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Christoblog

Camille Claudel, 1915

Juliette Binoche rit, renifle, chigne, pleure, bouge les sourcils, n'est pas maquillée, regarde au loin, hurle, se tait, gémit, se lamente, se coiffe, sourit, écrit, laisse un frisson parcourir ses joues, tremble, sanglote, etc.

Je pourrais continuer tout au long de l'article, mais je pense que vous l'avez compris, Camille Claudel, 1915 est un film à César, dédié à Juliette Binoche. On peut apprécier, bien sûr, c'est le cas de gens très bien, mais on peut aussi royalement s'ennuyer, ce qui fut mon cas.

Rappelons les faits : Camille Claudel, artiste maudite, ex-maîtresse de Rodin, est internée en asile psychiatrique (à tort ou à raison ?), et y restera jusqu'à la fin de ses jours, visitée de temps à autre par Paul Claudel, son frère. La deuxième partie du film est d'ailleurs consacré plutôt à ce dernier, et plus précisément à de longs monologues empreints d'une religiosité qui m'a laissé de marbre.

Le film n'a pas de ressort dramatique, et son propos aurait probablement plutôt convenu à un moyen métrage. Ceci étant dit, il faut reconnaître que Bruno Dumont est probablement le meilleur filmeur de bâtiments et surtout de paysages en activité. Les plans sur l'hospice et la nature environnante sont de toute beauté. L'utilisation de véritables malades mentaux dans le film ne m'a par contre pas du tout convaincu : leur intégration à la trame du film ne m'a paru si naturelle, et du coup le côté exhibitionniste m'a parfois gêné.

 

2e

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Sugar man

http://fr.web.img2.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/91/38/66/20146742.jpgRodriguez est un artiste américain qui enregistre 2 albums dans les années 70, puis disparait de la circulation, au point qu'on pense qu'il s'est suicidé. Pendant ce temps, ses chansons font de lui une star ... en Afrique du Sud, alors engluée dans l'appartheid. A l'insu de son plein de gré, si je puis dire.

Une situation ubuesque donc : comment devenir une superstar à des milliers de km de chez soi, qu'un couple de sud africains (un journaliste et un bijoutier) vont se piquer de creuser pendant des dizaines d'années, avant que  Malik Bendjelloul (suédois comme son nom l'indique) n'en fasse un film.

Notre ami Malik, autant le dire d'entrée, est un sacré roublard. Son film, en fait un documentaire, est scénarisé de telle façon qu'il nous enfarine le popotin d'une bien belle façon, et que de ce point de vue il se rapproche finalement plus d'une fiction. Fausses images d'archive, montage signifiant au possible, animations pour reconstituer une atmosphère, coups de théâtre : tout est fait pour nous haper dans cette histoire abracadabrantesque ... et ça marche !

Difficile en effet de ne pas reconnaître avoir été surpris (à quoi tient la réussite, qui sépare Rodriguez de Dylan ou Springsteen ?), ému (petites larmes obligatoires), et charmé par la musique (une sorte de Nick Drake américain, j'ai trouvé) et la personnalité du bonhomme.

En arrière fond, l'incroyable énergie motrice de l'artiste musicien (comme dans le remarquable Anvil !) dope le film de bout en bout, ne laissant que peu de place aux hésitations légitimes du cinéphile pinailleur (un peu de remplissage quand même).

Bref, à voir. Et à écouter.

 

3e

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The weight

http://3.bp.blogspot.com/-mzsimUq5Rvs/UDsPyhJTOfI/AAAAAAAAXDs/as65C5RCnC4/s1600/TheWeight2.jpgDate de sortie inconnue

 

Au festival du film asiatique de Deauville 2013, j'ai du me frotter les yeux plusieurs fois ce samedi matin, pour me persuader que ce que je voyais n'était pas un cauchemard.

 

Jeon Kyu-Hwan, que je connaissais pas, n'y vas pas avec le dos de la cuillère pour son introduction : une morgue, un bossu qui y officie, du sang, de la solitude. Un autre bossu arrive, tellement laid qu'il porte constamment un casque de moto, pleure sa mère, puis en proie à une soudaine excitation se livre à des pratiques nécrophiles sur le corps d'une actrice, sous l'oeil indifférent de notre croque-mort handicapé, qui en plus d'être bossu, est aussi tuberculeux et arthritique.

 

A ce stade (le film n'a commencé que depuis 10 petites minutes) on craint la surenchère grostesque, d'autant qu'on enchaîne rapidement sur des scènes de prostitution à l'aveugle concernant un transsexuel, qui s'avérera le fils de celle qui a adopté notre croque-mort.

 

Vous suivez ? Si non, ce n'est pas grave, car au-delà de ses outrances scénaristiques, qui par ailleurs s'emboîtent très clairement par le biais de flash-backs bien dosés, le film vaut surtout par sa maîtrise formelle exceptionnelle. La photographie y est magique, la mise en scène inspirée, et le film parvient à nous faire ressentir avec beaucoup de force le désir de beauté de son héros mutique qui peint, dessine, fait grandir des plantes, regarde la lune et la télé avec un égal émerveillement.

 

Jeon Kyu-Hwan ose un certain nombre de procédés fort originaux : pa rexemple les premiers plans du film montrent des plans de la ville de New-York peignant le luxe et la douceur de vivre avant de se conclure par une incrustation abrupte qui énonce "Notre héros ne vit pas dans ce monde-là". Les scènes oniriques (la danse en photo ci-dessus, le modèle de la peinture, le chant de coquelicots, les colombes miniatures) sont autant de réussites.

 

The weight est donc un film hors norme, qui ne ressemble à rien de connu de par son mix sujets sulfureux + traitement poétique + beauté formelle. Tout n'y est pas réussi, mais l'impression finale est agréable et marquante.

 

3e

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My own private festival : résultats

 

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/93/76/88/20352455.jpgFin du festival qui compte finalement 6 votants (voir leurs avis ici) : 

Et....le grand vainqueur est Wadjda.

Meilleur film

Cité 3 fois sur 6 en première position, le premier film saoudien, Wadjda, 34 pts, devance de peu Django Unchained (29 pts) et Passion (28 pts). Plus loin on trouve The master (24 pts), Spring breakers (22 pts), Dans la brume (20 pts), et ... Die Hard 5 (11 pts).

Meileure actrice

Waad Mohammed emporte la catégorie en étant citée 5 fois (sur 6 possible). Suivent Amy Adams, Naomi Rapace, Rachel McAdams (2 fois) et Karoline Herfurth (C'est qui ?).

Meilleur acteur

Sans trop de surprise, Leonardo di Caprio l'emporte (5 voix) devant James Franco (3) et un peloton constitué de Christoph Waltz, Joaquin Phoenix, Vladimir Svirskiiy (c'est qui ?) et Jamie Foxx.

Meilleur réalisateur

Quentin Tarantino écrase la concurrence (4 voix) devançant Haifa el Mansour, PTA, de Palma (2), Loznitsa et Korine (1)

Meilleur scénario

Troisième triomphe pour Wadjda (5 voix), qui surclasse Django, The Master et Passion (2) ainsi que Dans la brume (1). 

Coup de coeur

Paradis : Amour, l'emporte facilement, cité trois fois, devant la Bande des jotas, Aujourd'hui et Singue Sabour.

 

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Festival du film asiatique de Deauville 2013

http://www.abusdecine.com/upload/articles/affiche/festival-deauville-asia-2013-affiche-gde.jpgC'était ma première fois à Deauville, et je dois dire que cela m'a beaucoup plu. La salle du CID (1500 places) ressemble un peu au Grand Théâtre Lumière de Cannes (2300 places), en plus petit, sans dress code, et jamais complet. Le fait que les deux salles du festival donnent directement sur la plage a quelque chose de magique, surtout quand le soleil est au rendez-vous comme c'était le cas samedi. De quoi donner envie de tenter l'aventure du festival du film américain !

 

Samedi 9 mars 2013

 

Début tranquille à 10h du mat avec un film en compétition, le projet de fin d'étude d'une jeune japonnaise, Keiko Tsuruoka. Le film s'appelle The town of whales et souffre à l'évidence de son manque de moyens (le staff n'est pas professionnel). Ceci dit, je comprends pourquoi il a été sélectionné, car malgré son extrême précarité, le film parvient à séduire dans sa première partie grâce à un découpage et à un montage de toute beauté. Dans sa deuxième partie, il devient un peu nécrosé et regarde trop ouvertement vers le cinéma de Naomi Kawase (il est question d'une disparition), mais l'essai reste sympathique.

 

Dans la foulée j'enchaîne avec The weight, un film coréen passablement azimuté, sur lequel il me faudra revenir, où il est question de bossu travaillant dans une morgue, de transsexuels, de colombes mignatures et de nécrophilie pratiquée par un homme si laid qu'il revêt toujours un casque de moto. Le film de Jeon Kyu-Hwan réussit l'exploit d'être parfaitement maîtrisé, tout en traitant de sujets complètement barrés. Un tour de force qui ne fait pas dans la dentelle.

 

A 15h, retour du vétéran Chen Kaige (Adieu ma concubine) pour une comédie romantique classique (trop ?) et rythmée sur fond de Love story et de réflexion un peu sommaire sur le pouvoir du web. Le film se laisse regarder mais sans plus.

 

La sensation est tout autre pour le quatrième film de la journée, le sulfureux, puissant et déstabilisant Pieta de Kim Ki-Duk (sortie le 10 avril), http://fr.web.img3.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/92/85/95/20482718.jpgLion d'Or du dernier festival de Venise. L'oeuvre est vertigineuse, dérangeante (des vagues de spectateurs ont quitté la salle), séche, austère, mais terriblement prenante. La photographie, le jeu des acteurs et le scénario à rebondissement rendent ce thriller psychologique exceptionnel à bien des égards. Un coup de coeur.

 

Dernier effort qui se termine vers 0h40 (quand même !), le dernier film de Brillante Mendoza, Thy Womb, nous emmène dans les îles du Sud des Philippines. C'est très étonnant de la part de l'auteur des sulfureux Serbis et Kinatay, mais le film est une sorte de docu-fiction aquatique, un peu décevant sur le moment, mais profondément dépaysant et assez profond, lorsqu'on y repense le lendemain.

 

Dimanche 10 mars

 

Toute petite journée aujourd'hui. Bouddha, le grand départ est une adaptation sous forme d'anime de l'oeuvre d'Ozamu Tezuka qui retrace l'enfance de Siddharta, futur Bouddha. C'est typiquement japonnais, plutôt complexe, intéressant et très plaisant à suivre un dimanche matin brumeux.

 

Merci Deauville. Je reviendrai...

 

Palmarès de Deauville Asia 2013 ici.

 

 

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Au bout du conte

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/95/36/54/20470648.jpgIl y a des films sur lesquels on n'a même pas envie de taper. Ils sont tellement médiocres, vides et immédiatement oubliables qu'écrire trop longtemps à leur sujet leur ferait trop d'honneur.

Au bout du conte fait partie de ces films. Ceux dont l'intégralité des bons moments sont dans la bande annonce (et encore, il ne s'agit que d'énièmes rodomontades à la Bacri). Ceux dont on se dit en sortant qu'il reposent sur du vent, qu'ils ne sont que l'ombre d'un film.

Tout est mauvais dans la dernière production Jaoui/Bacri, de Biolay en loup, dont le personnage s'appelle subtilement Wolf, au procédé type Instagram qui transforme l'écran de cinéma en écran de téléphone portable effet "verre poli".

L'idée de plaquer des éléments de contes sur une histoire d'une banalité affligeante ne fonctionne pas, il s'agit d'une fausse bonne idée, qui au final donne du sous-sous-Woody Allen.

A fuir.

 

1e

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Spring breakers

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/56/90/20440651.jpgSpring breakers est un film pop, vous l'entendrez dire sur tous les tons.

 

Qu'est-ce qu'un film pop ? Un film qui manie les couleurs acidulées dans les décors et les bikinis, qui triture la bande-son comme César le métal, qui bouge toujours sa caméra, qui multiplie les effets d'images (grain, netteté) comme dans un clip, qui cherche le rythme dans le montage, qui ose une scène dans laquelle on danse sur du Britney Spears en faisant une farandole en cagoule rose et mitraillettes, un film qui se moque du réalisme.

 

Est-ce qu'un film pop est un film ? Ou bien est-ce un long clip ? On peut raisonnablement se poser la question tellement le film d'Harmony Korine est finalement vide de sens, ne fondant sa légitimité que sur la répétition et le bégaiement (les tics sonores récurrents, les montages alternés systématiques, les situations se reproduisant). De cette narration redondante découle qu'on ne s'intéresse finalement que très peu au parcours des personnages, réduits à de simples silhouettes singeant des attitudes archétypales. Il y a dans le cinéma de Korine quelque chose qui rappelle celui de Sofia Coppola : la forme prend tellement le pas sur le fond que l'auto-complaisance menace constamment l'équilibre de l'entreprise.

 

De quoi traite au fond le film ? De ce qu'on veut bien y voir : décadence du rêve américain, difficulté de passage à l'âge adulte, documentaire sur les spring breaks... Comme toute bonne coquille creuse, on pourra la remplir de ce qu'on voudra.

 

Friandise artificielle bizarrement privée de sensualité alors que les personnages n'y sont jamais habillés (où est le sexe ?), Spring breakers laisse dans la bouche l'amertume d'une barbe à papa trop sucrée.

 

2e

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Festival du film asiatique de Deauville

http://www.cine-asie.fr/wp-content/uploads/2013/02/Deauville-2013-300x170.jpgCe week-end, je me déplace à Deauville pour assouvir une de mes principales passions cinéphiliques : voir des films en provenance d'Asie.

 

Au programme si tout va bien je devrais pouvoir y voir :

- Caught in the web, le nouveau film de Chen Kaige au pitch étonnant

- Pieta, de Kim Ki Duk, ours d'or à Berlin

- Thy Womb, du brillant Brillante Mendoza

 

Et quelques films à piocher au hasard dans la programmation.

 

A suivre, sur FB ou Twitter :

 

 

 

 

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Neige

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/66/88/66/18961732.jpgDrôle d'impression que j'ai ressentie à la vision de Neige, le film de Jean-Henri Roger et de Juliet Berto, l'égérie de Rivette. Le film, qui date de 1981, paraît vraiment d'un autre temps. Le monde qu'il décrit, peuplé de R12, paraît bien éloigné du nôtre, mais la façon de le filmer aussi.

 

On chercherait en vain une trame qui puisse maintenir l'attention, tant le film passe d'un sujet à l'autre, d'un personnage à l'autre, avec une immersion dans le réel de Pigalle et une image un peu sale qui rappelle furieusement le cinéma de Cassavetes, mais en mode franchouillard.

 

Si le scénario est inexistant et inintéressant, on est attentif aux compositions d'acteurs que l'on suivra ultérieurement (Jean-François Stévenin, Jean-François Balmer, Patrick Chesnais) et à certaines figures absolument étonnantes montrées (exhibées pourrait-on dire) par le film, comme celle du jeune travelo.

 

Comme parfois, si le film m'a en fait ennuyé, j'ai été littéralement fasciné par l'interview de Jean-Henri Roger (décédé en 2012), que je ne connaissais pas, et qui se révèle fascinante par ce qu'elle nous apprend de la nouvelle vague et d'une certaine façon de faire du cinéma : à l'arrache, sans un sou, en filmant en décors naturel au milieu des vrais passants, sans figurant. Ainsi, Roger raconte une scène incroyable du film dans laquelle le travelo dont je parle plus haut se fait accoster par de VRAIS flics, alors que la caméra tourne du trottoir opposé.

 

C'est en entendant un homme parler du cinéma comme cela, avec des étincelles au fond des yeux, que l'on se sent subitement fier d'être cinéphile.

 

Cette critique a été réalisée dans le cadre de l'opération DVDTrafic. Le DVD est sorti le 20 novembre 2012, distribué par Epicentre films”. Découvrez d’autres films sur Cinetrafic dans des catégories aussi diverses et variées que film a voir ou bien film sur la drogue.

 
2e

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Kinatay

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/70/53/73/19102700.jpgKinatay signifie massacre en philippin.

Et c'est bien de cela dont il s'agit, du moins dans sa deuxième partie.

La première partie, elle, tournée en 35mm, montre assez classiquement des scènes de la vie quotidienne à Manille. Un jeune homme, étudiant en crimonologie, se marie.

Brillante Mendoza s'y montre un réalisateur assez classique, maniant les différents types de cadre avec une belle assurance. On s'ennuie tout de même un peu, et on ne comprend pas trop où le film va aller.

Puis tout à coup, alors que le héros se livre à un petit trafic sans conséquence, le film bascule vers tout autre chose. Le jeune homme (Coco Martin, acteur fétiche de Mendoza) est enrôlé contre son gré dans une expédition qui va aboutir à enlever une prostituée, la violer, la tuer, la démembrer et la décapiter. Cette partie nocturne, tournée elle en HD (et passant assez mal sur ma télé à vrai dire), est tournée dans l'esprit d'un temps réel. On suit les hésitations du jeune héros (s'échapper, mais comment ?), son incrédibilité révulsée, mais en même temps la crainte de mettre sa propre vie en danger.

Mendoza livre alors une mise en scène de haute volée (qui lui valu le prix du même nom à Cannes 2008), hypnotique, vacillante, absolument maîtrisée, bien qu'extrêmement sombre, au propre comme au figuré.

La plupart des horreurs ont lieu hors champ, alors qu'une partie des kidnappeurs mangent ou fument des cigarettes en discutant, ce qui contribue à rendre le film encore plus étrange. Même si la vision de Kinatay ne m'a pas été agréable, je dois reconnaître qu'il y a là de la graine de grand.

 

2e

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Les chevaux de Dieu

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/95/65/92/20459750.jpgIl est assez amusant de comparer Les chevaux de Dieu au récent film de Philippe Faucon, La désintégration, qui traitait du même sujet : comment en vient-on à être un martyr de l'Islam dans un attentat suicide ?

Autant le film de Faucon était intellectuel, presque désincarné dans une France froide et austère, autant celui de Nabil Ayouch, tourné au Maroc, est chaleureux, sensuel et romanesque.

On suit tout d'abord l'enfance d'une bande de gamins : Yachine et son frère Hamid, Nabil, Fouad, et quelques autres. L'aspect presque documentaire du tournage dans un bidonville de Casablanca, les péripéties dramatiques de cette période rendent le film tout à fait plaisant.

La montée en puissance de l'islamisme radical est ensuite analysé d'une manière exhaustive et passionnante. On retrouve évidemment les causes habituelles (mais ici subtilement incarnée) : sentiment d'entraide, révolte de classe, utilisation du sentiment d'injustice, glissement progressif du sentiment religieux vers une haine de l'autre, promesse d'un paradis inaccessible, etc.. Beaucoup plus palpitantes encore sont les pistes ouvertes par le film vers des explications plus osées et plus liées aux personnages du film : compétition fraternelle, frustations sexuelles (homo et hétéro).

La mise en scène est de qualité, élégante et énergique, et on se demande bien comment ce film exemplaire n'a pas fait plus parlé de lui.  A voir en urgence.

 

3e

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Die hard : belle journée pour mourir

http://fr.web.img2.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/89/27/21/20436728.jpgTristesse et consternation.

 

Tristesse parce que ce film est le symbole de la dégradation et de l'uniformisation du cinéma américain. Les premiers opus de Die hard, (1988, 1990, 1995) donnaient à voir en John McClane un anti-héros plutôt original, mauvais coucheur, alcoolique, mauvais mari et mauvais père. A la baguette on trouvait par deux fois un excellent réalisateur, John McTiernan, qui savait filmer l'action et le suspense avec une certaine classe.

 

Aujourd'hui, Bruce Willis ne vieillit pas, il est devenu un bon père de famille qui a envie de faire un gros calin à son fils, et les studios confient la réalisation à un tâcheron de seconde zone.

 

Le cinéma US fout le camp.

 

Consternation parce que voir autant de moyens produire aussi peu de résultats donne l'impression d'une gabegie éhontée. 132 voiture dézinguées de toutes les façon possibles, de gros camions qui défoncent tout, des décors improbables comme tirés des pires années Bond, des hélicoptères de toutes les formes, des armes de tous calibres qui pétaradent sans jamais toucher les héros, un festival de pyrotechnie, des cascades invraisemblables... et tout ça pour quoi ? Pour rien, tellement le film est une collection de clichés éculés, servie sur une nappe de décibels qui rend la projection comparables aux séances de torture à Guantanamo.

 

Pire que nul.

 

1e

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Syngué sabour - pierre de patience

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/93/80/62/20302906.JPGSyngué sabour est un bon film, le tout est de savoir à quel point.

D'abord, je craignais qu'Atiq Rahimi, écrivain adaptant son propre roman Prix Goncourt 2008, soit réalisateur comme moi je suis blogueur. Mais non, il est vraiment doué, et le film propose une mise en scène soignée, bien qu'un peu trop sage.

Ensuite j'attendais beaucoup de l'actrice Golshifteh Farahani, qui crevait l'écran dans le très bon film de Farhadi, A propos d'Elly, et là, je dois le dire, le film est un enchantement. Il repose entièrement sur elle, et elle arrive à être sublime tout du long, en tant qu'actrice bien sûr, mais aussi en tant que tableau vivant. Belle comme une Madonne.

Rappelons brièvement le propos : une femme parle à son mari qui est totalement paralysé avec une balle dans la nuque, sur fond de guerre, en Afghanistan. Progressivement elle arrive à lui dire de bien lourds secrets, notamment d'ordre sexuel. Quelques micros évènements viennent interrompre le monologue (ou plutôt le dialogue avec le silence comme aime à le dire Rahimi). Des allers-retours entre le domicile de l'héroïne, austère et dévasté, et celui de sa tante, chaleureux et sensuel, rythment le récit.

C'est superbement photographié, relativement bien monté, franchement prenant à certains moments, notamment dans quelques flash-backs bien amenés. Mais c'est aussi un peu (beaucoup) prévisible et parfois maladroit, surtout vers la fin. A certains moments le film présente des longueurs.

Syngué sabour amène à considérer la place de la femme dans l'islam sous un angle une fois de plus extrêmement préoccupant, quelques jours après Wadjda.

Bon, comme j'ai décidé d'être gentil en 2013, je pousse la troisième étoile au forceps, pour les beaux yeux de Golshifteh, et donc en totale contradiction avec l'exigence cinéphilique qui me caractérise habituellement.

 

3e

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Gazette de My own private festival by mymp

mopf2Le règlement complet, c'est par ici. La compétition regroupe les films suivants : The master / Django unchained / Dans la brume / Wadjda / Passion / Die Hard 5 / Spring breakers. Il est toujours temps pour vous inscrire.

C'est parti, mon kiki.

The master / PierreAfeu : plat, Chris : prétentieux, heavenlycreature : bizarre, Ffred : brillant, mymp : un rien figé, Bob Morane : beaucoup trop long,

Django unchained / mymp : jubilatoire, Chris : irrésistible, Ffred : du grand art, PierreAfeu : quelquefois d'une violence radicale, heavenlycreature : décevant, Bob Morane : glauque,

Dans la brume / Chris : lent, PierreAfeu : cinéma ultra-codifié, heavenlycreature : chiant, Ffred : austère, dur, âpre, froid, mymp : austère jusqu'à l'épuisement, Bob Morane : long et lent

Wadjda / PierreAfeu : intelligent, Chris : un bain de jouvence cinématographique, heavenlycreature : très gros coup de coeur, Ffred : les actrices sont formidables, mymp : conte gentillet, Bob Morane : magique

Passion / PierreAfeu : grisant, heavenlycreature : songe vénéneux, Ffred : grostesque, mymp : inégal, Chris : de l'extrême mauvais goût, Bob Morane : pour quoi faire ?

Spring Breakers / Bob Morane : glauque et malsain, Chris : un long clip, mymp : une coquille un peu vide, Ffred : du Araki soft, heavenlycreature : sombre, glauque, halluciné, PierreAfeu : trash et grostesque

 

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Passion

http://fr.web.img3.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/53/68/20212437.jpgPassion est ce genre de film qui essaye de se maintenir constamment sur le fil qui sépare le ridicule du spectaculaire. En ce sens il est très proche du giallo, et en particulier du cinéma de Dario Argento.

 

Première partie : jeu d'influence entre deux garces dans un milieu professionnel très codifié. C'est propre, mais déjà entâché de multiples insultes au bon goût (et même à un simple respect du réalisme narratif). Par exemple, pourquoi après deux minutes de film, les deux protagonistes éclatent de rire, après un seul verre d'alcool, comme si ce dernier contenait l'euphorisant le plus radical ? Cette partie m'a personnellement rappelé la série Damages, en infiniment moins bien. Reste tout de même au crédit du film l'interprétation nickel de la brune et de la blonde, Mulholland Drive es-tu là ?

 

Deuxième partie du film. De Palma perd son sang-froid et semble avoir abusé de la vodka givrée : le cadre est systématiquement de travers et l'éclairagiste semble avoir oublié une ampoule sur deux. Le film part complètement en vrille, alternant rêve dans le rêve qui semble être la réalité alors qu'il s'agit d'un rêve, et fin qui cache une sous-fin qui enchaîne sur une vraie fin, avant qu'un réveil brutal ne nous signifie que le rêve dont on croyait qu'il simulait la réalité était en fait une énième variation dans la trame narrative avant le rebondissement final qui cache lui-même une chute qui s'avère surprenante, si tant est qu'à ce point quelque chose puisse paraître surprenant.

 

Alors oui, devant une telle escalade dans les effets tapageurs, certains pourront s'extasier en prétextant que l'extrême mauvais goût, sur une sphère, ne sera pas loin de rejoindre le génie. Ce n'est pas mon cas.

 

1e

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Damsels in distress

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/89/08/77/20255904.jpgIl est très difficile de décrire l'expérience que représente la vision du dernier opus du trop rare Whit Stillman.

Voici plusieurs versions possibles.

Trois copines de fac emmenée par Violet (la formidable Greta Gerwig) accueillent les désespérés dans leur Centre de Prévention du Suicide, qui souvent se transforme en Suicide Center, car le panneau Prevention se casse la figure. Violet a des idées très originales : elle pense qu'il vaut mieux sortir avec des mecs moches et cons (car alors elle peut leur apporter quelque chose), elle adore être critiquée, elle ne semble jamais triste ni en colère.

Le film suit les amours de ce groupe qui accueille une petite nouvelle, Lily (jouée au naturel par Analeigh Tipton).

Deuxième version : Damsels in distress est un film dans lequel les odeurs corporelles des garçons jouent un rôle primordial. On y croise aussi un jeune homme très niais (Thor) qui apprend à nommer les couleurs (à la fin du film il exulte devant un arc-en-ciel), des étudiants en pédagogie qui se suicident en masse en sautant du deuxième étage d'un immeuble, un savon dont l'odeur suffit à changer l'humeur, une fête romaine, l'invention d'un nouveau style de danse, et bien d'autres choses bizarres. Le monde de Stillman est une féerie, il diffuse un sentiment de merveilleux et d'irréalité qui fait sonner le film comme une bulle de champagne. Mais attention, nous ne sommes pas non plus chez les Bisounours, le beau gosse Fred évoque à la fois Truffaut et les Cathares pour arriver à ses fins : sodomiser la jolie Lily.

Dernier point de vue possible : Damsels in distress est du Woddy Allen en mieux.  Les dialogues y sont ciselés et profond comme chez le Woody de la période Annie Hall. On finit par une scène de comédie musicale comme dans Tout le monde dit I love you, sur l'air de de Things are looking up, tiré de A damsel in distress de Fred Astaire. Greta Gerwig a joué dans To Rome with love, exactement comme d'autres actrices ont été débauchées par Allen après avoir joué chez Stillman (Chloë Sevigny dans Melinda et Melinda, Mira Sorvino dans Maudite Aphrodite). Jusqu'au lettrage du générique qui rappelle furieusement l'univers allenien.

Je conseille donc chaudement cet OVNI précieux et délicat, et pour soigner votre dépression je vous conseille de faire des claquettes ou de danser la Sambola. Si Thor le peut, alors vous le pouvez aussi.

 

3e

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Waad Mohammed surclasse Quvenzhané Wallis

 

Dans la série des matchs qui animent de temps en temps Christoblog, je vous propose aujourd'hui un duel de fillettes :

 

   6   Waad Mohammed (Wadjda)

vs

    2   Quvenzhané Wallis (Les bêtes du sud sauvage)

 

Comme d'habitude, laissez votre vote en commentaire et je fais les comptes. Fin des votes : 20 février, minuit. Je donnerai chaque jour de nouvelles informations sur les deux jeunes actrices.

 

http://l2.yimg.com/bt/api/res/1.2/rbWMZv_gyvWliU3F5gHcTQ--/YXBwaWQ9eW5ld3M7Zmk9aW5zZXQ7aD0zNDE7cT04NTt3PTUxMg--/http://media.zenfs.com/en-AE_XE/News/AFPMideastEN/photo_1346583083311-1-0.jpgWaad Mohammed : 12 ans. Waad n'est pas comédienne, et sa famille est très traditionnelle.Ce qu'en dit Haifa Al Mansour, la réalisatrice d'après le ciné d'Alain : "Toutes les filles que nous avions vues avant n'avaient pas ce truc en plus. Elles étaient trop douces, pas assez effrontées. Et soudain Waad est apparue, avec ses écouteurs sur les oreilles, portant un jean et des tatouages sur les mains. Je cherchais également une fille avec une jolie voix, capable de chanter avec sa mère, de mémoriser et psalmodier le Coran. Waad a une voix très mélodique et très douce"

 

 

 

 

http://thegrio.files.wordpress.com/2013/01/quvenzhane-wallis.jpg?w=650Quvenzhané Wallis : 9 ans. Benh Zeitlin déclare que Quvenzhané (QW) était assis sur ses genoux durant l'élaboration su scénario et corrigeait les dialogues en donnant son avis sur ce qui lui semblait naturel ou non.

La première partie de son prénom est la contraction des premières syllabes de ceux de ses parents, et sa mère a expliqué que zhané veut dire "fée" en swahili.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Antiviral

http://fr.web.img1.acsta.net/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/90/22/10/20430720.jpgAntiviral est d'une beauté confondante. L'univers visuel qu'il propose est bluffant, enthousiasmant. Antiviral est un magnifique tableau, dont on regrette vite qu'il dure plus de 5 minutes.

 

Parce que malheureusement, Antiviral n'est pas un film. Il est l'idée d'un film.

 

Il est permis de penser que le rejeton Cronenberg (trop visiblement élevé au lait de son père) se soit follement amusé à composer son film comme une succession de scènes cultes, chacune d'entre elles ayant de moins en moins de rapport avec les autres au fur et à mesure que le film progresse.

 

D'ailleurs, la version montrée à Cannes 2012 a été complètement remontée pour la sortie en salle, et à la limite, on se dit en voyant le film que l'art du montage pourrait proposer 11000 versions d'Antiviral tellement son propos est sybillin et son style maniéré.

 

Le film est clippesque, et sa bande-annonce en ajoute dans le genre en masquant par ailleurs la véritable intrigue du film (il ne s'agit pas de ressembler aux stars comme le laisse penser la BA, mais de s'inoculer leurs maladies, ce qui est à la fois plus malsain, plus drôle mais moins vendeur).

 

Produit d'une beauté inouïe mais sans aucune suite dans les idées. Pas vraiment, pas encore, du cinéma.

 

2e

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50/50

http://images.allocine.fr/r_640_600/b_1_d6d6d6/medias/nmedia/18/84/69/18/19753639.jpgLe film de Jonathan Levine est un miracle d'understatement (Understatement is a form of speech which contains an expression of less strength than what would be expected).

En effet, tout dans le sujet (un jeune apprend qu'il est atteint d'un cancer et entame une lourde chimio) est potentiellement tire-larme, et au final, rien ne l'est.

C'est bien le tour de force que réussit ce film. Notre cancéreux se fait larguer par sa copine infâme (mais ne va pas jusqu'à consommer avec sa thérapeute, bien qu'à l'évidence l'envie soit réciproque), sa mère est envahissante (mais pas tant que ça, et malgré un père en plein Alzheimer), et son pote et un gros lourdaud (Seth Rogen, étonamment modéré). Bref, c'est l'horreur, et pourtant non.

Tout sonne justement juste, si je puis me permettre l'allitération, dans ce film : c'est ce qui fait son charme. Joseph Gordon-Levitt ne surjoue à aucun moment, et tous les acteurs sont parfaits.

Le propos du film est finalement assez original (j'ai quelque difficulté à me remérorer une entreprise comparable), et si la musique est franchement un peu TROP envahissante, l'impression finale est nettement positive.

 

3e

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No

No est un film à l'esthétique très surprenante (format carré, image un peu sale façon Super 8). Une fois passé le moment de surprise que cause ce parti-pris osé, on entre pleinement dans le film, et au fil de son déroulement il faut reconnaître que l'aspect particulier de No contribue en partie à son charme.

Ceci étant dit, un aspect visuel "normal" assurerait sans nul doute une bien plus grande diffusion au film.

Le sujet de No est à la fois original et captivant : comment un jeune publicitaire innovant arrive à faire gagner le Non lors du référendum organisé par Pinochet sous la pression internationale, en 1988.

C'est vif, alerte, et, en matière de pub, passionant comme les meilleurs cas exposés dans Mad Men. Le film est littéralement porté par un Gael Garcia Bernal magnétique, par ailleurs coproducteur du film. On est tout du long pris par le suspense de la campagne (encore plus quand, comme moi, on ignore les circonstances de cet épisode historique). L'affrontement des deux camps par spots télévisés interposés est palpitant.

Le film suprend aussi agréablement par l'aspect réaliste de ces reconstitutions, en particulier de manifestation, et par la qualité d'interprétation de tous les seconds rôles.

Un beau moment de cinéma, un cinéaste (Pablo Larrain) à découvrir.

 

3e

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