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Christoblog

Articles avec #philippines

Ma' Rosa

A ceux qui connaissent l'oeuvre du grand cinéaste qu'est Brillante Mendoza, Ma' Rosa n'apprendra rien.

Suivant les points de vue, on pourra donc reprocher au dernier film du Philippin d'être peu original, ou considérer qu'il représente la quintessence du style de son réalisateur.

A vrai dire, le film vaut surtout pour son aspect documentaire sur Manille : sa boue, ce monde qui grouille, sa drogue et ses petites combines, sa corruption, son effervescence tranquille.

Après une introduction impressionnante dans le style classique de Mendoza (caméra à l'épaule, montage cut, éclairage faiblard), on craint un instant que le film bascule dans une violence insoutenable (comme dans l'éprouvant Kinatay). Il n'en sera rien et Ma' Rosa, loin de sombrer dans une brutalité aveugle, devient une sorte de déclinaison asiatique du néo-réalisme italien : comment trouver les 50 000 pesos nécessaires à soudoyer la police ?

Cette deuxième partie, moins énervée (inervée ?) que la première, m'a semblé aussi moins intéressante et plus convenue. Il n'empêche que le film irradie comme à l'habitude une force brute qui prend aux tripes et dont il est difficile de sortir indemne.

Brillante Mendoza sur Christoblog : Kinatay - 2009 (**) / Lola - 2009 (**) / Thy womb - 2012 (***) / Captive - 2012 (***) / Taklub - 2015 (**)

 

2e

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Taklub

Présenté à Cannes en 2015 dans la section Un certain regard, et sorti d'une façon hyper-confidentielle en salle en 2016, Taklub est un film aux frontières de la fiction et du documentaire.

Le film décrit le quotidien de plusieurs Philippins un an après le passage du terrible typhon Haiyan, qui détruisit quasi intégralement la ville de Tacloban, y faisant plus de 10 000 morts.

On y suit le destin d'un homme qui perd sa femme et ses cinq enfants dans l'incendie d'une tente de fortune (scène terrible d'une densité incroyable), celui d'une femme divorcée qui tient un petit restaurant et qui a perdu ses deux enfants, celui d'un homme qui doit à l'inverse élever les deux siens alors que sa femme est décédée. On suit aussi un jeune garçon qui élève sa soeur alors que leurs deux parents sont morts.

OK, ce n'est pas gai, gai.

Taklub est un film dérangeant, austère, âpre, qui parvient parfaitement à réstituer le sentiment d'extrême précarité qui règne dans ce type de situation. Si on y retrouve le talent habituel du cinéaste philippin pour faire entrer un souffle de réalité extrêmement puissant dans l'image, il faut quand même considérer qu'il s'agit d'une oeuvre mineure dans sa carrière.

Mendoza réussit à captiver à quelques moments (les tests ADN, le glissement de terrain...), mais il manque au film quelque chose pour séduire complètement. Peut-être un scénario ?

Brillante Mendoza sur Christoblog : Kinatay (**) / Lola (**) / Captive (***) / Thy womb (***)

 

2e

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Thy womb

Vu au Festival du film asiatique de Deauville en 2013. Le film n'est pas sorti en France.

Ce film étonnant de Brillante Mendoza ne ressemble en rien à ses précédents.

Thy womb est tourné parmi les populations musulmanes de petites îles complètement isolées au large des Philippines. On suit plus particulièrement un couple assez agé sans enfants.

La femme décide que son mari mérite une descendance et se met en quête d'une femme pour lui.

Mendoza commence à dresser un tableau quasi-documentaire de la vie très rude de ces peuplades éloignées de tout, ce qui donne au film un étrange aspect de tableau vivant aquatique qui rappelle tout à fait un autre film se déroulant dans le même type d'environnement : le mexicain Alamar.

Progressivement on s'attache au personnage joué par la formidable actrice Nora Aunor (une star aux Philippines), et alors qu'on s'attend à s'ennuyer ferme, on est progressivement surpris par les développements d'une situation un peu ubuesque, et qu'on n'imagine pas du tout pendant la première partie du film.

Si la progression de l'intrigue est très lente, il règne dans le film une atmosphère un peu magique, envoûtante, que Mendoza zèbre d'éclairs d'inquiétude ou de violence (la menace sourde de groupes terroristes est permanente). Thy womb constitue au final le tableau poignant d'humanité d'une femme force de la nature. La mise en scène, bien que plus discrète que dans les autres films de Mendoza, reste absolument limpide.

Brillante Mendoza sur Christoblog : Kinatay / Lola / Captive

 

3e

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Kinatay

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/70/53/73/19102700.jpgKinatay signifie massacre en philippin.

Et c'est bien de cela dont il s'agit, du moins dans sa deuxième partie.

La première partie, elle, tournée en 35mm, montre assez classiquement des scènes de la vie quotidienne à Manille. Un jeune homme, étudiant en crimonologie, se marie.

Brillante Mendoza s'y montre un réalisateur assez classique, maniant les différents types de cadre avec une belle assurance. On s'ennuie tout de même un peu, et on ne comprend pas trop où le film va aller.

Puis tout à coup, alors que le héros se livre à un petit trafic sans conséquence, le film bascule vers tout autre chose. Le jeune homme (Coco Martin, acteur fétiche de Mendoza) est enrôlé contre son gré dans une expédition qui va aboutir à enlever une prostituée, la violer, la tuer, la démembrer et la décapiter. Cette partie nocturne, tournée elle en HD (et passant assez mal sur ma télé à vrai dire), est tournée dans l'esprit d'un temps réel. On suit les hésitations du jeune héros (s'échapper, mais comment ?), son incrédibilité révulsée, mais en même temps la crainte de mettre sa propre vie en danger.

Mendoza livre alors une mise en scène de haute volée (qui lui valu le prix du même nom à Cannes 2008), hypnotique, vacillante, absolument maîtrisée, bien qu'extrêmement sombre, au propre comme au figuré.

La plupart des horreurs ont lieu hors champ, alors qu'une partie des kidnappeurs mangent ou fument des cigarettes en discutant, ce qui contribue à rendre le film encore plus étrange. Même si la vision de Kinatay ne m'a pas été agréable, je dois reconnaître qu'il y a là de la graine de grand.

 

2e

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Captive

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/89/07/85/20023516.jpgLa jeune carrière de Brillante Mendoza est déjà bien remplie : un film culte très violent (Kinatay), la description provocante d'une famille tenant un cinéma porno (Serbis), un portrait de grand-mère sans concession (Lola).

Cette fois-ci, Mendoza raconte l'enlèvement d'un groupe de touristes aux Philippines, en se basant sur les actions bien réelles du groupe terroriste Abu Sayyaf.

Le film est très prenant par sa façon de proposer un réalisme sans concession. Les scènes de violence sont extrêmement bien faites, la nature y est montrée avec une sorte de réalisme poétique qui évoque le cinéma de Malick, débarrassé de son côté new age. On est littéralement happé par toute la première partie du film, bulldozer narratif naviguant en pleine mer, s'enfonçant dans la jungle, visitant un hôpital, tuant des soldats et sacrifiant des otages. Tout est remarquable dans cette première partie : il est clair que Mendoza est un formaliste hors pair, sa façon de filmer est hyper-sensible et sa narration parfaitement fluide. Le moindre détail semble pensé, les acteurs sont absolument parfaits et la sensation de naturalisme atteint des sommets. Les ravisseurs comme les otages sont montrés avec de multiples nuances, en dehors de tout cliché.

La prise d'otages s'éternisant (mais c'est peut-être aussi un charme du film) plus d'un an, la routine s'empare à la fois de l'histoire et de sa narration, rendant la deuxième partie du film moins passionnante, d'autant que l'interprétation d'Isabelle Huppert m'a parue inégale.

Ceci dit, le film a forcé mon admiration par ses qualités formelles et sa puissance narrative. Mendoza est sans conteste un grand cinéaste de demain.

 

3e

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Lola

EquationJ'ai été voir Lola en souvenir d'un réalisateur philippin, autrefois renommé, décédé en 1991, et qui s'appelait Lino Brocka.

J'ai vu de lui un film, Bayan Ko, que peu de ceux qui liront cet article auront vu, mais qui, pour moi, est un des films qui a marqué mon entrée en cinéphilie, en 1985.

Les Philippines sont depuis restées discrètes dans le domaine du cinéma, jusqu'à l'irruption du doué Brillante (le bien nommé) Mendoza. Je n'ai pas vu les premiers films de ce dernier (Serbis, Kinatay), fortement auréolés d'une aura scandaleuse (pornographie, viol, meurtre).

Venons-en à Lola : le prétexte est simple. Une rixe entre deux jeunes gens tourne mal. L'un meurt. Les deux protagonistes ont des grands-mères (lolas) à forte personnalité. Les deux familles sont très pauvres.  La grand-mère de la victime veut un enterrement décent pour son petit-fils, la grand-mère de l'infortuné assassin souhaite un accord à l'amiable avec la famille de la victime : en clair, verser une grosse somme pour solde de tout compte, et que son fils soit libéré. Les deux grands-mères vont-elles arriver à trouver un accord ?

Sur cette intrigue simplissime, Mendoza tresse un film qui n'est pas horrible, mais qui n'est pas non plus passionnant. Le film vaut pour deux choses : le jeu des deux grand-mères, spectaculaire dans leur énergique détermination, mais attendu, et surtout la description quasi documentaire d'une Manille sous les eaux : ses vols à la tire, ses tribunaux de quatre sous, ses taxis collectifs, ses prisons surpeuplées, ses usuriers, ses vendeurs ambulants.... c'est sous cet aspect "terrain" que le film peut le plus intéresser.

 

2e

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