En attendant les hirondelles
Le premier long-métrage de Karim Moussaoui place son auteur parmi les jeunes cinéastes mondiaux les plus prometteurs.
Il y a en effet quelque chose de Krzysztof Kieslowski ou de Nuri Bilge Ceylan dans la double intention du film : donner à voir d'amples dilemmes moraux nichés au creux du quotidien, tout en donnant à son film une douce élégance esthétique.
On suit successivement trois histoires qui n'ont rien à voir entre elles, si ce n'est des rencontres fortuites qui font se croiser les différents personnages. L'oeil du cinéaste, et donc celui du spectateur, devient par ce procédé presque divin : on entre dans la vie des personnes presque par hasard et on y voit tout. Le film se termine par l'amorce d'un quatrième chapitre : on suit quelques minutes un personnage que le protagoniste du troisième volet croise par hasard, avant que le générique de fin nous frustre brutalement du pouvoir omniscient que nous avons eu pendant deux heures.
Le film de Moussaoui est empli de multiples petits signaux à peine esquissés qui peuvent évoquer la situation de l'Algérie contemporaine (un article de journal, une corruption en passant, un souvenir de la guerre civil) ou ouvrir une parenthèse poétique inattendue (les musiciens dans le désert). Sous ses dehors un peu lisses, il est d'une grande richesse.
L'intérêt des trois historiettes va croissant : la première décrit une (petite ?) lâcheté, la seconde le basculement d'une vie entre raison et sentiment (tout en étant un magnifique portrait de jeune femme) et la dernière terrasse par sa maîtrise formelle et l'attention portée aux visages des acteurs.
Un cinéaste important est probablement en train de naître.
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