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Christoblog

Articles avec #allemagne

L'étrangère

L'étrangère est un beau film trop.

Ouh là là, il va falloir que je m'explique après une intro pareille.

Commençons pas le plus simple : l'actrice. Elle s'appelle Sibel (a-t-on déjà mieux porté son prénom ?) Kekilli. Outre le fait qu'elle ait commencé comme actrice de films X, on l'a surtout vue dans le chef-d'oeuvre (oui, le chef d'oeuvre) de Fatih Akin : Head on. Elle est simplement irradiante, magnifique, solaire.

Ensuite la mise en scène : elle est OK. Nickel classique dans les champs/contre-champs, peut-être un poil trop de plans de coupe à mon goût, mais bon, ça va. Un peu quand même too much dans certaines séquences tire-larmes.

Et enfin, le propos du film. Alors voilà : notre société occidentale (état de droit, pour résumer) est quand même plus maline (et plus adaptable) que cette vieille société traditionnelle patriarcale et turque, condamnée à l'immobilisme et au final à l'auto-destruction, fut-elle résidente  (en Turquie) ou délocalisée (en Allemagne).

Le film est donc clairement politique de ce point de vue, et son message est pour le moins complexe : peut-on quitter contre leur gré ceux qu'on aime ? Ou au contraire ne pas les quitter, toujours contre leur gré ? C'est tout le dilemme de notre héroïne qui ne choisit pas vraiment, et c'est ce qui m'a profondément énervé. Bref, vous ne comprenez probablement pas grand-chose à ce que je dis, mais (pour une fois) ce n'est pas grave : il s'agit en quelque sorte d'un débat sur la laïcité sans qu'il soit question de religion (d'ailleurs une actrice le dit : foutez donc la paix à Dieu, il n'a rien à voir là-dedans). Ou si vous voulez d'une baston éthique autour de valeurs : famille vs liberté, égalité des droits vs honneur.

Brrr, je n'ai pas l'impression d'être abusivement clair mais peut-être est-ce parce que le film m'a laissé cette impression de trop-plein, avec cette fin qui déborde un peu selon moi.

En tout cas un film intéressant, voyez-le et dites moi ce que vous en pensez.

 

3e

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Tous mes pères

Malheureusement, vous ne pourrez pas voir ce film.

J'ai eu la chance de voir Tous mes pères dans le cadre d'un petit festival local et aucune date de sortie n'est prévue en France, ni d'ailleurs en Allemagne, son pays d'origine. Il s'agit typiquement d'un film de festival.

Et c'est bien dommage. A ma connaissance le film tente une expérience complètement radicale : le documentaire autobiographique instrumentalisé.

Je m'explique :

Documentaire : caméra DV, micro apparent, interview de face des personnes, instants volés

Autobiographique : le réalisateur Jan Raiber a envie d'aller filmer son père biologique, qu'il n'a jamais vu. Cette idée déclenche chez sa mère l'aveu d'une incroyable vérité : patatra, son prétendu père biologique (qui a versé pendant 18 ans une pension alimentaire...) ne l'est en réalité pas ! Et il ne le sait pas ! Et le vrai père non plus !

Instrumentalisé : parce qu'on ne peut s'empêcher de penser que les réactions des personnages seraient différentes sans la caméra.

Tout cela fait un mélange détonnant et follement excitant. On suit avec un ébahissement amusé les pérégrinations de notre Pied Nickelé allemand qui navigue entre ses trois pères, et qui met chacun devant ses responsabilités, accompagné par une mère formidable. Les révélations éclaboussent au passage le demi-frère (qui apprend à cette occasion que son frère ne l'est pas) et les grands-parents qui tirent sur tout ce qui bougent.

C'est cruel, c'est pétri de matière humaine, c'est drôle, c'est émouvant quand dans une incroyable pirouette du destin on découvre que le vrai père de Jan ... n'a jamais eu d'enfant avec sa femme.

Tout cela est filmé à l'arrache en deux semaines et demi, et fait l'effet d'une bombe.

 

3e

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Head on

Cela commence comme une sorte de mariage blanc. Sibel veut s'échapper de sa  famille en se mariant à n'importe quel allemand d'origine turque. Cahit, veuf en deuil et auto-destructeur, s'en fout un peu. Tous deux viennent d'échapper à une tentative de suicide.

Le film continue comme une comédie romantique à la sauce germano-turque arrosée de cocaïne. Les préparatifs du mariage et la cérémonie elle-même sont montrés avec tous les artifices de la comédie ethnico décalée. Sibel profite ensuite de sa toute nouvelle liberté d'épouse pour baiser à tout va. Cahit fait de même avec sa vieille amie Maren. Mais comme dans toute bonne comédie romantique, ce qui est en train de se jouer dans ce couple bizarre et déjanté, c'est la germination d'un sentiment fragile... jusqu'au drame.

Le film glisse alors vers la tragédie antique en même temps qu'il file vers l'Est, direction Istanbul, en  même temps que les cheveux de Sibel raccourcissent. Cette deuxième partie est une merveille d'écriture et de mise en scène, dont je ne dévoilerai rien, afin de ne pas ternir votre joie de spectateur.

On retrouve dans Head on toutes les qualités des deux films suivants de Fatih Akin (De l'autre côté, Soul kitchen) : un sens aigu du rythme, une bande son parfaite, un montage au cordeau, une direction d'acteurs exceptionnelle (Sibel Kekili est légère comme une plume - et elle porte si bien son prénom, Birol Unel sombre comme un puits sans fond), un génie de la mise en scène qu'on dirait inné, et un de ces merveilleux scénario en mille-feuilles qui capte l'attention de la première à la dernière seconde.

Le film est ponctué par de courts intermèdes musicaux proposés par un groupe de musique traditionnelle turque interprétant une chanson d'amour, filmé en plan large sur fond de Bosphore. Ce groupe apparaît en fin de film comme un choeur antique accompagnant la progression dramatique de l'histoire. Il nous salue en un dernier plan magnifique, en même temps qu'il annonce la naissance d'un très grand réalisateur.

 

3e

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Soul kitchen

Demir Gökgöl, Adam Bousdoukos, Anna Bederke, Birol Ünel, Moritz Bleibtreu, Pheline Roggan et Lucas Gregorowicz. Pyramide DistributionSi vous voulez passer un bon moment, allez voir Soul kitchen.

Le réalisateur, Fatih Akin,  possède des facilités hors norme pour décider quoi filmer et comment le faire, comme l'avait déjà prouvé le très bon De l'autre côté.

Son virage vers la comédie (presque) pure est pour le moins étonnant, mais assez réussi. Cela est du sans conteste à la performance des acteurs. Adam Bousdoukos est merveilleux en grand machin gaffeur, son frère Moritz Bleibtreu est parfait en cambrioleur à la petite semaine, et Birol Unel, déjà vu dans Head On (le film qui fit connaître Akin), joue avec délectation un cuisinier mégalo et violent. Les actrices sont parfaites également.

En s'appuyant sur un scénario millimétrique et une bande-son irrésistible, Akin se livre à une revue des différents types de comique : burlesque et visuel, de situation, de répétition, de dialogues. Après un démarrage en trombe, le film semble se diriger vers une sorte de success story à l'eau de rose, avant de bifurquer brutalement (et c'est sa force) vers une accumulation de catastrophes plus hilarantes les unes que les autres.

Bien sûr, tout n'est pas fin et plusieurs gags ont déjà été vus mille fois, mais globalement cela fonctionne. Et en plus de la comédie, Akin nous donne un joli portrait de Hambourg, entre friche industrielle et vieux immeubles.

 

3e

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De l'autre côté

Pyramide DistributionDe l’'autre côté est un grand film classique : scénario complexe, acteurs attachants, mise en scène efficace, discrète, très élégante.

Les trois parties s’'agencent remarquablement, les deux premières préparant le sommet de la troisième, dans laquelle Hanna Shygulla est époustouflante.

Fatih Akin confirme ici un talent exceptionnel. Les mouvements de caméra dans la rue, ou lors des déplacements en train, sont très fluides, très beaux, et me rappelle ce que disait –qui déjà (Godard ?) : le travelling est affaire de morale

2 heures très agréables avec des acteurs impeccables et une musique turque qui donne un indéfinissable vernis de mélancolie sereine à ce drame choral, qui n’'est pas sans rappeler le Short Cuts d’'Altman à la sauce germano-turc.

Fatih Akin est un futur très grand, c'est sûr. Le seul point qui me freine un petit peu dans ce film, c'est le trop plein de sens et d'intentions, mais c'est souvent le cas des oeuvres de première partie de carrière.

 

3e

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