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Christoblog

Articles avec #norvege

Sick of myself

Kristoffer Borgli signe ici un film dérangeant et très original.

Sick of myself commence comme une comédie à la mode scandinave : une jeune femme, unie à un artiste ayant le vent en poupe, souffre d'un manque de reconnaissance.

Les blessures d'égo et les humiliations répétées donnent lieu à de petites scènes délicieusement méchantes. Lorsque l'héroïne Signe décide d'attirer sur elle l'attention par le biais d'une grave maladie dont les symptômes sont obtenus à l'aide d'un médicament russe, les choses se compliquent. 

Le film dérive alors vers quelque chose de plus poignant, une sorte de body horror existentiel qui fonctionne comme une spirale infernale.

Ce sont donc les changements de ton qui font tout le sel de ce premier film norvégien : tour à tour grinçant, amusant, cruel, il dissèque merveilleusement plusieurs aspects de notre société contemporaine. On ne peut s'empêcher de penser au cinéma d'Ostlund, en moins exubérant.

Un réalisateur à suivre.

 

3e

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La symphonie des arbres

Retour aujourd'hui sur un film sorti discrètement en 2021, que j'ai découvert lors du dernier Festival Le grand bivouac, à Albertville.

Ce documentaire norvégien suit un luthier italien, Gaspar Borchardt, qui rêve de fabriquer un violon d'aussi bonne qualité que les Stradivarius, et qui pense que pour cela il lui faut le bois d'un arbre très spécifique qui ne pousse que dans les Balkans.

La caméra de Hans Lukas Hansen suit Gaspar avec attention et attendrissement sur une période de six ans. On le suit donc dans son improbable recherche, en particulier lors de différents voyages en Bosnie. 

Le contraste entre le caractère lunaire et délicat du luthier opiniâtre et la rudesse de la population locale confère au film une irrésistible drôlerie, mâtinée de mélancolie. Gaspar n'est plus très jeune, et ce défi un peu irréel est peut-être une façon pour lui de tirer un bilan de sa vie.

Parviendra-t-il à trouver l'arbre magique et à offrir le violon de ses rêves à la jolie soliste néerlandaise à qui il l'a promis ? Impossible de vous le dire, tant l'intérêt de ce joli film documentaire à la limite de la fiction réside dans le suspense lancinant qu'il propose. 

Réalisation impeccable et image d'une grande qualité pour ce quasi-thriller, d'une grande originalité.

 

3e

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The innocents

Cela commence comme un thriller d'épouvante classique : musique bien inquiétante, mouvements de caméra sur-signifiants, bruits qui font sursauter, décor à l'unisson.

On est dans le style "pour bien comprendre que la petite fille est méchante on va la montrer en train d'écraser un ver de terre".

Et finalement, il se terminera de la même façon : parcourant les chemins bien balisés du film qui cherche à faire peur. Entre temps, il y aura eu un frémissement, quelques passages lors desquels on aura été étonné par un plan, ou intrigué par un changement de perspective... mais au final, rien de bien enthousiasmant, ou novateur.

On songe à Morse, qui était infiniment plus déstabilisant et profond. Ici, les astuces et les procédés sont bien trop évidents pour ne pas gêner la catharsis. The innocents est une oeuvre formatée et un peu froide, qui ne parvient qu'épisodiquement à dépasser son statut d'exercice de style.

Eskil Vogt sur Christoblog : Blind - 2015 (*)  

 

2e

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Julie en douze chapitres

Pour ceux qui, comme moi, avaient été éblouis par Oslo 31 août, il avait été cruel de voir Joachim Trier se perdre au fil de ses films suivants, tous plus ou moins ratés.

Julie en 12 chapitres permet de retrouver le cinéaste norvégien dans ce qu'il a de meilleur : une grande sensibilité dans l'exploration des sentiments et des états d'âme, des idées de mises en scène renversantes (la merveilleuse scène dans laquelle le monde entier se fige) et une capacité à renouveler sans cesse l'intérêt du spectateur.

Il y a une forte probabilité pour que ce film devienne culte pour les spectateurs, et encore plus spectatrices, qui ont l'âge de Julie (en gros, les trentenaires). Il dessine en effet une sorte de Carte du Tendre de cette génération, entre hésitations, expérimentations et réalisation de soi-même. C'est souvent réussi (le chapitre "Infidélité") et aussi parfois un peu moins enlevé (les chapitres de la fin à propos d'Aksel).

On retrouve avec plaisir l'acteur d'Oslo, le magnétique Anders Danielsen Lie, et on découvre la pétillante Renate Reinsve, prix d'interprétation féminine à Cannes cette année. Cette dernière irradie le film comme rarement une actrice peut le faire.

Un film primesautier, bien qu'assez peu original, qui semble saisir l'essence même de la vie. A découvrir.

Joachim Trier sur Christoblog : Oslo, 31 août - 2012 (****) / Back home - 2014 (**) / Thelma - 2017 (*)


2e

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Utøya, 22 juillet

Il y a dans la démarche du réalisateur Erik Poppe une fausse modestie qui rend son film insupportable.

Pour faire simple, disons que la caméra suit en temps réel et en un seul long plan-séquence une jeune fille durant les 72 longues minutes que durèrent le massacre sur l'île d'Utøya, le 22 juillet 2011. 

Cela pourrait paraître modeste, mais le dispositif tourne vite à la performance : Erik Poppe semble très absorbé par la façon dont il va faire bouger sa caméra, quitte à filmer des choses insignifiantes pour meubler. Comme il fait de son personnage principal une bonne samaritaine qui veut sauver tout le monde (contrairement aux autres jeunes gens qui courent dans tous les sens d'un bout à l'autre du cadre), on doute vite du réalisme de ce qu'on voit, ce qui est un comble quand on sait que le film s'inspire de témoignages des victimes.

On n'est donc pas très à l'aise en regardant le film, malaise aggravé par la séquence où l'on voit une jeune fille mourrir lentement en direct, filmée avec beaucoup de complaisance et des effets très maladroits (la maman appelle sa fille pile au moment où celle-ci vient de rendre l'âme). Utoya, 22 juillet qui aurait pu être un bel hommage aux victimes ou un film instructif sur ce qui s'est passé ce jour-là, est plus énervant qu'émouvant ou dérangeant.

Au final, on ne tire rien de ce film creux qui se regarde le nombril.

 

1e

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Thelma

Dieu sait si j'ai aimé Oslo, 31 août, meilleur film pour moi de l'année 2012.

Las, son réalisateur Joachim Trier ne cesse depuis de me décevoir : son film précédent (Back home) m'avait interloqué (pour être gentil) et celui-ci m'a catastrophé, si je puis utiliser cette tournure familière.

Je vais donc, à contre coeur, énumérer ma liste de récriminations. Le scénario est cousu de fil blanc. Tout y est dessiné avec une lourdeur qui devient gênante, et qui est en contradiction totale avec la légèreté de traitement que nécessiterait l'intrigue. Exemples : la vue en plongée qui ouvre le film est inquiétante à souhait, les vols d'oiseaux rappelle avec une lourdeur kolossale Hitchcock, le portrait de la méchante grand-mère enfonce tous les clichés à trois sous, la fin avec la guérison par imposition des mains est ridicule, le retour de la disparue ne rime à rien, etc.

Le film fait fasse à un double handicap : le scénario est d'une faiblesse criarde, enfilant les poncifs du genre fantastique, et la mise en scène sert ces poncifs avec une servilité de débutant. Le résultat ressemble au final à une série Z d'auteur, chacun de ces deux défaut majeur aggravant l'autre. Et réciproquement. 

On pense sans cesse à Grave, de Julia Ducourneau. La thématique principale étant exactement la même : il s'agit dans les deux cas de peindre l'éveil à sa sexualité d'une jeune femme, associée à une transgression de l'ordre du bizarre. La comparaison est très cruelle, tant le film de la jeune française était choquant, iconoclaste, décoiffant et celui de Trier convenu, suranné, froid. Thelma convoque aussi des souvenirs de L'exorciste, de Carrie, de Morse, références qui toutes mettent en exergue son caractère souffreteux et innabouti. 

A fuir, malheureusement.

Joachim Trier sur Christoblog : Oslo, 31 août - 2012 (****) / Back home - 2014 (**)

 

1e

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Natür therapy

Représenter à l'écran les pensées d'un homme qui marche : c'est le défi que se propose de relever le réalisateur norvégien Ole Giaever.

Bien sûr, Natür therapy évoque Wild, le beau film de Jean-Marc Vallée, qui s'attaquait au même type de sujet, même si la marche de Reese Whiterspoon était beaucoup plus longue et spectaculaire. Dans les deux cas, les personnages sont à un tournant de leur vie, et doivent prendre (ou pas) des décisions radicales.

Le film de Giaever se situe à une sorte de croisement scandinave entre la sensibilité psychologique extrême de Oslo, 31 août et la distanciation cynique de Snow therapy. On est parfois compatissant envers le personnage et sa crise de la quarantaine mal gérée, mais le plus souvent c'est plutôt avec un oeil goguenard qu'on regarde Ole Giaever se débattre dans ses contradictions : il est à la fois acteur et réalisateur, et on ne peut s'empêcher de penser que le film est autobiographique.

La façon de montrer la nature norvégienne et de l'intégrer au récit est habile, les rebondissements humoristiques viennent ponctuer le récit avec bonheur. La vision du film est donc agréable, sans être renversante. Il lui manque un peu de profondeur et d'originalité pour susciter un enthousiasme plus entier.

 

2e

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Blind

Ce film m'a tellement énervé que je vais me faire un plaisir de spoiler abondamment. Ne lisez donc pas plus loin si vous voulez ne pas savoir.

Dans les tout premiers plans du film, il y a cette image bizarre, parmi d'autres qui n'ont rien à voir : un concombre revêtu d'une capote.

Le réalisateur Eskil Vogt nous donnera l'explication plus tard, mais pour faire court : Ingrid est aveugle, obsédée sexuelle (grave !), dépressive et elle écrit un roman. Le film insère donc des images du roman qu'elle est en train d'écrire dans quelques images du présent.

Cela pourrait être une bonne idée, mais la réalisation du film gâche une intention louable. Là où il faudrait entretenir l'ambiguité, Vogt sème la confusion. Là où il faudrait rendre ses personnages empathiques, il les éloigne de nous.

Le résultat est assez pédant, plein d'aspérités désagréables et au final franchement ennuyeux. 

J'ai vu récemment en DVD un film méconnu sur le fait d'être aveugle, bien plus intéressant que celui-ci : Imagine.

 

1e   

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Oslo, 31 août

En cette année 2012, il semble que le centre de gravité de la cinéphilie pourrait bien se déplacer vers le nord, avec Oslo, 31 août , le très beau film russe Portrait au crépuscule et l'adaptation de Millenium en Suède. Sans compter les très bonnes séries TV danoises (Borgen, The killing).

Le deuxième film du norvégien Joachim Trier (le premier, Nouvelle donne, est passé relativement inaperçu en 2008) est en effet un choc esthétique de première ampleur.

On ne peut qu'être admiratif devant l'élégance extrême de la caméra, très fluide, sensuelle, toujours en mouvement, qui suit pendant 24 heures environ l'errance dans Oslo d'un jeune junkie sortant d'une longue cure de désintoxication.

Le scénario est une sorte de road movie cantonné à la capitale norvégienne : multiplication de rencontres éphémères avec de vieilles connaissances (amis, famille, dealer) ou avec des inconnus (une rayonnante jeune fille, un partenaire de rave, un recruteur).

Si l'intrigue est minimaliste, le film parvient à installer une tension qui va croissant, par le biais d'une question lancinante : Anders replongera-t-il ? Il parvient à dépasser la contingence de sa trame narrative pour se muer en une sorte de biographie rêveuse (des images de films super 8, des photos de famille, par moment une loghorée de souvenirs en voix off) et même en une réflexion globale sur la condition humaine (la confession de l'ami d'enfance). Cet aspect presque Malickien du film culmine dans une scène exceptionnelle qui donne à Anders, attablé dans un café, une sorte de capacité d'extra-lucidité, qui lui permet d'entendre toutes les conversations l'environnant, et même de suivre par la pensée des inconnus jusque dans leur vie quotidienne.

Le film approche la perfection visuelle dans de nombreuses scènes (les vélos dans la rue, les images stroboscopiques de la rave, les derniers plans) et est porté par un acteur, Anders Danielsen Lie, charismatique.

Un film noir, superbe, qu'il faut absolument voir.

 

4e 

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