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Christoblog

Articles avec #fabrice luchini

Marcello mio

Christophe Honoré a déjà démontré qu'il savait filmer de façon fluide et libre une bande d'acteurs, dans le très beau Guermantes par exemple.

Ici, il échoue totalement à intéresser son spectateur. Les atermoiements du clan Deneuve sont non seulement peu intéressants, mais même parfois pitoyables, à l'image de ce match de volley sur une plage italienne qui donne l'impression de voir une bande de happy few des quartiers huppés rencontrer un ballon pour la première fois. J'ai parfois eu l'impression que le scénario du film était dicté par une IA (et si on refaisait la scène de la fontaine de Trévi ?)

Le film n'est porté que par une batterie de sous-textes, qui, s'ils vous échappent - et pensons aux spectateurs qui ne savent rien de la vie privée de Chiara Mastroianni - vous rendront le film aussi sympathique qu'une soirée lors de laquelle vos voisins vous montrent leurs films de famille. C'est d'autant plus triste que le sujet porte en lui un potentiel d'exploitation (psychanalytique, mythologique, cinématographique) colossal.

Les tentatives de "poétisation" (le chien, le soldat anglais) ne font que témoigner de la vacuité intrinsèque du projet, qui ne ressemble en rien à un film de cinéma. 

Très décevant, cet Honoré est un autel élevé à la culture de l'entre-soi, sur lequel la statue de Marcello trône sans émouvoir.

Christophe Honoré sur Christoblog : Les chansons d'amour - 2007 (****) / La belle personne - 2008 (***) / Non ma fille, tu n'iras pas danser - 2009 (**) / Les bien-aimés - 2011 (****) / Métamorphoses - 2014 (***) / Plaire, aimer et courir vite - 2017 (***) / Chambre 212 - 2019 (****) / Guermantes - 2021 (****) / Le lycéen - 2022 (**)

 

1e

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L'empire

Au début du film, tout semble frais et mystérieux. Ce qui est proposé à l'écran a des airs de "jamais vu".

J'ai adoré cette poésie diffuse qui sourd des premiers plans, dans une ambiance fantastique et solaire. La première apparition du bambin divin est par exemple sidérante.

Malheureusement, le film, en quelque sorte aplati, ne sait pas thésauriser sur cette bonne entame et piétine rapidement, ressassant les mêmes recettes en boucle, tout en changeant brutalement de ton, oscillant entre burlesque et métaphysique,  grand spectacle et tableau naturaliste.

Lucchini est en roue libre (alors qu'il était bien dirigé dans Ma loute), les développements narratifs sont pauvres, les apparitions en guests de Carpentier et Van der Weygen n'apportent rien à l'histoire, et globalement le niveau d'ennui s'accroit de façon logarithmique pour atteindre son maximum absolu en fin de film.

Seules véritables satisfactions à mes yeux : la prestation incroyablement juste d'Anamaria Vartolomei et la beauté visuelle des effets spéciaux, qui parviennent à sublimer la lumière verticale des paysages du Pas de Calais.

Dernière remarque : le personnage de Lyna Khoudri est grotesque et son asservissement au personnage de Jony m'a mis mal à l'aise. Globalement la façon dont les rapports hommes / femmes sont montrés dans le film est étrangement brutale : pour simplifier, c'est la position du missionnaire en moins de deux minutes et basta cosi.

Décevant.

Bruno Dumont sur Christoblog : L'humanité - 1999 (****) / Flandres - 2006 (***) / Hors Satan - 2011 (*) / Camille Claudel, 1915 (**) /  P'tit quinquin - 2014 (**) / Ma Loute - 2016 (****) / France - 2021 (***)

 

2e

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Mon crime

Ce nouvel opus de François Ozon est une sucrerie acidulée et colorée.

Une pièce de théâtre oubliée et un peu ringarde des années 30 est ici le véhicule d'un propos délibérément dans l'air du temps, important sur le fond (les femmes actrices de leur accomplissement, contre les hommes en majorité malfaisants) et léger sur la forme (les personnages sont réduits à des silhouettes, les jeux de mots approximatifs pleuvent à volonté, le film est émaillé de citations cocasses).

Il ne faut donc chercher ici ni profondeur psychologique, ni mise en scène ébouriffante, ni écriture élaborée : nous sommes dans un monde de carton-pâte dans lequel chaque acteur/trice fait son petit numéro, par ailleurs convaincant dans l'ensemble, dans un registre qui relève plus du théâtre de boulevard que du film d'auteur. Les artifices de mise en scène (les inserts en noir et blanc, les coupures de journaux du générique de fin) relèvent clairement du burlesque.

L'ambiance est donc à l'amusement, et la dose de poison et de mauvais esprit qu'Ozon aime instiller habituellement dans ses films est ici très, très légère. J'avais pour ma part préféré Potiche, dans le genre "numéro d'acteur + guimauve + comédie noire".

Mon crime est un divertissement honorable devant lequel il est légitime de sourire, et qui a également le mérite de mettre sur le devant de la scène deux grandes actrices, Rebecca Marder et Nadia Tereszkiewicz (un couple à la Audrey Hepburn / Marylin Monroe), qu'on n'a pas fini de voir sur les écrans.

 

2e

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Alice et le maire

Il faut reconnaître au film de Nicolas Pariser un point positif important : il parle d'un homme politique qui n'est ni corrompu, ni malhonnête, ni idiot, ni impuissant. Et à ma connaissance c'est l'une des premières fois que l'on voit ça au cinéma.

D'autre part, le scénario est assez malin, puisqu'il dessine en creux plusieurs thématiques (dont celle d'une jeunesse trentenaire en plein marasme sentimental), et l'interprétation est très solide (Luchini oublie de faire du Luchini, Anaïs Dumoustier est parfaite comme d'habitude, les seconds rôles sont plutôt convaincants).

Bref, beaucoup de qualités pour une sorte de "nouvelle qualité française", consistante à défaut d'être profonde.

Cela étant dit, et j'affirme que le film mérite d'être vu, quelques éléments m'ont toutefois gêné. Certains traits par exemple me semblent tout à fait caricaturaux (le projet Lyon 2500, le personnage de Brac). J'aurais aussi aimé que la belle idée de la philosophie qui challenge la politique soit poussée plus loin, et que globalement le film approfondisse ce qu'il effleure. C'est en gros les reproches que j'adressais au premier film de Pariser, Le grand jeu, même si celui-ci est beaucoup plus réussi.

Lyon forme en tout cas, comme dans Grâce à Dieu, un décor magnifique. Lors de sa présentation à Cannes, Nicolas Pariser a dit que la ville avait des airs de Budapest, et à la réflexion, il a raison.

Malgré mes quelques réserves, qui relèvent plus d'une déception par rapport à ce qu'aurait pu être le film, je vous le conseille : Alice et le maire est un film intelligent, et c'est suffisamment rare pour ne pas être négligé.

Nicolas Pariser : Le grand jeu - 2015 (*)

 

2e

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Ma Loute

On trouve dans Ma Loute tout le cinéma de Bruno Dumont : le couple de policiers empruntés mais déterminés de P'tit Quinquin, Juliette Binoche comme dans Camille Claudel, les paysages du Nord superbement filmés dans Hors Satan, etc

Tout le cinéma, et un peu plus : il est assez rare de voir un réalisateur sublimer toute son oeuvre pour produire quelque chose de nouveau. Et beau.

Parce que oui, pour commencer, Ma Loute est d'abord une splendeur visuelle. Perfection de la photographie, direction artistique (décors, costumes, accessoires) hors du commun, cadrages démentiels, génie du paysage : le film est d'abord une réussite totale d'un point de vue esthétique.

Au-delà de cet aspect visuel, Dumont parvient à entremêler brillamment plusieurs strates de discours : du burlesque pur (Tati, Max Linder), de la critique social au vitriol (les bourgeois à bout de course consanguins, l'apologie tronquée du capitalisme) et - ce que personne ne semble relever - une merveilleuse histoire d'éveil amoureux.

Rien que pour ces raisons, Ma Loute mériterait déjà tous nos éloges (et peut-être une Palme d'Or), mais on peut encore ajouter que Bruno Dumont trouve en plus le moyen de nous émerveiller (ces superbes scènes de lévitation), de nous choquer (la soupe un peu gore) et de nous emporter (un sens du rythme inattendu, les belles scènes de mer).

Beaucoup de détails dans le film pourraient faire l'objet de longues exégèses (l'extraordinaire travail sur le son par exemple), mais pour aller directement au fait, je résumerai de la façon suivante :

Courez-y.

 

4e

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L'hermine

Le dernier film de Christian Vincent entrelace subtilement plusieurs thèmes.

Le premier est passionnant. Il s'agit de suivre un procès d'assises très commun (un bébé de sept mois tué parce qu'il pleurait trop) de l'intérieur. Il n'est pas si courant de voir comment les jurés d'assises vivent leur expérience

Habituellement, les films de procès, dont le parangon est bien sûr Douze hommes en colère, s'attachent à bâtir un suspense sur la culpabilité de l'accusé. Ici, rien de ce type : le film s'attache à montrer les doutes, le travail de réflexion des jurés, les liens qui se tissent fugitivement entre eux. Le verdict est d'ailleurs d'une certaine façon expédié, escamoté.

Le deuxième thème du film est le personnage du juge lui-même : un homme sec, désagréable, mais qui réalise son travail avec précision et efficacité. On dit parfois que certains grands films sont des documentaires à propos de leur acteur principal, et c'est l'impression que l'on a en regradant L'hermine. Fabrice Luchini, qui est loin d'être mon acteur préféré, trouve ici un de ses tout meilleurs rôles : il ne surjoue jamais (un exploit pour lui !) et son personnage évolue tout en finesse. 

Le troisième thème du film est une histoire d'amour légère, aérienne, incroyablement ténue et fragile, entre le juge et un médecin urgentiste joué par la superbe Sidse Babett Knudsen (la présidente de Borgen). Il fallait sa classe naturelle et la formidable mobilité de son visage pour que l'on puisse croire à cette romance platonique, semblant provenir d'un autre espace-temps.

Le film permet à ces trois thématiques de ce répondre l'une l'autre. Sous ses dehors anecdotiques, il s'avère d'une belle et riche profondeur.

 

3e

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Dans la maison

Dans la maison n'est pas un film infâme. Il bénéficie d'un scénario intéressant, et la réalisation de François Ozon est comme toujours très maîtrisée, et même parfois brillante

Il y a pourtant des éléments dans le film qui m'ont empêché d'y adhérer vraiment.

Je trouve d'abord que tous les personnages sont hyper-caricaturaux, rabaissés en quelque sorte à leur simple silhouette. Prenons la famille Rapha : le père est ridicule avec son goût pour le basket (il ne joue même pas correctement), la mère réduite à son tropisme pour la décoration et le fils à une vague entité quasi décérébrée. Le tout ne fonctionne tout simplement pas, à tel point que j'ai cru pendant toute une partie de film que toute cette famille allait s'avérer n'être qu'une oeuvre d'imagination.

Luchini est artificiel (pléonasme ?), Kristin Scott-Thomas l'est encore plus, les enseignants et proviseurs ne sont absolument pas réalistes, les jumelles jouées par Yolande Moreau n'existent par vraiment, etc... Même les décors semblent surjouer ! Quant au personnage de Claude, sensé être diabolique, il se résume tristement à un petit rictus qu'on ne qualifiera même pas de pervers.

L'univers usuellement fantaisiste d'Ozon, avec son côté dessiné à gros traits, s'adaptait bien aux trames de 8 femmes et Potiche. Ici le mélange ne prend pas, par manque de réalisme. Pour que l'histoire fonctionne parfaitement, il faudrait que nous croyions à la vérité des situations, et ce n'est pas le cas.

Le film est enfin franchement mou du genou dans ses parti-pris : j'attendais plus de transgressions, plus d'audace, à la fois dans la matière narrative du film (on est loin des relations sulfureuses du modèle revendiqué, le Théorème de Pasolini), et aussi dans son jeu autour de l'imagination (les scènes rejouées pourraient être beaucoup plus stimulantes).

Dans la dernière partie, Ozon utilise carrément le bulldozer à symboles (Germain assommé par une lourde version du Voyage au bout de la nuit ?!?). Le film se finit en capilotade, accumulant raccourcis et ellipses improbables.

Prometteur sur le papier, Dans la maison accouche d'une souris en pleine cure de Xanax.

 

2e

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Potiche

Etonnant et jouissif.

Je n'attendais pas grand-chose de Potiche. Une collection de personnalités frenchies bankable pour un salmigondis indigeste : j'avais déjà prévu l'intro de ma descente en flamme.

Et puis zut, je me suis passablement marré. Catherine Deneuve y trouve probablement le meilleur rôle de sa fin de carrière : elle y déploie une palette très étendue, épouse bafouée, femme de tête, politicarde, ex-nymphomane, en gardant toujours un maintien absolument parfait et un positivisme renversant. Toute en subtilité. Du grand art : triple bravo !

Luchini est parfaitement en phase avec son personnage, goujat archétypal, et  son association avec Karin Viard est très plaisante. Judith Godrèche et Jérémie Renier sont parfaits. Seul Depardieu est une fois de plus un ton en-dessous, et son embonpoint augmente dramatiquement à chaque film : d'ici peu, il devrait avoir explosé comme l'obèse du Sens de la vie, des Monty Python.

L'intrigue se déroule tranquillement dans une atmosphère boulevardière agréable, et délicieusement pimentée à la sauce seventies. On a droit à des allusions à l'actualité (casse toi pauv'con) et à une réflexion finalement assez intéressante sur ce qui a changé (ou pas) depuis ces années-là.

Ozon affiche un mauvais goût assumé et adulte qui tranche franchement sur les tergiversations habituelles d'un certain cinéma français. Cet aspect du film, qui rappelle par plusieurs côtés les audaces de  Demy (les couleurs, les sentiments - et les retours de bâton - assumés, les chansons, Catherine Deneuve), est le plus intéressant. Il culmine dans une dernière scène abracadabrante mais parfaite.

Film concept et film plaisir, film sûr de lui et pas si bête  : il faut aller voir Potiche.

 

3e

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Paris

Je ne sais pas à quoi pensait Klapisch en tournant son film, mais le résultat est un film choral franchouillard.

Dans le genre film choral, De l'autre côté a donné récemment une forme brillante, proche de la tragédie grecque, dans lequel les personnages affrontaient leur destin.

Ici ils affrontent plutôt leurs petit tracas sur un fond de Paris de carte postale, mais le résultat n'est pas si mauvais.

Et les petits tracas, pour la première fois dans la filmographie de Klapisch, prennent la forme de la mort (Duris, le père de Luchini, l'accident de moto), sans qu'on y adhère à 100 %, je suis d'accord, mais cela produit son petit effet. De toute façon, je ne crois qu'il soit possible d'adhérer à 100 % à un film de Klapisch.

Au rayon des points forts : Juliette Binoche, plus elle est enlaidie, plus elle rayonne, comme un joyau, de l'intérieur. Son strip-tease devant un Albert Dupontel médusé est un grand moment de cinéma.

Comme toujours chez Klapisch, les acteurs sont très bien : Luchini se maintient juste sous le seuil du cabotinage (de justesse), Mélanie Laurent est hot (qui dira le contraire ?), Karin Viard impayable en boulangère raciste (accueil de la salle à Nantes pour sa tirade sur les bretonnes !), Cluzet est nul à souhait (il sait faire, mais le rêve en animation est assez bien vu), Dupontel est craquant, et Duris s'en sort bien dans un rôle chausse-trappe.

Dans les points forts aussi, des passages musicaux très beaux : la ritournelle envoutante de Wax Taylor teintée de nostalgie (quand Duris regarde les vieilles photos), Juliette qui se déchaine sur Louxor (j'adore) et le numéro exceptionnel de Luchini. Au rayon des points faibles : le reste, c'est à dire tout, ou presque (90 % du scénario, 80 % de la mise en scène), y compris des approximations coupables (l'itinéraire de l'africain, les top models aux halles...).

Klapisch est le Lelouch du XXIème siècle : films baclés, souvent horripilants, potentiellement géniaux, toujours à la limite.

Enfin est ce que Paris (le film) parle bien de Paris (la ville) ? Réponse : moins bien que Les chansons d'amour, bien sûr.

 

3e

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