Viet and Nam
Le cinéma vietnamien semble s'installer durablement dans le paysage du cinéma d'auteur : après L'arbre aux papillons d'or l'année dernière (caméra d'or), ce fut en ce mois de mai au tour de Viet and Nam de charmer Cannes.
Ce troisième film du jeune Minh Quý Trương (34 ans), formé au Fresnoy, est étonnant de maîtrise, dans un genre qui m'a irrésistiblement rappelé le cinéma atmosphérique d'Apitchatpong Weerasathekul : même onirisme vaporeux, même précision dans les cadrages, même capacité à faire surgir le fantastique des paysages et la poésie de la vie quotidienne, et aussi parfois ... même propension à nous endormir légèrement.
L'histoire oscille de façon continue entre l'histoire d'amour, montrée de façon très crue, unissant deux jeunes hommes (Viet et Nam) qui travaillent dans une mine de charbon, et la quête de la tombe du père de Nam. Ces deux trames narratives permettent au réalisateur d'aborder nombre de problématiques importantes, dont deux principales : les stigmates de la guerre et la tentation de l'exil.
Certaines visions que proposent le film sont d'une stupéfiante et intrigante beauté, je pense par exemple à cet environnement noir poudré de particules blanches qui représente la mine, au dernier plan de toute beauté, aux entraînements de traversée de rivière dans un sac plastique ou encore à cette vision incroyable de soldats figés sur le terrain de bataille, pendant qu'une voix décrit les différents types de bombes.
La temporalité du film est flottante, incertaine, et contribue à rendre le film encore plus énigmatique.
Une oeuvre un peu difficile d'accès, mais une réussite indiscutable, qui ne sera malheureusement pas montrée au Viet-Nam, où le film a été censuré.