Invictus
Invictus ne va pas m'aider à changer d'opinion sur Eastwood, que je juge incroyablement surestimé par la critique en général (encore la couverture de Télérama cette année).
Ses films s'enchaînent et démontrent de plus en plus qu'il tend vers un académisme US bien pensant, manichéiste, et sans grande inventivité.
Gran Torino marquait un léger mieux qui paraît bien lointain aujourd'hui.
Si la première partie du film est acceptable (les biopics ont toujours un intérêt intrinsèque par définition), la seconde sombre dans une sentimentalité et un angélisme bébêtes. Les scènes montrées durant la finale sont à ce titre d'une stupidité larmoyante difficilement égalable (un petit garçon noir qui sympathise avec des policiers blancs, des gardes du corps bourrus, blancs et noirs, qui se donnent une virile poignée de main de réconciliation....)
Le plus frappant est la maladresse intrinsèque avec laquelle sont reconstituée les scènes de rugby : on y voit des coups de pied d'engagement grostesques, et des incongruités manifestes (le tableau des scores change alors que le ballon n'a pas encore franchi les poteaux).
Je vois dans cette façon de ne pas saisir les subtilités du rugby, sport fantaisiste et combat impitoyable, une sorte de métaphore de l'Amérique droite dans ses bottes tentant d'approcher - sans la comprendre - la vieille Europe, puisque le rugby est avant tout caractéristique du couple franco-britannique, colonies comprises.
Abdelatif Benazzi, qui était capitaine de l'équipe de France dans le bourbier de Durban, en demi-finale, disait l'autre jour à la radio que le rugby montré dans le film n'était même pas du niveau de 3ème division. On se rappelle qu'il marqua ce jour-là à deux minutes de la fin un essai, refusé par l'arbitre, qui aurait éliminé les Boks (une péripétie essentielle dans l'histoire de la coupe du monde), qu'Eastwood, ou ses scénaristes, ne semblent pas connaître.
Restent les prestations des acteurs pour que le film ne sombre pas totalement. Freeman est sidérant en Nelson Mandela et Matt Damon très convaincant. Cela ne rattrape pas la mollesse tristounette du scénario, ni l'inconsistance de la mise en scène, mais m'empêche de qualifier le film de catastrophe.
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