Lumière ! L'aventure commence
Je ne sais pas à quoi je m'attendais exactement en allant voir ce film, mais en tout cas pas à rire, à être ému et émerveillé.
Pour moi les frères Lumière avait surtout produit des courts-métrages en plan fixe montrant des scènes de la vie quotidienne (comme le train arrivant en gare de La Ciotat).
Le charme de cette collection de 108 films de 50 secondes chacun est de nous faire découvrir bien d'autres aspects de leur oeuvre, qui finalement contient presque tout l'avenir du cinéma. Dans ces vignettes tournées à la fin du dix-neuvième siècle ou au tout début du vingtième, on trouve déjà : une science du cadre, des travellings latéraux et avant/arrière, de la profondeur de champ, du suspense, des trucages, du burlesque, de l'émotion, du documentaire, de l'abstraction, du documentaire au long cours, du comique de situation et un sens de la composition graphique admirable.
Parmi tous les bijoux présentés, j'ai particulièrement aimé les exercices très drôles des chasseurs alpins, la superbe progression de ces derniers dans la neige, l'incroyable plan des joueurs de foot qui regardent un ballon qu'on ne voit pas, le film sur les deux européennes qui jettent des pièces aux indigènes en Indochine comme à des pigeons, et le dernier film sur la petite fille asiatique qui court vers la caméra.
Les commentaires de Thierry Frémaux ont un ton parfaitement juste : à la fois enthousiastes et pondérés, parfois même nonchalants, ils éclairent avec tact et discernement ce qu'on voit à l'écran, signalant parfois un détail qu'on aurait probablement raté (comme cet homme infinitésimal dans le film sur le feu des puits de pétrole) ou éclairant brièvement l'agencement subtil de l'espace (comme les trois plans de ce merveilleux film du bateau mis à la mer).
On sort de la salle ému et enthousiaste, comme si notre amour immodéré du cinéma trouvait là sa justification et son origine.
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