Amore
Amore est une sorte de cauchemard pour le critique, en tout cas pour moi. Le film est tellement foisonnant en terme de références, de styles de mise en scène et de propos qu'on passe rapidement du plus grand énervement à une certaine émotion.
Un bon résumé pourrait être de dire que le réalisateur, Luca Guadagnino, a voulu livrer son Guépard : portrait d'une société en déliquescence à travers la chronique familiale d'une grande famille bourgeoise milanaise.
Les thématiques s'enchevêtrent donc sur le mode du "tout fout le camp" : le patriarche meurt, le fils vend l'affaire à des Indiens, la fille découvre son homosexualité, la mère tombe amoureuse façon Lady Chatterley, les pièces rapportées (la femme d'Edo) sont traitées avec une froide cruauté. Tout cela est montré à travers une mise en scène qu'on peut qualifier de pompeuse, voire pompière (ah, le plafond bleu de l'église, ou l'assiette d'écrevisses qui illumine le visage d'Emma), assemblage de très très gros plans, de quasi noir et blanc, de kaleidoscope, d'images floutées, de variation brusque de profondeur de champ, etc.
On passe tour à tour d'un repas filmé à la Desplechin, à une scène typiquement hitchcockienne (la musique de John Adams), en passant par du Pascale Ferran pur jus. Le dernier plan (à voir après un carton de générique de fin, attention) semble même sorti d'Oncle Boonmee.
On s'ennuie par moment, on s'interroge à d'autres et Tilda Swinton arrive à être à la fois énervante, touchante, parfois sublime.
Amore est tout entier tissé de paradoxes, c'est un grand film malade.
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