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Christoblog

Articles avec #leila bekhti

Je verrai toujours vos visages

J'ai beau chercher, je ne vois pas ce que je pourrais reprocher au nouveau film de Jeanne Herry.

Je verrai toujours vos visages est d'abord magnifiquement écrit. Les dialogues sont ciselés, jamais triviaux. Les destins s'entrecroisent avec brio, avec un sens du rythme et de l'ellipse confondant. L'idée de ne jamais voir le personnage du frère jusqu'à la fin est par exemple extrêmement forte.

Le casting est exceptionnel. Si Adèle Exarchopoulos domine le film et trouve ici son meilleur rôle depuis La vie d'Adèle, il faut signaler l'homogénéité du niveau de jeu de tous les autres protagonistes.

Il peut arriver qu'un bon scénario et un excellent casting soient illustrés par une mise en scène insipide. Ce n'est pas le cas ici. Jeanne Herry utilise avec brio toutes les possibilités qu'offre le cinéma pour ne pas ennuyer le spectateur (variétés des plans, plongées, variation de rythme et de lieu).

Le film parvient enfin, et ce n'est pas la moindre de ses qualités, à éviter le chantage lacrymal et l'effet facile. S'il arrache aux spectateurs de nombreuses larmes, il ne le fait que par la qualité de l'écriture et la puissance de jeu des acteurs, indépendamment de tout effet de manche. Le symbole de cette sécheresse narrative est la magnifique séance finale de rencontre, et sa chute ultime, bouleversante.

Une réussite qui concrétise toutes les promesses de Pupille.  

Jeanne Herry sur Christoblog : Pupille - 2018 (**)

 

4e

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Les intranquilles

J'aime assez le cinéma de Joachim Lafosse, que je trouve habituellement solide et profond.

Le sujet dont il s'empare ici est intéressant : il s'agit de montrer de façon réaliste ce qu'est la bipolarité, et d'en explorer les conséquences sur la sphère familiale. Le film suit scrupuleusement ce programme, d'une façon sage et appliquée. On assiste donc à l'évolution oppressante des troubles comportementaux, impuissants comme tous les proches, qui font par ailleurs preuve d'une grande bienveillance.

Les intranquilles porte la marque habituelle de Lafosse : les situations sont bien analysées, le rapport entre les personnes sont décrits avec beaucoup de finesse, et la direction d'acteurs est convaincante. Damien Bonnard est exceptionnel, donnant à voir la maladie uniquement par son degré de fébrilité plus ou moins élevé, sans recourir à d'expressives mimiques.  

Un film honorable donc, sans être exceptionnel, qui souffre peut-être de quelques longueurs et d'un scénario hésitant sur la façon de finir le film, mais qui mérite d'être vu.

Joachim Lafosse sur Christoblog : A perdre la raison - 2012 (***) / Les chevaliers blancs - 2015 (**) / L'économie du couple - 2016 (**)

 

2e

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La troisième guerre

La troisième guerre est une sorte de Désert des Tartares de notre temps. Le principe en est simple : il s’agit de pointer du doigt le sentiment d’inutilité des soldats qui participent à l‘opération Sentinelle, de confronter ce sentiment aux valeurs habituelles de l’armée (respect des ordres et de la hiérarchie, volonté de servir les autres, besoin de dépassement de soi et de combattre, virile camaraderie), et enfin de tirer de tout cela des implications d’ordre psychologique.

Si les déambulations parisiennes des soldats laissent entrevoir une belle sensibilité, le reste du programme énoncé ci-dessus est suivi avec trop d’application et pas assez d’imagination pour être pleinement convaincant.

L’exposé des différentes situations auxquelles sont exposés les soldats est très didactique, et suit des chemins à la fois prévisibles et inintéressants. Les seconds rôles, par exemple, manquent cruellement de profondeur (le complotiste ne fait que comploter, le gueulard ne fait que gueuler, etc).

Heureusement qu’Anthony Bajon est ici une nouvelle fois exceptionnel, à l’inverse d’une Leïla Bekhti complètement transparente. C’est lui qui donne un peu d’intérêt à ce film bourré d’intentions, mais vide d’émotions.

 

2e

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The Eddy

On présente parfois The Eddy comme la série de Damien Chazelle, ce qui est abusif, car il n'en est ni le showrunner, ni le scénariste. Il est l'un des producteurs, et a réalisé les deux premiers épisodes, qui sont plutôt réussis.

La série commence donc très bien, avec un épisode formidable caméra à l'épaule, qui pose un cadre intéressant, donne à voir de la musique vivante, et se termine par un évènement étourdissant.

Certains acteurs et actrices crèvent l'écran dès le début de la série. Andre Holland, vu dans Moonlight, est assez charismatique (mais son personnage est malheureusement mal écrit et assez antipathique). La géniale Joanna Kulig (Cold war) séduit et impressionne, comme d'habitude. Tahar Rahim et Leïla Bekhti sont formidables, et enfin la jeune Amandla Stenberg est une révélation. 

Malheureusement, l'intérêt du spectateur faiblit progressivement au long de ces huit épisodes. Le principe de centrer chaque segment autour d'un personnage (comme Lost !) trouve ses limites quand le personnage n'a rien à dire (c'est notamment le cas de l'épisode 4 consacré à Jude). L'autre grand problème de la série est le manque d'évolution de chaque personnage : chacun garde obstinément sa ligne de départ, même quand celle-ci s'avère catastrophique.

The Eddy reprend un peu de poil de la bête dans les épisodes 7 et 8, avec quelques jolies séquences (l'ouverture musicale de l'épisode 7 est excellente) et un sursaut de l'intérêt de l'intrigue, même si les péripéties criminelles restent au final assez peu crédibles.

En conclusion, la série de Netflix n'est pas désagréable dans son ensemble, formidable par moment (la scène des funérailles par exemple), et plombée par quelques défauts structurels.

A noter que Houda Benyamina (Divines) a réalisé deux épisodes.

 

2e

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La lutte des classes

Je vais voir aujourd'hui le dernier Michel Leclerc comme j'allais voir autrefois le dernier Woody Allen : avec la quasi certitude de passer un bon moment, sans grande prétention.

La lutte des classes est donc comme la plupart de ses prédécesseurs un tableau pittoresque qui brocarde avec tendresse le peuple de gauche. Ce qu'il y a de remarquable avec Michel Leclerc, c'est sa faculté à éviter les plus gros des pièges qui le guettent, en empilant les clichés en tout genre (même - et surtout - contradictoires) de telle façon qu'à la fin le propos paraisse presque équilibré.

Une autre des qualités du film est de ménager des instants poétiquement loufoques, parfois dissimulés dans un coin de l'écran (comme ses deux employés de voirie qui se braquent avec des souffleurs à feuilles mortes dans un des premiers plans), et à d'autres moments s'étirant en longueur (les vieux parents morts sur le banc).

Comme le film est aussi émaillé de saillies rigolotes, de scènes frappantes bien interprétées par Edouard Baer et Leïla Bekhti, on finit par lui pardonner son final lourdingue et ses quelques facilités.

Michel Leclerc sur Christoblog : Le nom des gens - 2010 (**) / Télé gaucho - 2011 (***) / La vie très privée de Monsieur Sim - 2015 (***) 

 

2e

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Le grand bain

Il y a une chance pour que Le grand bain devienne la comédie référence de son temps, comme le furent La grande vadrouille, Le dîner de cons ou Intouchables.

Le film de Gilles Lellouche partage en effet avec ses illustres prédécesseurs quelques points communs : un casting haut de gamme, des interprétations magistrales, une rigueur d'écriture jamais prise en défaut et surtout cet incroyable mélange de rire et de tendresse pour les cabossés de la vie, qui semble faire le sel de la comédie à la française.

Peu auraient pourtant parié sur la réussite de ce film, en avril 2018, juste avant qu'il soit sélectionné par Thierry Frémaux pour le Festival de Cannes. En traînant depuis le début de sa carrière d'acteur l'image du copain viril dans la bande de Guillaume Canet, Gilles Lellouche avait fini par se confondre avec ses personnages. On en avait oublié qu'il avait été réalisateur et scénariste avant d'être acteur. L'excellent accueil de la critique et des festivaliers cannois a donc surpris tout le monde, et peut-être même Lellouche lui-même.

Dans le genre feel-good buddy movie, Le grand bain est quasiment parfait. Si chaque acteur est globalement employé dans le registre qui lui convient habituellement, la tonalité générale du film est elle plutôt originale : il n'est pas si évident de prétendre narrer la reconstruction d'égos masculins malmenés à travers une activité particulièrement féminine (rappelons que la natation synchronisée est avec la GRS la seule discipline olympique exclusivement féminine). Il y a donc chez Lellouche une démarche plutôt gonflée, qui séduit par l'équilibre général du projet. Les acteurs, s'ils appuient sur le champignon, ne semblent jamais cabotiner, à l'image d'un Philippe Katerine excellentissime.

Le film prend bien le temps d'installer ses personnages, ce qui met encore plus en valeur le décollage jouissif de la seconde partie, durant laquelle Le grand bain devient irrésistiblement entraînant, Full Monty aquatique pour cinquantenaires. 

Un spectacle de très haut niveau (servi par des moyens très conséquents), à haut potentiel comique et lacrymal.

 

3e

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Nous trois ou rien

Difficile de savoir quoi penser de ce film, qui commence comme une chronique familiale orientale, se poursuit par un drame politique, tourne à la farce (Alexandre Astier qui joue le Chah d'Iran sur le mode Kaamelott) et se termine en hommage touchant à l'intégration.

Le film a des difficultés à trouver le ton juste sur la durée, mais il est vraiment très difficile de ne pas se laisser toucher à un moment ou à un autre par l'humanité des personnages, la justesse d'une scène ou le caractère édifiant d'une situation. 

On navigue donc des presque larmes (l'assassinat des amis) au presque rire (Chokri et sa manie du vol de vêtement) jusqu'à l'épilogue émouvant qui met en relation les images du film et les photos des personnes ayant inspiré chaque personnage. Ce qu'on pensait avoir été dessiné à trop gros traits (la fresque sur l'immeuble par exemple), s'avère alors tout à fait réel, et donne a posteriori au film un caractère fort respectable.

Touchant et amusant, à défaut d'être bouleversant.

 

2e  

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