L'hermine
Le dernier film de Christian Vincent entrelace subtilement plusieurs thèmes.
Le premier est passionnant. Il s'agit de suivre un procès d'assises très commun (un bébé de sept mois tué parce qu'il pleurait trop) de l'intérieur. Il n'est pas si courant de voir comment les jurés d'assises vivent leur expérience
Habituellement, les films de procès, dont le parangon est bien sûr Douze hommes en colère, s'attachent à bâtir un suspense sur la culpabilité de l'accusé. Ici, rien de ce type : le film s'attache à montrer les doutes, le travail de réflexion des jurés, les liens qui se tissent fugitivement entre eux. Le verdict est d'ailleurs d'une certaine façon expédié, escamoté.
Le deuxième thème du film est le personnage du juge lui-même : un homme sec, désagréable, mais qui réalise son travail avec précision et efficacité. On dit parfois que certains grands films sont des documentaires à propos de leur acteur principal, et c'est l'impression que l'on a en regradant L'hermine. Fabrice Luchini, qui est loin d'être mon acteur préféré, trouve ici un de ses tout meilleurs rôles : il ne surjoue jamais (un exploit pour lui !) et son personnage évolue tout en finesse.
Le troisième thème du film est une histoire d'amour légère, aérienne, incroyablement ténue et fragile, entre le juge et un médecin urgentiste joué par la superbe Sidse Babett Knudsen (la présidente de Borgen). Il fallait sa classe naturelle et la formidable mobilité de son visage pour que l'on puisse croire à cette romance platonique, semblant provenir d'un autre espace-temps.
Le film permet à ces trois thématiques de ce répondre l'une l'autre. Sous ses dehors anecdotiques, il s'avère d'une belle et riche profondeur.