rempli de plans inutiles qui ne servent qu'à meubler (l'avocat marche dans la rue, l'avocat rumine dans son canapé, l'avocat regarde par la fenêtre d'un air pénétré...), alors qu'Anatomie d'une chute brillait par son découpage au cordeau.

Heureusement, le film échappe au naufrage pour deux raisons : l'interprétation de Auteuil et Gadebois est impeccable, et l'aspect documentaire sur le fonctionnement de la justice est d'une grande précision. Deux avocats présents en fin de séance ont d'ailleurs confirmé au public que le tableau dressé par le film était en tout point semblable à leur quotidien.

Il y a toutefois beaucoup mieux à voir dans les salles en ce moment.

 

2e

 

Voir les commentaires

Sons

Le premier film de Gustav Möller, The guilty, plébiscité par la critique et le public, était un film habile, basé sur une seule idée.

On retrouve dans ce second film le même type d'obsession, consistant à mener une trame narrative simple en en explorant toutes ses conséquences.

Le problème de cette méthode est de lasser le spectateur : on voit trop bien où veut en arriver le réalisateur, en accumulant les effets redondants.

Comme ici le propos est de nature cruelle, le résultat évoque une expérience d'entomologiste sadique. Un peu comme du Haneke en mode automatique, ou du Michel Franco sans imagination.

Sidse Babett Knudsen tente de s'en sortir comme elle peut, c'est à dire en prenant des poses exprimant la plus grande variété possible d'émotions, sur un spectre très étroit allant de la contrariété maladive à l'obsession souffreteuse. 

Vous l'avez compris, je n'ai pas aimé me sentir prisonnier de ce huis clos programmé, dont le rebondissement central m'a paru à la fois invraisemblable et peu productif en terme de nouveaux développements. J'aurais d'une certaine façon préféré que le parti-pris sadique de la première partie soit poussé le plus loin possible : cela aurait au moins donné du grain à moudre d'ordre moral.

Gustav Möller pratique ce que j'appelle un cinéma de petit malin : au mieux efficacement prenant, au pire programmatiquement malaisant.

Gustav Möller sur Christoblog : The guilty - 2018 (**)

 

1e

Voir les commentaires

Club zéro

Rien ne va dans le nouveau film de Jessica Hausner.

S'il est entendu qu'il s'apparente plus à un conte qu'à un récit réaliste, il n'en demeure pas moins que l'école qui sert de décor au film est tellement invraisemblable qu'on a beaucoup de mal à entrer dans le film. La décoration, les costumes, les locaux : tout est froid, stylisé, désincarné à l'extrême (le cours de mandarin, le trampoline, la danse). 

On ne s'identifie évidemment à aucun personnage (la profondeur psychologique est nulle), mais plus grave, on se désintéresse assez vite de ce que l'on voit. 

Les dialogues semblent une compilation de tous les sujets à la mode, sans que l'on saisisse jamais où veut en venir la réalisatrice. S'il s'agit de dénoncer les excès de certaines théories, alors le film est très maladroit. S'il s'agit de dénoncer les abus d'une classe dominante, cela a été fait mille fois. 

Je me demande si le sujet du film n'est pas tout simplement de filmer des décors stylés comme une maison de poupée.

Une petite chose prétentieuse sans intérêt, qui pète plus haut que son cul, et qui ne me réconcilie pas avec la réalisatrice autrichienne, déjà coupable du calamiteux Little Joe.

Jessica Hausner sur Christoblog : Litlle Joe - 2019 (*)

 

1e

Voir les commentaires

L'hermine

Le dernier film de Christian Vincent entrelace subtilement plusieurs thèmes.

Le premier est passionnant. Il s'agit de suivre un procès d'assises très commun (un bébé de sept mois tué parce qu'il pleurait trop) de l'intérieur. Il n'est pas si courant de voir comment les jurés d'assises vivent leur expérience

Habituellement, les films de procès, dont le parangon est bien sûr Douze hommes en colère, s'attachent à bâtir un suspense sur la culpabilité de l'accusé. Ici, rien de ce type : le film s'attache à montrer les doutes, le travail de réflexion des jurés, les liens qui se tissent fugitivement entre eux. Le verdict est d'ailleurs d'une certaine façon expédié, escamoté.

Le deuxième thème du film est le personnage du juge lui-même : un homme sec, désagréable, mais qui réalise son travail avec précision et efficacité. On dit parfois que certains grands films sont des documentaires à propos de leur acteur principal, et c'est l'impression que l'on a en regradant L'hermine. Fabrice Luchini, qui est loin d'être mon acteur préféré, trouve ici un de ses tout meilleurs rôles : il ne surjoue jamais (un exploit pour lui !) et son personnage évolue tout en finesse. 

Le troisième thème du film est une histoire d'amour légère, aérienne, incroyablement ténue et fragile, entre le juge et un médecin urgentiste joué par la superbe Sidse Babett Knudsen (la présidente de Borgen). Il fallait sa classe naturelle et la formidable mobilité de son visage pour que l'on puisse croire à cette romance platonique, semblant provenir d'un autre espace-temps.

Le film permet à ces trois thématiques de ce répondre l'une l'autre. Sous ses dehors anecdotiques, il s'avère d'une belle et riche profondeur.

 

3e

Voir les commentaires

Borgen

Vous qui aimez les séries, il importe que vous regardiez immédiatement Borgen, sous peine de quoi vous pourriez vous retrouvez dans la situation de l'amateur de vin qui laisse lui passer sous le nez un Romanée Conti sans le goûter.

De quoi s'agit-il ? Nous sommes au Danemark, le royaume où l'on croise aussi bien Hamlet que le renouveau de la série européenne (The killing). Une femme politique centriste (qui se dévoue pour offrir Borgen à Bayrou ?) se retrouve à la faveur de circonstances hasardeuses en position d'être première ministre.

Suivent vingt épisodes palpitants durant lesquels les scénaristes vont parvenir avec une justesse de ton incroyable à entrecroiser les histoires personnelles (être femme et premier ministre, c'est possible ?) et intrigues politiques, toujours parfaitement ajustées. On compare souvent Borgen à A la Maison Blanche, comme une déclinaison européenne du walk and talk US, mais croyez moi, le modèle est assez différent, et encore plus palpitant.

La série nous entraîne en Afrique, en Afghanistan, mais aussi dans des hopîtaux psychiatriques danois ou dans des séminaires gouvernementaux avec le même bonheur. C'est excitant, rusé, malin, brillant, admirablement filmé et photographié, et surtout, surtout, c'est la plus forte addiction connue depuis .... depuis .... Lost ?

Il faut dire que le personnage de Birgitt Nyborg est magnifiquement interprété, et qu'il difficile, voire impossible, de ne pas tomber complètement dingue de cette femme découvrant l'ivresse du pouvoir, et la nécessité des compromissions.

 

4e

Voir les commentaires