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Christoblog

Articles avec #jeff nichols

The bikeriders

D'un livre de photographie de Danny Lion qui le fascina enfant, le cinéaste américain tire une oeuvre académique, qui séduit plus par la qualité de ses portraits que par sa narration.

On suit sans déplaisir l'histoire de ce groupe de motards, des origines à sa profonde transformation, à travers le destin de trois personnages principaux.

Austin Butler campe un beau gosse ténébreux avec une gueule à la James Dean convaincante, alors que Jodie Comer joue sa femme sans grande conviction. C'est Tom Hardy, dans un beau rôle de méchant boss malgré lui (façon Tony Soprano), qui emporte le morceau dans un casting assez plan-plan.

Pour le reste, l'évolution narrative est prévisible, les relations entre les personnages assez téléphonées, et la mise en scène à la fois convenue et efficace. La trame temporelle est inutilement compliquée par une série d'allers-retours sans grand intérêt. 

Le film vaut principalement par son aspect sociologique : le milieu des motards de cette époque est bien reconstitué, et l'étonnant mélange de règles inutiles et d'esprit libertaire produit parfois de beaux moments de tension dramatique.

A noter que Michael Shannon, qui joue un petit rôle, signe ici sa sixième collaboration avec Jeff Nichols en six films : un bel exemple de fidélité.

Une oeuvre appliquée, intéressante à défaut d'être passionnante.

Jeff Nichols sur Christoblog : Take shelter - 2011 (**) / Mud - 2012 (**) / Midnight special - 2016 (*) / Loving - 2017 (**)

 

2e

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Loving

Commençons par une évidence : le film est très classique dans sa forme.

Son intérêt réside principalement dans la performance remarquable du couple d'acteurs. Lui, Joel Edgerton, buté, taiseux, sûr de son amour, droit comme un fil à plomb de maçon. Elle, irrésistible Ruth Negga, d'abord empruntée, terrifiée, soumise, puis petit à petit plus déterminée, et plus radieuse aussi : une des plus belles évolutions de personnage vues récemment au cinéma.

Pour le reste Jeff Nichols propose toujours une mise en scène propre et élégante, formidable quand il s'agit de filmer la nature. Le film est doux, tranquille, alors qu'il pourrait être démonstratif et revendicatif. Les portes-voix et les mouvements de foule auraient également pu illustrer cette belle et terrible histoire, mais Nichols préfère l'intime, la capture du bonheur et l'affirmation du droit d'aimer qui l'on veut.

Un beau film sur la force de l'amour.

 

2e

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Midnight special

On aura rarement vu un film aussi raté que Midnight special.

Tout y est risible : les clichés innombrables, les carences scénaristiques abyssales, les répliques cul-cul, le jeu affligeant des acteurs.

Le jeune Jaeden Liebherer joue comme une enclume sous Xanax. Michael Shannon fait penser à une marmotte au sortir de son dernier rendez-vous avec le taxidermiste. Joel Edgerton affiche une palette d'expression aussi large que ses cheveux (en brosse) sont longs. Kirsten Dunst offre ici, dans un rôle de potiche à natte, la pire prestation de sa carrière. Le moindre second rôle du film semble fermement décidé à jouer le moins possible : cela en devient presque drôle (voir la direction d'acteur catastrophique du groupe qui observe le jeune Alton derrière la vitre).

On pourrait se moquer à l'infini de la façon dont Jeff Nichols raconte son histoire. Pensons par exemple à cette scène atterrante ou le jeune génie de la NSA éructe des phrases sans queue ni tête devant des coordonnées géographiques, puis finit par entourer deux chiffres au hasard en feignant le Euréka libérateur. 

Le pire du pire est probablement atteint dans les dernières images du film qui nous montre cette affreuse cité idéale toute de béton, qu'on dirait issue d'une série Z imitant Disney dans les années 80.

Jeff Nichols révèle progressivement au fil de ses films une médiocrité inquiétante.

 

1e

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Mud

Lors du dernier Festival de Cannes, l'attente était grande concernant le troisième film de Jeff Nichols, très remarqué pour son deuxième film, Take Shelter, qui pour ma part ne m'avait (déjà) que partiellement convaincu.

Mud commence très bien. Deux enfants errent dans la nature sauvage (et aquatique) du Sud des Etats-Unis et découvrent une île au milieu du fleuve, dans laquelle vit un être mystérieux joué par l'inévitable Matthew McConaughey, décidément très présent en 2012 sur la Croisette (Paperboy) et ailleurs (Killer Joe).

Cette partie du film est vraiment réussie, confirmant l'exceptionnelle aptitude de Nichols à filmer la nature (on pense évidemment à Malick), l'étrangeté, l'enfance et les visages. Les deux garçons sont remarquables, agissant comme des adultes et nous emportant dans un beau voyage vers le mystère, en convoquant toute la mythologie du Mississippi (Tom Sawyer et cie).

Il est d'autant plus triste de voir le film s'affaisser progressivement dans les conventions les plus éculées du cinéma américain, et perdre ainsi son intérêt. L'intrigue se révèle finalement platement classique, tristement noire, et prévisible. On s'ennuie. On se demande où sont les surprises, où est le mystère, et à quoi rime cette fin un peu idiote, en forme de happy end. Le fim, trop long, s'égare donc en route et perd le fil de son originalité.

Au final prédomine l'impression d'un talent gâché : Jeff Nichols semble armé pour faire beaucoup mieux que ce film, à la facture finalement très classique.

 

2e

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Take shelter

Take shelter, deuxième film du jeune réalisateur sudiste Jeff Nichols, icône du genre southern gothic, arrive sur les écrans précédé d'une répétition avantageuse, initiée en festival, relayée par la presse et amplifiée par quelques critiques de blogueurs. Le film ne fait pas moins que la couverture du nouveau Positif (le premier en couleur), alors que les Cahiers du cinéma de janvier y consacrent de nombreuses pages.

L'acteur Michael Shannon campe un américain pauvre, en proie à l'apparition des symptômes d'une maladie mentale (schizophrénie, paranoïa ?) et confronté aux difficultés financières pour se soigner.

Shannon possède un visage très expressif en lui-même, une démarche hallucinée et une élocution comateuse qui collent parfaitement à son rôle. Sa performance est assez convaincante, même si on peut considérer que son physique le prédispose à des rôles de zarbis dont ils devient spécialiste (Bug, une apparition marquante qui constitue le meilleur moment des Noces rebelles). Jessica Chastain est encore meilleure à mon sens, dégageant un flux d'amour infini, dont bénéficient son mari et leur petite fille sourde. La mise en scène est d'une sobriété assez étonnante, champ / contrechamp très sages, cadres hyper-classiques, caméra posée. Tout cela est très bien fait, légèrement malsain mais pas trop, parfois même assez brillant. La promotion du film dévoile les principaux ressorts du scénario, par ailleurs il faut le dire assez squelettique, gâchant un peu l'effet de découverte à la vision.

Le film est plaisant à regarder, surtout dans sa première partie lors de laquelle les séquences oniriques sont assez impressionnantes, sans être tape-à-l'oeil. Il s'essoufle à mon sens dans la deuxième, basculant curieusement dans une rationalité qui fait tomber la pression, puis dans une charge sociale certes intéressante, mais qui paraît devoir être un tout autre film. Quant au dernier plan, je le trouve très décevant - assez caractéristique d'un réalisateur qui tient une bonne idée mais ne sait pas trop comment la conclure.

Take shelter est donc une oeuvre de qualité, qui débute plutôt bien 2012, mais qui me semble un peu relever du pitch intéressant bien servi par un réalisateur talentueux, plutôt que du chef d'oeuvre un peu trop vite annoncé. Le film à l'évidence interroge le mythe d'une certaine Amérique, reprenant des éléments de la figure tutélaire du Sud : Terrence Malick. Entendre un journaliste parler du film comme d'un Shining à ciel ouvert est assez typique de l'emballement médiatique qui semble aujourd'hui devenu une sorte de règle : Nichols, avec ses qualités (très belle façon de filmer les visages, sensibilité à la nature qui le rapproche de The tree of life), doit encore parcourir un long chemin pour approcher Kubrick.

A voir, y compris par les âmes sensibles, le film étant bien moins stressant que certains veulent bien le dire (ce sont les mêmes qui essayeront de vous faire peur dans l'escalier de la cave).

 

2e

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